On peut lire le manifeste des Weathermen
https://infokiosques.net/imprimersans2.php?id_article=432Un curieux groupe, né de la scission des Students for a Democratic Society - SDS, avec un mélange d'inspiration marxiste (mao) et de contre-culture de l'époque. Ainsi le nom Weathermen vient d'un texte de Dylan et le manifeste commence par une citation de Lin Piao. Parmi leur "faits d'armes", l'aide à l'évasion de prison de Timothy Leary, le "pape du psychédélisme".
J'ai traduit il y a longtemps un texte de David Gilbert, condamné à la prison à vie pour une attaque d'un transfert de fonds de la Brink en 1981 ou un employé fut tué lors de la fusillade. On doit retrouver l'original ici.
https://ia800306.us.archive.org/17/items/SdswuoStudentsForADemocraticSocietyTheWeatherUnderground/Sds-wuoByDavidGilbert.pdfSDS/WUO: Students for a Democratic Society et le Weather Underground
IntroductionNous étudions le passé pour tirer les enseignements qui nous aideront à libérer l’avenir. Les jeunes militants d’aujourd’hui sont à féliciter pour leur plus grand intérêt que celui de ma génération des années 1960 envers les mouvements du passé. Cependant, je veux vous mettre en garde contre deux erreurs caractéristiques inhérentes à une telle étude.
1) En nous référant à des révolutions victorieuses dans d’autres pays, nous appliquons mécaniquement ces enseignements venant de niveaux beaucoup plus avancés à notre propre niveau embryonnaire.
2) En nous référant aux luttes passées U.S nous considérons leurs erreurs principalement comme comme de fausses idées dans l’esprit des dirigeants de l’époque. Par conséquent, nous nous flattons implicitement d’être des individus remarquables, naturellement plus intelligents et au principes plus élevés. Cette approche sous-estime les forces matérielles – telles que l’ampleur de la suprématie blanche ou les pouvoirs répressifs de l’état – et produit la répétition des erreurs.
Cette brève histoire en deux parties n’est ni détaillée, ni définitive. Elle est écrite par un participant et un partisan, dans le but de contribuer aux luttes d’aujourd’hui..
Students for a Democratic SocietyLes U.S.A étaient secouées par des actions de multiples et tumultueuses actions de protestations dans les années 1960. Le SDS était l’organisation au coeur du mouvement radical parmi les étudiants à prédominance blanche. Il tirait sa vigueur spécifique de sa relation étroite avec le Student Nonviolent Coordinating Committee (SNCC), le groupe militant pour les droits civique constitué principalement de jeunes noirs et fournissant le travail de terrain le plus dangereux dans le Sud. Le SDS est aussi devenu le fer de lance du mouvement de masse contre la guerre du Vietnam en organisant la première manifestation nationale le 17/4/65. Jusqu’alors, il était impensable de critiquer "notre" politique internationale ; appeler à une telle manifestation était donc une initiative radicale et la venue de 20 000 personnes était impressionnante. L’organisation de cette manifestation a provoqué également la rupture définitive du SDS avec son organisation-mère, la League for Industrial Democracy, lorsqu’il résista à son ordre d’en exclure les communistes.
Le SDS, fondé en 1960, s’identifia d’abord à travers la Déclaration de Port Huron de 1962. Le concept central en était la démocratie participative : au-delà d’élire des dirigeants, les gens ont besoin de participer directement dans le débat et la prise de décisions qui affectent leur vie, y compris dans le domaine économique. Les questions centrales étaient le mouvement pour les droits civiques et la paix (l’opposition à la guerre froide et aux bombes nucléaire). Un premier travail fondateur du SDS, avec son alliance avec le SNCC, fut le Economic Research and Action Project (ERAP) . Des étudiants partirent vivre dans des communautés pauvres pour "construire un "mouvement inter-racial des pauvres.
Si le succès en fut limité, l’expérience fut riche.
SDS bourdonnait de la résonance de la jeunesse. La plupart d’entre nous rejetions à la fois la chasse aux rouges et le modèle soviétique de "socialisme" . Les drapeaux rouges (communistes) et noirs (anarchistes) flottaient côte à côtes lors de nos conventions . Et nous essayions d’appliquer la démocratie participative à notre propre organisation, avec des résultats mitigés. La remise en question de la hiérarchie était ressentie comme libératrice, même si elle était souvent chaotique et inefficace. Mais il existait le réel problème de "la tyrannie de l’absence de structures" où les décisions sont prises de manière informelle et par conséquent, sans contrôle démocratique.
L’escalade de la guerre du Vietnam et l’évolution spectaculaire du SNCC lors de l’été 1966, des droits civiques au Black power, posèrent de nouveaux défis et causèrent quelques tensions entre la vieille garde, engagée dans ERAP, et les nouveaux militants étudiants. Le SDS n’était pas préparé à la percée du mouvement contre la guerre mais a fourni une présence militante et radicale au sein d’une coalition beaucoup plus large. Le SDS définissait encore de façon naïve le système comme un "libéralisme d’entreprises" alors que nous luttions pour assembler notre impulsion anti-raciste et contre la guerre avec une critique économique.
L’impact fut électrique lorsque le Black Panther Party fit irruption sur la scène nationale à l’automne 1966. L’auto-défense armée de leur communauté envers la brutalité policière et leurs programmes d’aide (petits-déjeuners gratuits pour les écoliers, cliniques gratuites, écoles gratuites) représentaient un exemple vivant de nationalisme révolutionnaire et d’auto-détermination pour les opprimés. Plusieurs autres groupes nationalistes révolutionnaires, tous basés sur les enseignements de Malcolm X, émergèrent durant cette période. Au même moment furent publiées les premières photos d’enfants vietnamiens brûlés par les bombes au napalm U.S -- ce qui nous rendit fous dans notre envie d’arrêter la guerre. Le slogan du SDS devint "de la protestation à la résistance," avec l’accent mis sur la résistance au service militaire.
Pendant ce temps, le modèle du mouvement pour les droits civiques, le travail combatif et indispensable des femmes en son sein et les problèmes de sexisme à l’intérieur de la gauche, conduisirent tous à la renaissance du mouvement de libération des femmes. Un des premiers exemples en fut un groupe de travail exclusivement féminin lors de notre convention nationale de juin 1967.
Pendant ce temps, le modèle du mouvement pour les droits civiques, le travail combatif et indispensable des femmes en son sein et les problèmes de sexisme à l’intérieur de la gauche, conduisirent tous à la renaissance du mouvement de libération des femmes. Un des premiers exemples en fut un groupe de travail exclusivement féminin lors de notre convention nationale de juin 1967 (3).L’air était saturé de l’énergie et de la créativité que généraient les femmes. Mais leur rapport lors de la séance plénière fut accueilli par un chahut – sifflets et lancers d’avions en papier -- par beaucoup d’hommes du SDS. Etant donné qu’il n’existait que peu de luttes par le passé, il n’est pas surprenant que des hommes étaient encore très sexistes, mais une telle hostilité éhontée était choquante dans une organisation qui se flattait d’être toujours aux côtés des opprimés. Cette débâcle était un exemple des problèmes qui ont poussé beaucoup de femmes à quitter la "gauche" et qui ont contribué à créer une tension malheureuse entre l’anti-impérialisme et le féminisme, ayant pour résultat d’affaiblir les deux. Beaucoup de femmes intègres-- renforcées par les exemples souvent tus et le rôle moteur des femmes de couleur – ont continué à ce battre sur les deux fronts, mais cela a demandé des efforts dignes des amazones.
Une immense vague de luttes déferla en 1968, après la puissante offensive vietnamienne du Tet et le soulèvement de plus de 100 ghettos au U.S.A suite à l’assassinat de Martin Luther King, Jr.,. Ces évènements inspirèrent des grèves étudiantes menées par le SDS qui fermèrent de nombreuses universités Nous avions commencé à nommer et à analyser le système comme "impérialisme" Le slogan de Che Guevara "2, 3, beaucoup de Vietnam" indiquait comment un tel colosse pouvait être combattu et éventuellement vaincu. La rébellion noire était était accompagnée par les révoltes militantes des indiens, des Chicanos, des Porto Ricains et des asiatiques aux USA.
La réponse du gouvernement fut une campagne vicieuse de déstabilisation et de violence, appelée COINTELPRO pour programme de contre-insurrection (Voir Agents of Repression par Ward Churchill et Jim Vander Wall). Plus de 30 Panthers furent tués en 1968-71, et plus de 1 000 ont été emprisonnés . Beaucoup d’autres groupes et de militants furent également attaqués. Même si ce niveau de répression n’a généralement pas été utilisé contre des blancs, nous avons connu le harcèlement, les arrestations et la menace du service militaire en temps de guerre. Plus important, nous nous sommes identifiés aux Panthers et avons fait le serment d’être à leurs côtés. Même si le mouvement avait grandi rapidement, nous étions encore une petite minorité dans l’Amérique blanche. Nous avons commencé à penser que la seule chose dont nous avions besoin était de "secouer la conscience morale de l’Amérique." Nous nous trouvions confrontés au gouvernement le plus puissant de toute l’histoire.
Sous cette pression terrible, le SDS s’est scindé le long de la ligne de fracture qu’est la pierre angulaire de la suprématie blanche : entre le désir d’une majorité potentielle au sein des américains blancs et et le besoin urgent d’une solidarité militante envers les noirs et autres luttes du tiers-monde. Un côté (se réclamant du Marxisme Eurocentrique) prétendait que la révolution concernait la classe ouvrière et utilisait cela comme prétexte pour se retirer du combat aux côtés des Panthers et des vietnamiens, proclamant que "tout nationalisme est réactionnaire ." L’autre bord, (inspiré par les luttes marxistes dans le tiers-monde) considérait à juste titre la solidarité avec les mouvements de libération nationale comme une priorité pour tout mouvement révolutionnaire digne de ce nom. Cependant, nous avions abandonné à tort les efforts pour organiser un nombre significatif de blancs, ce qui avait limité notre base pour un militantisme anti-raciste.
Alors que la scission représentait l’expression d’un vrai dilemme, il y avait une possibilité – bien qu’elle aurait été certainement difficile à concrétiser – pour une base plus large et plus représentative de la classe ouvrière sans se plier aux traditions racistes des milieux syndicaux. Cette stratégie aurait exiger de s’adresser à la rébellion croissante de la jeunesse avec un projet politique anti-impérialiste , en même temps que de s’allier avec le mouvement émergent des femmes
Nous étions trop écrasés par les enjeux radicaux de la vie et de la mort, combinés avec notre propre inexpérience et faiblesse pour mettre en pratique une telle stratégie. Le SDS s’est scindé en 1969-70. Le résultat en fut des suites de formations qui reproduisaient plus ou moins le traditionnel opportunisme de la gauche blanche envers la classe ouvrière. Un autre résultat en fut la Weather Underground Organization, un groupe sans précédent, bien que sérieusement défectueux, qui mena six années d’actions armées en solidarité avec les luttes de libération nationales.
Weather Underground OrganizationDans une société où chaque film sans exception et chaque émission de TV montrait que le FBI "avait toujours son homme ," le Weather Underground a échappé à la capture et a continué l’action armée pendant six ans. Dans une Amérike de suprématie blanche où historiquement presque tous les mouvements radicaux prometteurs parmi les blancs (populisme, vote des femmes, syndicalisme) glissent dans la compromission avec le racisme, le WUO a été réputé, au moins à son meilleur, pour sa solidarité avec la libération nationale. Dans un monde où les gouvernements "légitimes" bombardent des villages et assassinent des militants , mais condamnent toute résistance armée comme "terroriste," le WUO a réalisé une vingtaine d’attentats à la bombe dirigée contre la violence gouvernementale et économique sans tuer quiconque ni égratigner un civil
Le tremplin pour cette évolution est le contexte historique. Les années 60 et 70 sont sans précédent dans l’histoire mondiale s’agissant du nombre de révolutions en un court laps de temps, alors que des mouvements de libération nationale en Asie, en Afrique et en Amérique Latine renversait le colonialisme et le néo-colonialisme; il y avait aussi une forte vague de luttes des noirs et tiers-mondistes aux USA . Ces faits incitèrent à un radicalisme croissant parmi les blancs. Le WUO ne fut pas formé comme une conspiration étriquée mais était plutôt un point de convergence au sein d’une montée plus vaste du militantisme contre la guerre, alors que des milliers de bâtiments de l’armée et de locaux de la Bank of America étaient incendiés et que des centaines de milliers de personnes rejoignaient des manifestations , cassaient les vitres des bâtiments officiels, perturbaient les réunions des grosses légumes et résistaient aux arrestations.
Des progrès passionnants ont coexisté avec de coûteuses erreurs au sein du Weather. La première et la plus visible d’entre elles survint durant les premiers six mois (de fin 69 au début 70), alors que nous agissions encore à découvert ; notre écœurante et inexcusable glorification de la violence, qui contredisait de façon flagrante le fondement humaniste de notre action politique et de notre militantisme. Nous avons ainsi donné des munitions à tous ceux qui souhaitaient discréditer notre priorité quant aux luttes du tiers-monde et notre évolution vers la lutte armée. Depuis ce jour, quasiment toute "l’histoire" au sujet du WUO représente la folie de ces six mois comme étant toute l’histoire, sans faire référence à notre correction de cette erreur ni aux six années suivantes d’action anti-impérialiste continue et humaniste.
Selon moi, les raisons profondes de nos aberrations du début sont à rechercher dans la crise qui a fait imploser le SDS. Nous étions des gosses de la classe moyenne blanche qui – témoins des des bombardements de saturation au Vietnam et du meurtre des Black Panthers que nous admirions-- se sont sentis obligés de franchir le pas vers la lutte armée. Au lieu de reconnaître nos craintes et notre inexpérience et de mettre en place une stratégie de transition viable, nous nous sommes préparés psychologiquement en glorifiant la violence et en nous lançant des défis machistes quant à notre courage personnel. Ce délire s’accompagnait d’erreurs inhérentes de base: 1) Le sectarisme – un mépris hargneux envers tous ceux qui n’aidaient pas directement la lutte armée ( le sectarisme était mutuel puisque la plupart de la gauche blanche cherchait activement à discréditer la lutte armée) 2) Le militarisme – mettant en avant les actions armées et les audaces du groupe au détriment des principes politiques et du besoin de construire un mouvement à tous les niveaux .
Les premiers péchés graves par commission du Weather étaient aveuglants. Les péchés par omission, qui ne sont même pas remarqués en règle générale, peuvent être encore plus mortels. La terrible passivité de la grande majorité de la gauche blanche envers les premières attaques contre les Panthers a envoyé au gouvernement le signal qu’il ne paierait pas le prix politique fort pour la mise en place sans retenue de sa campagne COINTELPRO qui a tué des douzaines de militants noirs, indiens et latinos et en a emprisonné des milliers d’autres.
Le militarisme du Weather a culminé le 6 mars 70 lorsqu’une tentative forcenée pour construire des bombes, incluant des armes anti-personnelles, a provoqué une explosion accidentelle dans une planque (connue sous le nom de Townhouse) qui a tué trois de nos jeunes camarades. Cette tragédie a déclenché un intense débat interne qui a débouché sur une évolution qualitative vers un usage plus approprié de la lutte armée pour aider à mobiliser et à radicaliser une base parmi la jeunesse blanche. Deux mois après, plus d’un million de jeunes gens envahirent les rues en réponse au meurtre par l’état de quatre manifestants contre la guerre à l’Université d’Etat du Kent et des grèves étudiantes se déclenchèrent sur près d’un millier de campus à travers les USA. Au même moment, le besoin criant d’une orientation anti-raciste se révéla de manière douloureuse à travers l’absence d’une réponse similaire lorsque la police tua deux étudiants noirs à Jackson State.
La guérison du WUO envers le militarisme n’a pas réglé par magie tous les problèmes . Tout en voyant à juste titre une base potentielle au sein de la culture de la jeunesse, nous avons répété les erreurs traditionnelles fondées sur la suprématie blanche. Par exemple: 1) notre faible aide matérielle aux groupe armés noirs, latinos et indiens (même dans la clandestinité, les blancs ont un plus grand accès à l’aide matérielle et sont confrontés à des dangers moindres de harcèlement policier); 2) Pour séduire la jeunesse blanche, nous avons soutenu les "drogues douces" (cannabis et LSD), sans évaluer l’utilisation des drogues comme une forme de guerre chimique contre les ghettos et les barrios; 3) Nous n’avons pas réussi à répondre aux critiques très constructives des Panthers 21 sur nos positions quant aux drogues et au militantisme.; 4) Il y eut par la suite des moments d’ inaction exécrable comme durant l’occupation indienne et le siège du gouvernement de Wounded Knee en 1973.
Il n’est pas étonnant que notre autre grande faiblesse interne était basée sur notre sexisme, hétérosexisme et classe. La participation des femmes et leur représentativité dans la direction étaient très élevées mais, dans la pratique, la femme devait faire partie d’un couple hétérosexuel pour parvenir au sommet de la direction.. Nous n’avions que peu de programmes concernant la libération des femmes et nous n’avons pas fait un sérieux effort pour établir la nécessaire alliance entre anti-impérialisme et féminisme. La lutte interne quant au sexisme était très insuffisante, et liée de facto à une culture homophobe. En même temps que beaucoup de camarades lesbiennes et gays trouvèrent la force de se déclarer dans la clandestinité, il n’existait pas de place réelle pour une culture lesbienne/gay affirmée ; ils n’avaient pas accès aux postes de direction; et nous n’avions pas de programme quant aux questions lesbiennes/gays. De la même façon, nos origines classes-moyennes firent que nous n’avons réalisé qu’un piètre travail pour intervenir davantage dans les secteurs de la jeunesse de la classe ouvrière
Nous avons connu aussi des problème inhérents à notre vie interne. Nous avons adopté la théorie du u centralisme démocratique, mais dans la pratique, l’organisation était très hiérarchisée. La direction avait tendance à devenir manipulatrice et autoritaire, en même temps que les cadres cherchaient à bien de se faire voir. La critique/auto-critique était utilisée comme moyen de compétition et de manoeuvre en vue du pouvoir plutôt que de manière constructive. Alors qu’une organisation forte était la clef de la survie (les fugitifs isolées connaissaient des situations pires), cette réalité faisait de l’ostracisme social une arme puissante contre la contestation politique. A ma connaissance, il n’existe toujours pas de modèle précis et qui a fait ses preuve de co-existence entre les deux impératifs que sont un processus interne pleinement démocratique et une discipline stricte nécessaire pour combattre un état impitoyable.
Selon moi, une leçon capitale est que les militants doivent combattre en toute conscience l’attraction puissante de l’ego qui peut nous conduire à mettre en avant nos propres opinions et notre leadership au détriment de l’intérêt et de l’auto-détermination des opprimés. Dans notre manière de nous organiser, nous devons nous efforcer de vivre nos relations inter-personnelles selon nos idéaux politiques -- anti-racisme, féminisme, démocratie, humanisme.
Malgré ces sérieuses faiblesses, six années de résultats impressionnants ont résulté de ce qui était approprié dans la lutte contre l’anti-impérialisme. Contrairement aux mystifications des films d’espionnage qui présentent tous des techniques et technologies sophistiquées, notre survie en clandestinité était basée sur le soutien populaire venant de la jeunesse radicale et du mouvement contre la guerre. Ils étaient la solution pour répondre aux besoins tels que papiers d’identité, argents et planques. Il y eut des moments où nous avons senti le souffle du FBI sur notre nuque mais le soutien populaire fit que l’ information ne parvenait pas à l’état mais, au contraire, circulait jusqu’à la guérilla.
Notre niveau de lutte était "la propagande armée" sans illusion sur nos capacités à contester pour le moment le pouvoir armé. Les objectifs des actions étaient : 1) de détourner une partie des actions répressives concentrées sur les mouvements noirs, latinos et indiens, 2) de créer un exemple politique dominant de solidarité entre les blancs et les mouvements de libération nationale, 3) d’éduquer sur des questions politiques clés, 4) de dénoncer les institutions les plus responsables de l’oppression et 5) d’encourager d’autres personnes à intensifier leur militantisme malgré la répression de l’état. Nous avons aussi fourni des exemples d’actions non-armées (par exemple le bombage à la peinture), le dialogue continu avec le mouvement non clandestin à travers l’écriture ou la lecture de réponses dans les journaux radicaux et nous avons même mis en place notre propre imprimerie clandestine. Nous avons écrit et publié le livre Prairie Fire , une présentation détaillée concernant la politique de l’anti-impérialisme révolutionnaire .
Le WUO revendique plus de 20 attentats à la bombe, comprenant celui du Capitole après l’escalade de la guerre en Indochine par les USA avec l’invasion du Laos en février 1971; celui des bâtiments administratives de la prison de l’État de New York après le massacre d’Attica de septembre 1971 et celui de la Kennecott Copper Company à l’occasion de l’anniversaire du coup d’état sanglant contre la démocratie au Chili en 1973. Chaque action était accompagné d’un communiqué réfléchi situant ces actions dans leur contexte politique. Même si il n’y avait pas 100% de garantie, notre priorité absolue était d’éviter d’atteindre des civils et nous y sommes heureusement parvenus.
Le FBI n’a jamais brisé le WUO, mais en 1976-77, nous avons implosé à cause de nos propres faiblesses La chute à été causée par le fait que nous soyons retombés dans les erreurs traditionnelles de la gauche blanche, avec la théorie de la "classe ouvrière internationale" et la confection d’un plan pour sortir de la clandestinité afin de jouer un rôle central dans la "conduite" de la "révolution américaine dans son ensemble". Ces orientations ne tenaient pas compte du rôle indépendant et dominant du peuple de couleur aux USA et , en même temps, concurrençaient les groupes autonomes de femmes. Lorsque ces mouvements nous critiquèrent vertement – du fait de notre vitalité sapée par le manque de démocratie interne – nous n’avons pas su y répondre et, au lieu de cela, nous déchirèrent à coups de violentes récriminations.
Le WUO est né à une époque de l’époustouflante apparition des mouvements de libération nationale en opposition aux principes de la suprématie blanche U.S. Et dans l’élan de victoires prometteuses, suivies d"une féroce répression gouvernementale. Notre mort prend aussi ses racines dans de nombreuses réalités historiques : 1) COINTELPRO (en lien avec des faiblesses internes) a décimé les directions du mouvement noir, indien et latino , qui avaient inspiré une évolution progressiste parmi les blancs; 2) notre base la plus puissante, le mouvement contre la guerre, s’est rétréci de manière drastique après le retrait US de 1973 du Vietnam ; 3) nous n’avions pas réalisé que nous n’avions pas suffisamment transformé cette sensibilité contre la guerre en un sentiment plus profond anti-raciste et anti-impérialiste.
En tirant les leçons de l’histoire, nous devons rompre avec la culture dominante qui définit les gens comme "entièrement gentils " ou "entièrement méchants" , qui peut conduire à l’illusion que appliquer certaines idées de base garantit que tout ce que nous faisons est juste. Le WUO a commis de gigantesques erreurs en même temps que des actes précurseurs . Espérons que les deux soient riches en leçons pour une nouvelle génération de militants .