Rebonjour, j'ai écrit dernièrement un texte (que je copie plus bas dans cette article) dans lequel j'ai tenté d'analyser la situation des travailleurs-euses dans l'industrie des pêches dans les provinces maritimes et dans les côtes de l'est du Québec à partir d'événements récents, de contacts et de récits de pêcheurs, d'hommes de pont et de travailleurs d'usines de transformation de poisson et d'une vue ensemble (mettant en relation la situation de l'industrie de la pêche et l'industrie du bois d'oeuvre). Mais, c'était un premier essai sur le sujet, critiquable en certains points, j'aurais voulu connaître vos idées là-dessus, trucs sur lesquels vous développeriez davantage, et puis aussi, quel est la situation de l'industrie des pêches en France. L'article est un article de blog donc je ne m'intéresse pas vraiment à la forme mais surtout du fond et de la façon d'analyser.
Les pêcheurs de l'Est et des maritimes sacrifiés par le gouvernementhttp://ucl-saguenay.blogspot.com/Manifestation du 26 mai à Tracadie-Sheila
La saison s'annonce difficile pour les pêcheurs et leurs communautés en Gaspésie et dans les autres provinces maritimes. Face à la situation économique aux États-unis (qui est le principal acheteur du homard), les prix fixés par les transformateurs de homard sont de 2,50$ à 3,50$ la livre comparativement à près de 5$ les années précédentes. À ce prix, de nombreux pêcheurs de homard prévoient cesser leurs activités avant la pêche d'automne puisque leurs profits seront presque nuls. La pêche au crabe connait également un début de temps durs. Au delà des pêcheurs, c'est surtout les hommes de pont et les travailleurs et travailleuses des usines de transformation ("fish plant") qui souffriront de cette baisse d'activité. Les hommes de pont ne touchent pas grand chose des gros profits des pêcheurs et n'ont comparativement pas grand chose à transmettre à leurs descendances sinon une incroyable ténacité devant la misère et une forte vigueur. Ce qui est sûr, c'est que ceux-là ne pourront pas se serrer davantage la ceinture pour passer les temps difficiles et seront directement coupés dans leurs heures de travail et leur rémunération. De leur côté, les travailleurs-euses de certaines usines de transformation, payé-e-s en moyenne 9 à 10 $ de l'heure, ressentent déjà une importante diminution de leurs temps de travail.
Comme pour le bois d'oeuvre, les lois du libre-échange empêchent le gouvernement fédéral d'intervenir sur les prix. Beaucoup de pêcheurs espèrent toutefois recevoir une subvention d'aide sans quoi l'entière économie de nombreux villages côtiers risque risque de s'écrouler.
Mardi, le 26 mai, environ 500 pêcheurs de homard et leurs supporteurs-euses se sont rassemblé-e-s à Tracadie-Sheila, dans la péninsule acadienne (N-B) à l'appel de l'Union des Pêcheurs des Maritimes (UPM) pour manifester contre l'inaction du gouvernement, un peu comme l'ont fait par ici les travailleurs de SPK Pâtes à St-Félicien le 30 avril dernier.
Michaël Noel, un jeune homardier de Four Roads, a déclaré lors de la manifestation:
"J'ai 27 ans. Ça fait sept ans que je pêche. Je ne pourrai jamais faire mon
paiement cette année (20 000$). Je suis découragé. On est pas mal à bout de
nerfs, par ici. J'attrape du homard, mais je n'ai pas de prix pour mes captures.
Je ne sais pas quoi faire. Quand je serai au bout du rouleau, je serai obligé de
vendre. Mais même si je voulais vendre, il n'y a personne qui voudra acheter. Il
n'y a pas un jeune qui veut aller dans l'industrie de la pêche. Ça fait peur."
Il faut savoir que les temps difficiles pour l'industrie des pêches ne datent pas d'hier au Canada. La mauvaise gestion des pêches de morue par Ottawa, où le gouvernement a permis que les bateaux-usines étrangers drainent littéralement les stocks de morue à même les sites de reproduction, alors que les pêcheurs de l'endroit avaient paradoxalement des quotas réduits, a été fatale pour pour une grande partie de l'industrie dans l'est du pays. Cette situation a forcé l'exil et la réorientation professionnelle de plusieurs dizaines de millier de travailleurs-euses de l'industrie. Terre-Neuve a été particulièrement touchée. Sa population ceinturant jadis la grande île, est maintenant fortement centralisée dans sa capitale, St. John's, et quelques villes secondaires. Un très grand nombre de villages côtiers ont pratiquement été désertés dans cette urbanisation à vitesse 10, n'y restant que quelques dizaines de personne d'âge souvent avancé, et très peu d'espoir pour l'avenir des communautés (avec les problèmes sociaux que ça entraîne...).
Les "maladresses" du gouvernement ont suscité à de multiples reprises des expressions de la colère collective des travailleurs-euses. L'Émeute de Shippagan en mai 2003, où une foule en colère de plus de 200 personnes avait brulé un entrepôt, une usine de transformation et 4 bateaux de pêche de plus d'un million de dollar chacun que le gouvernement avait offert aux autochtones pour la pratique des droits ancestraux, en est un exemple notable. La réduction des quotas de homard a également généré de multiples conflits sectaires entre les communautés de pêcheurs où des sabotages de cage à homard et des affrontements sur l'eau ont eu lieu à répétition.
Au profit du grand Capital, les communautés côtières de l'est et les travailleurs-euses de toute une industrie sont littéralement sacrifié-e-s, tout comme ceux et celles du bois d'oeuvre par ici. Les travailleurs-euses sont mieux placé-e-s pour connaître la situation et les changements nécessaires qu'Ottawa, mais au service de la classe bourgeoise, cette dernière se sert des pêches pour améliorer ses relations et son commerce avec les autres pays.