Récapitulatif de ce qui précèdeTout le monde, y compris moi-même, s’est interrogé et s’interroge toujours sur les évènements. Pour quelle raison Pérez, porteur et incitateur du soulèvement, alors qu’il n’y avait pas de nouvelles de la délégation, et dans la grande confusion du moment, s’est décidé à signer l’acte de capitulation ?
Surtout que nous attendions des nouvelles, bonnes ou mauvaises, de Yépes. La réponse à cette interrogation se trouve peut-être en réfléchissant à l’échange de propos qui a eu lieu en notre présence entre le Secrétaire de la Région Catalane, Emilio Mira, et Yépes. Propos assez vifs.
Par exemple, le fait que Yépes n’eût aucune entrevue avec le Secrétaire de la Région Catalane ni avec aucun des membres du Comité National. Ce qui semble exact malgré l’insistance que mettait Yépes à vouloir l’affirmer.
On peut en conclure que ce mouvement révolutionnaire naquit dans la nuit du 17 au 18 janvier 1932 sans autre considération que l’idée folle et enthousiaste de quatre ou cinq camarades.
D’une part le geste mérite honneur et respect pour sa valeur révolutionnaire. D’autre part, sans la moindre condamnation sociale, il peut mériter la critique voire les reproches, pour avoir conduit des familles aux limites de la faim sans résultat ni objectif particulier.
Il mérite un autre reproche beaucoup plus sévère : c’est ce que ce Miguel Pérez meurt à Sallent, province de Barcelone, quelques mois avant le mouvement général alors qu’il avait des accointances avec la police. Honneur à Juan Yépes qui continua à être l’homme intègre tant social que révolutionnaire. Intégrité qui lui fit abandonner l’Argentine du dictateur Uroburo.
Nous autres ouvriers avons vécu des jours d’une fièvre révolutionnaire tout en nous conduisant avec beaucoup de sérénité, respect et cordialité jusqu’avec nos propres ennemis. Ce qui ne fut pas le comportement de l’entreprise et des autorités locales. Quand les armes furent déposées par les mineurs, ils commirent injustices sur injustices. Surtout contre des personnes innocentes et en réalité sans défense. Brutalités, renvois, détentions, bastonnades et coups de crosse de fusils de la Guardia Civil, tel était le quotidien des travailleurs qui restèrent dans les mines.
Une autre leçon est que c’est une erreur impardonnable d’abandonner une population après l’avoir conduite à un soulèvement révolutionnaire. L’abandon des lieux de certains camarades responsables directs de ce mouvement donna lieu à certaines interprétations malintentionnées. Certains en sont arrivés à dire que ce mouvement avait été forgé à l’étranger par les communistes russes. D’autres disaient qu’il s’agissait d’un jeu entre l’entreprise et la police pour expulser les indésirables.
Plus tard l’idée se propagea que Durruti avait pu être l’instigateur de ce mouvement. Il est vrai que Durruti devait venir parler à un meeting organisé fin septembre ou début octobre 1931. Mais les autorités et la Guardia Civil s’y étant opposés, le meeting ne put avoir lieu. Par contre le dimanche suivant un certain nombre de militants se réunirent autour de Durruti et Combina dans les bois autour de San Cornélio. Contrairement à ce qui a été écrit celui-ci nous dit : « Pour faire la révolution, il est nécessaire d’avoir une bonne préparation au combat et ne pas croire qu’avec des fusils de chasse on peut affronter la Guardia Civil et les militaires. » Ceci afin de démontrer que loin d’inciter les mineurs de Figols à un soulèvement Durruti nous faisait comprendre au contraire la réalité des choses. [1]
Tous ces mensonges étaient propagés par les réactionnaires et certains communistes, ces derniers ayant comme objectif de saper le prestige de la Confédération Nationale du Travail et l’anarchisme. Les uns comme les autres, quoique à des fins idéologiques différentes, n’ont jamais pu obtenir ce résultat. Quoi qu’il en soit, les camarades qui restaient durent lutter farouchement et sans repos pour réorganiser notre syndicat.
Quant à Trabal, comme il est démontré précédemment, il nous contacta sur notre initiative. Nous pensions qu’il ne nous restait en effet, comme ultime moyen, que celui de faire intervenir un député, ce qui finalement s’avéra être une forme de suicide.
Trabal utilisait pour sa politique les graves circonstances que nous traversions, nous les mineurs de Figols. Mais d’autre part, nous aussi, nous avons tenté d’utiliser la chance qui se présentait pour sortir de notre douloureuse situation.
Trabal nous accompagna à Barcelone et à Madrid dans toutes les instances officielles auxquelles nous devions nous adresser. Trabal était celui qui déclenchait les discussions officielles que ce soit par intérêt politique ou par soucis de nous venir en aide. Nous avons vu Trabal se féliciter au cours de notre assemblée en disant : « Vous pouvez dire à vos familles d’Aragon, Andalousie ou Levante que le conflit de Figols las Minas entre dans sa voie de solution. » Mais malheureusement Trabal, que ce soit par choix politique ou par bonne volonté, ne pût rien obtenir.
La preuve en est qu’après toutes ces entrevues stériles, nous avons dû recourir à une solution suicide en nous enfermant, une trentaine de mineurs, au fond de la mine. Nous y restâmes neuf jours sans interruption jusqu’à ce que l’entreprise et les autorités cèdent à nos justes revendications. Ils ne cédèrent pas pour sauver nos vies mais surtout par peur d’un scandale international plus grand et plus humiliant que celui qu’ils avaient subi lors du soulèvement révolutionnaire.
Balthasar Martinez, Chateauneuf du Rhône, 1965
LES FORCES EN PRÉSENCE
Fractions républicainesLes partis bourgeois1. Gauche républicaine (Izquierda republicana) : Manuel Azaňa
2. Union républicaine : Martinez Barrio
3. Parti autonomiste catalan (Esquerra) : Luis Companys
4. Nationalistes basques (Euzkadi) : Aguirre
Les partis ouvriers5. Parti socialiste :
A gauche : Largo Caballero (Alliance ouvrière)
A droite : Indalecio Prieto, J. Desteiro (Réformisme libéral)
6. Parti communiste (PCE) : José Diaz
7. Parti Socialiste Unifié de Catalogne (Partido Socialista Unificat de Catalunya) : PSCU
8. Communistes Trotskistes, POUM, Parti Ouvrier d’Unification Marxiste (Partido Obrero de Unificación Marxista : Joaquim Maurin
9. Anarchistes FAI, Fédération Anarchiste Ibérique (Fédéración Anarquista Iberica : Buenaventura Durruti, Angel Pastaňa
Les grandes associations syndicales10. UGT, Union Générale des Travailleurs (Unión General de Trabajadores) : Socialistes
11. CNT, Confédération Nationale du Travail (Confederación National de Trabajo) : Anarchistes
Les JeunessesJeunesses communistes (JC)
Jeunesses libertaires (trotskistes) (JL)
Jeunesses communistes ibériques (POUM)
Jeunesses socialistes (JS)
Jeunesses socialistes unifiées (JSU)
Fractions nationalistesCEDA : Confédération Espagnole des Droites Autonomes (Confederación Espaňola de Derechas Autonómas) : coalition de droite dirigée par Gil Robles
Action Populaire : Parti populaire essentiellement catholique
Agrariens : José Martinez de Velasco
Rénovation espagnole : Calco Sotelo
La Phalange : José Antonio Primo de Rivera
Carlistes et Traditionalistes : Fal Condé
Parti Radical : Alejandro Lerroux
Parti conservateur : Miguel Maura
Parti Libéral-Démocrate : Malquiades Alvarez
Les trois derniers n’ayant pas pris part ouvertement à la lutte.
CHRONOLOGIE DES PRINCIPAUX ÉVÈNEMENTS
1930
Janvier
30 Fin de la dictature de Primo de Rivera. Berenguer lui succède
1931
Avril
12 Elections municipales. Départ d’Alphonse XIII. La République est proclamée (président : Alcalá Zamora)
Mai
10 Emeutes à Madrid, puis un peu partout incendies d’Eglises et de couvents les jours suivants
Juin
28 Elections d’une assemblée constituante
Décembre
3 Loi agraire. Violents affrontements entre la garde civile et les anarchistes
9 Promulgation de la Constitution
1932
Janvier Dissolution de la Compagnie de Jésus
Mars
2 Institution du divorce et, trois mois plus tard, du mariage civil
Août
10-13 Soulèvement du général Sanjurgo à Séville
Décembre
6 Le général Macia président de la Généralité de Catalogne. Il meurt peu de mois après. Remplacé par José Luis Companys.
1933
Janvier
23 Expulsion des Jésuites
Mars Franco commandant général des Baléares
Octobre
29 José Antonio Primo de Rivera fonde la Phalange
Novembre
19 Elections législatives. Succès de la droite (CEDA).
1934
Janvier
10 Les Jésuites réautorisés à enseigner
Octobre
3 Grèves révolutionnaires à Madrid et à Barcelone
7 Insurrection des mineurs des Asturies. Près des 30 000 mineurs armés. Franco dirige la répression. Plus de 1000 tués. On capturera 90 000 fusils.
1935
Février. Franco commandant en chef de l’armée du Maroc. Le 13 mai il est nommé chef d’état-major général par le ministre de la Guerre Gil Robles.
1936
Février
16 Elections aux Cortes. Succès du Frente Popular.
Mars Franco nommé commandant général des Canaries.
Avril Le général Mola expose dans une circulaire son plan de soulèvement.
Mai
11 Azaňa président de la République.
12 Gouvernement Casares Quiroga.
Juillet
9 Assassinat du phalangiste Sanz de Heredia.
12 Assassinat du lieutenant Castillo.
13 Assassinat du leader monarchiste Calvo Sotelo.
La Guerre
(en gras : victoires et initiatives nationalistes, en romain : républicaines, italique : interventions étrangères)
Juillet
17 Au Maroc « soulèvement national » contre le Frente Popular.
18 Le soulèvement s’étend en Espagne. Début de la guerre civile.
19 Franco arrive à Tétouan. Le Gouvernement Giral donne des armes au peuple et sollicite l’aide française : armes et avions.
20 Mort du général Sanjurjo, chef théorique de la conspiration.
22-25 Bataille des Sierras au nord-ouest de Madrid. Premières vraies batailles de la Guerre civile.
Franco sollicite les aides italienne et allemande pour lui permettre de faire passer ses troupes sur le continent.
25 Arrivée en Espagne des premiers avions et des premières armes livrés par la France.
30 Arrivée au Maroc des premiers avions italiens et allemands.
Août
6 Franco arrive à Séville.
14 Prise nationaliste de Badajoz.
15 Déclaration franco-britannique sur la non-intervention. L’Italie y adhère le 21 août. L’Allemagne, le 24, l’URSS, le 28.
Septembre
3 Les nationalistes contre-attaquent victorieusement à Majorque.
4 Gouvernement Largo Caballero.
5 Chute d’Irun.
9 1ère réunion du Comité de non- intervention
13 Chute de Saint-Sébastien.
29 Fin du siège de l’Alcazar de Tolède.
27 Franco est nommé généralissime.
Octobre
1er Franco, chef de l’Etat.
7 Début de la marche sur Madrid.
Octobre-décembre
Bataille de Madrid.
LUIS COMPANYS
(1883-1940) Ancien président de la Généralité de Catalogne. Il se proclama Président de la République de Catalogne (31 Juin 1936). Réfugié en France en Février 1939. Arrêté par le gouvernement de Vichy, il fut remis par la Gestapo à Franco qui le fit fusiller à Barcelone.
Au moment des évènements de Figols, la Catalogne s’était déclarée République de Catalogne le 14 avril 1931 par le colonel Macias quelques heures seulement avant la République Espagnole et avait créé un gouvernement : la Généralité de Catalogne.
Esquerra Républicana dirigée par Companys avait remporté les élections en avril 1931.
Lorsque les Cortés abordèrent en Septembre 1931 le débat constitutionnel elles se trouvèrent en présence d’institutions autonomes en plein fonctionnement. La République Espagnole fut définie comme « Etat intégral compatible avec l’autonomie des Régions ».
Mais chaque fois qu’une Région demanda son autonomie elle se heurta au pouvoir central qui interprétait cette démarche comme une rupture propre à alarmer le patriotisme espagnol.
Les mouvements de cette époque s’inscrivent donc à la fois dans le cadre d’une recherche d’autonomie et d’un soulèvement populaire. Ce qui explique en bonne partie les fins de non-recevoir essuyées par la délégation de Figols auprès de Madrid.
L’autonomie de la Catalogne ne fut effective qu’à l’été 1932 avec toutefois des pouvoirs amoindris.
En 1934 les mineurs des Asturies se soulèvent, soulèvement férocement réprimé par l’armée commandée par Franco. Le général Yagüe se distingue par ses exactions.
Companys proclame alors l’Etat Catalan dans la République Espagnole. Mais le général Batat sur lequel il comptait se rangea du côté du pouvoir central et Companys fut emprisonné.
Les Cortés élues en 1936 remettent en vigueur le statut catalan et gracient les condamnés.
Le 31 juin 1936 Companys se proclame Président de la République de Catalogne.
Ce petit résumé afin de montrer combien les dissensions entre les pouvoirs influaient sur les mouvements en Catalogne, sans compter le patronat qui en profitait pour pressurer outrageusement les ouvriers.
EXTRAITS DE HISTORIA 1971 :
...« Les anarcho-syndicalistes, exaspérés par la montée du chômage et le renforcement de l’appareil policier, recouraient à nouveau aux méthodes terroristes en honneur sous le règne d’Alphonse XIII.
Une petite guerre chronique s’engage entre la CNT et les milices prétoriennes. En juillet 1931, à Séville, la CNT lance un ordre de grève générale pour protester contre la mort d’un gréviste, tué par la police au cours d’une bagarre. Des combats de rue se déroulent pendant trois jours dans la capitale andalouse. Le 6 janvier 1932, à Arnedo (province de Logroňo) la Benemerila (garde civile) tire sur une manifestation ouvrière. Bilan : 6 morts (dont 4 femmes) et 30 blessés. Quelques semaines plus tard, à la fin de janvier, une tentative de soulèvement ouvrier est étouffée à Figols, dans le bassin minier du Haut Llobregat (province de Barcelone). Cent quatre anarchistes, dont le fameux Durruti, sont alors déportés en Guinée espagnole. A cette époque, on estime à 400 morts (dont 20 gardes) et à 3000 blessés le chiffre des victimes de cette petite guerre sociale, au cours des dix-huit mois écoulés depuis la proclamation de la République.
L’épisode le plus dramatique se situe un peu plus tard en janvier 1933. Pour célébrer l’anniversaire du mouvement de Figols, les anarchistes organisèrent dans tout le pays une série de grèves, d’attentats et de manifestations. Ces tentatives furent aisément réprimées. Mais dans quelques communes de la province de Cadix, la grève des journaliers agricoles prit une allure de jacquerie.
Un détachement de la garde d’assaut aux ordres du capitaine Rojas, entreprit de fouiller maison par maison le hameau de Casas Viejas, dont les habitants avaient proclamé l’avènement du « Communisme libertaire ». Un vieux militant anarchiste connu sous le sobriquet de « Seisdebos » se barricada dans sa maison avec ses enfants, ses petits-enfants et deux voisins. On était au crépuscule. La nuit s’écoula sans amener de changement. A l’aube, les gardes exaspérés mirent le feu à la masure. « Seisdedos » et sa famille périrent dans les flammes. Au cours des heures suivantes, le capitaine Rojas donna l’ordre de fusiller onze personnes.
Les évènements de Casas Viejas provoquèrent des provocations unanimes. Le président Azaňa fut interpellé aux Cortès par les porte-parole de la gauche et de la droite.
Le châtiment exemplaire infligé au capitaire Rojas (vingt ans de prison) ne suffit pas à calmer l’opinion. Les ouvriers qui, depuis longtemps, avaient surnommé l’austère président Alcala Zamora « Alfonso en rustica » (Alphonse en édition brochée, sans uniforme chamarré) pensaient que, décidément, rien n’avait changé en Espagne.
Mémoires d’un évadé d’un des camps de concentration de Franco
Camp « La Merced » (Pampelune, Navarre)
Récit de Balthasar MartinezTraduit de l’espagnol par Lazare Martinez
Ces mémoires ne se targuent d’aucune littérature, j’ai beaucoup de carences à ce sujet, mais elles se veulent surtout la narration des injustices et souffrances que nous avons dû supporter moi et mes camarades dans ce camp de concentration.
Arrivée dans le camp de concentration
La majeure partie des prisonniers de guerre de ce camp provenait de France en passant par Hendaye. Une grande partie de ces hommes, devant les traitements que leur réservaient les autorités françaises, se portèrent volontaires pour le camp de Franco, pensant que celui-ci serait plus indulgent envers eux. D’autres qui, comme moi, avaient de la famille en France et qui pensaient obtenir l’autorisation de les rejoindre sortaient des camps français et partaient à la dérive. Mais les évadés de ces camps, moi y compris, atteignaient rarement leur objectif. Les militaires, les gendarmes, les autorités françaises et les gardes civils poursuivaient sans relâche ceux qui arrivaient à s’échapper des camps de concentration français. Ceux qui étaient arrêtés par l’une ou l’autre des autorités étaient conduits à la frontière à Hendaye, sans autre forme de procès, comme personnes indésirables. C’est ainsi, qu’après de nombreuses souffrances et avatars, je fus conduit à la frontière espagnole.
C’est là que les phalangistes, aidés par la Guardia Civil, sans fouille ni interrogations, nous enfermèrent dans des wagons à bestiaux et sous bonne garde nous conduisirent au camp de Pampelune.
On nous fit descendre un par un des wagons, entre deux files des serviteurs de l’ordre de Franco. Inutile d’espérer s’échapper, ni avec les autorités françaises ni avec celles d’Espagne. Quelques-uns tentèrent de le faire à la sortie des wagons et subirent un traitement terrible. Conduits en file indienne, sous la menace des fusils de la Guardia Civil, nous fûmes conduits à la « Merced ». L’entrée dans le camp se fit sans la moindre inspection. En entrant dans ce camp on se sentait tout de suite aussi mal en point que tous ceux qui s’y trouvaient déjà.
Le lendemain une voix annonça dans la minuscule cour : « Que ceux qui sont arrivés hier se présentent au bureau d’enregistrement ! » Ceux qui nous recevaient dans ce bureau avaient l’air de se méfier les uns des autres, certainement pour des questions de préséance, alors qu’ils disposaient de plus ou moins de responsabilités. Surtout lorsque la police française avait adjoint au prisonnier une note explicative, puisqu’ils ignoraient totalement le français.
Chacun des prisonniers subissait alors dans ce bureau un interrogatoire interminable, mais c’était inévitable, il fallait en passer par là.
Dans le bureau d’enregistrement
Un caporal de la Guardia Civil trônait fièrement, entouré de trois ou quatre secrétaires.
Le caporal : « Comment vous appelez-vous ? quel âge avez-vous ? où êtes-vous nés ? où vous trouviez-vous lors de l’explosion de notre glorieux mouvement ? » Le prisonnier répondait chaque fois aux questions qui lui étaient posées. Les secrétaires, sans lever la tête notaient tout ce que le prisonnier disait. Alors le cabot le regardait de haut en bas et lui disait : « Vous pouvez partir, mais n’oubliez pas de passer chez le coiffeur. » Celui-ci se trouvait justement en face et nous coiffait promptement, la boule à zéro. Là s’arrêtaient momentanément les ennuis.
A ce moment le prisonnier s’interrogeait : « Mais ces gens vont se renseigner certainement au village que j’ai déclaré ? » Intérieurement nous nous résumions : « Mais personne ne peut donner des renseignements, car personne ne me connaît davantage que moi-même, et moi-même je ne connais pas le pays que je viens de déclarer. » Le prisonnier demeurait alors abandonné dans ces locaux immondes, suspicieux de soi-même.
Ordre moral des prisonniers
Bien que la peur et la méfiance soient le quotidien des prisonniers, il y avait toujours quelqu’un qui plaisantait, certains racontaient des histoires drôles, d’autres se promenaient en long et en large, réfléchissaient ou pleuraient en sourdine accroupis dans un coin.
Cela montrait que ceux qui plaisantaient et leur entourage pensaient obtenir une solution favorable, alors que les autres qui réfléchissaient ou pleuraient dans leur coin ne voyaient aucune issue satisfaisante.
Au cours du temps, nous faisions connaissance les uns avec les autres, le temps de localiser les moutons introduits parmi nous. Quoique la règle pénitentiaire soit sévère et même criminelle, nous avions reconquis notre moral d’espagnols et les souffrances et vexations se faisaient moins insupportables qu’au début. Finalement les plaisantins arrivaient à créer une sorte d’évasion pour ceux qui aimaient discuter plus sérieusement et ouvertement. Malgré tout il fallait rester réservé et toute chose n’était pas bonne à dire.
L’ordre dans le camp
L’ordre dans le camp était assuré par un commandant de l’armée, un lieutenant et un caporal de la Guardia Civil, et deux sergents. Il y avait aussi un sergent blessé par les forces républicaines et trois ou quatre officiers de la Phalange qui se relayaient chaque semaine. De plus, six ou sept caporaux de l’armée qui étaient particulièrement efficaces dans les châtiments. Selon quelques informations de toute confiance, l’un d’entre eux faisait partie des pelotons d’exécution.
L’acharnement sur les prisonniers était, de la part des autorités du camp, particulièrement inhumain. Rassemblements, rondes de prisonniers, coups pour obtenir des déclarations sous contrainte.
Cela consistait à présenter des photographies de personnes qui avaient été tuées dans la zone républicaine et à les accuser de leur assassinat. La terreur était telle que le 15 avril 1939, suite à ces traitements injustes et pris par une crise de folie désespérée, le prisonnier Hullet Ferrer se jeta du troisième étage. Le 18 du même mois un autre prisonnier dénommé Maňo originaire de Balabastro mit ainsi, comme l’autre, fin à sa vie.
La contagion du suicide chez les prisonniers était telle que les sentinelles qui se tenaient à l’intérieur du camp réussirent à arrêter deux autres tentatives de suicide d’hommes qui ne pouvaient plus supporter une vie infâme digne plutôt des bêtes que des hommes. Devant une discipline aussi rigoureuse la contagion du suicide ne cessait d’augmenter.
Les responsables du maintien de l’ordre à l’intérieur avaient décidé de mettre des gardes militaires qui circulaient parmi nous avec la baïonnette au canon. A deux reprises les gardes arrêtèrent deux autres candidats au suicide qui tentaient de se suicider par défenestration comme les deux premiers.
De la même façon, ils ordonnèrent de mettre des forces de carabiniers et militaires à l’extérieur du camp de la « Merced » comme au pied du fronton de pelote basque puisqu’il y avait là-bas aussi une centaine de prisonniers. Un prisonnier qui tentait d’ouvrir une fenêtre fut blessé à la main par un tir de fusil d’un carabinier de faction.
Il y avait aussi l’ordre express d’assister à la messe que célébrait tous les dimanches, dans la cour, le curé du camp. Ceux qui essayaient de s’y soustraire, en se cachant dans les wc ou autres endroits, étaient pourchassés par les capos. Ils étaient alors ramenés au premier rang à grand coups de fouets.
Un autre dimanche, à la place du curé, un autre prêtre célébra la messe. Il était, paraît-il, lieutenant-colonel des Boïnas rojas (Bérets rouges). Ce Monsieur le curé, la messe dite, au lieu de s’occuper des mystères de l’Eglise, s’avança vers les prisonniers pour leur parler de la guerre. Après avoir encensé Franco, son Armée et le glorieux mouvement national, il attaqua sur les « rouges », nous traitant de crabes, lévriers (!), lâches, sacrilèges, violeurs, assassins, prédateurs de biens privés, destructeurs de la civilisation et autres propos de bravache. Cet homme déversait sa bile, lui qui savait comment un peuple laborieux pouvait se montrer courageux au combat, alors qu’il nous tenait à sa merci sans défense et soumis à un sort cruel sans précédent.
C’est pour ça que sur les murs, portes et autres lieux visibles se trouvaient de grands panneaux sur lesquels, entre autres inscriptions louant le régime de Franco et ses martyrs, il y avait :
« Dans les camps de Franco, il n’y a pas de terreur, il y a de l’amour »
Déclaration devant l’assemblée de classement
Dans un quartier militaire de Pampelune, il y avait une Assemblée de classement des prisonniers. Lorsqu’il avait passé une paire de mois dans le camp, le prisonnier était appelé devant cette assemblée pour faire sa déclaration sous serment.
Cette assemblée était composée d’un lieutenant-colonel de l’armée, d’un commandant et d’un capitaine de la Guardia Civil, d’un lieutenant et quelques caporaux de l’armée. Il y avait aussi quelques messieurs réquétés (troupes carlistes coiffées du béret rouge et portant un brassard vert avec une croix) et phalangistes dont j’ignore le grade.
La déclaration reposait toujours les mêmes questions : « Comment vous appelez-vous ? quel âge avez-vous ? où êtes-vous nés ? comment s’appellent vos parents ? où vous trouviez-vous quand le mouvement a éclaté ?avez-vous appartenu au SIM (Service d’Investigations Militaires dans la zone républicaine) ? avez-vous appartenu aux patrouilles de contrôle (!) ? combien de temps avez-vous été en guerre ? à quelle organisation ou parti politique apparteniez-vous ? êtes-vous catholique ? avez-vous volé ? avez-vous commis des sacrilèges ? avez-vous commis un crime quelconque pendant le mouvement ? »
Le prisonnier répondait au fur et à mesure aux questions. A certains on montrait des photographies de gens qui selon eux avaient été tués par des rouges. Rare était le prisonnier que l’assemblée emmenait sur le champ. Il fallait une grande imprudence du déclarant pour qu’il soit arrêté immédiatement et soumis aux décisions de cette assemblée.
Autrement le prisonnier était reconduit au camp, sans autre explication, pour y attendre son sort.
Quelques-uns étaient appelés à déclarer une deuxième fois. Ceux-ci étaient alors classés définitivement. Certains revenaient avec leurs documents en règle pour retourner au pays. D’autres étaient expédiés à la prison de Pampelune. D’autres encore au pénitencier de San Cristobal. Il y en avait qui étaient envoyés dans des camps de travail dont le recrutement se faisait à Miranda de Ebre.
Les prisonniers qui restaient dans le camp après leur première déclaration étaient journellement maltraités par les caporaux de la Guardia Civil. L’ordre intérieur du camp était renforcé afin d’éclaircir la situation de tous ces prisonniers qui n’avaient donné ni leur véritable nom, ni leur adresse exacte. Dans ce but, ils organisaient les prisonniers en formation militaire à de nombreuses occasions, terminant même par une formation en compagnies. Ils donnèrent alors l’autorité à ceux qu’ils avaient formé en exigeant même de ceux-ci une responsabilité accrue vis-à-vis des autres prisonniers.
Le caporal de la Guardia Civil continuait ses interrogatoires montrant des photographies et de fausses déclarations de personnes inconnues de l’interrogé. Lorsque le caporal n’obtenait pas les aveux qu’il souhaitait il lui administrait généralement une forte raclée. La raclée la plus atroce que subit un prisonnier fut administrée à un certain Arias qui était un ancien champion de boxe. Il avait, d’après certains, appartenu au SIM. Après cette mémorable bastonnade nous le vîmes, un beau matin, complètement nu dans la cour. Quelques temps plus tard, sous la menace des fusils, deux gardes civils l’emmenèrent et l’on n’entendit plus parler de lui.
Ce qu’il y avait aussi de terrible, c’est qu’après nous avoir imposé le silence, deux ou trois individus se présentaient et annonçaient les noms de quelques prisonniers. Lorsqu’ils répondaient, on leur demandait de prendre leur sac et leur couverture [2] et on les embarquait.
La terreur devenait alors palpable au milieu des prisonniers, comme si la mort venait d’apparaître. On savait en effet, par des indiscrétions, que tous ceux qui étaient appelés ainsi, au petit matin, allaient directement au peloton d’exécution.
Cet appel du matin fut abandonné lorsqu’à la fin plus personne ne répondait à l’appel des noms. Leur recherche au milieu des prisonniers aurait par ailleurs créé un véritable tumulte et nui gravement à l’ordre qu’ils voulaient faire régner dans le camp. Cela confirmait donc que ces appels ne se faisaient pas sur ordre des autorités, mais étaient plutôt la suite de dénonciations ou vengeances de pays d’origine.
Bien que les détenus soient organisés en compagnies, le désordre administratif régnait parmi eux. Ceux qui avaient été désignés pour nous contrôler étaient incapables de déterminer l’identité de chacun. En effet, nous permutions en permanence de nom les uns avec les autres et personne ne s’y retrouvait. La situation de confusion était arrivée à de telles extrémités que, d’accord ou non avec la direction du camp, une méthode fut mise au point pour débusquer certains prisonniers : on annonçait à la porte du bureau que untel avait reçu un mandat de tant de pesetas à retirer au bureau. L’imprudent qui tombait dans le piège était immédiatement arrêté et partait pour une direction inconnue de nous autres.
Cette manœuvre ne pût pas se renouveler très souvent car le bruit s’en répandit très vite bien que nous soyons 3000 détenus.
Les prisonniers recevaient du courrier, quelques-uns sous un faux nom. Le courrier était distribué par appel au milieu de la cour puis jeté par dessus les têtes dans la direction supposée de son destinataire puisqu’aussi bien personne ne répondait présent.
Les 3 et 4 juillet, pendant tout un après-midi, ils organisèrent une ronde de prisonniers. Après nous avoir fait descendre dans la cour, la ronde faite, ils installèrent un garde civil tous les 8 ou 10 mètres. Ceux-ci, une photographie à la main parcouraient la ronde à la recherche du prisonnier dont ils avaient la photo. Ils n’obtinrent aucun résultat et ce n’est qu’à la tombée du jour qu’ils nous firent rompre la formation. Au cours de ces rondes quelques-uns très fatigués tombaient lourdement. Ils n’en tenaient aucun compte sauf que quelques fois certains étaient enlevés de la cour complètement évanouis.
Quand la chiourme trouvait que les détenus se montraient moins abattus, elle cherchait une nuisance quelconque pour continuer à les tourmenter. Cela consistait parfois à prendre un prisonnier au hasard, le conduire au garde civil qui l’interrogeait sadiquement : « pourquoi vous trouvez-vous dans ce camp ? qu’avez-vous fait dans la zone rouge ? »
Le prisonnier répondait comme il pouvait mais le caporal jamais content lui montrait alors 14 ou 15 photographies et demandait : « connaissez-vous ces personnes ? » Naturellement le prisonnier ne connaissait personne et ne savait pas de quoi il s’agissait. Alors le caporal lui disait : « c’est vous qui avez tué tous ces gens » et sans attendre de réponse il s’acharnait sur lui à coups de cravache. Et ce maudit caporal frappait jusqu’à ce qu’il s’arrête d’épuisement.
Cela se répandait dans tout le camp comme une traînée de poudre et la terreur s’introduisait partout faisant disparaître le léger mieux que ces messieurs de l’ordre du camp avait constaté auparavant.
Cas très spécial : un jour un jeune homme, poussé par la faim, osa prendre un morceau de pain dans le local de la cuisine. Mais comme parmi nous, il y avait toujours quelques mouchards, un de ces maudits délateurs le dénonça à la Guardia Civil.
Le caporal de la chiourme le prit, lui lia les mains derrière le dos, et le montrant à la première compagnie comme un voleur, il commença alors à coups de ceinturon à lui infliger une première correction. Il l’emmena ensuite devant la deuxième compagnie, répétant « vous avez devant vous un petit voleur qui vaut ni plus ni moins que vous-mêmes ». Il lui infligea un second châtiment. Et, semblable au chemin de croix du Christ, il fut conduit devant la troisième compagnie où il tomba mortellement atteint, blessé par les coups et saignant par tous les pores. Deux caporaux l’enlevèrent alors et l’on n’entendit plus parler de lui. Le bruit courait parmi les détenus qu’il était mort dans la nuit.
Lorsque les détenus avaient un moment de répit, résonnait alors le rassemblement d’urgence. Les caporaux militaires accomplissaient alors leur mission en frappant à droite et à gauche sans discernement. Pour accélérer le rassemblement, en bas de l’escalier se trouvait un capo qui donnait les premiers coups de cravache sur les épaules. Le dernier caporal, en bas de l’escalier était celui que nous surnommions « le bossu » ou « le borgne », car il l’était vraiment. Il était natif de Tren (Lérida) et c’était celui-là même qui appartenait au peloton d’exécution.
Une nuit, de façon inopinée, un lieutenant-colonel se présenta au camp. Celui-ci avait été détenu dans nos camps. Avec des manières parfaitement correctes il nous annonça la chute de Madrid. Le directeur du camp nous dit ensuite : « Comme tout le monde se trouve libéré par notre glorieuse Armée, la communication est rétablie dans toute l’Espagne. Je vous conseille donc d’écrire chez vous afin d’obtenir des garanties pour sortir librement du camp ».
Ce lieutenant-colonel ne devait pas être très bien informé sur la reddition des forces républicaines à Madrid (celle-ci eut lieu le 28 avril 1939). Le lendemain matin nous fûmes informés avec toute certitude que les informations du lieutenant-colonel étaient fausses. Nous retrouvâmes alors un peu de bonne humeur.
La Guardia Civil se rendit compte de l’ambiance joyeuse des prisonniers et en profita pour montrer de quel bois elle se chauffait. Ce jour-là au moment de descendre dans la cour pour prendre le repas il y eût des coups, des corridas, rassemblements, formations de rondes et mises en rangs. Un officier, parce qu’un détenu n’était pas bien aligné, se mit à le rouer de coups puis se retourna vers le sergent et le gifla jusqu’à plus soif. Notre seule défense restait le silence et supporter l’humiliation.
Un beau jour un officier de la Phalange se présente, de garde, au camp. Il commence à protester contre les injustices dont nous étions victimes. Il accusait les militaires des très mauvaises conditions dans lesquelles on nous maintenait et de la mauvaise qualité du « rancho » (nourriture, synonyme du rata en français) et la guardia civil de mauvais traitements. Les protestations de cet officier, même s’il subsistait quelques doutes quant à leur sincérité, donnaient à penser à nombre de détenus qu’ils avaient quelques droits à réclamation. Entre doutes et semi-optimisme il s’écoula environ deux semaines. Après ces quelques jours tout se termina. Lorsque cet officier phalangiste prit sa garde pour la troisième fois, il était pire que ses prédécesseurs.
Un exemple de ces procédés sauvages : après avoir beaucoup critiqué l’attitude des autres chefs et officiers il fait une descente à la troisième compagnie où il trouve un jeune homme alité avec trente neuf degrés de fièvre. Il s’approche, et sans rien dire, il lui lance un grand coup de pied dans le ventre et lui ordonne de se mettre debout. Le jeune homme essaie de se relever comme il peut quand l’officier, sans faire de détail, lui assène deux gifles. Il l’attrape par le bras et l’oblige alors à se tenir au garde-à-vous exigeant qu’il garde cette position pendant une heure le bras levé en signe de salut fasciste. Pour s’assurer que ce châtiment sera exécuté il met de garde deux autres prisonniers sous la menace de leur faire subir le même sort si la sanction ne va pas à son terme. Cet officier espérait que le premier condamné tomberait avant, ce qui ne tarda pas d’arriver. Il entra alors, le roua de coups de pied et ordonna aux deux autres de jeter une couverture sur le corps. Celui-ci fut alors transporté à l’infirmerie puis à l’hôpital et nous ne sûmes plus rien de lui. Un autre jour, entrant dans une autre compagnie, il décida que le balayage était mal fait. Il avisa deux jeunes gens qui se trouvaient proches, les gifla, puis mettant la compagnie au garde-à-vous il les insulta de toutes les façons possibles. Le silence restait la seule force et la seule consolation des prisonniers.
Il s’introduisait dans le camp des orateurs de la Phalange et des missionnaires religieux. Les premiers s’adressaient aux détenus sous forme de conférences, les seconds s’introduisaient ouvertement au milieu des prisonniers parlant de leurs convictions spirituelles. La nuit tombée, ils réunissaient leurs adeptes, les tartuffes ne manquant pas, et les faisaient chanter. Les plus délurés racontaient des histoires drôles ou des contes et tout se terminait par une prière aux disparus pour la Patrie et pour le Roi.
Il est évident que les phalangistes et les réquétés n’avaient pu démarrer leurs activités que lorsque la commission de classification avait expurgé tous ceux, qui à leur idée, représentaient la lie où étaient les indésirables. La discipline devint alors un peu moins rigoureuse puisque l’effectif avait diminué ; et même lorsque les détenus du fronton de la pelote basque eurent rejoint le camp de la « Merced », nous n’étions plus que mille deux cent.
Un jour un phalangiste donna une conférence à une tribune improvisée dans la cour où il nous dit : « Nous savons que vous êtes maintenant convaincus que vous avez perdu la guerre et qu’avec elle vous en avez fini avec la cécité du communisme. Si vous savez reconnaître les faits, vous pouvez vous attendre à une vie meilleure que celle que vous avez eue jusqu’à présent. Si vous ne l’acceptez pas, vous passerez les 10 à 12 ans qui vous restent à vivre dans les conditions actuelles ou peut-être pires. Seuls ceux qui le méritent recouvreront la liberté et le bien-être. »
Il s’étendit ensuite sur diverses considérations louant le mouvement phalangiste. Cet homme fut correct et par son discours il tentait de stimuler les détenus. Quelques prisonniers applaudirent l’orateur et je les vis entreprendre une conversation avec lui, le fond de l’entretien portant surtout que quel était leur avenir s’ils n’obtenaient pas la fameuse caution. Il semblerait que cet homme après leur avoir parlé de la situation du camp leur fit des promesses mais sans aucun engagement. Mais au cours de cette nuit, après l’extinction des feux, trente prisonniers furent enlevés et disparurent à jamais. Devant ce cas qui ne s’était pas présenté depuis longtemps plusieurs hypothèses se présentèrent à notre esprit. On pouvait supposer que ces trente-là étaient ceux qui avaient donné leur nom et que la Phalange tenant ses promesses avait libérés. D’autres disaient qu’ils pouvaient avoir été fusillés. On les soupçonnait aussi d’être des espions qui avaient terminé leur mission parmi nous et fait coïncider la venue de l’orateur avec leur sortie spectaculaire ressemblant à celle des fusillés. La réalité c’est que plus jamais nous n’en entendîmes parler.
Semaine sainte à Pampelune
Pendant les jours de la semaine sainte il arriva des choses extraordinaires dans le camp, l’une d’elles en particulier étant la préparation à la confession générale de tous les prisonniers.
A cet effet, une salle occupée par une compagnie de 120 détenus dut déménagée et ses occupants répartis dans d’autres salles qui étaient elles-mêmes surchargées. La salle vide restait à la disposition des prêtres et de ceux qui désiraient se confesser.
Une douzaine de chaises furent installées et lorsque tout fut prêt, trois curés invitèrent les volontaires pour la confession. Le Jeudi Saint dans la matinée, la salle était déserte. Seuls les prêtres et quelques curieux, de ceux qui avaient pu décrocher une mission pour venir au camp, occupaient la salle.
Après le « rata » de midi on nous mit au garde-à-vous dans la cour et les curés, les uns après les autres, firent un prêche pour inciter les gens à aller se confesser. La prédication terminée nous nous dispersâmes. Il y eut entre les prisonniers diverses opinions et quelques légères discussions, mais, dans l’après-midi, la salle se trouva remplie par ceux qui allaient se confesser. Les curés eurent alors un incessant travail à poser des questions, pour beaucoup d’entre elles d’ailleurs assez extravagantes aux dires des hypocrites qui se soumettaient à la confession.
Il semblait que toutes les questions fussent orientées à des fins politiques. Les prêtres répétaient les mêmes questions que la commission de classement, demandant s’ils connaissaient à l’intérieur comme à l’extérieur du camp des gens qui auraient commis des viols, sacrilèges ou assassinats. Quoique cette confession fut une véritable plaisanterie pour les détenus, les religieux étaient profondément satisfaits puisque les trois quarts des prisonniers du camp avaient fait du bon travail.
Arriva le jour, si je me rappelle bien, du Vendredi Saint où une grande messe fut célébrée pour la communion. Celle-ci fut dite par un évêque qui était là expressément pour donner la communion aux prisonniers qui s’étaient confessés. Ceux-ci se présentèrent accompagnés par leurs confesseurs et par le curé basque, un dénommé Thomas. Si, parmi l’assemblée, il y avait quelqu’un d’honorable et de grand cœur, c’était bien lui.
Avec une grande solennité un autel fut élevé dans la cour. Les détenus étaient obligés de se tenir au garde-à-vous devant l’autel sauf évidemment ceux qui parvenaient à s’enfermer dans les toilettes et que personne, même à grands coups, n’aurait pu faire sortir de là. Avec la patience dont font preuve ces gens, l’évêque passait de l’un à l’autre, lui faisant avaler la mitre ! Cette opération dura une heure et demi. De nouveau certains s’évanouirent car la cérémonie dura trois heures au total.
Hygiène
La question de l’hygiène était très éprouvante. La « Merced » était autrefois un séminaire et ses bâtiments composés de larges nefs réunissaient les pires conditions pour un camp de concentration. Les habitations manquaient de ventilation et leur capacité pour 3000 prisonniers était nettement insuffisante. Les planchers et plafonds étaient rongés et brisés. Les rats montaient des égouts et dans la nuit couraient sur nos corps en véritables processions et parfois mordaient quelques mains qui dépassaient. Les gens étaient véritablement entassés.
Avant le couvre-feu chacun s’asseyait en allongeant les jambes de façon à marquer son territoire pour la nuit. Ceux qui oubliaient de faire cette opération étaient obligés de passer la nuit dans les passages extérieurs ou, souffrant du froid, de s’enfermer dans les toilettes où ils passaient la nuit debout ou accroupis. Il est impossible d’imaginer l’état dans lequel ils se trouvaient au lever avec la couverture et vêtements souillés d’immondices.
Il était impossible de changer de sous-vêtements pour autant qu’on en ait. A l’arrivée du camp chacun avait plus ou moins, dans son paquetage, quelques sous-vêtements, mais ceux-ci comme tous les objets qui intéressaient la Guardia Civil leur étaient dérobés. Pour cela, ils procédaient ainsi : deux ou trois gardes civils se présentaient à l’entrée des bâtiments, ordonnant de rester debout paquetage au pied. Deux prisonniers devaient alors prendre une couverture tendue aux quatre coins, un garde restant à la porte, les autres commençant le ramassage des sous-vêtements. Ceux-ci étaient ce qui les intéressait davantage. Devant chacun ils demandaient : « Ouvre ton paquetage ». Le prisonnier sortait quelques effets les étalant comme s’ils étaient mis à la vente. Les gardes se regardaient mutuellement de côté puis se jetaient à l’assaut de quelques misérables objets et dépouillaient celui-ci de tout ce qui les intéressait.
Quand ils estimaient en avoir assez, ils disaient : « Quelqu’un se trouve-t-il en possession d’un rasoir, couteau ou quelque objet coupant ? Si quelqu’un en possède, il vaut mieux les donner avant que nous les découvrions. » Ils se retiraient avec leur butin. Quelques jours après, la même opération se répétait jusqu’au dépouillement complet des détenus y compris ardoises, crayons et papier. Les prisonniers comprirent alors que l’unique façon de sauver quelques vêtements était de les porter sur soi. Les gardes en arrivèrent un jour à faire se déshabiller un garçon qui avait mis trois chemises les unes sur les autres et ne lui laissèrent que la plus minable. Ils arrivèrent même à piquer des couvertures qui ne leur paraissait pas trop mauvaises en disant au prisonnier : « Nous t’en donnerons une autre ». Mais le prisonnier restait alors sans couverture.
Pour toutes ces raisons les détenus ne pouvaient pas pratiquer une hygiène corporelle. Les poux nous envahissaient à tel point qu’au lieu de les tuer un par un, nous les repoussions de nos corps d’un revers de main comme s’il s’agissait de paille ou de poussière.
Dans l’infirmerie officiaient un infirmier et un médecin, enfin soi-disant car on ne le voyait jamais dans le camp. L’infirmerie était un petit local rempli par trois lits malpropres toujours occupés par un malade ou un autre. Quand le malade était à l’agonie on le transportait à l’hôpital, enfin plutôt à la morgue de l’hôpital. De nombreux détenus sortirent ainsi du camp de concentration. Parmi ceux-ci on en vit quelques-uns revenir dont un de mes amis. Il nous expliqua que les religieuses s’étaient très bien comporté avec lui car il avait su se soumettre à toutes les coutumes qui existaient dans cet hôpital. Mais il reconnut qu’il y avait des mauvais traitements sur d’autres prisonniers malades.
Au fond de la cour, il y avait des robinets qui devaient servir à la toilette et à la douche. Mais c’était inaccessible car pour arriver aux robinets, il fallait se déchausser et remonter le pantalon jusqu’aux genoux. La gale, le typhus, les bronchites aigües, les pneumonies et les débuts de tuberculose étaient le résultat de la mauvaise hygiène du camp. Finalement ils acceptèrent les demandes répétées d’un médecin qui se trouvait prisonnier dans le camp, mais cet homme se trouvait dans l’impossibilité d’accomplir sa tâche comme il le désirait. Il manquait de lits pour accueillir les nombreux malades qui se traînaient dans toutes les pièces, de médicaments, de matériel sanitaire et quelques fois l’aspirine même venait à manquer. Devant ce désastre, les autorités se virent obligées de vacciner tous les prisonniers contre la tuberculose, mais ces mesures arrivèrent trop tard pour quelques détenus. Je me rappelle de la mort affreuse d’un ami originaire de Berga (Barcelone), mort abominable qui frappa aussi un grand nombre de détenus.
L’alimentation et les repas dans le camp
Le petit déjeuner était composé d’orge et de seigle cuits et c’était tout jusqu’à midi où l’on servait le « rancho » (rata) qui ne variait jamais : un plat de fèves cuites, souvent à moitié crues, et un morceau de pain. Le pain était du pain d’orge et autres mélanges d’une ration d’environ 150 grammes. Avant de servir le rancho, on nous faisait chanter pendant trois quarts d’heure pour Dieu, pour la Patrie, pour le Roi et le Cara al Sol (hymne franquiste à la gloire de Franco). Un officier des réquétés était tenu de nous faire respecter rigoureusement ces formalités. Le malheureux qui négligeait de chanter était giflé, traîné au sol et privé de nourriture jusqu’au soir. Le soir où, pour changer, même chansons (quel petit roquet malicieux ce Monsieur) et même rata : fèves mal cuites et morceau de pain.
Un certain jour, quelques prisonniers qui ne descendirent pas pour avaler leurs fèves furent interrogés par un officier. Il les fit mettre au cachot pendant deux jours. A leur sortie certains d’entre eux furent admis à l’infirmerie et plus tard à l’hôpital cependant que les autres continuaient à manger des fèves à moitié cuites.
Rares étaient ceux qui avaient de l’argent et lorsque quelqu’un recevait un mandat il était rapidement liquidé. Le cantinier, frère d’un sergent de la Guardi Civil, volait honteusement et ouvertement le prisonnier sachant que celui-ci ne pouvait protester. Dans toutes les circonstances notre devise devait rester silence et soumission.
Une nouvelle importante nous parvient de l’extérieur
Dans une salle de cinéma de Pampelune on projetait un reportage sur la Guerre d’Espagne où l’on voyait l’aviation de l’armée républicaine mitraillant les troupes franquistes. Les habitants de Pampelune se mirent en colère et demandèrent la tête de tous les prisonniers qui se trouvaient dans le camp de la « Merced ». Un certain nombre de ces énergumènes se présentèrent à la direction du camp en réclamant nos têtes. Les autorités refusèrent évidemment d’accéder à cette demande et firent appel à une compagnie militaire pour rétablir l’ordre. Cet instant fut pour nous un moment curieux, à la fois d’abattement et de stimulation, car dans chaque visage on lisait le désir d’en découdre si le cas s’en présentait. Nous étions décidés à vendre chèrement notre vie. L’ordre fut rétabli dans le camp ainsi qu’à l’extérieur et nous retrouvâmes notre calme tout en gardant une forte méfiance envers les habitants de Pampelune.
Ma sortie du camp
Les habitants de Pampelune fêtent de manière démesurée la Saint Firmin. Je me rappellerai toute ma vie le 8 juillet 1939. Il y avait à l’extérieur un grand Carnaval. Cette mascarade pénétra dans le camp et parvint jusqu’aux bureaux de la direction. Fêtards, soûleries dans la nuit, tous se voulaient les frères des prisonniers. Sur le moment j’eus la crainte, et je n’étais pas le seul, que notre dernière heure était venue. Le soir, il n’y eut pas de couvre-feu. Profitant d’un passe que l’un des prisonniers m’avait prêté je sortis du camp de concentration de la « Merced » par la porte. « Comme un oiseau qui fuit les éperviers qui le poursuivent ». Le 10 juillet 1939, je me retrouvai à nouveau en France à la recherche de ma famille.
EXTRAITS DE MEMOIRES SUR LA VIE D’ANTONIA FERNANDEZ SANCHEZ, COMPAGNE DE BALTHASAR MARTINEZ
(...) En 1928, j’arrive à la Ricamarie en provenance d’Espagne. Je vais alors me loger à Bayon, quartier où elle habitait. Quelques mois après mon arrivée nous faisons connaissance et tombons amoureux. Après quelques mois, notre amour grandissant, nous décidons de nous marier. La cérémonie a lieu le 26 juillet 1939 alors qu’elle avait 19 ans et moi 27. (...)
Tout va bien pour nous, mais depuis le 14 avril un évènement politique survient en Espagne, la proclamation de la mal-nommée République des travailleurs. Comme tous les exilés je retourne aussi en Espagne et toujours aux mines de charbon de Figols las Minas. Au début tout va bien. Mais comme il arrive souvent en Espagne et avec les espagnols, tout part bientôt à vau-l’eau : travail, organisation et politique.
Comme tout va mal, les charbons de Berga commencent à mener la vie dure aux ouvrier. Le 18 janvier 1932 se produit un soulèvement populaire subversif. Pendant 9 jours les mineurs sont maîtres de la situation et de tout le bassin minier. Comme le mouvement échoue, l’entreprise a les mains libres pour traiter les ouvriers à sa guise, en jetant 30 à la rue et en mutant 30 autres. (...)
De 1932 à 1936 il n’y avait à Figols aucun moment de repos social. L’entreprise arrive à l’extrême de ne plus payer les salaires qui sont dus. Les travailleurs se mettent alors en grève sur le tas à l’intérieur de la mine. La police, au service du patronat, malmène et pourchasse les ouvriers mettant en détention qui lui semble bon. Dans les maisons, la Guardia Civil multiplie les perquisitions sauvages. Pendant ces perquisitions, Antonia conserve sur elle tout ce qui peut être compromettant. (...)
Elle démontre sa force de rébellion lorsque nous, mineurs, nous enfermons dans la mine pour obliger l’entreprise à revenir sur sa position. A cette occasion, elle anime les groupes de femmes qui manifestent à l’extérieur jusqu’à ce que l’entreprise capitule.
Ainsi nous arrivons au 17 juillet 1936, jour où le fascisme espagnol se soulève contre la République. Une centurie se constitue alors à Figols pour aller se battre contre les fascistes sur le front des Asturies.
Elle reste seule, comme d’ailleurs toutes les compagnes de ceux qui s’étaient engagés, avec seulement une paye de 10 pesetas, somme allouée par le Gouvernement à tout volontaire qui prenait les armes pour aller combattre le fascisme. Au cours de nos divers accrochages avec les fascistes, nous perdons six mineurs. Le personnel de la mine est alors mobilisé à l’intérieur de la mine mais pour ma part je repars pour le front.
La vie devenant alors très difficile, les 10 pesetas étant largement insuffisants, Antonia comme d’autres femmes s’embauche au lavage du charbon. Courageuse, elle fait front sans faiblir aux difficultés extrêmes du moment : la charge de trois enfants dont l’aîné a six ans et ma vieille mère.
Fin 1938, le fascisme enfonce les lignes du front républicain et se répand dans toute la Catalogne comme les chevaux d’Attila. Début 1939 je me retrouve dans un camp de concentration à Pampelune (Navarre). De mon frère je n’ai aucune nouvelle. Je pense qu’il est mort. C’est au camp de Pampelune que j’apprends la mort de ma mère survenue le 13 avril 1939.
Quelques jours plus tard, accompagnée d’Augustine, elle se présente au camp de concentration de Pampelune pour me faire savoir qu’il ne fallait surtout pas demander la sortie pour Figols car c’était dangereux. D’autres déjà qui y étaient retournées y avaient laissé la vie.
Nous convenons alors :
1. Qu’à son retour à Figols, elle prenne les trois enfants et par tous les moyens possibles tente de rejoindre la France.
2. Que de mon côté, même au risque de ma vie, je tenterai par tous les moyens de m’évader du camp.
A son retour à Figols, en compagnie des trois enfants et d’une amie qui avait aussi deux filles, elle part et traversant les Pyrénées, elle se retrouve en Franc quelques jours plus tard.
De mon côté je ne peux m’évader que le 8 juillet 1939, jour de la Saint Firmin, qui est jour de fête, de beuveries et d’oubli pour tous les habitants de Pampelune. Après avoir erré pendant deux jours dans les montagnes de Roncevaux, je passe la frontière au dessus du poste de St Carlos. Sitôt en France, je suis pris par les gendarmes qui me conduisent au camp de Gurs où je suis inscrit au nom de Balthasar Fernandez Sanchez.
Depuis sa visite au camp de Pampelune, nous n’avions aucune nouvelle l’un de l’autre.
Là se présente une situation assez cocasse. Un jour le responsable du camp me demande mes papiers d’identité. Je lui dis que je n’en ai pas vu les circonstances de mon passage en France. « Peu importe, me dit-il, vous vous appelez Balthasar Fernandez Sanchez et un propriétaire vous réclame pour travailler en petite Gironde. » On me fait des documents officiels et direction Bordeaux où l’on s’aperçoit que le véritable Balthasar Fernandez Sanchez est déjà là, installé chez ce patron. Celui-ci m’emmène alors à la sous-préfecture de Langon, rencontre je-ne-sais-qui et me dit en sortant : « vous verrez, vous serez bien ». Le sous-préfet en personne m’emmène alors, en voiture, jusqu’à un camp de réfugiés qui se trouve à Langon même et s’appelle « Château Garros ».
De là j’écris, toujours sous un faux nom, à mon beau-père qui habitait à Entraigues sur Sorgue. Par retour de courrier il m’apprend que ma femme et mes enfants sont chez lui mais que les gendarmes ne cessent de la menacer à plusieurs reprises de la renvoyer en Espagne. Sans attendre ma réponse , elle prend alors les trois enfants et se présente à la porte du camp. Les gens, dans le camp, sont à la fois effarés et stupéfaits de voir le courage, l’imagination et la détermination dont elle avait fait preuve dans toutes ces circonstances.
Le responsable du camp de réfugiés, Mr Manuel Llinas, un homme estimable et bon, avait été chef des communications et téléphones de l’état républicain. Il me promet de faire le nécessaire auprès de la sous-préfecture, ce qu’il fait à temps pour me permettre d’aller vendanger chez Mr. Dubedac.
Quelques mois plus tard, je fais une demande d’embauche aux mines de la Béraudière et en Février 1940 je peux commencer à travailler. Elle reste à nouveau seule à Langon avec les trois enfants et enceinte du quatrième.
La compagnie minière m’attribue deux petites pièces et elle peut alors me rejoindre. (...)
FIN.
Balthasar Martinez
P.S.
La suite conte alors la guerre au cours de laquelle ils ont la chance de se retrouver en zone « libre », où il travaille dans un camp réservé aux Espagnols.
La famille restera ensuite en France jusqu’à nos jours.
Antonia Martinez est décédée en 1982.
Balthazar en 1988.
Pour compléter avantageusement cette lecture je ne saurais que trop vous conseiller la lecture d’« Hommage à la Catalogne » de George Orwell, celle de « Adresse aux libertaires du présent et du futur sur les capitulations de 1937 »
http://infokiosques.net/spip.php?article420 , par un « Incontrôlé de la Colonne de fer », et enfin « Les fils de la nuit. Souvenirs de la guerre d’Espagne », d’Antoine Gimenez et les giménologues.
Nadarlana
[1] Ce paragraphe est extrait d’une lettre de mise au point adressée à Fédérica Montsény suite à un article de Séverino Campos paru dans le journal « Espoir ».
[2] « Macouto y la manta », paquetage et couverture, correspond à l’expression « avec arme et bagage », qui n’est pas très indiqué ici.