Le syndicalisme peut-il se suffir à lui-même ?

Re: Le syndicalisme peut-il se suffir à lui-même ?

Messagede berneri » 30 Nov 2011, 00:00

Je suis assez endesaccord avec tout le monde sur les derniers échanges.
Oui je pense que les recettes miracles et les explications historiques simplistes pour justifier sa position comme suele valable ( j'adore le passage sur la cfdt dans les rappels historiques de p'timat),bref que tout cela n'est pas la bonne voie.
En revanche je suis plutot proche des camarades du CSR sur la necessité de construire des organisaions de masse et perennes, les luttes de coordination ou d'indignés spontanée peuvent obtenir momentanément des victoires mais sans organisation pour les defendre ensuite quotidiennement tout ce qui est acquis est vite reperdus, de plus sans organisation collectives et experimentations sociales de masses comment mettre en oeuvre une alternative sociale, une revolution? L'adhésion à la révolution ne se fait pas comme l'adhésion à une religion... ce n'est pas un arrière monde, un paradis pour l'après mort... on dhère aussi à la perspective d'une revolution dans sa possibilité à être mise en oeuvre, sur un projet , du concret et pas seulement sur des aspirations romantiques...
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Re: Le syndicalisme peut-il se suffir à lui-même ?

Messagede SchwàrzLucks » 30 Nov 2011, 00:36

berneri a écrit:Je suis assez endesaccord avec tout le monde sur les derniers échanges.
Oui je pense que les recettes miracles et les explications historiques simplistes pour justifier sa position comme suele valable ( j'adore le passage sur la cfdt dans les rappels historiques de p'timat),bref que tout cela n'est pas la bonne voie.
En revanche je suis plutot proche des camarades du CSR sur la necessité de construire des organisaions de masse et perennes, les luttes de coordination ou d'indignés spontanée peuvent obtenir momentanément des victoires mais sans organisation pour les defendre ensuite quotidiennement tout ce qui est acquis est vite reperdus, de plus sans organisation collectives et experimentations sociales de masses comment mettre en oeuvre une alternative sociale, une revolution? L'adhésion à la révolution ne se fait pas comme l'adhésion à une religion... ce n'est pas un arrière monde, un paradis pour l'après mort... on dhère aussi à la perspective d'une revolution dans sa possibilité à être mise en oeuvre, sur un projet , du concret et pas seulement sur des aspirations romantiques...


Je suis d'accord avec toi là-dessus. Mais est-ce que organisation de masse pérenne signifie forcément "syndicat" ? Qui plus est, et c'est aussi ça qui me pose problème, le terme de "syndicat", s'il a pu, à une époque, représenter une organisation forcément révolutionnaire, ce n'est plus le cas aujourd'hui. Aujourd'hui les syndicats en France sont quasiment tous construits du haut vers le bas (CNT-f mis à part - je parle bien sûr du syndicat dans son ensemble, pas des perspectives d'auto-organisation à la base possibles au sein de plus ou moins tous les syndicats). Si l'on y ajoute le faible taux de syndicalisation...

D'où ma préférence pour les "conseils ouvriers" ou "assemblées générales" ou ce que vous voulez, mais pas des conseils juste le temps d'une situation insurrectionnelle, des conseils/assemblées clairement et durablement organisés et liés entre eux (fédéralisme et tout le tralala), à la fois pour les luttes revendicatives et pour la révolution un jour (sans oublier les activités connexes, culturelles, etc.). Qui plus est, à mon sens l'assemblée ne demande pas une adhésion comme ce peut être le cas pour les syndicats et c'est à mon avis l'expression même de l'unité de la classe exploitée, de son autonomie, du "front unique" à la base comme le prônent notamment les CSR. (je suis bien moins d'accord sur le "front unique" des centrales syndicales ou le "front unique" avec les partis, etc.) Pour certains, ce que je décris s'apparente peut-être ni plus ni moins à du syndicalisme révolutionnaire, mais je préfère parler de la formation d'un contre-pouvoir des conseils/assemblées/soviets/etc. face au pouvoir bourgeois, contre-pouvoir amené à détruire le pouvoir bourgeois à terme.

Après, intervenir dans les syndicats pour porter ce genre de discours et amener à l'auto-organisation à la base, je n'y vois aucun inconvénient.
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Re: Le syndicalisme peut-il se suffir à lui-même ?

Messagede Béatrice » 30 Nov 2011, 01:50

SchwàrzLucks a écrit:. Mais est-ce que organisation de masse pérenne signifie forcément "syndicat" ? Qui plus est, et c'est aussi ça qui me pose problème, le terme de "syndicat", s'il a pu, à une époque, représenter une organisation forcément révolutionnaire, ce n'est plus le cas aujourd'hui. Aujourd'hui les syndicats en France sont quasiment tous construits du haut vers le bas (CNT-f mis à part) et c'est presque la même chose pour les syndicats se revendiquant de la révolution. Si l'on y ajoute le faible taux de syndicalisation...


Bien d'accord avec toi sur le constat , l'abandon progressif du libre arbitre des salariés dans la défense des intérêts collectifs en déférant ceux-ci à une représentativité
syndicale , a participé à l'instauration d'une bureaucratie écrasante qui ramène le syndicat à l'équivalence d'un deuxième état dans l'état , toute proportion gardée
bien entendu . Mais je reste convaincue , que c'est dans la réappropriation des salariés eux-mêmes de leurs propres intérêts collectifs à défendre que la tendance
peut s'inverser . Le contexte actuel s'y prête , compte-tenu de toutes les attaques qui s'acharnent sur l'ensemble du monde du travail dans son ensemble avec
extinction progressive de tous les acquis qui furent obtenus au prix de longues et très dures luttes . La désagrégation rapide du tissu social ne peut qu'impulser
un sursaut général ( enfin , je l'espère mais comment peut-il en être autrement ?

SchwàrzLucks a écrit:D'où ma préférence pour les "conseils ouvriers" ou "assemblées générales" ou ce que vous voulez, mais pas des conseils juste le temps d'une situation insurrectionnelle, des conseils/assemblées clairement et durablement organisés et liés entre eux (fédéralisme et tout le tralala), à la fois pour les luttes revendicatives et pour la révolution un jour (sans oublier les activités connexes, culturelles, etc.).



Alors là , je ne sais quelle forme pourrait prendre la nécessaire articulation entre le monde du travail et toutes celles et ceux qui en sont exclus ou retraités étudiants et
autres : " laissés pour comptes " mais il me paraît évident qu'elle soit indispensable .

SchwàrzLucks a écrit:Après, intervenir dans les syndicats pour porter ce genre de discours et amener à l'auto-organisation à la base, je n'y vois aucun inconvénient.



Alors là aussi , j'en suis également entièrement convaincue : lorsque les conditions sont réunies : revendication portée par le plus grand nombre , l'émulation collective
est propice à l'auto-organisation ( j'en atteste pour en avoir vécu l'expérience au sein d'une " grosse " collectivité territoriale ) .
« Simple, forte, aimant l'art et l'idéal, brave et libre aussi, la femme de demain ne voudra ni dominer, ni être dominée. »
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Re: Le syndicalisme peut-il se suffir à lui-même ?

Messagede Pïérô » 04 Déc 2011, 11:37

SchwàrzLucks ne me convainc pas sur le fait qu'il pourrait exister d'autres formes d'organisation pérène que le syndicat dans ce domaine d'organisation collective, car L'auto-organisation, les AG interpro, etc...se créent pendant les luttes et disparaissent rapidement ensuite. Il y a pour moi bien nécessité de developper du syndicat, mais je n'en parle pas en cadre général car je pense que c'est bien le syndicalisme de lutte et de transformation sociale qu'il faut construire et développer (SUDs, CNT). Ensuite c'est plutôt dans la question de l'articulation entre ces espaces pérènes et l'auto-organisation qu'il nous faut participer à construire aussi pendant les luttes qu'il y a un enjeu en terme de construction d'un mouvement social à la hauteur, et évidemment aussi en terme de coordination pour contourner l'apathie de l'intersyndicale nationale.
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Re: Le syndicalisme peut-il se suffir à lui-même ?

Messagede anouchka » 10 Déc 2011, 22:12

La question que je me pose depuis le mouvement contre la réforme des retraites est: comment contrer certaines manoeuvres syndicales?
Car si une opportunité comme celle que je décris ci dessous devait se reproduire, évidemment nous la saisirions, mais être avertis des magouilles possibles ce n'est pas suffisant pour les contrer...

donc si quelqu'un a une idée sur la question, ou mieux, si quelqu'un a déjà réussi à surmonter un problème du même genre?

Je voudrais donc revenir sur le mouvement des retraites, sous l'angle des "débordements" (blocages en particulier) qui ont suscité tant d'espoir chez les libertaires. Je ne trahirai aucun secret stratégique qui pourrait servir à la police, ces infos ont largement circulé et sont maintenant "officielles", mais d'une part vous n'en avez pas forcément entendu parler, et je voudrais vous livrer le point de vue d'une anarchiste qui y a été mêlée de près.
En effet nous sommes tous d'accord pour déplorer les manifs "kermesses", les grèves d'une journée avec service minimum garanti...Îl était donc normal que le groupe d'Ivry se précipite pour participer au blocage de la TIRU, à Ivry. Une lutte indéniablement en rapport avec la lutte des classes (une obsession pour le groupe), qui semblait déborder les schémas traditionnels, qui continuait après la fin officielle du mouvement, et surtout qui faisait appel à soutiens extérieurs.
Nous avons décidé d'y passer un max de temps, surtout la nuit, car les soutiens étant plus rares on pensait que l'occasion serait meilleure pour nouer des liens avec les grévistes.
Première surprise, AUCUN gréviste de la TIRU (il semble qu'on ne leur ait même jamais fait de proposition pour participer au piquet). Les grévistes n'étaient même pas d'Ivry, c'étaient des syndicalistes, majoritairement des délégués (CGT nettoyage de la ville de Paris). Les soutiens (en dehors de quelques voisins) étaient également presque tous délégués. Les jours ou nuits de fêtes il y avait pas mal de monde, mais le reste du temps il y avait une vingtaine de personnes, une dizaine passé minuit. Les contacts étaient chaleureux, mais nous avions le sentiment que beaucoup de choses nous échappaient. Il y avait clairement une volonté d'empêcher que cette action prenne de l'ampleur, qu'elle échappe aux délégués syndicaux qui en étaient les initiateurs.
- Les grévistes répétaient que leur motivation était la défense des retraites, le retrait de la loi, etc. Pour nous militants révolutionnaires anarchistes, ce n'était bien sûr pas un mot d'ordre très intéressant (notre slogan préféré était "la retraite à vingt ans pour baiser il faut du temps"), mais au moins ça semblait partir d'une volonté de solidarité, d'unité, de dépassement des corporatismes...
Et puis un matin on a appris que tout s'arrêtait, sur la promesse de primes et recalculs de droits, revendications purement catégorielles dont il n'avait jamais été question tant que les grévistes parisiens (trop peu nombreux pour tenir seuls un piquet) avaient besoin d'aide extérieure... déjà, l'impression très nette de s'être fait rouler dans la farine.
Dès le début, une question évidente. Ce piquet de grève n'aurait pu résister cinq minutes si la police avait décidé de le dégager. Pourquoi alors l'avoir laissé durer plusieurs semaines? (je n'ai aucune réponse à cette question, je me la pose encore aujourd'hui).
Ci dessous, un texte de Peter Vener qui rejoint ces interrogations, qui dépassent largement le cadre de ce blocage en particulier.
Je précise encore (puisque le groupe d'Ivry vient de faire un débat sur le sujet avec des copains anars qui y ont participé en tant que grévistes) que le cas de la TIRU de St Ouen est différent. Les employés communaux étaient en grève depuis le début du mouvement, et constatant que cette grève était inefficace, ils cherchaient d'autres moyens d'action. Une de ces grévistes de St Ouen est venue voir le piquet de grève d'Ivry et a ramené l'idée de bloquer la TIRU de St Ouen. Donc à St Ouen les grévistes étaient des locaux, syndiqués ou non, qui agissaient spontanément. C'est seulement après coup que les syndicats sont intervenus pour faire pression afin qu'ils arrêtent le blocage (qui s'est poursuivi quelques jours après l'arrêt du blocage à Ivry).
Le lien avec "l'idéologie du blocage" de Peter Vener (lisez-le, d'accord ou non, c'est intéressant):
http://reposito.internetdown.org/analyses/oil.pdf
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Re: Le syndicalisme peut-il se suffir à lui-même ?

Messagede anouchka » 10 Déc 2011, 22:16

et à la même époque, le groupe d'Ivry a tenté les AG interpro (à la bourse du travail).
petit compte rendu à l'époque:
Nous sommes allés à une réunion (dans un bar face à la bourse du
travail) et des AG interpro (dans une salle de la Bourse du travail).
La réunion:
Positif; trois personnes intéressantes avec lesquelles nous avons eu des
échanges:
N., une jeune femme qui n'appartient apparemment à aucun syndicat, ni
parti ni organisation (elle a adhéré à ce mouvement interpro pour "tenter
de continuer la lutte malgré son syndicat")<.
Un jeune homme qui a reconnu nos voix (il écoute notre émission), qui a
parlé du piquet de grève de la TIRU et du sentiment "d'arnaque syndicale"
qui lui reste de cette expérience. Ayant nous mêmes passé plusieurs nuits
sur ce piquet de grève, nous avons eu la même impression et
avons pris la parole (pendant l'AG) pour en parler.
Enfin, un adhérent de SUD rail très remonté contre les syndicats (y
compris le sien...); quand on a balancé notre pedigree il a déclaré qu'il
venait justement de lire un bouquin de Bakounine.
Pour le reste, lors des AG (dont on pourra envoyer le compte rendu quand
N. l'aura rédigé), il y avait entre trente et quarante personnes. Entre les
trotskystes venus faire de la propagande, un gars du CCI qui distribuait des tracts, cégétiste venue défendre son syndicat... d'autres orgas - PC, trotskistes - étaient
également présentes et roulaient chacune pour leur boutique, de façon
carrément offensive, d'autres espéraient créer un nouveau syndicat, sans
compter quelques individus un peu à côté de leurs pompes... il n'en est pas
sorti grand chose.
Par exemple, quand il a été question "d'envoyer quelqu'un pour nous
représenter lors d'une AG nationale", quasiment tout le monde est tombé
d'accord: qui, dans une assemblée aussi disparate, pourrait se prétendre
représentatif?
Quant à défiler ensemble dans les manifs, problème: presque tous
appartenaient déjà à une organisation.
Pas si évident non plus de coordonner des actions éparses, qui plus est
devenues de plus en plus rares.
Nous avons quand même donné notre mail pour être tenus au courant de leurs
activités et n'excluons pas d'y retourner.
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Re: Le syndicalisme peut-il se suffir à lui-même ?

Messagede berneri » 11 Déc 2011, 12:34

Les grévistes répétaient que leur motivation était la défense des retraites, le retrait de la loi, etc. Pour nous militants révolutionnaires anarchistes, ce n'était bien sûr pas un mot d'ordre très intéressant (notre slogan préféré était "la retraite à vingt ans pour baiser il faut du temps"), mais au moins ça semblait partir d'une volonté de solidarité, d'unité, de dépassement des corporatismes...


Je ne vois pas comment on construit un projet de société libertaire à partir du mot d'ordre "la retraite à vingt ans pour baiser il faut du temps" ... c'est un peu du situationisme ultra gauche ... le problème c'est que quand on ne sait pas gagné une miette on voit mal comment on va etre credible pour gagner la baguette et encore moins pour autogérer la boulangerie ....


Trêve de plaisanterie : le problème que tu soulèves est que sur les piquets il y a un décalage entre des militants pour laquelle la lutte en cours et les revendications sont importantes et celles et ceux qui viennent les rejoindre en espérant que spontanément ça va devenir un mouvement révolutionnaire et qui ne trouvent pas intéressant les revendications qui ne vont pas dans le sens de leur romantisme révolutionnaire. Ce sont les travailleurs qui feront la revolution, pas les doux reveurs

Je pense qu'il faut commencer par abandonner cette forme de romantisme rvolutionnaire et comprendre que s'organiser n'est pas une contrainte qui prive l'individu de ses moyens critiques et de discernement. Il faut cesser le spontanéisme juvénile qui produit de l'inconséquence et de la faiblesse. Pour vraiment changer la société nous avons besoin d'etre organisé(e)s et les quelques décennies dernières ont fait l'éloge de l'individualisme à tout crin, les "rebelles" contre les organistions politiques ou syndicales ne voient pas qu'ils sont le pur produit de la société capitaliste individualiste et qu'ainsi ils contribuent à affaiblir la resistance aux politiques capitalistes.
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Re: Le syndicalisme peut-il se suffir à lui-même ?

Messagede anouchka » 11 Déc 2011, 14:13

Relis bien mon compte rendu, je n'ai pas posé le problème en ces termes, propositions révolutionnaires contre revendications immédiates:

Il y avait clairement une volonté d'empêcher que cette action prenne de l'ampleur, qu'elle échappe aux délégués syndicaux qui en étaient les initiateurs.
- Les grévistes répétaient que leur motivation était la défense des retraites, le retrait de la loi, etc. Pour nous militants révolutionnaires anarchistes, ce n'était bien sûr pas un mot d'ordre très intéressant (notre slogan préféré était "la retraite à vingt ans pour baiser il faut du temps"), mais au moins ça semblait partir d'une volonté de solidarité, d'unité, de dépassement des corporatismes...
Et puis un matin on a appris que tout s'arrêtait, sur la promesse de primes et recalculs de droits, revendications purement catégorielles dont il n'avait jamais été question tant que les grévistes parisiens (trop peu nombreux pour tenir seuls un piquet) avaient besoin d'aide extérieure... déjà, l'impression très nette de s'être fait rouler dans la farine.


Concernant le slogan "la retraite à vingt ans, pour baiser il faut du temps", c'est le problème de tous les slogans, de résumer à l'extrême des positions complexes. Cette revendication je ne l'aurais bien sûr pas formulée de façon aussi lapidaire sur le piquet de grève. Mais les éboueurs, conductrice de motocrotte... avec qui nous avons discuté ont quand même parfois évoqué des sujets plus fondamentaux, le dégoût du travail, de ce travail, l'envie de vivre autre chose...
Si on ne peut évoquer ses aspirations profondes, la révolution sociale et libertaire et tout ce que ça suppose, pendant les mouvements sociaux, dans des manifs avec cortège spécifique, où le fera-t-on?
(évidemment je n'aurais pas l'idée d'exprimer ces aspirations lors de réunions syndicales "ordinaires"...)
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Re: Le syndicalisme peut-il se suffir à lui-même ?

Messagede Pïérô » 11 Déc 2011, 16:16

L'AG gare de l'est c'était pas vraiment une AG interpro comme il y en a eu à Tours par exemple mais plutôt un regroupement hétéroclite d'individus. Et çà c'est vu dans les rencontres héxagonale à Tours comme à Nantes entre un gars du CCI (vite repéré) et un autre à Nantes déconecté mais complètement envahissant avec essentiellement du prosélitisme anti capitaliste (quoiqu'il me semble que celui-ci venai aussi au nom d'un autre espace "AG" aussi peu représentative). Je partage ce que dit berneri.
La dynamique au départ part bien de la question des retraites et de revendications, car la révolution sociale çà ne se revendique pas, et si c'est un objectif évidemment pour les révolutionnaires que nous sommes, ce n'est pas çà qui au départ met du monde dans la rue. Cette idée et objectif se construit, à travers la lutte, à partir d'un développement de la prise de conscience, etc...

Comme on a pu le constater en l'état, le syndicalisme ne se suffisait pas en lui même là non plus pour porter la lutte à la hauteur de l'enjeu, et bien évidemment la piste de l'auto-organisation a été expérimentée un peu partout, en même temps que la piste de coordination dont l'AG interpro 37 a pris l'initiative en première rencontre hexagonale. Cependant c'est bien sur les secteurs en grève et des secteurs syndiqués que c'est appuyé la dynamique, et c'est là dessus qu'elle doit s'appuyer avant tout, car grève et blocages sont complémentaires et il faut penser et construire en terme de mouvement de masse. Comment parler de grève générale en espérant que çà tombera du ciel ? Et sans grève générale je ne vois pas comment nous pourrions avancer et gagner. La question syndicale en construction et développement d'un syndicalisme de lutte et de transformation sociale est importante, comme celle de construire de l'unité à la base de ce côté. Ensuite, et comme je le dis plus haut, c'est en articulation entre ces espaces pérènes et l'auto-organisation qu'il nous faut participer à construire aussi pendant les luttes et évidemment aussi en terme de coordination ou au moins d'un réseau. De ce côté d'ailleurs un petit pas à été fait et le réseau pourra être activé rapidement je pense, pour gagner du temps la prochaine fois...
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Re: Le syndicalisme peut-il se suffir à lui-même ?

Messagede digger » 11 Déc 2011, 17:24

Je n’ai pas de réponses satisfaisantes à ta question. Cette question pose celle de la bureaucratie syndicale. Mais celle-ci n’explique pas tout pour moi parce que le syndicalisme est peu représentatif et ne saurait, à lui tout seul, bloquer une situation qui deviendrait réellement radicale. Et on a vu la base, dans le mouvement des retraites parfois, et en d’autres circonstances, déborder les consignes de leur direction. La remarque de Piéro sur la nécessité d’un syndicalisme de lutte est juste. Il renaitra par la base et, si ce retour au source se fait, la convergence entre syndicats et auto-organisation sera en grande partie résolue. Mais en attendant, il faut faire avec ce que nous avons.

La question se pose aujourd’hui aux Etats-Unis autour de la préparation de l’action de blocage des ports de la côte Ouest demain. La direction des dockers a fait parvenir une note aux sections concernée rappelant l’ILWU n’était pas à l’origine de l’action, qu’elle n’y participait pas et qu’une manifestation publique n’était pas un piquet de grève.
Des syndicalistes se sont élevés contre cette position, rappelant les principes et la tradition historique de l’ILWU. Jamais un de ses adhérents n’a traversé un piquet, syndicale ou non syndicale, comme lors du blocage d’un cargo sud africain ou les dockers ont respecté le piquet (non syndicale) pendant deux jours.
Les fédérations AFL -CIO des états du Maryland et de Columbia ont elles prises une position inverse, reconnaissant comme piquets de grève, les manifestations du mouvement et demandant à ses adhérents de les respecter de la même manière qu’une action syndicale.

Ces quelques exemples (il y en a beaucoup d’autres) me laissent penser que l’auto organisation peut peser sur les orientations des directions syndicales et que nous devons continuer à travailler sur celle-ci. (La question des retraites, dès le départ, n’était sans doute pas la bonne occasion.)

Le mouvement américain a choisi une position intéressante. Il se joint et renforce des luttes syndicales, comme celle des employés de Sotherby à NY plus qu’il n’affronte ou ne critique des positions émanant des directions. Il est présent auprès des militants de base, qui le leur rendent bien en apportant un soutien logistique dans les sections locales. Le travail sera fait lorsque les deux parties auront une confiance et une conscience mutuelle que leurs objectifs sont les mêmes. Les directions suivront.

Je vais passer pour un affreux situationniste romantique aux yeux de certainEs. J’assume.
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Re: Le syndicalisme peut-il se suffir à lui-même ?

Messagede Spike » 11 Déc 2011, 19:26

Anouchka, ta question est intéressante. Mais les faits que tu relates mettent en valeur des choses importante:

Tout d'abord les salariés de la TIRU n'ont rien à foutre de leur condition de travail puisque aucun de leur membres n'étaient présents. La lutte fut donc portée par des syndicalistes. Cela rejoins ce que disait p'tit Mat, le niveau de conscience dans le prolétariat est trop hétérogène pour pouvoir aboutir pour le moment et que la lutte syndicale est la seule qui est aujourd'hui capable de renforcer le mouvement.
C'est vrai que ton intervention traite également de la bureaucratisation des syndicats et ça je ne sais pas trop comment la combattre, mais il me semble que pour la combattre plus efficacement, il faudrait déjà que plus de monde soit syndiqué.
Ensuite ne pas être d'accord sur les revendications a dû nuire grandement à la cohésion du mouvement.
Enfin, tu as constaté qu'une journée d'action isolée ne sert pas à grand chose et personnellement durant ces journées je n'ai jamais réussi à créer des liens avec des camarades (mais peut être que je suis pas très doué pour ça...). C'est pourquoi je pense que le syndicalisme ne peut se suffire à lui-même actuellement, parce que pour créer des liens plus forts, il me semble qu'il faut des espaces prévus pour ça comme le furent les Bourses du Travail.
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Re: Le syndicalisme peut-il se suffir à lui-même ?

Messagede berneri » 11 Déc 2011, 19:38

Je ne vais pas m'amuser à donner des leçons, je voulais juste souligner que "oh surprise!" lorsqu'il n'y a pas de travaille de terrain des organisations révolutionnaires au quotidien , dans les quartiers et à la sortie des boites, lorsqu'on se parachute sur un piquet ça produit un decallage et tout le monde ne parle pas la même langue. Il y a donc certes les bureaucraties syndicales, mais aussi la faible syndicalisation et la responsabilité des militants revolutionnaires qui ne trouvent plas toujours sexy de faire une diff de tract de bonne heure ou bien un tract qui fait le lien entre les problèmes quotidiens des gens et la politique économique en proposant des revendications qu'on puisse s'approprier et dans un jargon que tout le monde comprenne. Oui je sais ma phrase est longue et il faut faire des phrases courtes pour être sûr d'etre compris...
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Re: Le syndicalisme peut-il se suffir à lui-même ?

Messagede berneri » 11 Déc 2011, 19:43

Le Travail inteprofessionnel dans les organisations syndicales , D'accord avec SPike : C'est ce travail interpro tout au long de l'année qui contribue à dépasser les corporatisme, à créer des solidarités, à avoir une vison globale des attaques du capitalisme et de l'économie nécessaire à une reflexion révolutionnaire ou du moins à y etre sensible. C'est ce travail interpro qui doit être encore développé et mis en valeur.

Appeler cela bourse du travail ou autre chose peut importe mais , dans les différente organisations syndicales y travailler c'est important.

Ce n'est pas les AG interpro qui peuvent le faire le mieux, même si celles-ci peuvent être un plus parallelement selon leur mode de de fonctionnement, dans le cadre d'une lutte on est dans l'urgence, pris de vitesse, on questionne la légitimité des ag du tout-venant, alors que dans l'hypothese d'un travail interprofessionnel et intersyndical (quand c'est possible)sur l'année au quotidien , des reseaux, des reflexes sont créers qui évitent d'avoir à reinventer le fil à couper le beurre dans chaque lutte.
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Re: Le syndicalisme peut-il se suffir à lui-même ?

Messagede Winston » 12 Déc 2011, 02:05

Je rejoindrais sur certains point ce que disent certains en appuyant un peu plus sur certains elements.

Les chats ne font pas des chiens, on vit dans une societe ou l'acceptation du systeme actuel est ultra-dominant dans notre societe, ca va de la resignation a l'adhesion totale, ce qui reste ne "fait pas des masses".

Les syndicats ont tous les defauts que soulevent certains, mais beaucoup de ces defauts ne font que refleter ce que veulent, enfin surtout.... ce que sont pret a faire la plupart des gens pour obtenir un quelconque changement.
Crée dans une boite un syndicat sur des positions ultra radicale (par rapport au systeme), et une autre sur des positions revendicatives reformistes, on sait tous que ceux pret a se syndiquer iront plutot vers le second...
De fait le syndicat ne peut aller plus loin que ceux que veulent ses adherants, encore moins quand les adherants a un quelconque syndicat est minoritaire, ce qui l'oblige plus ou moins a adopter des positions "ecoutables" par ceux pouvant se sentir concerné de pres ou de loin, si il veut avoir une quelconque influence sur ce qui est en cours, le rapport de force est souvent tellement defavorable qu'elle impacte forcement les buts ou les moyens envisagés collectivement par un syndicat.
Le fait d'obtenir aucun resultat demobilise, et fait perdre de la credibilité a la structure qui porte le projet ou au moyen d'action utilisée, ou a la possibilité meme de penser que l'idee/projet/revendication est realisable, comme souvent quand on echoue ou vise moins "haut", on ose moins, ca vaut pour les individus, et ca vaut aussi quand ils se rassemblent collectivement.
Quand on critique sa mollesse ou le syndicalisme en lui-meme, il faut aussi se rendre compte qu'on critique surtout les membres de la societe qui ont amene a ce genre de position, cad quasiment tout le monde.

De meme que les "indignés" quand ils sont nombreux, se retrouveront au commencement par des mots-d'ordre reformistes, c'est logique, si l'ensemble de la societe etait reellement sur des positions revolutionnaires, notre "paysage" actuel ressemblerait a tout autre chose....

Une partie des gens critiques, operent trop facilement un distinguo quand ca les arrange, mais le probleme c'est beaucoup moins les structures comme les syndicats, que l'acceptation de fait des idees par "quasiment" tout le monde, (que ce soit par depit, ou par adhesion reel) qui confortent ce que l'on pourrait vouloir voir disparaitre.

L'exemple que tu donnes anouchka, je pense, conforte plus ou moins ce que je dis, quand on a abandonné les idees "ambitieuses", on se rabat sur ce qui nous semble plus abordable, pour certains les revendications catégorielles pour d'autres leurs interets personnels, quitte parfois a choisir des solutions "non-cooperatives".
Quand un syndicat lance une greve/journee de mobilisation peu suivie ca impacte forcement ses possibilités d'obtenir un changement concret, on a les syndicats que l'on "merite".

Alors certes les syndicats pourraient demander plus, diffuser pour faire evoluer les opinions, mais au fond je crois qu'il se contente de proposer dans ce qu'ils croient etre la limite de l'acceptable pour avoir l'assentiment suffisant pour avancer sur des buts fixés par un processus similaire d'anticipation de "l'Opinion" sur lequel s'appuie leur "champs du realisable".

Ce qui est en jeu est plus de l'ordre du ping-pong, de l'interaction entre differents facteurs qui parcourent notre societe, et dont les syndicats sont autant un acteur significatif qu'un reflet, je ferais le meme genre d'analyse dans le domaine politique domaine plus que voisin.
Il n'y a pas que l'ideologie dominante actuelle qui pousse a l'individualisme mais aussi le fait de se sentir une voix, seul, inefficace portant des idees que personne semble vouloir.
Certes il y'a des accointances des "complicités" etc.... mais cela prospere sur un substrat favorable, ca ne peut expliquer comme le font certains, le probleme en lui-meme.

On parle des syndicats donc je te reponds sur les syndicats, les critiques qui ont ete fait aux syndicats, je les partage souvent, mais je leur donnerais pas la meme importance que le point que j'ai soulevé.

Il est clair aussi pour moi que la solution n'est pas une structuration specifique, relai d'idees, d'action, ni une structure specifique pour une societe "ideale", la structure ideale etant celle que ce sont choisit les personnes et correspond a leurs besoins. Les idees auquel on pourrait adherer, doivent evoluer en milieu hostile et subira forcement une certaine dose de "denaturation". Le syndicalisme pour exister de facon a avoir du poids, doit faire des compromis dans notre societe comme les individus qui la compose, ces compromis sont a la fois la condition d'existence, et constitue aussi souvent un frein pour evoluer vers les buts qu'on se serait fixé, dans une moindre mesure tout groupement politique dans notre societe, contre l'ideologie plutot supporté par la plupart, doit se situer dans ce genre de processus, etre dans des positions "radicales", mais confidentielles, ou consensuelles et denaturer ses idees. La frontiere entre les deux est flou, connaitre le positionnement le plus efficace pour atteindre les buts fixés, difficile de le dire...

On pourrait prendre en compte et tenter aussi d'analyser un peu sous d'autres aspects, l'influence des structures sur les individus ou les differentes interactions entre les structures existantes, qui a autant son importance, mais bon j'ai deja fait trop long je crois et ca deviendrait surement h.s. si ca ne l'est pas deja.

Ce que je dis ne se veut pas exhaustif, je souleve juste un point ou deux dans toute cette problematique, je ne fais pas appel a des references historiques (evenement fait) ou a des chartes ou a des syndicats specifiques, je presente juste un raisonnement qui me parait important pour etablir des constats et eviter de trop juger par rapport a ce que l'on pense devoir etre pour faire des constats.
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Re: Le syndicalisme peut-il se suffir à lui-même ?

Messagede digger » 12 Déc 2011, 11:24

L’action d’aujourd’hui sur la côte Ouest pour le blocage coordonné des ports peut servir d’exemple pratique et d’illustration à certains point soulevés ici.

La relation entre mouvement syndicale et mouvement social est devenu un point de débat central dans la région de la Baie (Oakland San Fransisco)
L’enjeu est capital. Soit il y a clash entre les direction syndicales et le mouvement social, soit il y a cohabitation, soit il y a collaboration.
Dans le premier cas, les deux en sortent affaiblis. Le vainqueur est le patronat.
Dans le second, chaque mouvement réaffirme ses spécificités et ses différences.
Dans le troisième, il y a convergence totale et le mouvement passe à un stade plus radicale sur la côte Ouest avec un mouvement syndicale d’occupation soutenu par le mouvement social. Alors nous verrons des occupations d’usines. .
Ken Knabb écrivait dans "Les Situationnistes et les mouvements des occupations(1968/2011)"
http://www.bopsecrets.org/French/situationists-occupations.htm

"Et, avec le récent appel à la grève générale émané d’Occupy Oakland (ce qui inclut le blocage du port et la tentative d’occupation d’un immeuble vide), même l’idée d’occupation d’usines ne semble plus aussi lointaine et irréaliste qu’elle pouvait l’être voilà une semaine. Nous avons encore un long chemin à parcourir pour y arriver, mais de telles idées sont désormais clairement dans l’air. "

C’est une partie de ce chemin qui peut être fait dès aujourd’hui.

Selon des infos arrivées à Oakland, via des militants syndicaux, officieusement, l’ILWU accepte finalement que ses adhérents respectent les piquets du mouvement.

Il ne s’agit pas d’un affrontement pour que l’un des mouvements gagne (quoi?) par rapport à l’autre. Il s’agit de signifier le changement de donne , par un signal clair, au pouvoir en place, au patronat et aux directions syndicales. Comme le disait justement Winston, un syndicat prend des positions que lui permettent de prendre sa base.

Là la base dit (et démontre, surtout) "Nous sommes prêts à passer à l’offensive" . Un mouvement social va bloquer l’économie portuaire d’un pays sur l’une de ses côtes, 3 mois à peine après son
apparition.

Il y aurait beaucoup à dire encore. Tout cela sera publié avec un peu plus de recul dans les prochains jours.

En attendant, pour les ceusses qui lisent l’anglo saxon :
Occupy vs. Big Labor http://www.salon.com/2011/12/09/occupy_vs_big_labor/singleton/
A reply to Cal Winslow on the West Coast Port Shut Down
http://occupiedoaktrib.org/2011/12/06/a-reply-to-cal-winslow-on-the-west-coast-port-shut-down/
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