(article pour le P'tit Noir n°5)
A l’aube de la création officielle du « parti de Besancenot » comme l’appelle la presse officielle et au lendemain de la dissolution d’une des trois grandes organisation trotskiste Française , la Ligue Communiste Révolutionnaire , nous pouvons nous poser la question suivante : Que reste–t-il du trotskisme dans l’hexagone et où en est-il ?
La seule formation qui s’en réclame bien que camouflée derrière son nouveau POI (Parti Ouvrier Indépendant) est le CCI (Comité Communiste Internationaliste) dirigé par Daniel Gluckstein dauphin du défunt
Pierre Lambert qui avait régné sur son petit parti et l’ internationale annexée en maître absolu depuis environ 50 ans.
Aujourd’hui le CCI développe une politique « national trotskiste » avec comme cheval de bataille quasi exclusif la lutte contre l’union européenne. Le CCI et son antenne restent cependant plutôt discrets dans leur impact sur la vie politique française malgré 10000 adhérents annoncées pour leur POI. Mais leur réputation justifiée de secte ne leur permettra sans doute pas de dépasser un seuil nécessaire pour devenir un véritable acteur de la vie politique ni en France et encore moins ailleurs.
Vient ensuite Lutte Ouvrière qui depuis sa formation s’est toujours tenue légèrement à distance du trotskisme orthodoxe.
Sa position axée depuis de nombreuses années sur une stratégie électorale la fait glisser sur la pente douce des alliances jusqu’à l’amener à appeler sans équivoque à voter Ségolène Royal au deuxième tour des dernières présidentielles. L’espoir non avoué d’obtenir en échange un strapontin gouvernemental en cas de victoire de la gauche n’y était sans doute pas étranger. Cette position leur a valu une scission de plus : celle du groupe « ARS-Combat » aujourd’hui orphelin.
La stratégie opportuniste de LO s’accompagne de la traditionnelle politique ouvriériste dans la forme : Il reste de bon ton de « faire ouvrier » puisque c’est lui qui sauvera, derrière son indispensable avant-garde , l’humanité toute entière. LO reste fidèle à la bonne vieille tradition marxiste et on ne change pas une icône du jour au lendemain : Nathalie Arthaud nouvelle porte-parole de LO ressemble à sa grande sœur Arlette comme deux gouttes d’eau. Pour ce qui est du fond, les énormités d’analyse de la direction de Lutte Ouvrière valent leur pesant de cacahuètes. Citons parmi elles le fait que LO considère toujours le gouvernement de Vladimir Poutine comme un gouvernement « ouvrier ».
Reste enfin feu la LCR et son projet de Nouveau Parti Anticapitaliste supposé rassembler largement les anticapitalistes. Le NPA totaliserait aujourd’hui environ 7000 cartes.
Le trotskisme y est passé officiellement plutôt à la trappe et, il n’y est plus question de centralisme démocratique mais une sorte de fédéralisme hybride associé à une direction nationale élue par les délégués des comités locaux et dont les pouvoirs des uns et des autres restent pour le moment assez flous.
L’abandon des grands principes du trotskisme par le NPA issu de la LCR n’est bien sur pas du goût des nombreux groupes et groupuscules pour la plupart exclus du courant lambertiste qui souhaiterait se placer le plus haut possible à la direction du nouveau parti pour défendre une position « bolchevique ».
Citons parmi eux le CRI très prolixe, tous les groupuscules issus de l’exclusion du lambertiste Stéphane Just, mais aussi le groupe « la commune » et bien d’autres encore dont les leaders sont de politiciens aguerris à tous points de vue. Tout ceci annonce une belle pagaille en perspective pour les luttes de directions.
D’ores et déjà la direction provisoire nationale du CAN se met sur ces gardes et donne des avis défavorables à l’intégration de certains membres de ces groupes dans les comités locaux NPA, ce qui bien sur est à l’origine de dissensions.
Voilà donc en très gros l’état du mouvement trotskiste en France ou ce qu’il en reste.
Bien sur nombre de militants de ces organisations sont des personnes sincères qui cherchent une issue à la situation de crise grave que nous vivons.
Nous devons, les libertaires et les anarchistes, être capables d’apporter des réponses claires et former le pôle attractif qui sera nécessaire le moment où un grand nombre d’entre eux s’apercevront que la centralisation aussi bien organisationnelle que le projet transitoire étatique propre aux trotskistes ne mènent qu’à une impasse comme l’histoire l’a déjà montré à maintes reprises.
L’organisation à la base , le fédéralisme , la démocratie directe, l’autogestion généralisée, principes anarchistes et libertaires, devront alors être défendus suffisamment fort pour que tout évolue positivement.
22 Janvier 2009