Quelqu'un peut-il faire le point sur la situation hier à Marseille
MercrediMarseille, épicentre de la contestation sociale en France (Reuters)
Poubelles qui débordent, stations-service vides, départ de Ryanair, patrons désespérés et embouteillage de pétroliers dans la rade: Marseille est l'épicentre de la contestation contre la réforme des retraites.
Le climat est étrange dans la citée phocéenne où le "clasico" entre l'Olympique de Marseille et le PSG du 7 novembre est passé au second plan des priorités des habitants, qui craignent pour leurs réservoirs, leurs retraites et leurs emplois, ce qui en dit long dans une ville folle de son club.
En raison de la grève des éboueurs, un classique dans la cité phocéenne, les tas d'immondices s'amoncellent depuis trois jours sur les trottoirs, notamment du centre-ville.
En mars dernier, une grève d'une semaine dans un seul arrondissement avait provoqué l'entassement de 7.000 tonnes de poubelles. Cette fois, 12 des 16 arrondissements sont concernés.
Les secteurs de l'éducation - lycées, crèches, cantines scolaires - et des transports sont également touchés.
La grève peu suivie à la Régie des transports marseillais (RTM) ne suffit pas à perturber les transports publics locaux.
Mais les cheminots de la région sont, comme souvent, à l'avant-garde de la contestation et ont voté jeudi la reconduction de la grève pour 24 heures. Les trois quarts des conducteurs de train étaient en grève jeudi selon Sud-Rail et un TGV sur trois est assuré entre Paris et la Côte d'Azur.
L'AÉROPORT COMME LE PORT ?
Sur le front de l'emploi, après la fermeture de l'usine Fralib de Gémenos - 182 salariés -, les Marseillais ont appris une autre mauvaise nouvelle: la compagnie aérienne Ryanair a menacé mercredi de fermer sa plate-forme de Marseille après l'ouverture d'une procédure judiciaire à son encontre.
"Deux cents emplois s'envolent", titre La Provence jeudi.
Pour Jean-Claude Gaudin, le maire UMP de la ville, un millier d'emplois directs ou indirects vont disparaître par la faute, selon lui, des syndicats de pilotes à l'origine de la plainte pour "travail dissimulé".
"J'espère que ce comportement irresponsable ne conduira pas l'aéroport dans la même impasse que celle connue aujourd'hui par le grand port maritime de Marseille (GPMM)", a ajouté l'édile.
Certains ouvriers du port, opposés à la réforme portuaire, n'ont pas attendu leurs camarades cheminots, postiers ou éboueurs pour se lancer dans une grève reconduite depuis maintenant plus de deux semaines.
Le long de l'autoroute du littoral, qui longe la façade maritime avant de plonger au coeur de la ville, les automobilistes ralentissent pour photographier les silhouettes immobiles des pétroliers à l'ancre dans la rade de Marseille.
Jeudi, selon la direction du port, 20 navires dont 17 pétroliers étaient en attente sur la rade, et 40 autres sur la rade de Fos, à une vingtaine de kilomètres.
"THE BEST JOB IN THE WORLD"
En raison d'arrêts de travail des agents des terminaux marchandises, des porte-conteneurs en attente de charger ou décharger leurs cargaison patientaient également. Des voyages avec la Corse ont été annulés.
Les patrons bouillonnent, les hommes politiques s'inquiètent et les automobilistes paniquent.
L'Union pour les entreprises des Bouches-du-Rhône a fait paraître lundi dans Les Echos, après avoir essuyé un refus de La Provence, une publicité parodiant le concours australien pour "The best job in the world", qui détaillait les avantageuses conditions d'emploi présumées des 36 grutiers du port.
Son président, Jean-Luc Chauvin, évalue à 35 millions d'euros les pertes pour l'économie marseillaise. L'industrie chimique a dit avoir perdu 550 millions d'euros et les patrons marseillais, comme le gouvernement, prédisent une mort lente au port qui a fait de Marseille une ville incontournable en Méditerranée.
Comme Jean-Claude Gaudin, les socialistes locaux ont réclamé la fin de la grève, motivée selon eux par "des intérêts très catégoriels".
"Nous appelons les grévistes du grand port de Marseille à mesurer les dégâts causés à notre économie déjà en difficulté et nous leur demandons de cesser ce mouvement", a dit Patrick Mennucci, chef de l'opposition socialiste au conseil municipal.
La situation aux pompes en carburant est aggravée par la conjonction de ce mouvement avec celui contre la réforme des retraites.
Les raffineries du port de Fos-Lavera seront toutes à l'arrêt en fin de semaine, en raison des grèves ou du manque de produits pétroliers.
Du coup, les automobilistes défilent aux stations-essence, qui devraient être à sec la semaine prochaine.
"Cette semaine, j'ai refait trois fois mes réserves contre une seule fois habituellement", explique le gérant d'une station Total. "Ce n'est pas la panique, mais les gens prennent leurs précautions et anticipent une possible pénurie."
LundiMarseille Bouches du Rhône : La reconduction fait tâche d'huile...
Après les grosses mobilisations des 7 et 23 septembre, du 2 octobre, la journée du 12 octobre s'annonce des plus puissantes.
L'idée de la grève reconductible gagne du terrain et se concrétise dans le département:
*TERRITORIAUX: le jour de la grève du 23 sept, les agents de la ville et de la Communauté urbaine de Marseille, ont décidé de sa reconduction avec leur intersyndicale (CGT,SDU-FSU13,CFDT,CFTC,UNSA. Ce mouvement se poursuit et a gagné d'autres collectivités du département.
*Impôt: depuis le début de cette semaine, les agents ont engagé une grève reconductible. Ils ont le soutien de leurs syndicats CGT,SNUI-Solidaires et FO. Ils devraient être rejoints par leurs collègues du Trésor et des douanes...
*Professions portuaires: On assiste à des actions à répétition depuis plusieurs jours, tant sur les bassins Est du Grand Port maritime de Marseille, que dans les bassins Ouest.L'activité est quasiment paralysée. Cette mobilisation associant le refus des conditions de mise en oeuvre de la réforme portuaire, dont l'exigence de la reconnaissance de la pénibilité, et l'opposition à la réforme des retraites. Elle concerne aussi bien les agents du GPMM que les dockers.
*Marine marchande: le syndicat CGT des marins de Marseille, a déposé un préavis de grève de 24H reconductible à la SNCM et à la CMN.Il est applicable à partir du 12.Il s'agit de s'opposer à la loi Woerth sur la réforme des retraites et à la perspective de disparition du régime de retraite des marins, mais aussi d'exiger le maintien du niveau de la flotte de la SNCM...
*Chimie et pétrochimie: de nombreuses mobilisations sont intervenues ces derniers jours dans les entreprises du Golfe de Fos, de l'étang de Berre et du complexe de Lavéra. Ensemble qui ne compte pas moins de 7 des 11 raffineries de l'Hexagone. La grève reconductible a été décidée.
*Energie: le syndicat CGT de Marseille a décidé de s'inscrire dans le mot d'ordre de grève illimitée de la fédération nationale CGT Mines Energie...
*Education: dans plusieurs écoles, collèges et lycées, des grèves se sont développées, assorties de la demande d'appel à la grève reconductible à partir du 13 oct...
*La Poste: les postiers réunis jeudi matin ont partagé la décision nationale d'une grève reconductible à partir du 12..
*SNCF: les organisations syndicales de la région PACA,la CGT,l'UNSA,Sud Rail et FO appellent à la grève à partir du 12 et à poursuivre dès le 13 oct...
*Transports urbains: un préavis de grève reconductible a été déposé à la régie des transports de Marseille(RTM) à partir du 12 oct...
*Fralib: la nouvelle de la décision du groupe de l'agroalimentaire Unilever de fermer l'usine Fralib de Gémenos (près d'Aubagne), a suscité une vive réaction de son personnel qui refuse cette perspective et participera au 12...
*Monoprix: Victoire des salariées des deux magasins de Marseille après deux semaines de grève.