Mitraillage d’un bus et prise d’otages
Aqmi s’attaque au bassin gazier d’In Amenas le 17.01.13 | 10h00 
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Tôt dans la matinée d’hier, un groupe de terroristes a pris en otage les travailleurs de Sonatrach, de British Petroleum et de Statoil, alors qu’ils se trouvaient dans leur base-vie située à Tigantourine, à 40 km d’In Amenas, dans la wilaya d’Illizi. Les terroristes d’Aqmi avaient auparavant attaqué un bus, faisant plusieurs morts et blessés. Parmi les otages se trouvent des Américains, Britanniques, Français, Norvégiens et Japonais. Le groupe d’Aqmi, tout en demandant la libération d’une centaine d’islamistes, tentait hier soir d’exfiltrer les otages d’Algérie.
Les assaillants ont pénétré sur les lieux après avoir attaqué un bus transportant les employés, faisant deux morts – un Britannique et un agent de sécurité – et six blessés – deux autres étrangers, deux gendarmes et deux agents de sécurité. Parmi les otages se trouvent des Américains, des Britanniques, des Français, des Norvégiens et des Japonais.
En fin de journée, dans un communiqué officiel repris par l’APS, le wali d’Illizi annonçait la libération de travailleurs algériens
«par petits groupes», sans pour autant révéler leur nombre. Il a précisé :
«Le groupe terroriste retient encore des otages, dont des ressortissants norvégiens, français, américains, britanniques et japonais», sans pour autant donner leur nombre exact.
Selon l’AFP qui cite le PDG de la société française CIS Catering (hôtellerie logistique), 150 employés étaient toujours retenus sur le site gazier de BP.
«J’ai 150 employés algériens qui sont laissés en liberté sur la base, contrairement aux otages étrangers qui sont, eux, bloqués dans un coin et ne peuvent pas bouger, mais ils (les employés algériens, ndlr) n’ont pas le droit de quitter la base», a précisé M. Arnoux, PDG de CIS Catering. Interrogé sur une possible libération de ces personnes, le PDG de CIS Catering, une société spécialisée dans l’hébergement et la restauration des salariés sur des sites isolés, a poursuivi :
«Je pense que si mes collaborateurs algériens avaient été autorisés à quitter la base, je le saurais». En fait, tôt dans la matinée, un groupe de terroristes armés a investi la base-vie de Tigantourine, située à une quarantaine de kilomètres d’In Amenas, de Sonatrach, British Petroleum et Statoil, et pris en otage l’ensemble des travailleurs s’y trouvant, dont plusieurs sont des expatriés, notamment des Norvégiens, Américains, Britanniques, Français et Japonais.
Que s’est-il donc passé ?
Officiellement, le communiqué du ministère de l’Intérieur, diffusé par l’APS, avance la thèse suivante :
«Un groupe de terroristes, fortement armé, arrivé à bord de trois véhicules, a investi, mercredi à 5h, la base-vie de Sonatrach à Tigantourine, à proximité d’In Amenas, à une centaine de kilomètres de la frontière algéro-libyenne. L’attaque a porté d’abord sur un bus qui quittait cette base, transportant des étrangers vers l’aéroport d’In Amenas. Un ressortissant étranger est décédé lors de cette attaque, qui a été repoussée par les unités d’escorte, alors que six personnes (deux étrangers, deux gendarmes et deux agents de sécurité) ont été blessées. Le bus transportant les personnes blessées est arrivé à In Amenas. Les victimes ont été prises en charge par les autorités locales.» Quelques heures plus tard, alors que les plus folles rumeurs sur la prise d’otages circulaient, un autre communiqué du ministère de l’Intérieur annonçait la mort d’une deuxième personne, un Britannique :
«Cette victime porte à deux le nombre de morts, suite à l’attentat terroriste mené dans une installation de traitement de gaz exploitée par Sonatrach avec des compagnies étrangères, British Petroleum et Statoil, sur ce site de Tigantourine, à 40 km d’In Amenas. Six personnes ont été blessées (deux étrangers, deux gendarmes et deux agents de sécurité) et admises à l’hôpital d’In Amenas. L’attaque a porté sur un bus qui quittait cette base transportant des étrangers vers l’aéroport d’In Amenas. Le groupe terroriste, après cette tentative avortée, s’est dirigé vers la base-vie dont il a investi une partie et y a pris en otage un nombre indéterminé de travailleurs, dont des étrangers. Les forces de l’Armée nationale populaire (ANP) et des services de sécurité sont arrivées sur les lieux et ont pris aussitôt toutes les mesures afin de sécuriser la région et trouver un dénouement rapide à cette situation, qui reste suivie de très près par les autorités du pays.» Et de noter qu’une cellule de crise, présidée par le wali d’Illizi, Mohamed Laïd Khelfi, regroupant les représentants des services de sécurité, a été installée, alors que
«le pompage du gaz a été arrêté au niveau de ce complexe suite à cette agression terroriste». En fait, selon des sources locales jointes par téléphone,
«tôt dans la matinée d’hier, entre 4h30 et 5h, une colonne d’une dizaine de pick-up, transportant de nombreux hommes armés et enturbannés, se dirigeait vers la base-vie de Tigantourine, à 40 km d’In Amenas, où étaient hébergés de nombreux travailleurs de la base pétrolière exploitée par Sonatrach, Statoil et British Petroleum. Le hasard a fait qu’un bus transportant des expatriés sortait de cette base pour se diriger vers l’aéroport. Les premiers à réagir ont été les agents de sécurité qui ont usé de leurs armes. Une patrouille de gendarmes qui n’était pas loin est arrivée rapidement et s’est accrochée avec les assaillants, qui se sont dispersés. Bilan : deux morts et six blessés sur le coup, dont des gendarmes, des agents de sécurité et des étrangers. A ce moment précis, personne ne savait que les terroristes n’avaient pas pris la fuite, mais s’étaient scindés en deux groupes ; l’un s’est dirigé vers la plateforme de traitement de gaz et l’autre vers la base-vie pour accomplir la mission pour laquelle ils étaient venus, à savoir prendre en otage le plus grand nombre de ressortissants étrangers».Nos sources précisent que la rapidité de l’alerte a permis aux éléments de l’ANP d’arriver sur les deux points. Ce qui a empêché les terroristes de quitter les lieux avec les otages, dont le plus grand nombre est captif au niveau de la base-vie.
Tous les étrangers placés dans des lieux sécurisés Jusqu’en fin de journée, aucune information sur le nombre d’otages n’avait filtré.
«Nous sommes en train de vérifier qui était sur place. Il est difficile de connaître les présents et les absents parce que, souvent, les travailleurs sont sur le terrain à des dizaines, voire des centaines de kilomètres», nous a expliqué un travailleur de cette base en milieu d’après-midi, qui était au moment des faits présent à Illizi.
Notre interlocuteur affirme que les preneurs d’otages, ayant un accent algéro-libyen, menacent de faire exploser la base si jamais leurs revendications ne sont pas concrétisées.
«Nous ne savons pas ce qu’ils veulent au juste. Certains disent qu’ils veulent partir avec les otages, d’autres prétendent qu’ils veulent quitter l’Algérie en toute quiétude. Mais rien d’officiel. Le plus important, pour l’instant, est de les convaincre de libérer les otages, seul gage de leur survie», indique notre source, qui espère un dénouement rapide de cette affaire qui a eu pour conséquence l’isolement total des structures de communication et de transport aérien de la région.
Tous les étrangers se trouvant à In Amenas et ses environs ont été contactés pour être placés dans des lieux sécurisés. En fin de journée, dans un communiqué diffusé par deux sites islamistes mauritaniens, «un porte-parole» d’un groupe, présenté comme étant l’auteur de la prise d’otages, fait état de «41 ressortissants occidentaux, dont 7 Américains, des Français, des Britanniques et des Japonais».
Le communiqué précise que
«5 otages sont retenus dans l’usine alors que les 36 autres se trouvent sur un site d’hébergement» et explique que l’opération terroriste a été organisée «en réaction à l’ingérence flagrante de l’Algérie autorisant l’usage de son espace aérien par l’aviation française pour mener des raids contre le nord du Mali (…), une trahison du sang des martyrs algériens tombés sous les balle du colon français». Il est également souligné que ce groupe a été récemment créé par Mokhtar Belmoktar.
Quel crédit peut-on donner à ce communiqué difficile à authentifier ? Impossible d’y répondre. Ce qui est par contre certain, c’est que les assaillants sont entrés de la frontière libyenne, située à moins de 80 km du lieu du rapt. Des informations faisaient état, il y a quelques jours, d’une incursion d’éléments suspects venant de Libye.
Ce qui a suscité la mise en place d’un nouveau dispositif de sécurité par l’ANP, aux alentours des plateformes pétrolières et des bases-vie hébergeant les expatriés. Un dispositif qui a permis de riposter rapidement à l’attaque en étant sur les lieux avant que les terroristes ne s’enfuient avec les otages étrangers, d’autant qu’ils avaient suffisamment de véhicules pour transporter au moins une vingtaine de passagers.
Les ravisseurs veulent la libération d’islamistes : Les ravisseurs qui affirment retenir en otage une quarantaine de ressortissants étrangers sur un site gazier du Sahara algérien réclament la libération de 100 islamistes détenus dans ce pays avant de relâcher leurs otages, a indiqué hier à l’AFP un employé du site ayant requis l’anonymat.
«Les ravisseurs réclament la libération de 100 terroristes détenus en Algérie pour relâcher leurs otages», a-t-il déclaré par téléphone. «Les assaillants ont exigé que ces islamistes soient conduits dans la région du Nord-Mali», a ajouté cette source, présente sur le site et témoin de la prise d’otages. AFP
Salima Tlemçani