Fonderies d’Hazebrouck. Leur patron n’avait pas entendu parler du droit de grève…Pour avoir fait grève contre le projet de loi travail, trois salariés d’une fonderie du Nord, syndiqués à la CGT, ont été menacés de licenciement. Face à l’ampleur du soutien, et à court d’argument, le patron a renoncé. Patrick, Pascal et Sébastien, plus déterminés que jamais à combattre le texte, sont prêts pour les manifestations de la rentrée.
Le 14 juin, Patrick Turpin et Sébastien Bernard sont parmi les centaines de milliers de personnes qui manifestent pacifiquement à Paris, entre la place d’Italie et les Invalides, contre le projet de loi El Khomri. Depuis le début du mouvement, le premier en est à quatre jours de grève, le second à trois. À chaque fois, il leur en coûte 75 euros. Pas négligeable sur leur salaire d’ouvriers aux Fonderies du Nord, à Hazebrouck, une PME d’une trentaine de salariés. Mais, « vu la gravité de la situation », ils ne se voient pas rester sans réagir devant les reculs sociaux que porte le projet de loi : « Si ça passe, ils pourront licencier à tout bout de champ », résume Sébastien. Pourtant, l’exercice de ce droit constitutionnel qu’est la grève a failli leur coûter beaucoup plus que quelques centaines d’euros en moins sur leur fiche de paie. Leur boulot, tout simplement. Le 31 mars, journée nationale de mobilisation intersyndicale, ils manifestent à Lille avec leur collègue Pascal Poiret. Dans le bus organisé au départ d’Hazebrouck, il y avait « des agents de l’hôpital, de la CAF (Caisse d’allocations familiales), des salariés d’une boîte d’espaces verts, quelques lycéens, des retraités… » se souviennent-ils. À Lille, ils se retrouvent derrière la banderole de l’union locale CGT dont ils dépendent, celle d’Armentières, avec un message clair : « Loi El Khomri, retrait immédiat. » De retour au travail, le lendemain matin, on leur demande de rentrer chez eux, avec une « convocation à entretien préalable à licenciement éventuel pour faute grave avec mise à pied conservatoire ». Dans ce courrier complètement délirant (lire l’encadré), le PDG leur reproche « une absence inopinée (…) qui désorganise gravement la production vitale » de l’entreprise. Le patron ajoute même n’avoir « connaissance d’aucun avis de grève ni au plan national ni au niveau de la branche professionnelle »…
« Les ouvriers ont des droits ! »
Patrick, militant CGT et conseiller du salarié, avait déjà fait grève, seul, sans jamais être inquiété. Est-ce parce que, ce 31 mars, Sébastien et Pascal, plus récemment syndiqués à la CGT, l’accompagnent pour la première fois que le patron a sorti le bazooka ? Les trois collègues ont en tout cas prévenu leur chef il y a plus d’une semaine. Ce qui leur a même valu diverses pressions. Deux jours avant la grève, « on a été convoqués tous les trois en même temps pour nous dire que si on faisait grève, ce serait une absence injustifiée, sanction lourde à la clé », raconte Patrick. Le 31 mars, contrairement à Sébastien, Patrick et Pascal travaillent le matin, ne se mettant en grève que l’après-midi. « On a été rappelés à deux pour nous dire que si on maintenait notre position, ce serait un licenciement immédiat », précise Sébastien, qui n’en démord pas : « Le patron a des droits, mais les ouvriers aussi ! »
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