Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

Messagede Pïérô » 18 Fév 2018, 15:57

Contester librement la politique israélienne? Un droit qui reste à conquérir

A-t-on le droit de contester la politique israélienne ? C’est le thème d’un colloque qui a lieu lundi 12 février au Sénat. Et c’est la question que posent dans cette tribune Pascal Boniface, Rony Brauman, Ivar Ekeland, Bertrand Heilbronn, Christiane Hessel, Renée Le Mignot et Dominique Vidal.

A-t-on le droit, en France, de contester la politique israélienne, de condamner son mépris du droit international, de dénoncer les injustices subies par le peuple palestinien ? Et ce, dans une période où le peuple palestinien est de plus en plus menacé par la colonisation, les projets d’annexion, le projet de redéfinir la nature même de l’Etat d’Israël ?

En théorie, rien ne nous empêche de nous exprimer, mais qu’en est-il en pratique ?

Quiconque a envie de contester la politique israélienne va se poser la question des attaques auxquelles il ou elle risque d’être confronté : insultes, intimidation, pressions, amalgames, délégitimation, accusations infâmantes d’antisémitisme. Qui va prendre ce risque, avec une carrière politique ou journalistique à construire ? Les expressions se font rares, et parfois les portes se ferment sans autre raison. C’est une forme de peur et d’autocensure qui s’installe…

L’intimidation ? Savez-vous que l’un de nous, directeur d’un centre de recherches stratégiques, 16 ans après avoir écrit une note interne au Parti socialiste sur l’orientation de sa politique israélo-palestinienne, est toujours soumis aux attaques de ses détracteurs, y compris d’un ancien Premier ministre ?

Les pressions et les interdictions ? Avez-vous entendu parler de l’interdiction faite à des élus de la République de se rendre en Israël, en novembre dernier, sous prétexte qu’ils avaient demandé à rendre visite à Marwan Barghouthi, le Mandela palestinien, dans la prison où il est détenu par Israël ? Et vous souvenez-vous aussi, de la « liste noire », publiée début janvier, des organisations dont les dirigeants peuvent désormais être refoulés par l’Etat d’Israël, rendant impossible leur accès à la Palestine occupée ?

Les amalgames ? Savez-vous que les inconditionnels de la politique israélienne font la promotion d’une « définition » de l’antisémitisme qui prendrait en exemple la critique « excessive » de la politique israélienne ? Insulte au combat antiraciste, l’adoption d’une telle définition, sous quelque forme et à quelque niveau que ce soit, ferait des ravages vis-à-vis de la liberté d’expression. Avez-vous lu l’interview du président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), demandant que cette « définition » soit inscrite dans la loi, transformant ainsi une opinion en délit ?

La délégitimation ? Mesurez-vous les effets, sur la liberté d’expression et d’action citoyenne, des tentatives de diabolisation des campagnes de Boycott-Désinvestissement-Sanctions (BDS), que chacun a le droit d’approuver ou non, mais qui ne sont qu’un moyen pacifique de tenter d’imposer le droit ?

Que faire face à ces attaques et tentatives de délégitimation ? La première chose est d’étudier la question en profondeur : c’est l’objet d’un colloque organisé le 12 février au Palais du Luxembourg ; une discussion sans tabou, qui analyse les amalgames et les attaques, en recherche les causes possibles en France (sans nier ni mettre en scène les différentes composantes de la montée du racisme), tout en cherchant à comprendre et dépasser les phénomènes communautaires. L’exposé de la situation en Israël, aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, doit nous montrer aussi la puissance et la détermination du pouvoir israélien, qui s’exprime au grand jour en mettant des moyens considérables pour faire taire la contestation de sa politique partout dans le monde.

Rien ne nous oblige d’avoir la même analyse de la situation, ni d’être d’accord entre nous sur le fond. Le débat peut être vigoureux, mais il ne doit pas être entravé, ni soumis à des coups bas incessants. Il doit être libre, démocratique, loyal, débarrassé de ses amalgames. Nous l’affirmons à travers une initiative, « 6 principes pour un débat libre et démocratique sur la question israélo-palestinienne », que nous lançons avec les 50 premiers signataires en clôture du colloque du 12 février. Cette initiative, publiquement ouverte aux signatures sur son site internet (6principes.fr 3) dès son lancement, veut donner le coup d’envoi d’une mobilisation citoyenne : nous ne voulons plus nous laisser intimider, dénigrer, nous avons la force d’être ensemble et la volonté, partout, de faire reculer la peur de s’exprimer.

Mais cette mobilisation citoyenne ne sera pas suffisante si l’exemple ne vient pas, aussi, du plus haut niveau de l’Etat. Nous attendons du Président de la République qu’il cesse d’encourager et reprendre les amalgames (notamment entre antisionisme et antisémitisme), qu’il rejette clairement la projet de donner une définition, de surcroît manipulée, de l’antisémitisme, qu’il donne des limites claires au débordement des approches communautaristes, et qu’il soit le garant de notre liberté d’expression et d’action citoyenne.

Nous attendons des signes forts dans ce sens, et nous y serons particulièrement attentifs dans les semaines et les mois qui viennent.

Face à la politique irresponsable du gouvernement israélien et de son allié états-unien, qui risque encore de connaître de nouveaux développements, la France a besoin d’un débat citoyen, démocratique, un débat qui peut être vigoureux mais doit être exempt d’attaques personnelles et de coups bas. Nous y veillerons.

Pascal Boniface, géopolitologue
Rony Brauman, médecin, professeur et essayiste
Ivar Ekeland, ancien président de l'Université Paris Dauphine
Bertrand Heilbronn, président de l’Association France Palestine Solidarité
Christiane Hessel
Renée Le Mignot, co-présidente du MRAP
Dominique Vidal, journaliste et historien


https://blogs.mediapart.fr/les-invites- ... -conquerir
Image------------ Demain Le Grand Soir --------- --------- C’est dans la rue qu'çà s'passe --------
Avatar de l’utilisateur-trice
Pïérô
 
Messages: 22436
Enregistré le: 12 Juil 2008, 21:43
Localisation: 37, Saint-Pierre-des-Corps

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

Messagede bipbip » 03 Mar 2018, 12:13

Pierre Stambul

Le sionisme m’a quitter

Les origines

Mes parents sont nés tous les deux en 1917 dans un pays qui n’existe plus : la Bessarabie. Cette région peuplée en majorité de Roumains avec des minorités turques et juives (séfarades) a été ottomane jusqu’à la conquête russe de 1812. Le tsar a fait venir des populations russophones. C’est ainsi que des Juifs ashkénazes venus des pays baltes et de Biélorussie se sont installés. Pour les attirer, on leur a permis la possession de la terre (ce qui n’existait nulle part ailleurs dans l’empire russe) et l’exemption du service militaire (qui durait à l’époque 25 ans pour les aînés).

L’antisémitisme est une politique d’État dans l’empire russe. Les pogroms débutent en 1881. L’émigration vers l’Europe occidentale et l’Amérique commence. C’est ainsi que mon père aura des cousins aux États-Unis et d’autres en Argentine. Ma famille maternelle vivait dans un shtetl (ces bourgades juives où l’on parlait yiddish) au bord du Dniestr. Ils étaient paysans mais très pauvres. Ma grand-mère paternelle a été une survivante du pogrom de Kichinev (1903).

Comme dans beaucoup de régions de l’empire russe, l’antisémitisme et la prolétarisation des masses juives ont provoqué une perte massive de religion et un engagement assez répandu dans les différents mouvements révolutionnaires. Mon père a été conçu à Saint-Pétersbourg pendant la révolution de février 1917. Sa famille était russophone. Il est né à Akkerman, au bord de la Mer Noire dans une ville où vraisemblablement les Juifs venus du nord s’étaient mélangés à des Juifs ottomans (d’où mon nom : Stambul). Il était l’arrière petit-fils du grand rabbin Rabinovitz d’Odessa, mais mes grands-parents étaient athées.

Au moment de la révolution d’octobre, la Bessarabie est conquise par les troupes roumaines.

Le communisme et le génocide

Entre les deux guerres, la Roumanie est un royaume. Les Juifs forment environ 5% de la population. L’antisémitisme s’exprime de façon décomplexée.

Dans la famille de ma mère, les parents sont religieux et les cinq frères et sœurs sont communistes et bien sûr athées. Leur village, Vertujeni, est situé juste en face du « paradis » : l’URSS de l’autre côté du fleuve. Ma mère quittera l’école assez tôt pour l’usine où elle deviendra une militante active du parti communiste roumain. Elle a fréquenté Olga Bancic (décapitée à la hache en 1944), Ion Maurer (le futur président de la république roumaine) et sans doute Ceaucescu. C’est le parti qui décide son émigration vers la France en 1938. Et c’est parmi les Juifs immigrés du parti qu’elle va trouver son insertion sociale à Paris. Elle parlait yiddish et roumain. Elle comprenait le russe et à peine le Français.

Mon père, fils unique, a été un élève brillant. Il a fait ses études à Galati, au bord du Danube puis, après le baccalauréat, à l’école polytechnique de Bucarest où il étudie la chimie. Politiquement, il passe de l’Hashomer Hatzaïr (un mouvement de jeunes « sionistes de gauche ») au parti communiste, ce qui était à l’époque une évolution classique. Il affronte parfois violemment les fascistes de la « garde de fer ». Son groupe communiste est démantelé par la police roumaine en 1938. Pour lui éviter la prison, mon grand-père achète le juge et tout le groupe est expulsé en France où mon père poursuit ses études de chimie.

En France, l’émigration juive bessarabienne va plonger dans la clandestinité dès le début de l’occupation. Ma mère sera agent de liaison de la MOI (Main d’Oeuvre Immigrée, bras armé des étrangers du PC) à Paris sous un pseudonyme qui n’aurait trompé personne en cas d’arrestation vu son accent.

Mon père sera recruté par le groupe Manouchian. Le groupe était organisé en triangles. Il y a eu un « triangle » Boczor-Glasz-Stambul. Les deux premiers ont été fusillés au mont Valérien, ils sont sur l’affiche rouge. Mon père participera à des actions de déraillement de trains. Le groupe tombe en novembre 1943. Mon père est torturé par la police française et condamné à mort. Il a subi un simulacre d’exécution et a été livré à la Gestapo. Déporté à Compiègne-Royallieu, il a réussi à convaincre les Nazis que Stambul était un nom roumain et que sa circoncision était due à une opération médicale. Il sera déporté à Buchenwald. Sa compagne de l’époque sera gazée dès son arrivée à Auschwitz. Les conditions de Buchenwald étaient très dures, mais mon père n’a livré que des bribes de récit. Il perdra 25 kg en 18 mois de détention.

En mai 1945, ma mère est chargée par le parti d’accueillir les rescapés des camps à l’hôtel Lutétia. C’est ainsi qu’elle connaîtra mon père.

En Europe Orientale, au moment de l’offensive allemande, mes grands-parents paternels auront le temps de partir en Union Soviétique et de fuir (à pied, en charrette, en train, en bateau) jusqu’en Ouzbékistan où ils passeront la guerre. La famille de ma mère (parents, frères, sœur) a disparu sans qu’on sache où et comment : les Nazis ? Les Roumains ? Le shtetl est devenu un camp de concentration, c’est peut-être là qu’ils ont disparu. Le seul qui n’était pas là s’est engagé dans l’armée rouge, a été grièvement blessé à Stalingrad et est mort peu après.

La transmission

Comme beaucoup de rescapés du génocide, mes parents après guerre n’ont eu qu’une idée : se reconstruire, essayer d’oublier, se fondre dans la population française. Les nouvelles reçues d’URSS, le fait que de nombreux résistants qu’ils avaient côtoyés, avaient été arrêtés ou exécutés dans les « démocraties populaires » les ont éloignés progressivement du communisme. Ils ont accueilli avec enthousiasme la création de l’État d’Israël où une partie de la famille s’est établie, certains avant guerre, d’autres à la libération. Mes parents seront opposants à la guerre d’Algérie. Mon père sera au PSU avant de virer à droite en 1967.

J’ai eu une éducation pas seulement athée mais profondément antireligieuse. Je ne suis pas circoncis. Je savais que j’avais des grands-parents soviétiques et que mes parents parlaient parfois des langues bizarres à la maison, mais je ne savais pas que j’étais juif. Un jour (je dois avoir 8 ans), je rentre de l’école et je raconte des choses que j’ai entendues sur les Juifs dans la cour de récréation. Mes parents sont bouleversés. Ils me prennent dans une chambre, rideaux baissés. En une heure, on m’explique tout : l’antisémitisme, les pogroms, les camps d’extermination … Je suis devenu juif.

Ma famille parlait politique sans arrêt et j’ai commencé très tôt à lire Le Monde et Le Canard Enchaîné. Enfant, je suis allé à deux reprises visiter mes grands-parents en Union Soviétique. J’y ai découvert un antisémitisme décomplexé et une société qui n’avait pas grand-chose à voir avec le socialisme.

Mes parents parlaient très souvent des Juifs. Tous les grands scientifiques, écrivains, cinéastes, artistes, journalistes étaient juifs. Mes parents avaient même annexé Charles Chaplin au judaïsme. Ma mère savait même débusquer les Juifs qui avaient francisé leurs noms. Parmi les livres que j’ai lus, il y a « Le dernier des Justes » d’André Schwartz-Bart qui commence au pogrom d’York au Moyen-Âge et se termine à Auschwitz.

Le sionisme

À l’âge de 14 ans, je prends pour la première fois l’avion … pour Israël. Séjour familial au Club Méditerranée. Voyage d’une semaine dans le pays et visites familiales. Je trouve ça superbe : Le Néguev, la Mer Morte, Eilat et la Mer Rouge, Jérusalem. On visite des kibboutz qui (surtout en comparaison avec l’URSS), nous apparaissent comme le vrai socialisme avec leurs cantines collectives et la forme d’éducation des enfants. Le discours sur la beauté du pays, les slogans « du désert nous avons fait un jardin » me plaisent.

Je ne verrai pas d’Arabes. Je verrai un peu les régions frontalières et je partagerai l’admiration pour l’héroïsme des gens qui se défendent contre un ennemi qui veut les jeter à la mer. On ne voit quasiment pas de religieux, sauf à Méa Sharim à Jérusalem et je partage le mépris de mes parents à leur égard.

J’ai 16 ans au moment de la guerre des 6 jours (juin 1967) et je suis en train de passer le baccalauréat. Toute la famille vit cette guerre comme une menace d’anéantissement, une malédiction sur les Juifs, l’idée que les Arabes poursuivent l’œuvre des Nazis.

Sitôt mon bac passé, je pars travailler au kibboutz, à Sde Boqer, le kibboutz de Ben Gourion (que je ne verrai pas) dans le nord du Néguev.

Je suis bluffé. Il me faudra des décennies pour découvrir que les terres de ce kibboutz ont été volées à des Bédouins expulsés.

C’est un kibboutz athée, où je vais dépecer un sanglier (pas vraiment casher) et où on travaille le samedi. Il n’y a pas d’argent. Au magasin, on peut prendre ce qu’on veut, mais on ne prend que ce dont a besoin. Je monte fièrement la garde en pleine nuit (la première frontière est très loin). Je tiens à travailler jusqu’à 13 h alors que la chaleur du désert est déjà terrible.

Bien sûr, je ressens une gène quand un volontaire français qui a émis des critiques est expulsé. Je ne vois pas d’arabe, il n’y en a pas.

Pendant mes courtes permissions, je voyage. Je vois Jérusalem Est et Béthléem qui viennent d’être conquis. Je sens bien que les habitants sont mécontents mais j’évacue ces sensations de ma pensée : ces territoires vont forcément être rendus en échange de la paix, c’est ce que j’imagine.

Je viens à Tel-Aviv pour la bar-mitsva d’un cousin. En fait, avec mon éducation antireligieuse, j’ignore ce qu’est une bar-mitsva. Le père de ce cousin est un général de l’armée de l’air qui a été attaché militaire de l’ambassade d’Israël en France et qui sera plus tard (avec le criminel de guerre Rafael Eitan) un des deux députés du Tsomet, un parti de l’extrême droite « laïque ». Yoash m’explique tranquillement : « nous n’étions absolument pas menacés. Les plans d’attaque étaient prêts depuis longtemps. C’est moi qui ai fait les plans de bombardements de Bagdad et Khartoum. » Et il ajoute : « et tu vas voir, la colonisation va commencer » (je rappelle a posteriori que c’est le travailliste « de gauche » Yigal Allon qui a fait les plans – toujours appliqués – de la colonisation). Dans ma tête, un univers commence à s’effondrer. Moi qui étais venu « sauver mon pays » pour être solidaire contre ce que je croyais être un anéantissement programmé.

La bar-mitsva a lieu à Tsahalla, la banlieue « militaire » de Tel-Aviv. Je serre la main de Mordekhai Hod, général en chef de l’armée de l’air (qui vient de montrer son « efficacité »), d’Ezer Weizman (qui sera plus tard Président de la République). Je serre la main d’un petit gros (probablement Sharon). Et très probablement Eitan et Rabin étaient aussi là.

La fêlure

J’étudie au lycée Louis-le-Grand en plein Quartier Latin en 1968. Je participerai aux « événements » comme on les a appelés : occupation de mon lycée, comité de grève, Assemblées générales, manifestations, barricades, enthousiasme et désillusion. En un temps très bref, politiquement, je passe du « mendésisme » au communisme libertaire. La révolution est devenue à la fois possible et indispensable.

J’avais prévu avant mai 68 de repasser l’été au kibboutz. J’y retourne, mais cette fois le goût est plus qu’amer. Je suis dans un kibboutz capitaliste au pied du Golan occupé. Rien n’a le goût ou l’odeur des barricades parisiennes. J’entends des propos militaristes, racistes, colonialistes, réactionnaires. En plus pendant l’été, l’invasion de la Tchécoslovaquie me pousse un peu plus à croire que l’avenir, c’est la révolution partout : à l’Ouest, à l’Est, en Israël et dans les pays arabes. Je vais sur le Golan et un peu en Cisjordanie, toujours incapable de « voir » l’autre : le Palestinien. Jamais je n’avais apprécié la mentalité israélienne : la « chutspah, » ce mélange d’insolence et de sentiment de supériorité. Même mes parents, devenus depuis la guerre des 6 jours de fervents sionistes (surtout mon père qui a donné beaucoup d’argent à Israël) n’ont jamais supporté cette mentalité et ne se sont jamais posé la question d’émigrer.

La déception fera que je mettrai 26 ans avant de retourner en Israël. Mais la rupture n’est pas vraiment faite. Je constate que, dans tous les combats que je soutiens : au Viêt-Nam, contre l’apartheid sud-africain, contre les dictatures sud-américaines, Israël est dans le mauvais camp. Je soutiens les mouvements révolutionnaires, donc bien sûr je me sens solidaire du FPLP et des Palestiniens massacrés par le roi Hussein lors de « septembre noir ». Je ne saurai que bien plus tard qu’un pont aérien israélien en faveur de ce roi a été décisif. Je suis révulsé quand le Mossad assassine impunément en France Mahmoud Hamchari, représentant de l’OLP. J’aime à me présenter comme « juif palestinien ». En 1973, lors de la guerre du kippour, je suis pour les armées égyptienne et syrienne puisqu’il me paraît normal qu’elles veuillent récupérer leur territoire. Les débuts de la colonisation me révulsent, mais je reste aveugle face au négationnisme d’une Golda Meir pour qui les Palestiniens n’existent pas.

Je vis la victoire électorale de Begin en 1977 comme une catastrophe, oubliant que c’est la « gauche sioniste » qui a expulsé les Palestiniens en 1948 et initié la colonisation. Pour moi, Begin est un fasciste. Mais j’accorde encore plein d’excuses à la pseudo « gauche sioniste ».

Un « outing » qui a tardé.

En 1982, Begin et Sharon lancent leurs troupes sur le Liban. Il s’agit d’écraser l’OLP et de soutenir les fascistes des Phalanges Libanaises. Juste avant les massacres de Sabra et Chatila, j’envoie à une revue culturelle juive nommée « Traces » un texte de colère intitulé « Que reste-t-il du judaïsme ? » que je qualifierais aujourd’hui de « naïf » voire d’aveugle. Je commence par renvoyer dos-à-dos Israéliens et Palestiniens à propos de la guerre de 48. Je pose la question : « comment les Juifs peuvent-ils se conduire comme cela après ce qu’ils ont subi ? » Grossière erreur : les soudards de Tsahal ressemblent plus à ceux qui ont commis le génocide qu’à ceux qui l’ont subi. C’est plus tard que je découvrirai que pas mal de sionistes ont collaboré pendant le génocide nazi.

Mais je souhaite déjà dans ce texte un judaïsme sans sionisme. Je me réclame d’un judaïsme minoritaire et universaliste et je fustige ceux qui (déjà) traitent de « Juifs de la honte » ceux qui critiquent Israël.

C’est l’époque où la colonisation s’accélère. Je soutiens sans réserve Yasser Arafat contre les « extrémistes » de son camp. À partir de 1989, j’écris tous les mois les « brèves internationales » dans la revue « L’École Émancipée » puis, à partir de 2004 dans la revue « Émancipation ». Beaucoup de ces brèves ou des articles plus longs abordent la question juive, l’antisémitisme et la guerre au Proche-Orient. Leur mise bout à bout montre, documents à l’appui, comment a fonctionné le rouleau compresseur colonial.

En 1993, je me réjouis de la signature des accords d’Oslo. En même temps, je fais un voyage familial en Israël/Palestine à l’été 1994 et de façon prémonitoire, je prédis l’échec du « processus ».

Je suis horrifié lors de l’assassinat de Rabin. C’est pourtant lui qui vient d’installer 60 000 nouveaux colons et qui a amené l’armée pour protéger les « fous de Dieu » d’Hébron.

Qu’est-ce qui m’a manqué dans toute cette période ? Je gardais l’idée qu’Israël avait été un « havre de paix » pour les Juifs persécutés. Je ne faisais pas encore la distinction entre les Juifs qui sont arrivés là parce qu’ils ne savaient pas où aller et le sionisme qui, 40 ans avant Auschwitz, a commencé à mettre en place les structures qui allaient expulser les Palestiniens de leur propre pays.

Je ne mettais pas en cause la « légitimité » de l’État d’Israël. Il m’apparaît aujourd’hui clairement qu’on peut le tourner de tous les côtés : la Nakba, l’expulsion préméditée des Palestiniens, l’interdiction qu’ils reviennent et la destruction de leurs villages sont illégitimes.

Il me manquait encore quelques éléments d’histoire : le fait qu’à l’évidence les Juifs d’aujourd’hui ne sont pas les descendants de ceux de l’Antiquité. Ils sont des descendants de convertis de différentes époques et de différentes régions et les descendants des Judéens d’autrefois sont les Palestiniens. Il n’y a pas eu d’exil et il n’y a pas de retour. Il me manquait la compréhension du colonialisme particulier qui a été à l’œuvre.

L’antisionisme

En 2002, c’est la deuxième Intifada. Sharon lance ses soudards sur Ramallah et Jénine. Je décide de faire une conférence intitulée « Les Juifs, le sionisme et Israël ». Je m’attends à une assistance confidentielle et la salle est trop petite. Je croyais dire des choses connues de tout le monde et j’observe la stupéfaction de l’auditoire. Dans mon discours, j’ai une intuition : « pour fabriquer l’Israélien nouveau, il a fallu détruire patiemment le « Juif », l’étranger, le cosmopolite, l’universaliste, l’exilé … » ce qu’on traduit aujourd’hui par « le sionisme est un crime contre les Palestiniens et un suicide pour les Juifs ».

Il me faudra encore un peu de temps pour adhérer à l’UJFP, c’est le J qui m’embête. Au début de mon adhésion, l’idée dominante est « pas de crimes en notre nom », une façon assez narcissique de dire : « nous on est des Juifs propres ». La découverte du Palestinien, de la Nakba, de l’occupation, de l’apartheid, de la cage de Gaza, ce sera plus tard.

Tout le monde n’était pas antisioniste dans le mouvement de solidarité. Je me souviens d’une conférence sur « antisionisme, antisémitisme » en 2006. Des amis avaient affirmé que ce que je disais sur le sionisme était juste, mais que c’était une question d’histoire, sans grand intérêt puisque l’État d’Israël existe.

C’est Michel Warschawski qui conteste cette idée dans la préface de mon livre « Israël/Palestine, du refus d’être complice à l’engagement ». Le sionisme est bien la question centrale. Ce qui est à l’œuvre explique l’écrasement de la Palestine et la destruction de sa société. Si on pense qu’il n’y a pas d’alternative au « vivre ensemble dans l’égalité des droits », on ne peut que refuser une théorie de la séparation et la mise en place d’une société où, selon ses origines ou son identité supposée, les uns ont tous les droits et les autres n’en ont aucun.

Pierre Stambul


http://www.ujfp.org/spip.php?article6235
Avatar de l’utilisateur-trice
bipbip
 
Messages: 35413
Enregistré le: 10 Fév 2011, 09:05

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

Messagede bipbip » 09 Mar 2018, 01:57

« L'antisionisme, nouvelle forme d'antisémitisme ? »

Salon anticolonial - débat organisée par l'UJFP

Paris samedi 10 mars 2018
à 13h30, La Bellevilloise, 19-21 rue Boyer

Comment l'accusation d'antisémitisme sert à criminaliser l'antisionisme.

Intervenants : Maxime Benatouil et Pierre Stambul.

Après la projection du clip éponyme, Maxime Benatouil interviendra sur les offensives réactionnaires en Europe visant à normaliser juridiquement la criminalisation de l'antisionisme au nom de l'antisémitisme et Pierre Stambul interviendra sur le thème : Expliquer que la complémentarité sionisme /antisémitisme a toujours existé depuis Herzl. Sionistes et antisémites ont le même axiome : séparer les Juifs du reste de l'humanité.

https://paris.demosphere.eu/rv/59842
Avatar de l’utilisateur-trice
bipbip
 
Messages: 35413
Enregistré le: 10 Fév 2011, 09:05

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

Messagede bipbip » 10 Avr 2018, 01:38

Amalgame entre antisionisme et antisémitisme, l’arme des sionistes

Si l’on en croit Emmanuel Macron, Manuel Valls ou encore Anne Hidalgo, toute critique d’Israël relèverait de l’antisémitisme. Cela ne masque-t-il pas un autre discours ?

Dominique Vidal : Sans ignorer Manuel Valls et Anne Hidalgo, qui font du zèle, ce qui me paraît le plus grave, c’est l’initiative prise le 16 juillet 2017 par le président de la République. Non content d’inviter – pour la première fois – le Premier ministre israélien, incarnation de l’ultranationalisme, à la commémoration de la rafle du Vél d’Hiv et de lui donner du « cher Bibi », il a repris à son compte – pour la première fois aussi – l’amalgame de la propagande israélienne entre antisionisme et antisémitisme. C’est une faute politique, car on ne saurait transformer une opinion en délit. Les sionistes prétendent interdire l’antisionisme. Les communistes exigent-ils l’interdiction de l’anticommunisme, les gaullistes celle de l’antigaullisme ou les ultralibéraux celle de l’altermondialisme ?

Cette faute politique se double d’une erreur historique. Jusqu’en 1939, l’écrasante majorité des Juifs rejetait le projet sioniste. Et si, ensuite, le génocide nazi a poussé nombreux d’entre eux vers la Palestine, la majorité ne vit toujours pas en Israël. La majorité des Juifs du monde est-elle antisémite ?

Cette manœuvre est couse de fil blanc : il s’agit pour Benyamin Netanyahou de faire taire les critiques de sa politique. De fait, il n’a jamais été aussi isolé dans l’opinion mondiale.

Les États-Unis viennent de reconnaître Jérusalem « capitale d’Israël ». Est-ce un tournant dans la politique états-unienne ? Quelles peuvent en être les conséquences ?

Dominique Vidal : Non seulement cette décision viole les résolutions de l’ONU, mais elle tourne le dos aux positions affichées, de longue date, par leur diplomatie : contre la colonisation, pour deux États ayant chacun leur capitale à Jérusalem. Ce parjure sème le doute sur la parole des États-Unis et les disqualifie comme médiateurs.

Malgré l’isolement de Trump à l’ONU, cette provocation risque d’avoir de graves conséquences. Car elle encourage la radicalisation de la droite et de l’extrême droite au pouvoir à Tel-Aviv qui, tout en accélérant la colonisation, veulent désormais annexer le reste de la Palestine. La Knesset a adopté une loi en ce sens le 6 février dernier. Une autre permettra l’annexion des cinq blocs de colonies situés à l’est de Jérusalem, « bétonnant » l’hégémonie juive dans la ville et interdisant la naissance d’une capitale palestinienne. Sans parler de la nouvelle loi « verrouillant » Jérusalem. Même le Likoud, jusqu’ici plus prudent, exige l’annexion de la Cisjordanie.

Au-delà, le président américain pourrait porter un coup mortel à la solution des deux États, au profit d’un seul État où les Palestiniens n’auraient aucun droit – un apartheid à l’israélienne...

La politique française au Proche-Orient a-t-elle changé depuis l’accession à la présidence d’Emmanuel Macron ?

Dominique Vidal : Franchement, la politique proche-orientale du président de la République donne le tournis. Officiellement, il se prononce pour la création d’un État palestinien aux côtés d’Israël avec Jérusalem-Est pour capitale. Mais il refuse de reconnaître cet État pourtant entré à l’ONU et à la Cour pénale internationale. En revanche, il semble être intervenu, fin 2017, en faveur de la libération de Salah Hamouri – il était temps !

Mais il n’y a pas que la situation en Palestine. La France d’Emmanuel Macron est absente du conflit syrien comme du chaos libyen. Elle se pose en libératrice du Premier ministre libanais, mais se tait devant les crimes perpétrés par l’Arabie saoudite et ses alliés au Yémen… À quand une grande initiative pour faire baisser la tension entre Ryad et Téhéran et empêcher qu’elle ne débouche sur une guerre régionale ?

Revenons sur la campagne menée par Boycott-Désinvestissement-sanction (BDS).

Dominique Vidal : Sous la pression d’Israël et de ses inconditionnels français, Nicolas Sarkozy et François Hollande avaient mis le doigt dans l’engrenage de la criminalisation. Mais sur des milliers d’action, seules quelques-unes avaient été jugées.

Car ce n’est pas si simple. Il n’existe pas de loi réprimant le boycott. Et le jugement de la Cour de cassation de 2015 pourrait être « retoqué » par la Cour européenne des droits de l’Homme. Federico Mogherini, la ministre européenne des Affaires étrangères, a précisé : « L’Union européenne se positionne fermement pour la protection de la liberté d’expression et de la liberté d’association, en cohérence avec sa Charte des droits fondamentaux, qui est applicable au territoire des États membres, y compris en ce qui concerne les actions BDS. »

C’est une question de liberté, mais aussi d’efficacité dans la solidarité. Car il y a le boycott militant, mais aussi institutionnel : quand le Fonds de pension pour l’avenir de Norvège, la Danske Bank, la société de sécurité G4S ou encore Veolia et Orange se retirent des Territoires occupés, voire d’Israël, on comprend l’inquiétude des dirigeants israéliens. En qualifiant BDS de « menace stratégique majeure », Netanyahou nous montre le chemin. La meilleure réponse à la radicalisation de Tel-Aviv et de Washington, c’est BDS !

Dominique Vidal


https://bxl.indymedia.org/spip.php?article18290
Avatar de l’utilisateur-trice
bipbip
 
Messages: 35413
Enregistré le: 10 Fév 2011, 09:05

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

Messagede bipbip » 12 Avr 2018, 14:24

L'antisionisme est-il une nouvelle forme d'antisémitisme ?

Paris vendredi 13 avril 2018
à 20h15, Librairie Jonas, 14-16 rue de la Maison Blanche

Nous recevons à la librairie Dominique Vidal pour son ouvrage Antisionisme = antisémitisme (Editions Libertalia, Paris, 2018)

L'antisionisme est-il une nouvelle forme d'antisémitisme ?

C'est ce que le président de la République avait affirmé le 16 juillet dernier, en commémorant la rafle du Vel d'Hiv.

Dominique Vidal lui répond dans un petit livre très pédagogique. Pour lui, « cette vision constitue une erreur historique et une faute politique. »

Journaliste et historien, auteur de nombreux livres Dominique Vidal exprime ici son opinion, mais s'efforce surtout de donner les éléments d'information permettant à tout un chacun de se faire la sienne.

Depuis de longues années Dominique VIDAL nous fait l'amitié d'animer nombre des soirées organisées par les Violons à la librairie. C'est un véritable cadeau tant ses dons pédagogiques et son écoute enrichissent nos échanges

Dominique Vidal, journaliste, fut directeur adjoint au Monde Diplomatique, auteur de nombreux livres principalement à propos du Proche et du Moyen Orient

PAF adhérents 1€50 non adhérent 2€50

Conviviale sangria en fin de soirée

https://paris.demosphere.eu/rv/61344



Conférence-débat sur le thème

Antisémitisme et antisionisme

En solidarité avec la résistance héroïque du peuple palestinien

Paris dimanche 15 avril 2018
à 15h, Siège de la FTCR, 23 Rue du Maroc

Le peuple palestinien traverse, ces jours-ci, une étape cruciale de son héroïque histoire, à la suite de la décision des Etats-Unis de reconnaître Jérusalem comme capitale de l'entité sioniste et d'y transférer leur ambassade. Les Palestiniens ont réagi à cette agression par des luttes et des affrontements quotidiens avec l'armée sioniste, affrontements qui ont fait plusieurs morts et blessés en Palestine occupée (Jérusalem, Cisjordanie, Gaza). A Gaza, la manifestation pacifique et populaire (la Marche du Retour) du vendredi 30 mars à l'occasion de la Journée de la Terre a été violemment réprimée par la même armée d'occupation par des tirs à balles réelles qui ont fait plus 17 morts et autour de 1500 blessés. Et depuis le nombre de manifestants assassinés et blessés par la machine de la terreur sioniste ne cesse d'augmenter.

Pour soutenir le peuple palestinien dans sa lutte continue depuis plus de 70 ans et son actuel soulèvement, le Front Populaire (Tunisie)- Coordination France Nord organise une conférence-débat qui sera donnée par le militant anticolonialiste et antisioniste Pierre Stambul, le 15 avril 2018 à 15 heures, sur le thème

« Antisémitisme et antisionisme. Comment l'entité sioniste est devenu le laboratoire de I 'enfermement et de la régression »,

Avec la participation des associations palestiniennes.

« Comprendre l'injustice est la première condition pour la combattre ! »

Venez nombreux et prenez part au débat.

Vive l'héroïque lutte du peuple palestinien pour son émancipation !
Palestine vivra Palestine vaincra !

Front Populaire (Tunisie) Coordination France-Nord

https://paris.demosphere.eu/rv/61454
Avatar de l’utilisateur-trice
bipbip
 
Messages: 35413
Enregistré le: 10 Fév 2011, 09:05

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

Messagede Pïérô » 08 Oct 2018, 21:16

Peut-on critiquer la politique d'Israël ?
(sans être accusé d'antisémitisme...)

Villeneuve d'Ascq (59), jeudi 11 octobre 2018
à 20h, Espace République, Salle Marianne, Place de la République (Annappes)

Avec Rony Brauman, né en 1950 à Jérusalem, médecin, ex-président de Médecins sans frontières de 1982 à 1994, professeur, essayiste, (auteur, entre autres, d'un Manifeste pour les Palestiniens -Éditions Autrement, 2014)

« A-t-on le droit, en France, de contester la politique israélienne, de condamner son mépris du droit international, de dénoncer les injustices subies par le peuple palestinien ? Et ce, dans une période où le peuple palestinien est de plus en plus menacé par la colonisation, les projets d'annexion, le projet de redéfinir la nature même de l'Etat d'Israël ? »

https://lille.demosphere.eu/rv/6266

Image
Image------------ Demain Le Grand Soir --------- --------- C’est dans la rue qu'çà s'passe --------
Avatar de l’utilisateur-trice
Pïérô
 
Messages: 22436
Enregistré le: 12 Juil 2008, 21:43
Localisation: 37, Saint-Pierre-des-Corps

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

Messagede bipbip » 16 Oct 2018, 18:21

Déclaration de syndicats européens sur la définition pratique de l’antisémitisme donnée par l’IHRA

Une campagne se développe pour demander aux syndicats d’endosser la définition de l’antisémistisme portée pour l’IHRA (International Holocaust Remembrance Alliance). Des syndicats du réseau syndical européen pour la justice en Palestine ont souhaité s’exprimer face à une campagne qui met en cause les positionnements de solidarité avec la Palestine et qui est particulièrement vive en Grande Bretagne.

En anglais sur le site du réseau syndical européen pour la justice en Palestine
http://www.etun-palestine.org/site/2018 ... de-unions/

En tant que syndicats, nous agissons dans l’esprit de l’internationalisme de la classe ouvrière et pour la défense des droits humains, de l’égalité et de la justice. Sur la base de ces engagements de principe, nous dénonçons sans équivoque toutes les formes de racisme, et nous croyons fermement dans le droit à la liberté d’expression (et le défendons) en tant qu’aspect central et fondamental des démocraties réelles.

Nous observons maintenant avec une grande inquiétude comment, à la demande d’Israël, des gouvernements occidentaux adoptent des législations cherchant à mettre hors la loi la critique légitime d’Israël pour ses sérieuses violations des droits humains. De telles politiques ne font pas qu’entraver le droit à la liberté d’expression, elles dénient aussi le droit des Palestiniens, en tant que peuple opprimé, de critiquer leurs oppresseurs et de défendre leurs droits.

Particulièrement inquiétant est le cas de la promotion et de l’implémentation par les institutions européennes et les gouvernements européens de « la définition pratique de l’antisémitisme proposée par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste » (IHRA). Ce document a été l’objet de nombreuses critiques et de nombreuses inquiétudes.

Le document de l’IHRA est composé d’un résumé, d’une définition de l’antisémitisme en 40 mots et d’une liste d’exemples de ce qui, selon ses auteurs, pourrait constituer de l’antisémitisme. Certains de ces exemples suggèrent que la critique de l’Etat d’Israël pour des politiques qui violent les droits fondamentaux du peuple palestinien, y compris la discrimination raciale, les colonies illégales et l’annexion de territoires palestiniens occupés, serait de l’antisémitisme.

Le document, donc, constitue une grave menace pour le droit à la liberté d’expression, en confondant avec de l’antisémitisme des critiques légitimes des lois, de la jurisprudence et/ou des politiques d’Israël.

Très récemment, une dizaine d’organisations de la société civile palestinienne ont rendu publique une lettre appelant la parti travailliste britannique « à rejeter [la] définition biaisée de l’IHRA qui étouffe tout plaidoyer pour les droits palestiniens ». Selon la lettre,« adopter la définition de l’IHRA (avec ses exemples) ne ferait pas que diaboliser notre lutte actuelle pour la libération et l’auto-détermination. Cela réduirait aussi au silence une discussion publique [au Royaume-Uni] sur ce qui est arrivé en Palestine et aux Palestiniens en 1948, que plus de cent groupes noirs, asiatiques ou d’autres minorités ethniques (BAME) au Royaume-Uni ont appuyée ». Une quarantaine d’organisations juives du monde entier ont rendue publique une lettre mi-juillet appelant les gouvernements à se retenir d’adopter la définition pratique de l’antisémitisme de l’IHRA parce qu’elle « est énoncée de telle sorte qu’elle pourrait être facilement adoptée ou considérée par les gouvernements occidentaux comme identifiant intentionnellement la critique légitime d’Israël et le plaidoyer pour les droits palestiniens avec l’antisémitisme afin de supprimer les premiers. »

De plus, il y a de fortes preuves que la définition pratique de l’ IHRA est déjà utilisée en pratique pour restreindre, mettre hors la loi et criminaliser de telles critiques ou les efforts pacifiques pour qu’Israël respecte les droits palestiniens, comme cela est expliqué dans la fiche signalétique publiée par la Coordination européenne des comités et associations pour la Palestine (ECCP).

Kenneth Stern, l’auteur de la définition, a souligné à maintes reprises que l’intention de la définition est seulement de surveiller l’antisémitisme et de collecter des données dessus et s’oppose avec force à un usage de la définition pour le contrôle intérieur de la libre expression.

Plaider pour les droits palestiniens et chercher à faire rendre des comptes à Israël pour les violations flagrantes commises contre le peuple palestinien est une responsabilité morale et éthique qui doit être promue et protégée par tout état ou institution se revendiquant comme démocratique.

La définition pratique de l’IHRA et les exemples l’accompagnant, au lieu de fournir un cadre pour combattre l’antisémitisme, est un outil pour criminaliser le mouvement de solidarité avec la Palestine. L’adoption d’une telle définition aggrave l’injustice de long terme faite aux peuples autochtones de Palestine, elle réduit au silence les narratifs palestiniens et contribue à maintenir le régime israélien d’appartheid, de colonialisme et d’occupation illégale.

En tant que syndicats européens engagés sur les principes des droits humains, l’internationalisme et les valeurs démocratiques, nous appelons les gouvernements et les institutions à :

Rejeter la définition de l’IHRA pour son impact négatif sur la lutte palestinienne pour la liberté, la justice et l’égalité
Défendre et protéger le droit à la liberté d’expression et à la solidarité internationale, y compris le droit à critiquer les politiques racistes et discriminatoires d’Israël, qui pourraient être un crime d’apartheid contre le peuple palestinien
Soutenir les droits reconnus par les Nations Unies du peuple palestinien, dont le droit à l’autodétermination
Prendre des mesures effectives pour faire rendre des comptes à Israël sur ses violations flagrantes du droit international

Organisations syndicales signataires :

University and College Union – UK

Union Syndicale Solidaires – France

ACOD Cultuur – Union for Cultural Workers – Belgium

Communications Workers Union of Ireland

Mandate Trade Union – Ireland

Belfast & District Trades Union Council – Ireland

Derry Trades Union Council – Ireland, UK

Fagforbundet – Norway

CGT Catalunya

ELA – Basque Workers Solidarity – Basque Country

LAB – Abertisale Workers Committee – Basque Country

CIG – Confederacion Intersindical Galega – CIG – Galicia

IAC– Intersindical Alternativa de Catalunya


https://solidaires.org/Declaration-de-s ... tique-de-l
Avatar de l’utilisateur-trice
bipbip
 
Messages: 35413
Enregistré le: 10 Fév 2011, 09:05

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

Messagede bipbip » 17 Oct 2018, 19:47

Le sionisme : de la théorie de la séparation au suprématisme

Par Pierre Stambul. Publié dans l’Émancipation et par Solidaires.

La Knesset, le Parlement israélien, vient de voter « qu’Israël est l’Etat-nation du peuple juif dans lequel il réalise son droit naturel, culturel, historique et religieux à l’autodétermination ». Accessoirement, il a aussi voté que « L’Etat considère le développement d’implantations juives comme une valeur nationale et fera en sorte de l’encourager et de le promouvoir. »

Ainsi, le plus officiellement du monde, les 50% d’habitants entre Méditerranée et Jourdain qui sont considérés comme « juifs » ont tous les droits : politiques, économiques, possession du territoire et de la terre … et les 50 % qui ne le sont pas n’en ont quasiment aucun. Ils sont discriminés dans la loi, considérés comme des étrangers dans leur propre pays et souvent soumis à la « justice » militaire. Leur société a été impitoyablement fragmentée et l’occupant s’offre régulièrement contre eux des tueries impunies.

Parallèlement, les dirigeants israéliens n’ont plus aucun complexe à proclamer qu’ils sont d’extrême droite et à proférer les pires propos racistes contre les Palestiniens, les Arabes, les Noirs et même, à l’intérieur de la société juive israélienne, contre les Juifs non européens. Ils n’éprouvent pas la moindre gêne à s’afficher comme les amis indéfectibles des antisémites, que ce soit le dirigeant hongrois Viktor Orban qui a entrepris de réhabiliter le régime pro nazi de l’Amiral Horthy, ou les Chrétiens Sionistes des États-Unis pour qui les Juifs doivent disparaître s’ils ne se convertissent pas à la vraie foi.
Cette situation n’est pas un accident de l’histoire. Elle était inscrite à l’origine dans l’idéologie sioniste qui a permis la fondation de l’État d’Israël et le nettoyage ethnique accompagnant cette création.

La séparation : une idée simple et meurtrière

La fin du XIXème siècle est marquée en Europe par un véritable consensus antisémite chez les dirigeants européens. Alors que les grands empires (autrichien, russe, ottoman…) s’affaiblissent, les nationalismes naissants professent tous l’idée simpliste « un peuple = un État ». Or les Juifs sont devenus en Europe une minorité invisible, obstacle au rêve fou d’États ethniquement purs. La majorité des Juifs du monde vivent à cette époque dans un seul pays, l’empire russe, et le régime du tsar organise régulièrement contre eux des pogroms pour détourner la colère populaire.

Le sionisme qui naît à la fin du XIXème siècle proclame dès le départ que Juifs et non Juifs ne peuvent pas vivre ensemble, ni dans le pays d’origine, ni dans le futur État juif qu’il faut construire. Les sionistes partagent les rêves de pureté des nationalistes de cette époque qui seront une des causes des deux guerres mondiales.

Mais où construire cet État puisqu’il n’existe aucune région d’Europe où les Juifs forment plus de 10% de la population ? Les sionistes recherchent une « terre sans peuple pour un peuple terre » pour reprendre les mots de l’écrivain Israël Zangwill. La majorité des sionistes de cette époque sont agnostiques ou athées. Afin d’avoir l’appui des religieux, ils choisiront la Palestine pour construire l’Etat juif. Peine perdue : la religion juive est une religion messianique pour qui le « retour » en Terre Sainte est interdit avant l’arrivée du Messie. Jusqu’en 1967, la majorité des Juifs orthodoxes seront indifférents ou hostiles au sionisme.

L’idéologie sioniste

Dès le départ, les dirigeants sionistes considèrent que l’antisémitisme est inéluctable et qu’il est inutile de le combattre. Alors que la majorité des Juifs de cette époque pensent que le combat pour leur émancipation en tant que minorité opprimée passe par le combat pour l’émancipation de toute l’humanité, et s’engagent massivement dans le mouvement ouvrier, les sionistes désertent le combat contre l’antisémitisme. Pire, Herzl, le fondateur du sionisme, n’hésite pas à rencontrer les pires dirigeants antisémites de l’époque en soulignant qu’il a en commun avec eux le souhait qu’un maximum de Juifs quittent l’Europe. Pour le Bund, parti révolutionnaire juif en Europe orientale, le sionisme est le parti de la bourgeoisie

Les Juifs étaient considérés comme les parias asiatiques inassimilables de l’Europe. Le sionisme a proposé de les transformer en colons européens en Asie. Balfour, le dirigeant britannique auteur en 1917 de la fameuse déclaration Balfour promettant que la Palestine deviendrait un « foyer national juif », était un antisémite notoire, ce qui n’a pas empêché les sionistes d’utiliser cette déclaration.

Copiant une idéologie hégémonique de cette époque, le sionisme a été dès le départ colonialiste.

Mais le colonialisme sioniste est très différent des colonialismes français ou britannique. Il ne vise pas à asservir et exploiter le peuple colonisé, mais à l’expulser et le remplacer. Le sionisme a été dès le départ négationniste vis-à-vis de l’existence, des droits et de la dignité du peuple palestinien. Il a voulu en faire les Amérindiens ou les Aborigènes du Proche-Orient, « transférés » au-delà du Jourdain ou enfermés dans des réserves.

Le sionisme a prétendu être un nationalisme et même un mouvement de libération nationale. Drôle de nationalisme, basé sur le mythe que les Juifs, après 2 000 ans d’exil, retournent dans « leur » pays. En réalité, les Juifs d’aujourd’hui sont majoritairement des descendants de convertis de différentes époques et de différents lieux. Les descendants des Juifs de l’antiquité sont surtout les Palestiniens.
Le sionisme est un curieux nationalisme qui a construit une gigantesque manipulation de l’histoire, de la mémoire et des identités juives pour inventer le peuple, la langue et la terre.
Le sionisme s’est bâti contre les différentes formes de socialisme auxquelles la plupart des Juifs s’étaient ralliés et il a été très longtemps le bras armé de l’impérialisme britannique en Palestine.

La mise en place d’une société séparée
Des décennies avant la création de l’Etat d’Israël, le sionisme a fondé les structures qui ont dépossédé le peuple palestinien de son propre pays. La Banque coloniale juive, dont les fonds servent à acheter la terre à des féodaux absents pour exproprier les métayers présents est fondée en 1898.
Le KKL (Fonds National Juif), qui plante des arbres pour cacher les ruines des villages palestiniens détruits, est fondé en 1901.
La Histadrout, le syndicat sioniste, est fondé en 1920. L’article n°1 de ses statuts défend le « travail juif ». La première action d’éclat de ce syndicat a été, dès sa fondation, d’organiser un boycott des magasins arabes pour « acheter juif ». Dans cette quête d’une société séparée, les kibboutz ont été un instrument de conquête, installés dans les zones à forte population arabe et réservés aux seuls Juifs.
La Histadrout a fondé la compagnie d’autobus Egged, la compagnie de navigation Zim, la compagnie des eaux Mékorot, la banque Leumi … toutes ces entreprises étant réservées à la société juive.
La Haganah (futur armée israélienne) a été fondée en 1920, suivie de peu par l’Agence Juive chargée d’accueillir les nouveaux immigrants. Dans un pays où la grande majorité de la population était palestinienne, le sionisme a construit avec la complicité du colonisateur britannique, des années avant la création d’Israël, une société coloniale séparée.
Le nettoyage ethnique de 1948 que les Palestiniens appellent la Nakba (la catastrophe) n’est pas un accident de l’histoire. Il était prémédité et organisé de longue date. L’idée du « transfert », la déportation des Palestiniens au-delà du Jourdain, est devenue majoritaire chez les dirigeants sionistes dès les années 1920. Bien sûr, les Juifs qui sont arrivés en Palestine, souvent faute d’autre choix possible, n’étaient pas tous, loin de là, venus pour expulser les Palestiniens. Les partisans d’un Etat binational ont obtenu environ 45% des voix aux élections internes au Yichouv (Les institutions juives en Palestine mandataire) en 1944.
Mais l’idéologie sioniste, en construisant une société coloniale séparée, avait organisé et prémédité l’expulsion depuis des décennies.

La collusion avec l’extrême droite : une histoire ancienne
Certains s’étonnent du racisme décomplexé de la plupart des dirigeants politiques israéliens actuels, qu’ils soient laïques ou religieux. Citons Ayelet Shaked, ministre de la Justice pour qui « les mères palestiniennes doivent être tuées et leurs maisons détruites de telle sorte qu’elles ne puissent plus abriter de terroriste ».
D’autres s’étonnent de la présence, lors de l’inauguration de l’ambassade états-unienne à Jérusalem de pasteurs évangéliques antisémites et néo-nazis comme Robert Jeffress et John Hagee qui pensent que les Juifs iront en enfer pour l’un et qu’Hitler a accompli une mission divine pour l’autre.
Le mouvement sioniste a connu une scission au début des années 1920 avec la création par Vladimir Jabotinsky d’un courant du sionisme qui s’est intitulé « révisionniste ». Les principaux dirigeants israéliens qui ont exercé le pouvoir depuis 1977 appartiennent à ce courant. Le père de Benyamin Nétanyahou était le secrétaire de Jabotinsky.
Celui-ci, pendant la révolution russe, a défendu publiquement Pétlioura, éphémère dirigeant d’une république ukrainienne indépendante, mais surtout pogromiste notoire : on estime à 40 000 le nombre de Juifs massacrés par ses troupes. Jabotinsky a été un admirateur de l’Italie fasciste. Plus tard après sa mort, un des groupes issus du courant révisionniste, le groupe Stern, a été ouvertement collaborateur avec le nazisme. Sa presse expliquait que le sort des Juifs du Yichouv était pire que celui des Juifs du ghetto de Varsovie (lire à ce sujet Marius Schattner, histoire de la droite israélienne de Jabotinsky à Shamir, 1999). Le groupe Stern a assassiné des soldats et des dignitaires britanniques (dont Lord Moyne, haut représentant britannique au Caire) jusqu’en 1944, alors que l’extermination des Juifs était en cours en Europe. Tout ceci n’a pas empêché son dirigeant, Yitzhak Shamir, d’être Premier ministre d’Israël pendant 7 ans dans les années 1980-90.
Ceux qu’on appelle improprement la « gauche sioniste » ont aussi négocié avec les Nazis, dès 1933, les accords de Haavara (accords de transfert). L’accord permettait l’émigration des Juifs allemands vers la Palestine mandataire en échange d’un mécanisme bancaire permettant le déversement massif des marchandises allemandes dans le Yichouv.
Après la deuxième guerre mondiale, Ben Gourion a négocié avec l’Allemagne fédérale d’Adenauer l’indemnisation des victimes juives du nazisme via l’Etat d’Israël. Le négociateur allemand était Hans Globke, conseiller d’Adenauer mais surtout ancien nazi notoire : il a été un des principaux auteurs des lois raciales de Nuremberg.
Plus tard, l’Etat d’Israël entretiendra des relations politiques et militaires avec les pires régimes : l’Afrique du Sud de l’apartheid, les dictatures militaires latino-américaines (Argentine, Guatemala, Chili …). Et aux Etats-Unis, le principal lobby pro-israélien, l’AIPAC, est lié aux néo-conservateurs et aux Chrétiens Sionistes, ceux qui pensent que, pour que le Christ revienne, les Juifs doivent chasser de Terre Sainte le « mal » (Armageddon, les Arabes) puis se convertir à la vraie foi sous peine de disparition.
L’amitié actuelle avec l’extrême droite raciste européenne dont les dirigeants (le néerlandais Wilders, le flamand Dewinter, l’autrichien Strache …) ont été invités en Israël, ou avec les partis d’Europe de l’Est descendants de ceux qui ont aidé les Einsatzgruppen dans l’extermination des Juifs, est la suite logique de fréquentations anciennes. Les dirigeants israéliens actuels sont infiniment plus proches de ceux qui ont commis le génocide que de ceux qui l’ont subi.

Israël : de l’apartheid masqué à l’apartheid décomplexé.
Après le génocide nazi, les dirigeants sionistes ont utilisé l’émotion issue de la révélation de l’ampleur de l’extermination, la volonté de régler la « question juive » en Europe en envoyant les Juifs ailleurs (en Palestine), et les préjugés colonialistes : les Israéliens étaient des Européens « développés » face à des Arabes forcément archaïques.
Le vote du « plan de partage » de la Palestine par l’ONU en décembre 1947, a permis aux dirigeants sionistes d’expulser la quasi-totalité des Palestiniens qui vivaient dans « l’Etat juif » offert par l’ONU aux sionistes.
Pour être admis à l’ONU, le nouvel Etat avait besoin d’une façade « respectable ». La déclaration d’indépendance (mai 1948) parle d’égalité et de respect des minorités. Et cela a permis l’admission d’Israël à l’ONU. Le texte explicatif de cette admission est un summum d’hypocrisie : il dit que le nouvel Etat respecte le droit international !
La réalité est toute autre. Tout a été fait pour que tous les Palestiniens partent. Des massacres comme celui de Deir Yassin (avril 1948) ont convaincu les récalcitrants qu’il n’y avait pas d’autre issue. L’ouverture des archives en 1998 a confirmé ce que les Palestiniens avaient toujours dit : il y avait un plan (le plan Daleth) d’expulsion de tous les Palestiniens. Cette expulsion s’est poursuivie au début des années 1950. Ceux qui ont échappé à l’expulsion sont des miraculés.
Derrière la façade du « seul Etat démocratique du Proche-Orient », la réalité est têtue. Israël a expulsé 800 000 personnes et détruit plusieurs centaines de villages. Alors que la résolution 194 de l’ONU stipulait, fin 1948, que les réfugiés devaient rentrer, Israël a interdit ce retour et a effacé systématiquement les traces de la Palestine. La question des réfugiés était née avec, de la part des sionistes, un cynisme calculé : « les vieux mourront, les jeunes oublieront ».
Certes les « Arabes israéliens » (qui sont des Palestiniens et préfèrent être appelés les « Palestiniens de 48 ») ont le droit de vote. Mais dans la plupart des cas, leurs terres ont été volées. Ils n’ont le droit d’habiter que sur une petite portion du territoire israélien. De très nombreux métiers leur sont interdits, dans la fonction publique et en général tous les métiers qui ont un rapport avec l’énergie, les transports ou la sécurité. Plus de la moitié des Palestiniens de 48 vivent sous le seuil de pauvreté.
Ces Palestiniens ont vécu de 1948 à 1966 sous régime militaire. Cette période est marquée par le massacre de Kafr Qassem (47 morts en 1956). Il s’agissait de villageois rentrant de leurs champs qui n’avaient pas été prévenus d’un changement d’heure du couvre-feu.
Aujourd’hui un nouveau nettoyage ethnique est en cours, contre les Bédouins palestiniens qui vivent dans le nord du désert du Néguev. Ils ont des papiers israéliens, et pourtant on détruit leurs villages (le village d’Al Araqib a subi plus de 100 destructions) parce que, dans un État juif, leurs droits de propriété ne sont pas reconnus et que les dirigeants israéliens veulent « judaïser » cette région.

Le Tribunal Russell sur la Palestine, tribunal symbolique, a déclaré que l’Etat d’Israël était coupable du crime d’apartheid. Il s’est particulièrement penché sur les discriminations légales contre les Palestiniens de 48. Le deuxième point de l’appel palestinien au BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions) contre l’Etat d’Israël (2005) exige l’égalité des droits entre Juifs israéliens et Palestiniens de 48.

La colonisation : le nouveau modèle

La colonisation de la Cisjordanie était préméditée. Aujourd’hui 12% des Juifs israéliens vivent au-delà de la « ligne verte » (la frontière internationalement reconnue). Les colons sont près de 50% dans l’armée et dans le gouvernement.
Dès 1967, les Israéliens ont créé un statut, pour les Palestiniens des territoires occupés, qui rappelle le code de l’indigénat dans les colonies françaises. Privés de tout droit à la citoyenneté, les habitants de ces territoires subissent la « justice » militaire, l’arbitraire le plus total sur la propriété des maisons et des terres, l’impunité de l’occupant, les arrestations de masse et les exécutions extrajudiciaires. Le portrait vivant de cet apartheid décomplexé, c’est la situation à Hébron où 2 000 soldats protègent quelques centaines de « fous de Dieu » déversant quotidiennement leurs ordures sur les Palestiniens et poussant leurs enfants à caillasser les écoliers palestiniens. C’est aussi la situation à Gaza, où deux millions de personnes sont bouclées par terre, par mer et par air et où l’armée israélienne commet régulièrement des massacres de masse.

Cette situation est ancienne. Le vote de la loi sur l’État-nation a officialisé et inscrit dans la loi cette reconquête coloniale.

Israël aujourd’hui, c’est ce que serait devenue la France si l’OAS avait gagné la guerre d’Algérie. C’est un pays dont les dirigeants professent ouvertement qu’une moitié de la population a le droit de dominer totalement l’autre. Et où la population a été dressée dans l’idée qu’il n’y a pas d’alternative à cette situation sous prétexte que le « vivre ensemble » serait inenvisageable.
Le roi est nu. A nous de savoir lutter contre l’apartheid que le sionisme a méthodiquement créé avec la même énergie et la même efficacité que ce qui s’est fait contre l’apartheid sud-africain.

Pierre Stambul


http://www.ujfp.org/spip.php?article6716
Avatar de l’utilisateur-trice
bipbip
 
Messages: 35413
Enregistré le: 10 Fév 2011, 09:05

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

Messagede bipbip » 30 Oct 2018, 14:13

Antisionisme = antisémitisme ?

Conférence-débat avec Dominique Vidal

Pennautier (11) mercredi 31 octobre 2018
à 20h30, salle des associations

Cette égalité repose-t-elle sur une quelconque réalité ? N'y a-t-il pas de juifs antisionistes ? Telles sont certaines des questions qui trouveront leurs réponses lors de l'intervention de l'ancien journaliste du Monde diplomatique !

http://amd11.free.fr/page-70/page-71/pa ... index.html
Avatar de l’utilisateur-trice
bipbip
 
Messages: 35413
Enregistré le: 10 Fév 2011, 09:05

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

Messagede bipbip » 04 Mar 2019, 20:11

Pierre Stambul : « J'abjure ! »

« L’antisionisme est l’une des formes modernes de l’antisémitisme ». C’est lumineux ! Comment n’avais-je pas compris plus tôt ? Merci, monsieur Macron, j’abjure !

Je croyais , comme le disent tous les historiens, qu’il y avait eu en 1948-49 un nettoyage ethnique prémédité de 800 000 Palestiniens, avec de nombreux crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Je croyais qu’Israël avait sciemment violé la résolution 194 de l’ONU sur le retour des réfugiés palestiniens chez eux et avait détruit des centaines de villages pour effacer les traces de la Palestine.
Grâce à vous, je sais qu’une telle pensée est antisémite. D’abord les Palestiniens, ça n’existe pas. Dieu a donné cette terre au peuple juif qui rentre chez lui après 2000 ans d’exil. Ce pays était une terre sans peuple pour un peuple sans terre, les Arabes sont partis d’eux-mêmes et Tsahal est l’armée la plus morale du monde. Quant aux réfugiés, souhaiter leur retour mettrait en doute la légitimité de l’État juif et est donc antisémite. J’abjure !

Je croyais naïvement que la colonisation était illégale, que la présence de colons violents à Hébron déversant leurs ordures dans la rue palestinienne et dressant leurs enfants à caillasser les écoliers palestiniens sous l’oeil débonnaire des soldats qui les protègent était une infamie. Je croyais que le mur qui balafre la Cisjordanie avait été condamné par la justice internationale. Je croyais que 850 000 Palestiniens avaient connu la prison depuis 50 ans, que des enfants très jeunes y croupissaient et que la torture y était pratiquée.
Merci, monsieur Macron de m’avoir fait comprendre que de telles pensées sont antisémites. Israël est la seule démocratie du Proche-Orient. Elle a le droit de se défendre, puisque ce sont des terroristes qui l’entourent et souhaiteraient que la Cisjordanie soit « judenrein ». D’ailleurs, comme l’expliquait très justement Monsieur Goldnadel, les Juifs sont chez eux en Judée-Samarie. C’est en Seine-Saint-Denis qu’il y a des colonies de peuplement.
J’abjure !

Je croyais bêtement que Gaza était une cage hermétique, par terre, par mer et par air, où deux millions de personnes étaient retirées du monde. Je pensais que le blocus de Gaza et ses conséquences (manque dramatique d’eau, d’électricité, de médicaments, de produits de première nécessité) était un crime. Il me semblait que les grandes vagues de massacres contre la population de Gaza étaient des horreurs et que les images de soldats poussant des cris de joie après avoir touché mortellement des civils désarmés méritaient des sanctions.
Vous m’avez fait comprendre que de telles pensées sont antisémites. Gaza est dirigée à l’évidence par d’affreux barbus terroristes qui veulent jeter les Juifs à la mer. À Gaza, les gens utilisent les enfants comme boucliers humains. Les soldats sont obligés de tirer pour empêcher une invasion et ils ne font que se défendre. D’ailleurs la France a manifesté en toute occasion son soutien à Israël. Ce sont les Israéliens les victimes et les roquettes qui partent de Gaza sont antisémites.
Merci monsieur Macron, même s’il n’est pas toujours facile de vous comprendre.
J’abjure !

Je croyais superficiellement qu’avec la loi sur « Israël-État-nation du peuple juif », l’apartheid qui existait depuis 1948 avait été légalisé. Entre la Mer et le Jourdain, il y a autant de Juifs israéliens que de Palestiniens. Il me semblait que le fait que les premiers aient tout (les richesses, le pouvoir politique et militaire, la terre …) et que les autres aient été fragmentés en différents statuts de domination relevait de l’apartheid. Il me semblait que l’apartheid était considéré comme un crime et que, contre lui, le boycott était prôné.
Vous m’avez aidé à comprendre le caractère antisémite d’une telle assertion. Si on détruit les villages des Bédouins du Néguev, c’est bien sûr pour les aider à avoir des maisons en dur. Ailleurs. On leur apporte le progrès. Si l’Arabe n’est plus langue officielle, c’est pour que, dans un État juif, les Arabes parlent la langue du pays, c’est progressiste.
Comment n’y avais-je pas pensé ?
Merci monsieur Macron, j’abjure.

Je croyais profondément que les amitiés racistes, fascistes et antisémites de Monsieur Nétanyahou avec les Chrétiens sionistes ou avec Monsieur Orban traduisaient la vraie nature de la direction israélienne. Ces fréquentations me rappelaient des événements anciens : Theodor Herzl expliquant aux dirigeants antisémites de l’Europe qu’il avait le même but qu’eux, faire partir les Juifs d’Europe. Ben Gourion signant en 1933 avec l’Allemagne nazie les accords de Haavara (transfert des Juifs allemands en Palestine) ou Yitzhak Shamir collaborant pendant la deuxième guerre mondiale en faisant assassiner des soldats britanniques.
Vous m’avez fait comprendre que de telles pensées sont antisémites puisque vous-mêmes avez pour ami un ancien du Bétar, monsieur Kalifat (président du CRIF) et que vous donnez du « cher Bibi » à Monsieur Nétanyahou, même quand il vient d’affirmer qu’« Hitler ne voulait pas tuer les Juifs, et c’est le grand mufti de Jérusalem qui lui a soufflé l’idée ». Ces gens-là font tout pour sauver le sionisme, il est antisémite de les critiquer.
J’abjure !

Fils d’un résistant du groupe Manouchian torturé par la police française, je n’avais pas bien compris ce qu’est l’antisémitisme. Merci encore monsieur Macron de me l’avoir expliqué.

J’abjure !

Pierre Stambul


https://blogs.mediapart.fr/gabas/blog/2 ... 4qv4FRfkYM
Avatar de l’utilisateur-trice
bipbip
 
Messages: 35413
Enregistré le: 10 Fév 2011, 09:05

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

Messagede Pïérô » 16 Fév 2020, 22:35

Antisionisme : Macron, Netanyahou et Trump sur la même ligne

En visite officielle en Israël, Macron ne s’est pas contenté de sa tentative grotesque et pathétique de singer Jacques Chirac avec sa sortie contre un policier à l’entrée de l’église Sainte-Anne de Jérusalem. Il y a réaffirmé la ligne politique considérant l’antisionisme comme une forme d’antisémitisme, présente dans la « résolution Maillard ».

... https://www.unioncommunistelibertaire.o ... ZImBYgulu0
Image------------ Demain Le Grand Soir --------- --------- C’est dans la rue qu'çà s'passe --------
Avatar de l’utilisateur-trice
Pïérô
 
Messages: 22436
Enregistré le: 12 Juil 2008, 21:43
Localisation: 37, Saint-Pierre-des-Corps

Précédente

Retourner vers Débats théoriques

Qui est en ligne

Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun-e utilisateur-trice enregistré-e et 4 invités