Le 22 mai 2018 se tenaient à Paris et dans toute la France des manifestations, regroupant des fonctionnaires, des étudiant.e.s, des lycéen.ne.s, des cheminot.e.s , des salarié.e.s de l’énergie.
Des dizaines de milliers d’individu.e.s sont descendu.e.s dans la rue pour se dresser et protester contre les réformes de notre gouvernement et contre les politiques actuelles.
Le 22 mai 2018, à Paris, 12e arrondissement, s’est tenu un rassemblement devant le lycée Arago, improvisé par des étudiant.e.s et des lycéen.ne.s, venu.e.s protester contre les inégalités engendrées par ParcourSup. Ces manifestant.e.s sont rentré.e.s dans le lycée afin de tenir une occupation pacifique, et ont organisé rapidement une Assemblée Générale afin de discuter de la suite des événements dans le calme et le respect des lieux.
Le 22 mai 2018, dans le lycée Arago, 101 jeunes ont été interpellé.e.s, arrêté.e.s, et placé.e.s en garde à vue. Parmi ces 101 étudiant.e.s, nous constations la présence de mineur.e.s, parfois très jeunes. En résumé, ce sont 101 jeunes non masqué.e.s, non armé.e.s et non agressif.ve.s, venu.e.s avec pour seule intention celle de débattre, que le gouvernement a arrêtés.
Nous dénonçons les conditions de détention absolument honteuses, enfermé.e.s à plus de 60 dans un bus de 30 places pendant plus de 4 heures, garé dans le parking souterrain du commissariat du 18e arrondissement, puis parqué.e.s dans ce même parking comme des animaux, sans eau, sans droit d’aller aux toilettes, sans information. Nous dénonçons aussi les interrogatoires, la pression mise à des jeunes mineur.e.s, les cellules de 9 mètres carrés remplies par 25 personnes, les actes de violence de certains policiers, les mensonges sur les heures de sortie, les nombreux vices de procédures. Ces jeunes ont été pour la plupart retenus 60h en garde à vue avec l’impossibilité de contacter leurs proches.
Ce procès est un procès politique
Le Jeudi 24 mai 2018, 67 d’entre eux ont été déférés en comparution immédiate : parmi eux la plupart ont été mis en examen pour des charges telles que “intrusion” et “rassemblement en vue de commettre des dégradations” ; amenant une interdiction de pénétrer dans Paris jusqu’à la date du procès.
Ce procès est un procès politique. Aucune violence de la part des interpellé.e.s, aucune dégradation : rien ne justifie de telles sanctions, une telle dureté, si ce n’est faire peur aux lycéen.ne.s qui se mobilisent, aux manifestant.e.s, à ceux et celles qui font entendre leur voix !
Ces procès sont bien plus graves que de simples histoires de jeunes qui passent devant la justice pour quelques bêtises en manifestation ; ces procès soulèvent une question beaucoup plus dérangeante, que certains voudraient étouffer : avons-nous encore une totale liberté d’expression ?
Ces actes sont la preuve que nous glissons peu à peu vers un musèlement de la colère du peuple, vers un État de droit privatisant tout ce qu’il y a à privatiser et qui ne fonctionne que pour la machine bien huilée du patronat.
La masse grondante dans la rue n’est pas une bande de gauchistes en manque d’attention ; nous sommes les étudiant.e.s mécontent.e.s, réclamant un libre accès aux études supérieures et du budget pour nos universités.
Nous sommes les lycéen.ne.s à qui l’on refuse le droit d’étudier parce que nous n’avons pas eu les mêmes chances que certain.e.s plus aisé.e.s, et qui voyons nos rêves balayés par la politique de sélection profondément inégalitaire de ParcourSup.
Nous sommes les cheminot.e.s , les fonctionnaires, les syndiqué.e.s, les professeurs, les révolté.es, nous sommes la voix de toutes et tous les mécontent.e.s et nous sommes celles et ceux qui nous battons pour des droits que l’on nous refuse.
Militant.e.s de tous bords, citoyens et citoyennes : le gouvernement préfère aujourd’hui arrêter 101 d’entre nous plutôt que d’écouter les dizaines de milliers qui sont dans la rue. Nous ne nous laisserons pas faire ; et nous avons besoin de vous. Nous avons besoin de votre voix, vos déclarations, de votre parole, mais aussi et surtout de votre présence devant le TGI le 15 juin.
Aidez-nous à nous faire entendre.
Rendez-vous le 15 juin dès 12h,
devant le TGI de Paris - métro Porte de Clichy (ligne 13 et RER C)
Le 15 juin dernier 16 personnes devaient comparaitre devant la 23e chambre du TGI pour avoir, certaines :
• « participé sciemment à un groupement, même formé de façon temporaire, en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, de violences volontaires contre les personnes ou de destructions ou dégradations de biens. »
Ainsi que, d’autres avoir en plus :
• « pénétré ou s’être maintenues dans l’enceinte d’un établissement d’enseignement scolaire sans y être habilitées en vertu de dispositions législatives ou réglementaires ou y avoir été autorisées par les autorités compétentes, ... dans le but de troubler la tranquillité ou le bon ordre de l’établissement ».
L’une d’entre elles était accusée également de « vol de tablette appartenant au lycée Arago » et quatre « d’avoir refusé le prélèvement ADN. »
Nous étions très nombreu.ses. devant le tribunal à manifester notre solidarité et également à vouloir assister aux procès, faute de pouvoir tou.te.s entrer dans la salle d’audience, filtré.e.s que nous étions par des gendarmes et des policiers qui comme d’habitude faisaient entrer les journalistes avant les soutiens. Le problème se pose aussi en termes de capacité d’accueil des salles qui sont toujours trop petites.
Sur proposition du juge-président les procès étaient organisés en deux parties.
Une première où devaient comparaître les personnes arrêtées durant la manifestation du 22 mai « sur la voie publique » et une deuxième où devaient comparaître celles arrêtées lors de ce même jour en fin de manifestation au lycée Arago.
Première partie pour les cinq interpelé.es pendant la manif :
Quelques 12 avocats sont là, toutes et tous debout, formant un bloc compact noir devant les juges et le procureur. Deux autres sont sagement assis.es Les cinq premiers prévenu.es sont appelé.es à se présenter à la barre pour entendre leurs chefs d’accusation. Ils ont été chacun.e interpelé.es séparément et à des moments et des lieux différents, mais le tribunal a décidé d’en faire « un dossier joint ».
Une avocate tente de faire disjoindre son client des quatre autres au motif que "lui, passait là par hasard et n’avait pas à se faire arrêter."
Le président s’embrouille un peu dans les dossiers, pressé qu’il est par les avocat.e.s. qui crient au scandale. Quelques passes d’armes entre les avocat.es et le procureur et une interruption de séance plus tard, le renvoi du procès des cinq est prononcé, puisqu’ un des prévenu n’a pu se rendre présent ce jour là et que c’était un « dossier joint ». D’ici là tous les contrôles judiciaires d’interdiction du 12e, d’Île de France, ou de se rencontrer sont levés.
Rendez-vous le 4 décembre à 9 heures chambre 24.1 au TGI porte de Clichy.
Deuxième partie pour les interpelé.es du lycée Arago : cette fois-ci 11 personnes présentes sont concernées.
Une tentative de nullité va être présentée par la défense sur le fait que deux personnes (la proviseure et le gardien du lycée Arago) étaient cités comme témoins – ce que le président conteste en disant qu’il leur était « simplement demandé de bien vouloir venir »- sont absentes.
Une deuxième demande de nullité va être déposée par les avocat.es : Ielles plaident de n’avoir eu accès qu’à la seule partie concernant leurs client.es et ne peuvent donc avoir une vision globale des évènements que seul le Parquet possède.
Il y a eu ce jour-là 128 interpelé.es dont 102 à Arago pour les mêmes chefs d’accusation. Certain.es ont eu 24 heures de GAV, d’autres 48 heures. Certain.es ont été déféré.es, d’autres pas. Certain.es ont été relaxé.es, d’autres ont eu un rappel à la loi.
Le tribunal n’en fait comparaître que 16 aujourd’hui et quelques autres fin juin, en juillet, en septembre et en octobre.
Pour pouvoir défendre efficacement leurs 16 et en tous cas leurs onze client.es, ielles ne peuvent le faire qu’en connaissant les raisons de ces différences de traitement et donc en ayant accès à l’intégralité des procédures de l’ensembles des interpelé.es. A nouveau quelques passes d’armes entre les avocat.es et le procureur et une interruption de séance plus tard, le tribunal rejettera ces deux demandes. Les onze prévenu.es sont donc appelé.es à se présenter à la barre pour entendre leurs chefs d’accusation.
Le président s’embrouillera à nouveau dans les dossiers, en oubliant d’en citer un, en en confondant deux pendant cinq minutes et en n’en retrouvant pas un autre dans son tas durant une minute.
Une deuxième demande de nullité fait son entrée, celle de « l’incompétence » du tribunal à juger ces affaires. Ielles plaident que « le délit politique » existe et qu’il ne peut être plaidé en chambre de comparution immédiate.
Après un bref rappel historique, les avocat.e.s veulent que les deux chefs d’accusation soient considérés comme politiques par nature -comme l’a considéré la Cour de cassation l’an dernier concernant la qualification de "participation à un attroupement". En ce sens que l’objet de « l’intrusion » est bien de contester un projet politique gouvernemental (parcours sup) et ne doit donc pas être jugé comme un délit de droit commun passible d’une comparution immédiate.
Que le fait de sélectionner arbitrairement des personnes, en en interpelant 102 et en en faisant comparaitre une vingtaine n’a rien d’à-politique et renforce l’idée qu’aujourd’hui la concentration de la justice sur « l’intention » en instrumentalisant le droit pénal - peu importe le résultat des peines- ce qui compte c’est le coup d’arrêt politique : ce qui est productif c’est la nasse, l’empêchement à manifester, les prises d’empreintes comme un moyen de maintien de l’ordre.
Et encore une fois, quelques passes d’armes entre les avocat.es et le procureur et une interruption de séance -cette fois-ci de près de une heure trente- plus tard, le tribunal rejettera aussi cette demande.
A l’annonce de cette décision, les avocat.es précisent immédiatement qu’ielles vont faire appel.
Le tribunal, après une dernière interruption de séance, lève tous les contrôles judiciaires et renvoie pour « appel » ... le 4 décembre. Il y a de fortes chances que cette date ne soit que « technique » et que ce jour-là, la cour d’appel ne soit pas prête. Les procès en appel seraient alors automatiquement renvoyés à une date ultérieure.
Que dire de plus qu’une défense collective vaut mieux que 16 défenses individuelles !
N’oublions surtout pas que deux des interpellé.es du 22 mai ont été placés en détention provisoire et n’en sont sortis que quinze jours plus tard pour l’un et plus de trois semaines pour l’autre. Ils vont comparaître le 29 juin à 13 heures 30 devant la 23e chambre.
C’est encore et toujours la même histoire. Nous ne pouvons qu’être un nombre important à venir les soutenir. Ne lâchons rien !
Le Groupe Légal de la Coordination anti-rep
stoprepression@riseup.net
La fédération SUD éducation relaie et soutient l’expression de SUD éducation 44.
SUD éducation 44 affirme son soutien sans faille aux deux enseignants-chercheurs de l’Université de Nantes, mis en cause par l’équipe présidentielle de l’université de Nantes qui fait preuve d’un autoritarisme de plus en plus inquiétant.
Dans un contexte nantais déjà marqué par de graves régressions démocratiques (militarisation du maintien de « l’ordre », violences policières répétées à l’encontre des lycéen-ne-s, étudiant-e-s et des personnels mobilisé-e-s), la Présidence de l’université a fait intervenir la police sur le campus à trois reprises depuis le mois de février. Après plusieurs jours d’examens délocalisés hors des sites universitaires où les étudiant-e-s mobilisés ont été victimes à la fois de violences policières et de graves intimidations de la part de membres de l’équipe de direction, le 18 mai a eu lieu une nouvelle séance d’examen sous tension. À l’issue de cet examen et à proximité du Pôle Étudiant, des étudiant-e-s mobilisé-e-s ont réclamé de manière véhémente leurs cartes d’étudiants momentanément confisquées par des personnels administratifs réquisitionnés pour surveiller des examens, ces personnels étant de fait exposés par leur hiérarchie. Les deux collègues enseignants-chercheurs sont alors intervenus pour tenter de faire baisser la tension.
Le lendemain et sur un plateau de télévision, le président de l’Université de Nantes a déclaré qu’un « nouveau cap avait été franchi » en accusant ces deux collègues enseignants-chercheurs d’agression sur leurs collègues du personnel administratif… Le comble est qu’il assume dans la même émission que les faits n’étaient pas encore établis ! Ces deux collègues font désormais l’objet de procédures disciplinaires internes, et l’un d’eux a été suspendu de toutes ses fonctions à titre conservatoire. Depuis, la solidarité s’organise autour des deux collègues pour dénoncer cette décision aussi précipitée qu’autoritaire : large soutien des syndicats ; lettre ouverte signée par 170 personnels de l’Université de Nantes ; pétition en ligne qui récolte, à l’heure actuelle, près de 3000 signatures.
Ne nous y trompons pas : la décision de la présidence de l’Université de Nantes est avant tout une tentative de répression politique de la mobilisation. Elle vise à « punir » les opposant-e-s à la loi ORE en les faisant passer pour des agresseurs et à faire croire que la violence vient du côté du mouvement social. Mais elle sert aussi à opposer les catégories de personnels entre elles (personnels administratifs et techniques VS enseignants-chercheurs) pour casser les solidarités qui existent encore sur les lieux de travail. Cette décision de la présidence de l’Université de Nantes s’inscrit dans un mouvement plus large d’intimidations et de répression contre les opposant-e-s lycéen-ne-s et étudiant-e-s à la loi ORE (intervention de milices d’extrême droite, interventions policières à répétition sur les campus, insultes et menaces des chefs d’établissements, etc.).
SUD éducation 44 dénonce toutes les formes de violences et d’intimidations dont sont victimes les lycéen-ne-s, les étudiant-e-s et les personnels de toutes les catégories, à Nantes comme ailleurs. SUD éducation appelle à la solidarité avec les enseignants-chercheurs nantais injustement mis en cause en l’absence de faits établis, notamment par la signature de la pétition en ligne « Soutien à deux enseignants-chercheurs nantais mobilisés contre la réforme ORE sanctionnés » :
https://www.change.org/p/olivier-laboux ... onn%C3%A9s
Nous ne nous laisserons pas intimider dans notre combat
pour un service public de l’ESR ouvert à tou-te-s !
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