Un texte personnel que j'écris, principalement en réaction à une "insulte" bien particulière, celle de "petit bourgeois". Il est probable qu'après ça, pas mal d'entre vous me vois différemment, mais bon, j'en ai un peu rien à foutre...
Je reviendrai pas où j'ai grandi, ça vous le savez déjà. Dans le quartier de La Bastide, sur la rive droite de Bordeaux.
Je suis né dans ce que beaucoup s'accordent à appeler, et je ne m'en cache pas, bien qu'il m'arrive d'en avoir honte parfois (pas de tentative d'attendrissement de ma part, c'est un fait), dans un milieu bourgeois, mon père est psychiatre. Je sens que certain(e)s vont déjà s'arrêter de lire... Et pourtant, je le revendique, je suis anarchiste.
J'entends déjà des protestations arrivées "Comment ce petit bourgeois peut-il se revendiquer anar ?". Par de la pure logique, et un sens aigüe de la justice (je ne parle pas de celle qu'on apprend dans le code pénal...). Avant d'aller plus loin, deux questions à vous poser : Avez-vous choisi de vivre en france ? Avez-vous choisi d'avoir les parents que vous avez, et donc le milieu dans lequel ils sont ? A moins que vous ne soyez particulièrement de mauvaise foi, je pense que la réponse aux deux questions est irrévocablement non.
Seulement, quelque soit le milieu économique et social dans lequel on évolue, on s'interroge sur le monde qui nous entoure. Au départ, je regardai pas mal de documentaires animalier, puis, en regardant tout bêtement les JT, je me disais que, quand même, comment l'humanité peut-elle se prétendre supérieure aux autres animaux quand nombre de ses actes (guerre, exploitation de l'homme par l'homme, etc) sont à 100 lieues de ressembler à ceux des animaux ? Je veux dire, les animaux dits "sociaux", ceux qui vivent en groupe (les fourmis, les abeilles, les troupeaux, ou même les tribus de primates), ont une manière radicalement différentes de la notre de vivre en société.
Puis, en regardant d'autres documentaires, plus sociaux ceux-là, que ce soit sur le chômage, la précarité ou autres, j'ai compris que nombre de ces choses étaient liées à l'existence d'un seul et même système avilissant : le capitalisme. De là est né un fort rejet du capitalisme. J'aurai put me contenter de rejeter ce qu'on appelle pudiquement le libéralisme, mais j'ai rapidement compris que le capitalisme à visage humain, ou le capitalisme d'état tel qu'il a été fait en URSS, sont nécessairement injustes, de par leur nature, la hiérarchie inhérente à ces capitalismes et de par leur inégale répartition des richesses. L'argument selon lequel "sans le patron, il n'y aurait pas d'entreprise et donc du chômage" est, par exemple, l'argument-type qui a le don de m'ulcérer.
Puis, un jour, en faisant des recherches sur l'anarchisme, j'ai eut ma révélation. Toutes les idées que j'avais au fond de moi, sans même jamais parvenir à les développer dans mon esprit, était écrite, là, juste sous mes yeux. Je dis ici révélation, car c'est bien de cela qu'il s'agit, dès que j'ai commencé à lire les fondements de l'anarchisme (autogestion, démocratie directe...) ça a été un véritable déclic. Ça a fait tilt comme on dit. De là, j'ai donc commencé à me documenter plus avant sur notre cause commune : l'anarchie, en achetant des livres, en me documentant sur le Net (le site Increvables Anarchistes est particulièrement bien fait d'ailleurs je trouve pour les "novices" de l'anarchisme). Puis est venu le temps de commencer à militer.
A ceux et celles qui utilisent cette fameuse expression de "petit bourgeois". Quel regard portez-vous sur les enseignant(e)s ou sur les agents de l'ANPE ? Après tout, ce sont des prolétaires, ils sont exploités par l'état. Cependant, ils participent largement au contrôle social, qui bénéficie, non seulement à l'état, mais aussi au capitalisme. Est-ce que ce sont d'ignobles "petits bourgeois" ?
Est-ce qu'un "petit bourgeois" comme moi (et à mon avis, je suis loin d'être un cas isolé...), qui participe à un bon nombre de manifs, qui milite, etc est un homme à abattre ?
Sortez donc un peu de vos dogmes dans lesquels vous vous enfermez. A moins que vous ne pensiez que, comme votre père est cheminot et votre mère femme de ménage (ce sont des exemples, je n'ai rien contre ces professions), vous valez mieux que moi ou qu'un(e) autre militant(e).
Ce qui compte à mon sens, est bien où l'on s'engage, dans quelle voie, ce que l'on souhaite, pour soi-même et pour les autres. Quand je vois un ouvrier crever à 57 ans à cause de son travail alors que son patron ne crèvera lui qu'à 87 ans, j'ai envie de gerber, non pas à cause de leur différence d'âge, mais parce que je sait qu'entre les deux, l'un est exploité et l'autre pas.
Le rêve du grand soir et d'une société enfin libérée et égalitaire n'est pas l'exclusivité des prolétaires. Et, à moins de s'appeler Lagardère et autre Martin Bouygues, bien peu de gens ont intérêt à ce que le capitalisme, et son tendre complice, l'état, ne perdure plus longtemps.