Mouvement social : au delà des "temps forts"...
Catégories par catégories, "temps forts" en pointillés et un mouvement social qui peine à être à la hauteur des enjeux et des attaques que nous subissons de la part du gouvernement/patronnat, c'est le résumé que l'on peut faire de la période. Celà va devenir de plus en plus difficile de mobiliser, quand beaucoup commencent à penser que çà ne sert à rien, que la méthode n'est pas la bonne, et qu'aller à la grève ne paie pas, dans tous les sens du terme...Les directions syndicales s'ancrent dans des opérations qui tiennent plus de la mise en scène que de la volonté d'en découdre, et la CGT s'affirme de plus en plus comme "partenaire social", allant jusqu'à proposer le dialogue social et l'apaisement avant la lutte, comme celà s'est passé pour les cheminots, ceci confortant un tournant pris par ce syndicat.
En positif, peut-être pour l'avenir, c'est à nouveau l'existence des AG réunissant syndiqué de divers syndicats et non syndiqués pour décider ensemble et à la base, et le renforcement du syndicalisme alternatif comme les SUD/Solidaires et la CNT, par exemple. Mais ceci ne permet pas, aujourd'hui, de contourner les bureaucraties syndicales, et ce syndicalisme de lutte et de transformation sociale n'est pas encore en capacité de porter ou d'impulser seul le mouvement social d'ampleur et la réponse que mérite les attaques successives des gouvernements, de droite comme de gauche, qui se sont succèdés, et celui-ci qui met les bouchées doubles.
Que se profile t-il, à l'heure ou nous écrivons, pour cette rentrée sinon que les bureaucraties syndicales sont parties pour rejouer un petit scénario du même ordre, où les journées d'actions s'annoncent secteurs par secteurs. Cà bouge toujours et encore du côté du soutien aux sans papiers et dans des entreprises qui les emploient, cà va bouger du côté, tout d'abord, des enseignants, puis de La Poste et du côté hospitalier. D'autre part, des collectifs se sont construits dans différents domaines : collectif national contre les franchises, pour l'accès aux soins partout et pour tous et pour une sécurité sociale solidaire, convergence nationale des collectifs de défense et de promotion des services publics, coordination nationale des comités de défense des hopitaux et maternités de proximité. Ces collectifs appelleront à des mobilisations en septembre et octobre. Deux initiatives ont aussi vu le jour ses derniers temps et semblent converger vers la date du 10 novembre. Ces deux initiatives lancent un appel à la grève générale interprofessionelle avec une volonté de reconduction : appel du CNR (Conseil National de la Résistance ), et la "lettre ouverte aux états majors". ces initiatives portent en elles mêmes des intentions convergentes, mais sont-elles en mesure d'impulser ce front social véritable qu'il reste à construire. Car, d'une part, la convergence entre secteurs de lutte n'est pas encore ni acquise ni gagnée, et l'angle d'attaque de la "lettre aux états majors", comme son nom l'indique, n'est pas forcément le bon, parce que pas forcément productif... Et la date du 10 novembre parait éloignée et pas forcément bien choisie...pour partir sur une grève générale reconductible.
Peut-être que la balle est encore, aujourd'hui, dans le camps des directions syndicales, en l'absence d'un syndicalisme de lutte et de transformation sociale suffisamment représentatifs, mais elle est aussi et surtout à la base, car c'est ici qu'il faut prendre sa lutte en mains et s'auto-organiser. Il faut absolument que les sections syndicales combatives de la CGT, FSU, FO...prennent position et rejoignent les espaces interprofessionnels et unitaires qui se créent, à l'image des AG qui ont eu lieu dans quelques villes, autour de l'appel à la grève générale interprofessionnelle porté par des syndiqués de différents syndicats. C'est ce type de réseau local qu'il faut chercher à développer, et se doter d'outils comme des bulletins intersyndicaux, par exemple. Ce type d'auto-organisation et de réseau local, il est évidemment important d'en développer le concept au niveau régional et national, et il serait aussi important de se pencher sur les liens à créer au niveau européen et international...
Au delà du "monde syndical", du renforcement aussi du syndicalisme alternatif et des syndicats de lutte et de transformation sociale, il reste encore des espaces à construire avec la population plus généralement, espaces de rencontres, d'échanges, d'élaboration et de combat. Car, en plus de la nécessaire convergence des luttes, se posent les questions de contenus et de sens, et la nécessaire appropriation du "politique" : résistance ou offensive (et les deux), aménagement ou transformation/révolution sociale, vers quel monde, puisque l'on voit souvent "pour un autre monde", c'est quoi les grandes lignes, si l'on ne veut pas que celà reste une phrase creuse ? Ces espaces ne peuvent être compris comme des partis politiques (comme le sont les comités pour le NPA, par exemple) et doivent se construire de manière unifiantes et en toute autonomie et indépendance.
Celà fait peut-être beaucoup de "y a qu'à...", mais il y a, en l'état, beaucoup de choses à réinventer, à inventer et imaginer..., et si l'on arrive à faire quelques pas...ensemble...on aura au moins l'impression d'avancer un peu...