Les zones d'ombre de Carlos Ghosn, le très redouté patron de l'Alliance Renault-Nissan
Vision stratégique exceptionnelle, culte de la personnalité, rémunération record et méfiance maladive : Carlos Ghosn, patron de l’Alliance Renault-Nissan-Mitsubishi, est à 64 ans le patron le mieux payé de France.
Après plus de 12 ans à la tête du groupe Renault puis de l’Alliance Renault-Nissan, Carlos Ghosn dirige 120 000 salariés et 38 usines à travers le monde, pour plus de 10 millions de voitures vendues chaque année. En février 2018 le gouvernement français (présent à 15 % au capital du constructeur automobile) a autorisé sa reconduction pour quatre années supplémentaires, soit jusqu’en 2022. Encore lui faut-il obtenir le feu vert de l’assemblée des actionnaires le 15 juin 2018. Comment cet homme de 64 ans aux méthodes implacables et à la rémunération record est-il parvenu à obtenir et conserver la confiance du groupe et de l’État durant toutes ces années ?
Un salaire record, âprement négocié avec l’État
Pour pouvoir être reconduit à la tête de Renault, Carlos Ghosn a dû négocier ferme durant de longs mois avec l’État français, quitte à tenir tête à l’exécutif et passer outre l’avis des actionnaires. En jeu, son salaire : plus de 7 millions d’euros en 2016. L’État exige une baisse significative de sa rémunération pour autoriser la prolongation de son mandat. En avril 2016, l’assemblée générale des actionnaires de Renault vote contre le montant du salaire de Carlos Ghosn.
Mais, fort du soutien de son conseil d’administration, le PDG passe en force, provoquant la colère d’Emmanuel Macron, alors ministre de l’Économie. « Quand des gouvernances sont défaillantes parce qu’elles pensent que tout est permis et qu’il n’y a plus de comportement en responsabilité et en éthique, on est obligé de réouvrir des sujets comme celui de la loi », menace-t-il sur la chaîne LCP, promettant de légiférer si Carlos Ghosn ne diminue pas son salaire. Officiellement, Carlos Ghosn accepte finalement une baisse de 30%. « J’ai dit très clairement à M. Ghosn que nous ne pouvions pas voter pour un dirigeant qui avait des rémunérations aussi élevées », explique Bruno Le Maire, successeur d’Emmanuel Macron à Bercy, sur CNews, qui s’attribue le mérite de cette baisse.
Une baisse de rémunération en trompe-l’œil
Mais qu’en est-il vraiment de cette baisse de salaire ? En ce qui concerne la partie française de son salaire, en tant que patron de Renault – car le PDG est aussi à la tête des constructeurs automobiles japonais Nissan et Mitsubishi – il s’agit plutôt d’une baisse de 20% et non de 30%. Mais quand on regarde en détail, cette baisse apparente dissimule bien autre chose : en effet, Carlos Ghosn a accumulé au fil des ans des centaines de milliers d’actions de Renault, ce qui lui permet de considérablement gonfler son revenu en réalisant ses stock-options.
« Le cours de l’action Renault a beaucoup augmenté ces dernières années, explique Loïc Dessaint, analyste dans une société de conseil en investissement. Le 16 décembre 2017, Carlos Ghosn a dégagé une plus-value de 6 millions d’euros sur l’exercice de stock-options. En 2020, il pourra même bénéficier de 8 millions supplémentaires s’il revend les 100 000 actions gratuites obtenues en 2016. » Une rémunération en stock-options qui s’ajoute donc à son salaire de PDG. Cette addition de revenus lui permet de gagner environ 15 millions d’euros en 2017, une jolie somme comparée aux autres patrons du CAC 40 qui ne touchent en moyenne « que » cinq millions d’euros.
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