C'est un peu facile de ne pas s'organiser tout en pronant l'union collective, et sous prétexte qu'il n'y en a pas qui unisse tout le monde.
Non, ce n’est pas facile. C’est sans doute la méthode la plus difficile qui soit, en fait.
Tout d’abord, il ne s’agit pas de "ne pas s’organiser".
La démarche est d’analyser les formes d’organisations existantes et leurs capacités à être une forme de transformation radicale. Cette force peut-être réunie en une seule organisation ou par une coalition (ce que j’appelle union) de plusieurs.
Il n’existe rien de tel aujourd’hui. On peut y trouver les raisons que l’on veut. Je pense personnellement qu’il s’agit d’une volonté délibérée.
Ce constat fait (et en admettant que d’autres continuent à travailler au sein de ces organisations, d’autant plus si c’est dans la volonté d’essayer de les faire évoluer de l’intérieur) , il s’agit de non pas refuser de s’organiser, mais de trouver de nouvelles formes d’organisations susceptibles d’attirer des personnes qui de toute façon ne se syndiqueraient pas ou n’adhéreraient pas à une idéologie politique. Soit l’immense majorité.
Je pense que la moitié sinon les 3/4 des sympathisants libertaires sont hors organisations. Et de la même manière, que la majorité des personnes désireuses d’un changement radicale sont devenues imperméables aux discours traditionnels de l’extrême gauche et des milieux révolutionnaires.
Tous les derniers grands mouvements sociaux sont nés "hors organisations " mais ne sont pas nés de nulle part. Aux Etats-unis, il est né d’anarchistes expérimentés, qui n’ont pas hurlé "Anarchie !" ce qui aurait fait fuir tout le monde mais qui en ont appliqué les principes, c’est à dire l’imposition d’un système de prises de décision horizontale et tout un dispositif de sensibilisation et de préparation à l’action directe. Et bien d’autres choses. Ils n’ont pas été suivi, ils ont remis l’outil entre les mains de celles et ceux qui voulaient l’utiliser. Et des milliers de personnes, sans aucune conception de l’anarchie, l’utilisent (plutôt bien)
Le ciment, c’est la volonté de mettre un terme à la domination du milieu de la finance et de son interférence avec la prise de décision politique. De facto, ce mouvement est anticapitaliste. C’est un mouvement de masse, du bas vers le haut. C’est pour moi la définition de la révolution. Elle n’a pas à se revendiquer communiste ou anarchiste . C’est la dynamique du mouvement créé, si il survit, qui décidera pas à pas de l’organisation politique et sociale.
La question de la création d’une dynamique reste entière. Mais la méthode vers laquelle je penche aujourd’hui, c’est la fédération de réseaux actifs , autour de ce même ciment, sans projection politique au-delà de la destruction du capitalisme. Ces réseaux existent sous maintes formes , intervenant dans de nombreux domaines différents.
Je crois en la théorie du "point d’unité", c’est à dire la définition de l’objectif commun qui réunit sans projection vers ce qui sépare. (C’est à dire souvent l’étape suivante). C’est stupide de refuser de combattre le capitalisme sous prétexte que l’on n’est pas d’accord sur la suite. Bottons lui le cul d’abord et on verra ensuite.
Et la seconde chose, c’est la reconnaissance de la diversité des tactiques. Il est tout aussi stupide de refuser un objectif commun parce qu’on ne va pas employer les mêmes moyens.
Et je ne vois personne ici qui ne peut entrer dans un tel schéma en gardant intactes ses convictions , ses méthodes d’actions et ses convictions pour l’après capitalisme.
La seule chose que je vois, ce sont des organisations traditionnelles incapables, et je le répète, hostiles, à l’unité dans la lutte contre le capitalisme.
Ma conclusion est que ces organisations doivent s’adapter – grâce à l’effort des militantEs sincères de la base – ou disparaître. Mais ces décennies d’immobilisme et pire, de sabotage systématique de toute véléité de transformation radicale ont assez duré.