Du Limousin à la Guyane, la France en relance minière
La France, dans la lignée des stratégies européennes, souhaite relancer une industrie minière sur son territoire dans les prochaines années. Retour sur les enjeux, les positions des différents acteurs et les mobilisations autour de cette question, par Romain Gelin du Gresea.
La première législation minière française « moderne » remonte à 1810, sous Napoléon. Elle contraint les exploitants à introduire une déclaration auprès de la commune. En 1956, le premier Code minier entre en vigueur. Il rassemble les textes de droit en lien avec l’exploitation des ressources minérales et l’extraction des hydrocarbures. Il sera enrichi de plusieurs dispositions au cours de la seconde moitié du XXe siècle (protection de l’environnement, gestion de l’eau, sécurité sociale du secteur, code des assurances…).
Une législation obsolète
En 2009, la loi de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures [1] ouvre la voie à une réforme du code minier. L’année suivante, le public s’aperçoit que des permis de recherche d’hydrocarbures ont été discrètement accordés, sans information des riverains ni des élus. Or, depuis 2005, la Charte de l’environnement, en son Article 7, prévoit l’information et la consultation des populations locales pour toute décision publique ayant une incidence sur l’environnement. L’affaire fait scandale. En 2011, afin de calmer la polémique, un décret interdisant la fracturation hydraulique (le « fracking ») pour l’exploitation d’hydrocarbures non conventionnels (gaz et pétrole de schiste notamment) est adopté par le gouvernement.
En 2012, le nouvel exécutif (présidence Hollande) annonce sa volonté de réformer le code minier et soumet plusieurs avant-projets, en 2013 et 2014. Au gré des remaniements ministériels, la réforme est repoussée jusqu’à la proposition de loi de septembre 2016 - finalement portée par des parlementaires et non par le gouvernement. En janvier 2017, le projet est approuvé par l’Assemblée nationale et envoyé au Sénat (lire l’enquête publiée alors par l’Observatoire des multinationales). Mais, les élections présidentielles approchant, les sessions parlementaires se terminent et le projet ne voit finalement pas le jour, au grand dam – pour des raisons différentes - des ONG et des entreprises.
À l’été 2017, le nouveau ministre de l’Écologie du président Macron, Nicolas Hulot, affirme qu’il soumettra une nouvelle proposition de loi avant fin 2017, finalement repoussée à 2018. En octobre 2017, plusieurs dispositions sont ajoutées concernant les hydrocarbures, via la loi Hulot (lire notre article). La fin de l’exploitation de ceux-ci est annoncée pour 2040 (avec des dérogations possibles). L’exploitation non conventionnelle des hydrocarbures reste bannie.
Points d’achoppement
Les avant-projets au code minier avaient déjà créé des polémiques. Pour les opposants à la relance minière, outre l’intérêt économique douteux de relancer l’extraction, ce sont les aspects ayant trait à la pratique démocratique et aux préoccupations environnementales qui ont focalisé les critiques.
Aucune procédure de consultation digne de ce nom n’est en effet prévue. Comme l’expliquent les Amis de la Terre et leurs alliés associatifs, « les "consultations" des populations locales sont bien souvent des réunions d’information unilatérales qui ne présentent que les aspects positifs de l’extraction [2]. » Le plus souvent, celles-ci se cantonnent à des consultations numériques d’une durée de 21 jours. La grande majorité des avis recueillis lors de ces « consultations » sont défavorables aux projets miniers. Mais comme celles-ci ne sont que consultatives [3], les permis finissent tout de même par être accordés.
Un autre point de discorde concerne le « droit de suite ». Ce principe juridique donne la primauté aux entreprises exploratrices lors d’une future exploitation ; autrement dit, un permis d’exploration décroché assure quasi automatiquement l’obtention de la concession et la possibilité de la renouveler.
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