Mouvement et manifs, questions de stratègie

Mouvement et manifs, questions de stratègie

Messagede bipbip » 20 Sep 2016, 15:10

Manifs et mouvement, questions de stratègie

Pression policière, casse, affrontements… Avec Valls-la-Matraque, les manifs se sont pas pépères ! Attention cependant à ne pas se laisser aveugler par le romantisme de la violence… ni par le crétinisme de la légalité.

Grabuge organisé : ça passe ou ça casse ?

Lunettes de piscine, foulard, éventuellement casque… Pas de mal de gens ont redécouvert, en ce printemps 2016, l’équipement de base du manifestant alter­mondialiste du début des années 2000. Avec cette nouveauté : en tête des défilés, invariablement, une foule bariolée, à mi-chemin du black bloc et du carnaval, parsemée de drapeaux, syndicaux, libertaires ou autres, qui assume un certain degré de confrontation avec les forces anti-émeutes et ne s’émeut pas des vitrines de banques explosées au passage.

Indéniablement, et même si cette atti­tude est limitée à une petite fraction des manifestants, c’est l’indice d’une exas­pération : quand on met un bulletin dans l’urne, on est trahi ; quand on descend à 3 millions dans la rue comme en 2010, on est méprisé. Que reste-t-il alors pour se faire entendre ?

Le grabuge. Comme un démenti cinglant à la provocation de Sarkozy en 2008 : « Désormais, quand il y a une grève en France, personne ne s’en aperçoit. »

Le grabuge, cependant, peut-il être une alternative à la grève, aux blocages ? En aucune façon. Il n’a de sens que dans un contexte de lutte massive et populaire. Que quelques centaines de militantes et militants radicaux puissent, à eux seuls, faire plier l’État, nul n’y songe. La théorie insurrectionnelle de la révolution est morte il y a plus d’un siècle avec le vieux Blanqui. Et la théorie grève-généraliste qui l’a supplantée continue, bon an mal an, de prévaloir, parce qu’elle repose sur l’action directe de la masse des producteurs et productrices, qu’aucune force anti-émeute ne pourra jamais circonscrire.

Par ailleurs, dans un pays ­comme la France, n° 1 mondial sur le marché de l’armement de « maintien de l’ordre », l’Etat a parfaitement les moyens de contenir quelques centaines de personnes cagoulées dans un cadre ultra-prévisible  : parcours balisé, horaires annoncés… Gérer une horde de hooligans est plus complexe.

Or, contrairement aux hooligans, les manifestants anti-loi Travail ne sont pas des sacs à bière fanatisés : ce sont des militantes et des militants politiques qui savent apprécier une situation, un rapport de forces, et ne souhaitent pas entrer dans une escalade perdue d’avance avec la police. On l’a bien vu pendant ces quatre mois : les affrontements se sont limités à des caillassages, il n’y a guère eu d’engagement physique à l’initiative des manifestantes et manifestants, et quand ils sentaient que la fin du jeu approchait, c’était la dispersion.

Toute manifestation n’est-elle pas un spectacle ?

Il y a donc là une part de spectacle, mais après tout, toute manifestation n’est-elle pas un spectacle ? Spectacle du nom­bre, de la combativité, de la détermination, de la dignité… Avec le spectacle du grabuge et de l’affrontement avec la police, il s’agit de créer une atmosphère plus électrique que ne le fait la traditionnelle manifestation merguez-ballon.

Et, dans certaines villes moyennes, ça marche. Aujour­d’hui à Nantes ou à Rennes, la ou le manifestant « moyen » n’est plus effrayé par les robocops, par un canon à eau ou par le ­harcèlement d’un hélicoptère. On s’aguerrit. Les manifestations syndicales ne sont plus des rendez-vous plan-plan où l’on vient faire une petite balade…

Attitude ambivalente des syndicats

Face au grabuge, la réaction des organisations syndicales a été ambivalente. Elles ont évidemment refusé de se solidariser avec les « casseurs », dont l’image est négative auprès du grand public, mais ont aussi refusé d’« assurer l’ordre » dans les manifs, comme le gouver­nement les y exhortait, et ont axé leur communication sur la dénonciation des violences policières, d’une gravité sans commune mesure avec celle des manifestants.

Du côté des autonomes, il y a bien eu des tentatives d’accuser les services d’ordre syndicaux de collaborer avec la police, mais globalement ce discours préformaté s’est heurté à la réalité, avec un SO CGT qui n’avait ni la volonté ni les moyens de s’occuper de ce qui se passait devant lui. Les accrochages du 12 mai et du 17 mai suite au communiqué manipulateur de la préfecture de Paris ont donc heureusement été sans lendemain, personne n’ayant réellement envie d’une vendetta interne au mouvement.

Deux conséquences assez discutables

Que penser du grabuge ?

Tout d’abord, il faut le ramener à ses justes proportions. Des ­vitres cassées, c’est peu face aux calamités économiques et sociales engendrées par les banques. TF1 ou BFMTV ne pleurent jamais sur les dizaines de milliers de personnes surendettées, avec interdits bancaires ou expulsées de leur maison… mais s’étouffent d’indignation devant quelques vitrines étoilées. C’est dérisoire.

Ensuite, il faut souligner à quel point les violences policières sont plus dramatiques, parce qu’elles attentent aux personnes et non aux biens, et peuvent se traduire par des mutilations…

Le grabuge a cependant deux conséquences assez discutables : primo, il est mal perçu par la masse des manifestantes et manifestants qui n’y participent pas ; secundo, une partie des casseuses et des casseurs ont tendance à le fétichiser.

Le fait est que l’immense majorité des manifestantes et des manifestants n’assument pas cette pratique. La plupart affichent une indifférence gênée. Certains en ont honte. D’autres sont révoltés, ont le sentiment que leur mouvement est dévoyé. Les plus soupçonneux accusent la police d’être derrière tout ça. Combien de fois, en tant que révolutionnaire, a-t-on été interpelés à ce sujet ? On a beau minimiser, relativiser, montrer du doigt les violences policières et sociales, rire des montages médiatiques… on est bien souvent gêné aux entournures. La grève, le blocage d’une zone économique, le sabotage (dans le cadre d’un mouvement), on peut facilement les justifier, et même essayer de convaincre les collègues d’y participer. Mais dé­gommer des abribus, là, en général, on cale.

Le grabuge a-t-il dissuadé des gens d’aller en manif ? La question mérite d’être posée. Quand on est le nez dans le guidon, qu’on a l’habitude des manifs musclées et de l’adrénaline, on peut y trouver son compte. Quand on n’a pas cette culture et qu’on découvre des images tournant en boucle sur les réseaux sociaux, alternant scènes de ­destruction et violences poli­cières… on peut être intimidé.

Gare à la dérive fétichiste

Du côté des militantes et militants radicaux, le principal ­problème est qu’une minorité fétichise la casse. Les plus expérimentés savent bien quelle est la part du spectacle dans tout cela, se posent la question du message qu’ils transmettent et souhaitent ne pas uniquement générer de la vidéo d’émeute consommable sur YouTube – du riot porn. Mais, quand on voit fleurir des slogans glorifiant la casse pour la casse (« Je pense donc je casse », « Nous sommes tous des casseurs »...), tout en clamant en parallèle que « Nous ne revendiquons rien »… On a le droit d’être circonspect – même si, par ailleurs, on apprécie la poésie slogandaire.

Le risque est que des groupes radicaux dérivent dans le grabuge systématique, sans se soucier du moment ni de l’endroit, et sans autre résultat que la dislocation du trop maigre défilé qu’ils auront néanmoins cru bon d’accompagner… On l’a vu en 2014, lors de la manif contre le congrès du FN à Lyon. Ou plus récemment, dans les manifs lycéennes de mars contre la loi Travail, où des gens qui, souvent, manifestaient pour la ­première fois de leur vie, ont pu se sentir dépossédés de leur mouvement…

Les blocages économiques réconcilient tout le monde

Pour conclure, le grabuge n’est pas un problème en soi. Mais il peut l’être dans certains contextes, quand le mouvement social débute tout juste, qu’il est fragile, pas mûr pour endosser cela. Aux groupes radicaux d’avoir cela en tête s’ils veulent gagner la bienveillance ou, au moins, la neutralité de la masse des manifestants.

Pour faire admettre le principe de la « diversité des tactiques », il faut œuvrer à dépasser les ­préjugés d’un côté comme de l’autre, accepter que les pratiques et les rythmes militants ne sont pas les mêmes si l’on est étudiante, lycéen, cheminote, docker, intérimaire, vendeuse, avec ou sans enfants…

Le meilleur endroit pour dépasser les défiances, c’est encore sur les piquets de blocage. L’action directe réconcilie tout le monde. A Nantes par exemple, les temps les plus forts de la lutte ont été ces moments de convergence sur les piquets, notamment ceux de l’aéroport, où les travailleurs de Vinci fraternisaient avec les zadistes, avec un soutien actif des salarié-es d’Airbus.

Le gouvernement, le Medef et les médias cherchent à diviser le mouvement entre bons et mauvais manifestants. Les actions de blocage, en plus d’être efficaces d’un point de vue économique, ont l’immense avantage de souder le mouvement dans toute sa diversité.

Lulu (AL Nantes), Guillaume (AL Montreuil)

http://www.alternativelibertaire.org/?G ... asse-ou-ca
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Re: Mouvement et manifs, questions de stratègie

Messagede Pïérô » 20 Sep 2016, 20:24

De Rouen, un texte plutôt bien je trouve

K-way noirs et chasubles rouges devraient avancer ensemble (mais peuvent aussi continuer à se taper dessus)

Un retour sur la manifestation rouennaise du 15 septembre doublé d’un éclaircissement sur la situation nationale.

A Rouen comme en d’autres villes, le retour des manifestations s’est accompagné du retour des embrouilles entre les "syndicats" et les "autonomes". Le réflexe souvent juste dans ces histoires consiste à ne pas trop s'attarder. Cette fois-ci pourtant nous ferons l'effort de mettre des mots sur ce qui pourrait paraître intégralement anecdotique. Il faut bien tenter d'expliquer pourquoi différentes personnes affiliées à la CGT, à son service d'ordre, ou à quelque parti d’extrême-gauche, viennent faire pression sur le cortège de tête - physiquement ou à coup de menaces, de sermons et de stigmatisations grossières. Et pourquoi il serait préférable pour tout le monde que cela cesse.

Deux visions, deux perceptions s'opposent évidemment. Pour certains, la situation était très simple : les infirmiers et les aides soignants du centre hospitalier de Saint-Etienne-du-Rouvray (agglomération de Rouen) sont en grève depuis début septembre contre un projet crapuleux comme les managers savent en pondre. L'intersyndicale ayant décidé que ce serait aux agents en grève de prendre la tête de la manifestation, il fallait informer de cette décision les jeunes et les non-syndiqués placés en tête du cortège. Ceux-ci, évidemment absents de ces organes de décision, et soucieux de ne pas être cernés par un Service d’Ordre, refusèrent et ne cédèrent pas à la pression quand elle devint physique. L'affaire était bouclée. Et toutes les invectives sortant de la bouche des têtes syndicales allaient dans le même sens : c'était une honte, un manque de respect total pour ces travailleurs en grève. Comment faire ça aux hospitaliers ? Et tant pis si certains d’entre nous s’étaient rendus au centre hospitalier pour leur apporter du soutien. Armés de ces évidences, il était alors facile de justifier le coup de force avorté et de donner des leçons de morale condescendante. Mais l'argument est imparable : le cortège de tête a refusé de laisser la place aux hospitaliers en grève. Face à un tel scandale, tout était permis et rien ne serait pardonné.

Las. La réalité est souvent un peu plus complexe. Ceux qui avaient pris la tête du cortège constituent ce qu'on appelle maintenant et officiellement, à Rouen comme ailleurs, “le cortège de tête”, bien qu'il soit constitué d'un ensemble hétéroclite d'individus, de bandes et de forces plus ou moins organisées. Ensemble hétéroclite de forces autonomes au sens strict et descriptif du terme : autonomes à l'égard des structures politiques et syndicales classiques. Indépendant. Des étudiants, des chômeurs, des précaires, des salariés, des lycéens surtout et des syndiqués aussi, parfois lassés par le ronron des défilés officiels rythmés par Zebda et HK qui crachent leurs "on lâche rien".

Le développement de ces cortèges de tête autonomes dans les principales villes de France est l'un des traits marquants de ce mouvement. Il faut toute la mauvaise foi d’un journaliste pour parler de marge de la manifestation à propos de ces cortèges. A Rouen, depuis le début du mouvement, ces cortèges ont pris la tête des manifestations à une exception près. Pour être tout à fait honnête, il faut rappeler que ça ne s'est pas fait sans heurts ni tensions. Et qu'à plusieurs reprises les syndicats ont tenté de reprendre la main. Encouragés en cela par les forces de police qui leur demandaient de garantir la sécurité dans les manifestations. Finalement, chaque manifestation voyait cohabiter plus ou moins cordialement deux cortèges : un cortège syndical et un cortège autonome. Les frontières étaient parfois suffisamment floues pour que la police s'acharne à empêcher ceux qui étaient dans le premier de rejoindre le second. Il s'est vu des manifestations à Paris encore où l’on ne savait plus trop qui était qui. Et partout des complicités neuves se sont nouées entre des éléments des deux cortèges. Personne dans le cortège de tête ne déteste les « syndicats » en général, abstraitement. Et nombreux sont ceux qui font la distinction entre d’un côté les directions syndicales et leurs objectifs propres, et de l’autre, les salariés de base qui montent des syndicats et en font des instruments de lutte.

Deux cortèges. Deux temporalités. Deux logiques d’organisation. Ce 15 septembre à Rouen, pour cette manifestation, comme pour toutes les autres, certains éléments du cortège de tête s’étaient organisés à différents niveaux et avaient confectionné un dragon, une banderole et autres réjouissances qui n’avaient de sens que s’ils étaient en tête. Les forces autonomes du cortège de tête ne sont pas tenues informées des décisions de l'intersyndicale et sont de toute façon habituées à s'organiser indépendamment de ces décisions. Tout était prêt. Le dragon trépignait en attendant de cracher sa colère. C’est pourquoi quand certains représentants de la CGT sont venus lui dire que l’intersyndicale avait décidé qui serait en tête et qu’il fallait laisser la place, il fut difficile de s’exécuter. Et les pressions violentes exercées alors par le service d’ordre ne pouvaient que conforter le cortège “autonome” dans ce refus.

On peut s’étonner que l’intersyndicale ait pris cette décision et ait envoyé ses représentants officiels pour l’imposer. Néanmoins, si beaucoup ont parlé en lieu et place des agents de l’hôpital, certains d’entre eux s’étonnaient d’une telle embrouille et proposaient de partager le cortège de tête. D’ailleurs, des tensions entre les services d’ordre et les forces autonomes ont eu lieu dans différentes villes ce 15 septembre sans s’inventer de prétexte fallacieux. Ce jour-là, en fin de parcours à Rouen, la manoeuvre de neutralisation s’achève sur le refus de laisser le micro à des jeunes qui le demandaient pour porter une proposition relative à la tenue de l'université du PS à Rouen le 18. « La parole au dragon » est largement scandé. La situation s’envenime, et se clôt avec l’arrivée de la police qui signe tristement la dispersion.

Pour notre part, nous pensons que de telles embrouilles ne servent personne. Sauf à vouloir entretenir l’opposition caricaturale entre cortège syndical et cortège autonome comme le pouvoir semble y avoir intérêt. Quand le gouvernement tient responsable la CGT des débordements du 14 juin, point n’est besoin de tomber dans le piège. La CGT n’a pas à assurer la sécurité dans la totalité de l’espace public. Mais comme cortèges de têtes et cortèges syndicaux seront amenés à se recroiser, nous pensons qu’il est préférable de jouer carte sur table.

Considérant :
1.L’existence de forces autonomes qui n’ont pas vocation à être encadrées par les syndicats.
2.L’existence de syndicats au sens strict, combatifs, dont le rôle est déterminant dans tous les mouvements.
3.Le fait que chaque mouvement résulte de la combinaison de pratiques multiples, légales et illégales : manifestations, blocages, occupations, affrontements, casses, pétitions, etc., et de débordements en tout genre.
4.Qu’il ne revient à aucune fraction du mouvement d’imposer de façon hégémonique la ligne qui est la sienne à toutes autres fractions du mouvement.
5.Que c’est la conjonction de ces différentes lignes combattantes qui peut permettre de remporter des batailles politiques.

Il existe trois solutions possibles à cette tension entre les représentants syndicaux et les forces autonomes :
1. Le statu quo : c’est la situation actuelle. On s’ignore. On s’embrouille. On adore se détester. Parfois, quand le mouvement est à son point culminant et que les lignes bougent on trouve des terrains d’entente ou en tout cas de non-affrontement. Mais dès que le cortège de tête est moins imposant, le désir de le contrôler refait surface. Et les services d’ordre syndicaux se remettent à jouer des coudes.
2. Le rapport de force assumé et permanent. L’intersyndicale pourrait décider d’assumer une opposition franche et ouverte à l’égard du cortège autonome et de tout ce qui la déborde. Elle pourrait essayer de se donner les moyens de chasser les forces autonomes de la tête de cortège. Il faudrait pour cela s’équiper en conséquence et assumer aux yeux de tous de ressembler à une milice comme ce fut le cas à Paris, où cette tentation semble exister dans certains secteurs. Le coût politique d’une telle perspective serait assez élevé pour la CGT locale. On ne tape pas si facilement que ça sur 400 jeunes, et encore moins sur 4000.
3. L’art des distances. Il serait tout aussi possible de garder une distance convenable et d’en finir avec le comportement paternaliste propre à certains représentants syndicaux. Les syndicats doivent cesser de penser qu’ils doivent rendre des comptes à la police ou à leurs syndiqués sur tout ce qui peut se passer dans une manifestation. Un représentant syndical n’a pas à retenir la main qui s’apprête à fendre une vitrine de banque, il n’a pas à protéger un local politique, il n’a pas à imposer une manière correcte de lutter. Il n’a pas à essayer de canaliser un cortège sauvage en collaborant avec la police. Il existe des villes où l’on est parvenu à une telle entente. A Nantes par exemple, il ne viendrait pas à l’idée d’un syndicaliste de la CGT de mettre son nez dans les affaires du cortège autonome. C’est à partir d’une telle distance où chacun se contente d’occuper l’espace politique qui est le sien avec les gestes et les pratiques qui sont les siens que des complicités éventuelles peuvent se tisser, ou à défaut une indifférence bienveillante. C’est alors que nous pourrons commencer à envisager de façon un peu plus mature, moins mesquine, les taches historiques qui sont les nôtres.

https://www.facebook.com/notes/rouen-da ... 5816413628
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Re: Mouvement et manifs, questions de stratègie

Messagede bipbip » 15 Déc 2016, 14:54

Paris vendredi 16 décembre 2016

Journée d'études

Qualifier la contestation :
Insurrection, violence politique, manifestations en 2016


Journée d'études organisée par le Laboratoire Théories du Politique (LabTop- UMR CRESPPA) et le Centre d'Etudes Sociologiques et Politiques Raymond Aron (UMR CESPRA)

EHESS, École des hautes études en sciences sociales
Amphithéâtre François Furet, 105 boulevard Raspail, Paris 6e

Vendredi 16 décembre 2016 (9h-18h)

A chaque époque ses soubresauts, ses ébranlements et ses critiques : zones à défendre, désobéissance civile, cortège de tête des manifestations contre la Loi Travail, Nuit debout, hacktivisme, dissidence, insurrection, etc. Autant d'objets actuels et souvent récents, qui ouvrent des questions irrésolues par les sciences sociales, en ce qui concerne l'articulation entre social et politique dans ces luttes, ou encore le projet de transformation sociale qui y est énoncé. Ce sont les registres multiples de la contestation, et depuis des prises parfois contradictoires (entre le réalisme et l'impossible), dont il s'agit de fournir un aperçu cartographique à travers cette journée d'étude. Ce faisant, il s'agira de préserver ouverte une double tension : tension entre qualifications scientifiques et qualifications ordinaires ; et tension entre l'ambition taxinomique du sociologue et la résistance que les matériaux de son enquête opposent à toute entreprise taxinomique.

De nombreuses lignes de clivage, de nombreux linéaments traversent l'espace français des mouvements sociaux, mais une attention particulière sera accordée aux éléments suivants durant toute la journée : la configuration actuelle des scènes protestataires, et les transformations catégorielles des contestations, de leurs acteurs, reprenant ou non des traditions critiques et politiques ; la polarisation violence / non-violence, mais également « citoyennisme » / insurrection dans les grammaires contestataires, étant entendu que ces pôles constituent des idéaux-types entre lesquels se dessine une vaste palette de nuances intermédiaires ; l'agir contestataire, déployant des formes d'action directe, d'occupations, de récits et une relation spécifique aux ordres politiques ; la mise à l'épreuve de l'Etat, la relation aux ordres judiciaires et politiques qu'induisent ces contestations.

Cette journée d'études est conçue comme un espace d'échange où sont présentés des outils conceptuels et méthodologiques pour appréhender des enjeux spécifiques qui font l'objet de travaux en cours portant sur les mouvements récents (contestations, occupations, assemblées, Zad). Elle est ouverte à tous les doctorants et chercheurs intéressés par cet objet.

Contacts :
• Sylvaine Bulle (sbulle@club-internet)
• Manuel Cervera-Marzal (manuelcerveramarzal@gmail.com)

Programme

8h45-9h : Accueil des participants : Sylvaine Bulle (LabTop-CRESPPA) et Manuel Cervera-Marzal (CESPRA- EHESS)
• Presidence : Laurent Jeanpierre (LabTop-CRESPPA). Discutante : Paula Vásquez Lezama (CESPRA- EHESS)

9h-10h15 : Trajectoires et linéaments de la contestation
• Julie Le Mazier (CESSP-Paris 1) : « Les militants étudiants sont-ils des jeunes comme les autres ? Regards sur la mobilisation contre la loi travail à partir d'une sociologie des syndicalistes étudiants à la fin des années 2000 »
• Cyprien Tasset (IRIS-EHESS) : « Les investissements politiques du précariat culturel »
• Alexandra Bidet (CMH-ENS) et Carole Gayet-Viaud (CESDIP-CNRS) : « Enquêter sur Nuit debout »

10h15-11h30 : Réalités et ambiguïté de la démocratie radicale en 2016 : catégorie politique, publics.
• Albert Ogien (CEMS-EHESS) : « La démocratie radicale et ses ennemis »
• Michel Kokoreff (GTM-CRESPPA): « Des émeutes de 2005 à Nuit debout : continuités et discontinuités »
• Federico Tarragoni (LCSP-Paris 7) : « Nuit debout est-il un mouvement (véritablement) populaire ? »

11h30-11h50 : Pause 11h50-13h : Echanges animés par Laurent Jeanpierre et Paula Vasquez-Lezama

14-18h : Présidence : Olivier Remaud (CESPRA-EHESS). Discutant : Lilian Mathieu (CMW-Lyon2-ENS)

14h-15h15 : Registres de traitement de la contestation et pensée de l'Etat
• Alessio Motta (CESSP-Paris 1) : « L'inévitable émeute. La violence collective comme institution »
• Pierre Douillard-Lefevre ( Université Nantes) : « Prendre la rue : réflexion sur la militarisation de l'ordre et l'écologie de la résistance »
• Anthony Pregnolato (Centre Marc Bloch, Université Paris-Ouest) : « Les enjeux de la qualification de la "violence policière" dans le mouvement contre la loi travail : conflits et alliances contre les déviances policières violentes »

15h15-15h30 : Pause

15h30-16h45 : Ecologie sociale des luttes
• Emmanuel Ruzé (CRISSEA-Université de Picardie) : « Etude exploratoire du mouvement Nuit Debout »
• Clement Mabi (COSTECH-Université de Compiègne) : « Contester par Internet. Radicalité politique et circulation des discours autour du cas de l'opposition à l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes »
• Bruno Frère (Université de Liège) : « Faire émerger la critique dans le monde »

16h45-17h45 : Echanges animés par Olivier Remaud et Lilian Mathieu

Pot final

Intervenants

Alexandra Bidet est chargée de recherche CNRS au Centre Maurice Halbwachs. Dans le domaine de la sociologie du travail et des engagements, ou au croisement avec la sociologie économique, ses travaux portent attention aux valuations engagées dans les activités les plus concrètes.

Pierre Douillard-Lefevre, achève un travail de recherche en sociologie urbaine à Nantes sur la mise en concurrence des territoires, dans une perspective socio-historique. Concerné par la problématique des violences policières, il est également l'auteur de l'ouvrage L'arme à l'œil, violences d'État et militarisation de la police, Le Bord de l'eau, coll. Altérité Critique, 2016.

Bruno Frère est philosophe et sociologue, Professeur à l'Université de Liège. Il est l'auteur de plusieurs articles en sociologie politique et en théorie sociale. Il a notamment publié Le Nouvel esprit solidaire (Paris, Desclée de Brouwer, 2009) et Le tournant de la théorie critique (Paris, Desclée de Brouwer, 2015).

Carole Gayet-Viaud est chargée de recherche CNRS au Centre de recherches sociologiques sur le droit et les institutions pénales (CESDIP). Ses travaux visent à développer une approche pragmatiste des mœurs en démocratie, à partir d'enquêtes portant sur le côtoiement civil et ses épreuves.

Laurent Jeanpierre est professeur de science politique à l'Université Paris 8-Saint-Denis et directeur adjoint du Laboratoire Théories du politique (LabTop), composante du CRESPPA (UMR 7217, CNRS/Paris 8/Paris-Ouest). Il travaille actuellement à un ouvrage sur le traitement du possible en sciences sociales.

Michel Kokoreff est professeur de sociologie à Paris 8 et chercheur au CRESPPA-GTM. Il a notamment publié La Force des quartiers (Payot, 2003), Sociologie des émeutes (Payot, 2008) et Une France en mutations (Payot, 2012, avec J. Rodriguez).

Clément Mabi est maître de conférence à l'UTC de Compiègne en sciences de l'information et de la communication, ses recherches interrogent les questions d'expérimentation démocratique, de controverses environnementales et d'usages politiques du numérique.

Julie Le Mazier est docteure en science politique rattachée au CESSP. Elle a soutenu en 2015 une thèse intitulée : « Pas de mouvement sans AG » : les conditions d'appropriation de l'assemblée générale dans les mobilisations étudiantes en France (2006-2010). Ses travaux portent sur la sociologie des mobilisations, du syndicalisme et de l'engagement.

Lilian Mathieu est sociologue, directeur de recherche au CNRS (Centre Max Weber, ENS de Lyon) ; il a notamment publié La Démocatie protestataire (Presses de Sciences Po, 2011) et L'Espace des mouvements sociaux (Le Croquant, 2012).

Alessio Motta est doctorant en science politique à Paris 1/CESSP. Sa thèse porte sur les conditions de déclenchement des actions de protestation collective. Il travaille également sur le traitement social des 'théories du complot' et a publié récemment Discriminations et carrières, sur les discriminations chez les diplômés du supérieur.

Albert Ogien est sociologue, directeur de recherches au CNRS et enseignant à l'EHESS. Il est l'auteur de : L'Esprit gestionnaire (EHESS, 1995), et Désacraliser le chiffre (Quaé Editions, 2013). Il a écrit, avec

Sandra Laugier, Pourquoi désobéir en démocratie? (La Découverte, 2010) et Le Principe démocratie (La Découverte, 2014).

Anthony Pregnolato réalise une thèse sur l'espace des mobilisations contre les déviances policières violentes en région parisienne et en région Bruxelles-Capitale, des années 1980 à nos jours, en étudiant les conditions de possibilité des rébellions urbaines et des mobilisations non-violentes contre les déviances policières violentes.

Olivier Remaud est philosophe, maître de conférences à l'EHESS et directeur du CESPRA. Ses recherches actuelles portent sur le cosmopolitisme et la philosophie du sens commun. Il est l'auteur de Un monde étrange. Pour une autre approche du cosmopolitisme (Paris, PUF, 2015).

Emmanuel Ruzé est maître de conférences à l'Université de Picardie Jules Verne (laboratoire CRIISEA, en économie-gestion). Ses thèmes de recherche sont entre autres les communautés en ligne, les mouvements sociaux, l'économie politique, les théories des organisations et les systèmes d'information.

Federico Tarragoni est maître de conférences en sociologie à l'Université Paris 7-Denis Diderot.

Chercheur au Laboratoire du changement social et politique (LCSP), il travaille sur le populisme en Europe et en Amérique latine, les processus de subjectivation politique et la question émancipatoire. Il vient de publier L'énigme révolutionnaire aux Prairies ordinaires.

Cyprien Tasset a soutenu en 2015 une thèse de sociologie menée sous la direction de Luc Boltanski, intitulée Les intellectuels précaires, genèses et réalités d'une figure critique.

Paula Vásquez Lezama est anthropologue, chargée de recherche au CNRS et membre du CESPRA. Ses recherches actuelles portent sur la relation entre militarisation et expression des émotions en Amérique latine. Elle est l'auteure de Le charisme ou le militarisme compassionnel (Paris, Editions de la MSH, 2014)

Organisateurs

Sylvaine Bulle est sociologue, maitre de conférences, chercheure au LabTop-Cresppa. Ses travaux portent sur la sociologie de l'Etat, des conflits, de la violence intercommunautaire et sur les contestations radicales.

Manuel Cervera-Marzal est docteur en science politique et actuellement ATER à l'EHESS. Il a publié Les nouveaux désobéissants : citoyens ou hors-la-loi ? (Le Bord de l'eau, 2016). Ses recherches post-doctorales portent sur les militants de Podemos et les mouvements sociaux espagnols.

https://paris.demosphere.eu/rv/51204
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Re: Mouvement et manifs, questions de stratègie

Messagede bipbip » 31 Aoû 2017, 13:05

Essai sur la nasse

« La nasse » est le nom d’une technique policière , qui, quoi qu’ancienne, s’est largement répandue ces dernières années. La nasse est à l’origine, littéralement, un « piège à rat » qui a la particularité de laisser passer le rat dans un sens pour attraper un appât et de l’empêcher par la suite de sortir du piège. Une nasse, symboliquement c’est un passage irréversible.

La technique policière qui porte le même nom, consiste à regrouper, puis séparer, puis encore bloquer un groupe plus ou moins important d’opposants ou de manifestants agités, au sein d’une foule plus grande, pour ensuite appliquer différents types de répression collectifs et violents. Ce qui fait la particularité de cette technique répressive, c’est qu’elle tourne le dos aux principes traditionnellement admis quant au traitement à appliquer aux trublions et contestataires. Traditionnellement, l’effort policier consistait à empêcher ces individus de se regrouper, ou d’occuper une position dans la foule ou le cortège. Il s’agissait au maximum d’éviter toute situation d’opposition frontale et collective. Ici il s’agit exactement de l’inverse : le mouvement est provoqué, accompagné, puis bloqué jusqu’à ce qu’il soit réprimé collectivement.

Auparavant, il s’agissait de minimiser le phénomène, d’empêcher les militants désireux d’en découdre de se regrouper, et de se compter. Dans la logique policière, actuelle, de la nasse, on cherche au contraire à identifier et visibiliser le groupe, mais c’est pour le couper des autres à la fois physiquement et symboliquement : il s’agit de désigner les moutons noirs et de les stigmatiser comme étant les instigateurs de la violence … qu’au final ils recevront contre eux mêmes.

Par un retournement de la logique répressive, « être nassé » constitue en soi même une sorte de délit et partant, une justification anticipée de la répression que l’on recevra probablement. La nasse fait ainsi oublier qu’elle constitue comme inévitable l’affrontement qui en découlera. Que peuvent faire en effet les groupes « nassés » et bloqués sinon tenter d’attaquer le point de la nasse qui leur apparaît comme plus faible pour s’en sortir ? Par une inversion logique et temporelle c’est « cette attaque pour en sortir » qui justifie a posteriori la nasse qui a provoqué (ou au moins attisé) le phénomène. On constitue ainsi des ennemis intérieurs qui deviennent visibles et visiblement violents et qui peuvent donc participer à une politique générale de découragement, d’intimidation ou de stigmatisation.

Si on considère la technique de la nasse en dehors et de son contexte policier et qu’on s’intéresse à ce qu’elle exprime comme mode de traitement collectif des minorités indésirables, on peut aussi entrevoir que son registre n’est pas seulement sécuritaire, mais concerne aussi le social. Dans le social aussi , on est passé d’un mode de traitement basé sur le mouvement, l’accompagnement, la prévention de l’aggravation des situations et la dispersion dans la société globale, vers d’autres modalités d’action qui compartiment, bloquent et déterminent un parcours de confrontation violente et inégale.

Aujourd’hui, il n’y a pas besoin d’être grand clerc pour comprendre comment des catégories entières de la population se retrouvent « nassées », c’est à dire à la fois regroupées, bloquées et visées par l’évolution des politiques sociales. Etre Rrom aujourd’hui, jeune des citées, RSA-ste, ou chômeur de longue durée, constitue bien une position d’isolement au sein de la société et plonge chaque individu dans une catégorie désormais visée par nombre de mesures, ou projets de réformes « offensives » ou violentes en ce qu’elles ciblent leur catégorie.

Il ne s’agit plus de faire sortir les gens de leur catégorie mais qu’ils y restent et qu’en quelque sorte ils y pourrissent comme dans un piège. A force d’être bloqués, les groupes sociaux « nassés » perdent toute relation globale (et tout soutien) du reste de la société. Leur position, leur posture, leur situation perd progressivement tout sens. Ils ne font plus partie d’une catégorie sociale arbitraire, du fait de difficultés spécifiques ou de processus de marginalisation économiques et sociaux ; ils font partie de la « nasse », par fatigue et décomposition : ils ont fait le mauvais choix ; ils sont passés dans la nasse. Ainsi on décourage progressivement tout phénomène d’identification et de sympathie entre les catégories stigmatisées et le reste de la société.

Ainsi les « jeunes des cités » sont ils condamnés à rester « jeunes » pour tant d’entre eux jeunes jusqu’à 40 et 50 ans ; ainsi les Rroms et les mal-logés, retombent -ils régulièrement à la rue et à l’insolvabilité ; ainsi les « sans-droits » sociaux reperdent le peu qu’ils ont acquis à toute occasion.

Bien entendu, une idéologie individualiste mettra toujours en avant des cas de promotion exceptionnelle, de sortie magistrale des situations socialement marginalisantes. Ce sont des « sorties » de la nasse, littéralement des exfiltrations, au cas par cas, qui ne changent rien au dispositif par lui même. Le but de la valorisation de la sortie de ces individus, sert à donner du poids à la « théorie du (mauvais) choix », qu’auraient fait tous les autres, pour rester dans une nasse dont la principale fonction reste cependant, bel et bien l’irréversibilité.

Aujourd’hui les catégories dans lesquelles on enferme les gens sont en effet tout autant irréversibles que promises à la dégradation de leur situation.

Après guerre, et jusqu’à la fin des années 60, on « excluait » les marginaux , c’est à dire qu’on les tenait « dans un ailleurs social », voire sociétal, une irréductible altérité qui empêchait toute participation . On les mettait en quelque sorte dans un dehors dont on ne savait rien et dont on ne voulait rien savoir. Les marginaux d’aujourd’hui, à l’inverse, sont « inclus », c’est à dire qu’ils sont parqués, surveillés, connus, bloqués. C’est le véritable sens à retenir de cette notion d’inclusion souvent présentée comme l’aboutissement de la générosité sociale , mais qui dans les faits, constitue des « prisons de l’intérieur ».

On comprend où est le piège , ou la difficulté pour l’acteur social , désireux de lutter contre ces violences, ces blocages et ces enfermements. Il ne peut en effet entrer en contact avec les groupes et les individus « nassés » qu’en contribuant indirectement à leur propre enfermement ou blocage. Plus il les cible, plus il fait des projets pour eux, …plus il les enferme. Il peut, lui aussi, à force d’accompagnements affaiblir un point de la nasse, mais celle ci se reconstituera un peu plus loin , car « l’effort pour en sortir » justifie et provoque le renforcement du dispositif et de l’assignation.

Que faire alors ? D’abord, il faut se reconnaître comme « nassé », apprendre à voir la nasse, pour ce qu’elle est : la condition irréductible, première , indispensable pour travailler à toute modification de la situation.

Comprendre les rouages des facteurs d’exclusion, apprendre à reconnaître comment ils s’agencent et se renforcement les uns, les autres, constitue le préalable à toute difficulté d’agir. On découvre pourquoi le désir de comprendre est tellement réprimé, découragé au nom de la vindicte d’une « pseudo culture de l’excuse » ; car quand on commence à voir et à comprendre, on ne voit plus du tout le monde de la même manière que les journalistes, les politiques et les médias et tous ceux qui s’arrogent le monopole de sa représentation.

La Pédagogie sociale , depuis Paolo Freire, est école de compréhension de « sa » condition. C’est la tâche même de tout ce que l’on met en œuvre dans nos ateliers et auprès des publics les plus « nassés » : activités d’expression de soi (dans la dimension individuelle et collective du « soi »), propositions d’organisation.

On ne se sort pas de la nasse en attaquant ses limites mais en l’occupant, en l’organisant, en en faisant un « centre désirable » par l’expression et la communication, et en convainquant les autres de venir nous y rejoindre.

C’est comme cela que les clôtures cèdent toujours : quand elles sont simultanément attaquées des deux côtés.

Laurent Ott, Espace de Vie Sociale, Intermèdes-Robinson Site, blog et bien plus encore : http://www.intermedes-robinson.org Vidéos : http://www.dailymotion.com/user/Cultures_Robinson/1


http://www.questionsdeclasses.org/?Le-m ... age-de-soi
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Re: Mouvement et manifs, questions de stratègie

Messagede bipbip » 11 Sep 2017, 10:37

QUELLE STRATÉGIE POUR LES FAIRE CONCRÈTEMENT RECULER ???

Vous êtes très nombreuses et nombreux à vouloir vous mobiliser, mais vous êtes beaucoup à dire et redire à juste titre, qu'elle est la stratégie pour cette fois ci, obtenir la victoire ....

Il est évident que sans un vrai blocage du système, la partie d'en face ne bougera pas ou alors sur des détails, bien évidement les manifestations les dérangent mais pas au point de les faire renoncer à leurs projets, alors il faut une stratégie de blocage de l'économie, la journée du 12 qui est le marqueur de la contestation sociale en cette rentrée ne sera et c'est une évidence, juste qu'un début ...et il faut aue ce soit une réussite totale par le nombre dans la rue et dans les grèves ....

Il faut une ligne clairement affichée et pas que des slogans, souvenons de l'année dernière, " ni amandable, ni négociable, retrait..." et nous avons stoppé les hostilités le 15 septembre, sans le retrait ....

Nous devons cette fois ci dès le 12, travailler à la convergence la plus large possible, s'imposer une stratégie précise, avoir un carnet de route, démontrer au plus grand nombre que le camp d'en face flippe d'une unité large et que seule le tous ensemble les fera plier !!!

Nous allons proposer notre aide, il faudra de toute les façons un maximum d'aides, personne n'a la solution mais tous ensemble nous l'a détenons,, surtout ne pas oublier que nous n'allons pas lutter que pour contrer les ordonnances, mais tout le projet dicté par la finance et qui vise à détruire tout le tissu social dans. Notre pays .....

Ne soyons surtout pas rivaux mais complémentaires, nous avons beaucoup d'expérience dans la lutte, ce que ceux d'en face n'ont absolument pas, cette guerre des classes qui nous est faite, par des méprisant , nous la gagnerons !!!

Mais pour cela, il faut être convaincu que rien n'est bon dans le programme du jeune ROI, tout est à jeter, il faudra donc imposer un autre choix de société, à compter du 12 nous devons embarquer Avec nous un maximum de citoyennes et citoyens, pour cela ne pas combattre qu'un point mais toute la stratégie anti sociale ....

Le 12 septembre 2017, soyons au rendez vous avec l'avenir de nos gamins, notre avenir, celui de nos parents qui ont lutte pour nous permettre d'avoir ce que nous avons et en mémoire de celles et ceux qui y ont laissé leurs peaux, nous sommes toutes et tous concernés et cela est encore plus vrai pour les militant-e-s, imposons cette fois ci le principe de ne pas capituler, rien ne serait plus dramatique que de lâcher avant la victoire, soyons en conscient et travaillons à la concrétisation du tous ensemble ....

Cette fois ci, c'est eux ou NOUS !!!
S'UNIR POUR NE PLUS SUBIR....

https://www.facebook.com/photo.php?fbid ... 070&type=3
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Re: Mouvement et manifs, questions de stratègie

Messagede bipbip » 16 Sep 2017, 14:19

Il est urgent de s'unir…

LETTRE OUVERTE AUX SYNDICATS, ASSOCIATIONS, FRONTS DE LUTTE, FORMATIONS POLITIQUES

Amis et camarades,

Comme vous, nous constatons que le programme de Macron n’épargne personne, des étudiants aux retraités, des jeunes bénéficiant de contrats aidés aux assurés sociaux, des chômeurs aux locataires, des salariés à toute la population. Ce ne sont pas des « réformes » mais une contre-révolution libérale.

De toute urgence, nous voulons avec vous lever les obstacles à la mobilisation :
- d’un côté les mesures dévoilées chaque jour globalisent une offensive contre toutes et tous, de l’autre les dates de l'agenda de ripostes organisent leur dispersion.
- d’un côté un besoin de résister et une aspiration unitaire s’expriment en de nombreux endroits, de l’autre des prévisions de cortèges et d’actions semblent s’ignorer, voire se concurrencer.

Nous ne nous pouvons pas nous permettre le luxe d'une défaite. L’offensive de Macron est bien trop dangereuse et touche à l’essentiel.

La manifestation du 12 septembre, formidable encouragement, appelle une suite à la hauteur.

Mais la suite, pour l’heure ?
- le 21, journée interprofessionnelle avancée par la CGT ;
- le 22, adoption des ordonnances Macron ;
- le 23, manifestations de la France Insoumise et/ou de la CGT pour la paix ;
- le 25, début de la grève à l’appel des Fédérations de Transport CGT et FO ;
- le 26, journée nationale pour la défense des hôpitaux psychiatriques
- le 28, les retraités puis le 10 octobre, la fonction publique, le 13 octobre, la métallurgie...

Les voilà bien, les raisons de notre appel !

Toutes et tous, nous devons nous mettre autour d’une table pour définir ensemble une feuille de route, un plan de luttes, de grèves, de manifestations et des revendications communes, qui, en plus du retrait des ordonnances, permettent d’associer toutes les catégories professionnelles, la jeunesse, les précaires, les chômeurs, les retraités.
Embauches massives, hausse importante des salaires, développement des services publics et de la Sécurité sociale, c’est sur cette base commune que toute la population peut être entraînée dans la lutte pour envoyer aux oubliettes les projets de Macron.

S’unir pour ne plus subir, tout bloquer pour gagner, ce message du Front Social, nous allons le porter lors des échéances déjà décidées : nous appelons à réussir la journée du 21 septembre, veille de l’adoption des ordonnances. Par les manifestations, les grèves, le 21 doit peser de toutes nos forces.

Le 23 septembre, le Front Social portera aux manifestants de la France Insoumise la proposition unitaire de la convergence des luttes pour gagner.
Le 25 septembre, la grève des fédérations de Transports CGT et FO fait surgir le besoin de mouvements qui bloquent l’économie, autour desquels la solidarité de tous doit s’exprimer.

Ne nous dispersons pas ! Si le but est bien de construire un mouvement pour gagner, alors l’unité d’action doit l’emporter sur la dispersion qui conduit à la défaite. Tout est encore possible, et la bouffée d’oxygène du 12 septembre nous fonde à espérer l’élan unitaire de toutes et tous.
Soyons à la hauteur des enjeux, rencontrons-nous sans délai ni préalable. La résistance victorieuse au désastre social organisé par Macron est à ce prix, à la portée de toutes et tous.

S’unir pour ne plus subir

Front Social, le 12 septembre 2017

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Contre attaques du Code du travail et loi travail

Messagede digger » 17 Sep 2017, 09:26

Bon, ben, c'est la rentrée. Et pas la der des der.
Tout le discours syndical et politique est connu et entendu des dizaines de fois. Les bisbilles aussi. Rien de neuf et rien à espérer de ce côté.
La question, c'est qu'est-ce qui existe à la base à côté des mots d'ordre des organisations traditionnelles qui rentreront au bercail une fois qu'elles auront obtenu les miettes qu'elles appelleront victoire ?
Pas grand chose, malheureusement. Ou des forces qui n'ont pas conscience de leur propre force parce qu'elles restent dans des vieilles ornières et comme on dit, on ne franchit pas un fossé par plusieurs bonds successifs.
La loi travail, la loi Macron, est-ce le problème? Ou le problème, est-ce le capitalisme?
Alors pourquoi le mot d'ordre n'est-il pas aujourd'hui d'abattre le capitalisme et non de lutter contre une des nombreuses têtes de l'hydre ? (Sachant qu'il va lui en repousser dix autres, sur les retraites, la couverture sociale, l'éducation....)
A Nantes, et sûrement ailleurs, il n'y avait pas d'unité dans la rue. Les "anti-capitalistes" étaient minoritaires. Et disciplinés. La manif syndicale n'a pas été perturbée. Ensuite, la routine. 9 gardes à vue, les brimades habituelles, les coups de matraques sur l'épaule, les propos racistes pour le black, le voyage au tribunal, le renvoi de tout le monde avec un rappel à la loi, une épée de Damoclès de trois ans au-dessus de la tête. Quelques enragé-es de plus pour la prochaine.
Et le sentiment de ne pas vivre dans le même monde. Ca a été ça surtout le 12 (et 13) au téléphone avec la legal team et dans la voiture pour être à l'heure au tribunal.
Bientôt, il y aura les premières condamnations des "violences", et pas toujours d'où on pense. Après tout, un militant d'AL a bien condamné l'attaque des bus de fachos (même pas au cocktail molotov, juste à la peinture) lors du meeting de Le Pen à Nantes il y a quelques mois. Ses collègues de travail ne comprenaient pas...
Bien au-delà des loi Macron, actuelles et futures, il y a à construire avec les moyens du bord, locaux, dans les boîtes, dans les espaces libérés (et à libérer, et ce n'est pas du Hakim Bey), dans les rues même si on ne peut pas les tenir encore, dans les centres sociaux autogérés...
En quoi çà dérange les syndicats, les partis et orgas politiques dits "de gauche", voire "révolutionnaires". Le côté "incontrôlable"? Qui a peur de qui et de quoi?
L'efficacité ? (qui peut donner des leçons sur le sujet?) La "crédibilité"? (envers qui?)
Alors, appeler à "l'unité", très bien. Mais l'unité est plus que l'uniformité et l'obéissance à des mots d'ordre. Et elle porte bien plus loin et fait réussir beaucoup plus de choses. Bien plus la loin qu'une simple loi de plus et un mouvement (éphémère) de plus.
Bon courage à tous. :ping:
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Re: Mouvement et manifs, questions de stratègie

Messagede Pïérô » 18 Sep 2017, 11:06

J'ai déplacé le post en "questions de stratégie", plus adaptée pour échanger, car le topic lutte est envahi d'infos.

Je suis d’accord sur le fond. D’ailleurs cela révèle en partie une certaine faiblesse du courant anticapitaliste et révolutionnaire. Ce courant ne pèse pas assez pour influer suffisamment sur le cours des choses et faire partager l’articulation entre luttes défensives, réformistes, et projet de société autogestionnaire, communiste-libertaire. En même temps et malgré notre petit nombre il me semble que l’on peut dire que l’on fait ce qu’on peut et que cette voix existe et tente de se faire entendre et comprendre.

Si je parle d'articulation c'est bien parce que c'est dans les luttes que la conscience se forge. Et là on ne peut plus continuer à perdre. C'est en terme de rapport de force et de nombre qu'il y a enjeu dans un premier temps, et c'est en ce sens que la question de l'unité est importante. Je dénonce ce qu'est la CFDT, mais je suis bien content de voir qu'il y en a dans ce "syndicat" qui se révoltent et participent à la lutte. Et il en est de même pour FO dont une grande partie conteste la position de la direction syndicale. Nous ne pouvons pas imaginer une mobilisation d'ampleur avec seulement nos maigres forces, politiques mais aussi syndicales, et je pense notamment à Solidaires/SUDs et les CNT.

Sur le fond, il est clair que contribuer à apporter des contenus et du sens est nécessaire. L'expérience de la ZAD, et de la lutte qui se mène comme des alternatives en actes qui s'articulent, est importante de ce point de vue. La question de la convergence des luttes peut être justement un point d'appui à une remise en question du capitalisme.

Et on comprend bien qu'il y a du boulot... :wink:
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Re: Mouvement et manifs, questions de stratègie

Messagede digger » 18 Sep 2017, 18:01

Embuscade à la Nantaise - BACblock terror - Manif du 12 septembre à Nantes


correction de la formulation de l'adresse vidéo, admin Denis
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Re: Mouvement et manifs, questions de stratègie

Messagede Pïérô » 22 Sep 2017, 11:22

Un texte très long, avec des éléments interessants

Renouer avec l’Histoire. À propos de quelques propositions pour « aller au-delà du cortège de tête » et du regard porté sur nos actions.

Pourquoi le mouvement contre la loi travail 2 ferait-il mieux que le précédent ? Que s’est-il vraiment passé au printemps 2016 ? Comment peut-on inscrire ces réflexions dans la situation actuelle, et comment définir cette situation ? Autant de questions dont les conclusions pourraient nous aider à formuler quelques réflexions stratégiques pour dépasser le cortège de tête autrement que par de belles formules...

... https://paris-luttes.info/renouer-avec- ... ropos-8740
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Re: Mouvement et manifs, questions de stratègie

Messagede Pïérô » 09 Oct 2017, 10:51

Une grève pour toutes et tous

Par Théo ROUMIER

Annoncée initialement comme une journée d’action de la fonction publique, la grève du 10 octobre prend depuis quelques jours un cours nouveau et sera dans de nombreuses villes comme dans plusieurs secteurs professionnels un nouveau jour de lutte contre la politique anti-sociale du tandem Macron/Gattaz. Il est temps d’y aller.

En soi, la journée de grève dans la Fonction publique pouvait être intéressante pour celles et ceux qui ne se résignent pas. Inédite de par son arc de force très large (toutes les organisations syndicales de la fonction publique y appellent), elle permet de reposer la question de l’unité syndicale. Placée un peu moins de trois semaines après la précédente journée de grève interprofessionnelle du 21 septembre, elle pourrait se transformer en étape de convergence au gré de la combativité dans les différents secteurs, opérant une jonction contre les différentes attaques présentes (APL, CSG, ordonnances et loi travail XXL, contrats aidés supprimés…) et à venir (sur les retraites, notamment).

Et c’est ce scénario qui semble s’esquisser. Que ce soient dans les secteurs professionnels, comme à la RATP (CGT, FO, Solidaires, Unsa), dans le Rail (CFDT, SUD, Unsa), la chimie (CGT, SUD)... ou dans les départements (Aude, Bouches-du-Rhône, Cantal, Gers, Hérault, Loire-Atlantique, Loiret, Maine-et-Loire, Meurthe-et-Moselle, Puy-de-Dôme, Seine-Maritime, Deux-Sèvres, Tarn, Vienne, Yonne…), les appels à la grève public/privé se multiplient. Si les Unions départementales CGT et Solidaires sont bien sûr en pointe, les configurations intersyndicales peuvent aller au-delà et sont variées, comme dans le Maine-et-Loire 3. L’Union syndicale Solidaires a pris, nationalement, la responsabilité d’appeler ce 10 octobre l’ensemble des salarié.es à la grève 3. Gageons que les récents remous au sein de FO et de la CFDT achèveront de convaincre (plus qu’il n’y en avait déjà) des équipes militantes dans ces syndicats que l’heure est à l’action, vigoureuse et déterminée.

Encore plus de grève

Cette nouvelle journée de grève prendra donc aussi un caractère interprofessionnel qu’il ne faut pas négliger. C’est sans doute pour cela que le gouvernement a opéré un premier recul face aux organisations de routiers 3, la CFDT et la CFTC menaçant d’une grève le 10 octobre justement (auquel continue d’appeler par contre la CGT Transports), qui aurait rallié la grève reconductible lancée par la CGT, FO et Solidaires Transports dès le 25 septembre. Ce recul indique on ne peut plus clairement quel est le talon d’Achille de tout gouvernement : le blocage de l’économie.

On peut se lamenter et se dire que le « corporatisme » des routiers met en péril la grève générale… ce serait être de bien mauvais donneurs de leçon et, surtout, ça ne servirait strictement à rien ! L’enjeu – s’il faut éviter les replis corporatistes – est bien plutôt d’ancrer et d’étendre la grève partout (c’est par exemple ce que tentent de faire les salarié.es de la centrale nucléaire de Dampierre en grève illimitée contre les ordonnances depuis le 28 septembre). Il ne s’agit pas tant de demander à nos collègues de cotiser à une caisse de grève pour celles et ceux qui la feraient à leur place : il faut discuter et convaincre autour de soi d’y aller. Le droit de grève existe 3, utilisons-le ! Car c’est là, quand l’extension de la lutte à plusieurs secteurs devient possible, quand les assemblées générales de grévistes mènent la contestation, que la grève est la plus forte et que le blocage de l’économie devient réel. Nous voulons une victoire interprofessionnelle, pour toutes et tous ? Alors il faut construire une grève interprofessionnelle, de toutes et tous.

Pour l’instant, soyons lucides, le mouvement social qui se dessine n’est pas à pleine puissance. Mais pourtant il existe. À côté de ça, la conflictualité s’exprime aussi pour la défense de l’emploi, comme chez les cheminot.es de Périgueux 3 ou les salarié.es d’Hydro-Grenoble 3. Dans ce climat, une journée de grève forte le 10 octobre peut contribuer à redonner confiance. Dans la foulée, les métallurgistes sont invités à marcher jusqu’au siège de l’UIMM le 13 octobre 3. Et un appel, intersyndical et unitaire, à une nouvelle journée n’est pas improbable (on parle de la date du 19 octobre). Voilà de quoi faire.

Un peu de Catalogne

Et puis, au-delà des Pyrénées, nous avons bien vu qu’une grève générale c’est possible ! Le 3 octobre, la Catalogne a connu un arrêt massif de la production et de l’activité. Certes le contexte est bien différent, mais retenons que des habitudes ont été brisées. Ainsi, UGT et CCOO, les deux organisations syndicales majoritaires, envisageaient-elles d’abord de négocier des débrayages de quelques heures en journée. Malgré ça, c’est la grève toute entière qui s’est imposée : barrages routiers, blocages des zones industrielles, arrêt des transports, fermetures des commerces…

Ici l’état d’urgence et sa transposition dans le droit commun n’ont pas encore – pour la majorité de la population – l’évidence de la répression brute qui s’est déchaînée en Catalogne. Il a pourtant les mêmes ressorts et les mêmes conséquences : museler toute contestation, corseter nos libertés. Quant à la morgue d’Emmanuel Macron, elle vaut bien celle de Rajoy. Ses injures (« fainéants », « illettrés », qui « ne sont rien » ou « foutent le bordel ») à l’égard de la classe sociale qui est la nôtre ne peuvent pas rester sans réponses. Parce que d’autres, pour le moment réduits au silence, seront là, avec leur racisme et leur chauvinisme. On peut gloser sur le départ de Philippot du FN, mais ce parti ne subit pas non plus une crise de l’ampleur de celle de 1999 et la scission mégrétiste. N’oublions pas que ce dernier est en embuscade et que le fascisme (post- ou néo- peut importe) peut encore pointer son museau putride. Que ferait-il des dispositions liberticides adoptées, confortablement, par l’Assemblée nationale ?

Nous avons donc une responsabilité, face à Macron et face à Le Pen, celle de rendre visible, crédible, un projet politique et social autonome, hors calendrier électoral et s’opposant aux institutions, un projet bâti sur nos solidarités, nos luttes, nos résistances. Pour construire un pouvoir populaire.


https://blogs.mediapart.fr/theo-roumier ... es-et-tous
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Re: Mouvement et manifs, questions de stratègie

Messagede bipbip » 11 Oct 2017, 14:22

Négocier avec Macron ?

Boycott des « concertations » le 12 octobre : Non, nous n’en avons pas fini avec les ordonnances !

Le 12 octobre prochain, le gouvernement entend débuter les négociations avec les syndicats sur les réformes à venir sur la formation professionnelle, l'apprentissage et l'assurance-chômage. Alors que Macron et ses sbires entendent ainsi tourner la page des ordonnances, il est indispensable que les syndicats boycottent cette rencontre.

C’est avec la même méthode que pour les ordonnances que le gouvernement entend mener le « dialogue social » avec les organisations syndicales à propos des réformes sur la formation professionnelle, l’apprentissage et l’assurance-chômage. Chacun leur tour, les principales centrales des représentants des travailleurs seront conviées à l’Élysée, avec un calendrier extrêmement serré. En effet, le gouvernement entend débuter les concertations fin octobre sur la réforme de l’apprentissage, enchaîner début novembre sur la formation professionnelle, puis enfin attaquer dans la continuité la refonte de l’assurance-chômage. Une ligne politique dans la lignée des ordonnances, avec une attaque massive sur toute la ligne afin de mater toute contestation possible.

L’objectif affiché du tandem Macron/Philippe consiste bien entendu a « siffler la fin de la récréation » sur la question des ordonnances, et ainsi à entériner une « victoire » supposée et affichée comme telle, avec la signature en direct à la télévision des dites ordonnances par Emmanuel Macron lui-même. Une véritable urgence pour le gouvernement, alors que l’exécutif a vu l’un de ses plus fidèles lieutenants de ce début de quinquennat, Jean-Claude Mailly, mis en minorité dans Force Ouvrière. La centrale a, depuis, appelé à la mobilisation contre la loi travail XXL, fissurant gravement la « béquille de gauche » constituée par les appareils syndicaux aspirant à accompagner les réformes du gouvernement, condition essentielle à Macron pour imposer ses réformes.

A quelques jours de la mobilisation du 10 octobre, initialement appelée dans la fonction publique, mais avec laquelle des secteurs de la jeunesse et du privé convergent, le gouvernement entend donc ramener les syndicats dans les salons pour reprendre la voie d’un « dialogue social » mortifère pour l’ensemble des travailleurs et des classes populaires. Une façon aussi de chercher à démobiliser notre camp. En effet, il apparaît totalement contradictoire de manifester contre les ordonnances puis de courir à l’Élysée entamer les discussions sur les réformes à venir, toutes aussi néfastes.

Alors que l’arc de force intersyndical s’est objectivement renforcé avec l’entrée dans la bataille de Force Ouvrière imposée sous la contrainte à Mailly par la pression de la base, ainsi que par les prises de position de nombres d’unions locales et départementales de la CFDT, il est tout à fait indispensable que les directions syndicales refusent tout net le dialogue avec Emmanuel Macron ce 12 octobre. Il s’agit dans les faits du seul moyen pour envoyer au gouvernement le message : « Non, le combat contre les ordonnances détricotant le code du travail n’est pas fini ! » Par ailleurs, il apparaît aujourd’hui d’autant plus urgent qu’un plan de bataille soit discuté par les organisations des travailleurs, afin de penser une stratégie à même de renvoyer le gouvernement dans ses cordes et organisant la bataille à échelle nationale, par la grève reconductible et la fin des journées saute-mouton.


http://www.revolutionpermanente.fr/Boyc ... rdonnances
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Re: Mouvement et manifs, questions de stratègie

Messagede Pïérô » 14 Oct 2017, 01:13

Eric Beynel : "Il faut construire une grève générale reconductible"

Au lendemain de la mobilisation de la fonction publique, quelles suites à donner au mouvement social ? Public et privé convergeront-ils vers des modes d’actions unitaires ? Eric Beynel, porte-parole de Solidaires était l’invité de La Midinale.



http://www.regards.fr/la-midinale/artic ... ible-10619
Image------------ Demain Le Grand Soir --------- --------- C’est dans la rue qu'çà s'passe --------
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Re: Mouvement et manifs, questions de stratègie

Messagede bipbip » 15 Oct 2017, 20:00

FIN DE PARTIE OU NOUVELLE STRATÉGIE ?

Fin de partie contre les ordonnances Macron ? La manœuvre présidentielle du 12 octobre vise bien à ça, s’appuyant sur des confédérations qui semblent consentir à passer aux destructions suivantes, à savoir s’en prendre aux chômeurs, dont seule la moitié est indemnisée.

Ainsi Macron aurait porté dès le début de son règne une défaite dissuadant et hypothéquant les ripostes à venir. Il cherchait le K.O. pas la négo. Aurait-il réussi ? Pourtant, l’attente des militant.es combati.ves est considérable. Cette attente est faite de vigilance et d’expérience, nourrie des échecs de 2010 et de l’arrêt brusque, le 15 septembre 2016, par l’intersyndicale (CGT FO Solidaires) du mouvement contre la loi El Khomri.

La rentrée de manifestations saute-mouton, qui finit sur le perron de l’Élysée par une nouvelle mascarade de négociations Macron, provoque de la confusion, du découragement, mais aussi beaucoup d’interrogations. Un ras-le-bol se répand contre ces manifs promenades, alibis vérifiés d’un refus de combat qui dit son nom pour les uns, qui se dissimulait pour les autres mais qui vient de surgir au grand jour. Le 19 risque d’en faire les frais.

Que sont les lois Macron, si ce n’est l’utopie des patrons d’il y a quarante ans ?

Les conseils sociaux et économiques bientôt transformés en conseils d’entreprise, cœur des ordonnances bientôt transformées en loi, vont-il avoir raison du syndicalisme indépendant ? La ligne de fuite vers l’institutionnalisation à la valeur d’une tragi-comédie. Au moment où, autour du 12 octobre, la fausse monnaie de la négociation prend une nouvelle valeur, il apparaît pour tous les militants combatifs que l’identité même de Macron est la violence sociale, en aucun cas le paritarisme et la négociation.

Une course de vitesse est enclenchée entre stratégie gagnante ou institutionnalisation.

Au cœur de cette couse se trouve la stratégie gagnante contre la destruction du code du travail et la mise en place d’une politique libérale d’une violence sans précédent. À la périphérie se trouve une force négative mais redoutable, le découragement généré par la confusion d’un débat non assumé. Car les tenants de l’institutionnalisation mentent de façon monumentale sur ses bienfaits, tandis que les autres n’assument pas ce recentrage.

Les indices de ce débat sont présents dans le 10 octobre. L’unité syndicale était bien réalisée, mais seulement pour les fonctionnaires mobilisés pour leurs revendications. Sauf que plus de 30 structures interprofessionnelles CGT (UD) et professionnelles du privé (FD) ont métamorphosé une journée catégorielle en rendez-vous interprofessionnel contre toute la politique du gouvernement.

Or c’est précisément la veille de cette démonstration que l’unité s’est réalisée pour aller le 12 chez macron.
Dans les échanges réels, au Front Social, dans les syndicats et les associations, le sentiment est général d’un changement profond. Le syndicalisme fondé sur la Charte d’Amiens, qui liait revendications immédiates et émancipation générale, est la cible de l’État, mais celles et ceux qui sont aux manettes nationales des confédérations ne s’orientent pas vers sa défense.

Le syndicalisme d'en haut est bien rassemblé, mais autour de Macron.

Sous la férule de la CFDT et de FO, il consent à sa mutation institutionnelle. Tout sauf une surprise, la CFDT et la CFTC ont signé en juin 2011 un programme commun avec le Medef et la CGPME, et elles s’y tiennent. Quant à FO, née de la guerre froide côté ouest, elle se trouve en panne historique d’identité et opte pour ce qu’elle sait faire de mieux, produire du jaune.

Loin de son héritage révolutionnaire, la confédération générale du travail semble dépourvue de gouvernail et de skipper. Le « syndicalisme rassemblé », l’engagement dans les processus de « démocratie sociale » institutionnalisée semblent lui servir de boussole désaimantée.

Or le bilan est quasi nul de ce syndicalisme de lobbying, incapable de résister aux offensives en cascade contre l’État social depuis 2003. C’est fort de cette nullité que Macron pousse l’avantage pour traquer les forces vives du syndicalisme de lutte jusque dans la plus petite entreprise.

La grève et la rue, pas la rue contre la grève !

La stratégie gagnante consiste à reconsidérer les vertus des grèves reconductibles et surtout de refaire de la politique, au sens de dissoudre la césure entre lutte sociale et lutte politique contre Macron. Parce que Macron est le nom d’une guerre totale, et les commentaires abondants ont montré que son équipe est faite des agents de première ligne de la bourgeoisie tant française qu’européenne.

La rue est le lieu d’expression du rapport des forces sociales. Soit le cortège est un but en soi, et alors il devient comme aujourd’hui une aimable promenade, ou alors il groupe sur la chaussée conquise les grévistes, les mouvements de lutte, les acteurs des multiples résistances qui choisissent de s’y exprimer en commun.

Redonner à la rue sa fonction de démonstration de force, c’est considérer que cette force n’est tirée que de l’action d’entraînement dans les grèves et les lieux de résistance. Externaliser le rapport des forces hors l’entreprise, c’est la stratégie perdante, celle qui nous mène de 2003 (retraites Fillon mutilées sans coup férir), à 2010 où la rue majoritaire est rentrée bredouille, à 2016, où l’élan contre la loi El Khomri s’est tari un triste soir intersyndicale de septembre. Le refus doit s’exprimer d’une démarche de lutte de classe contre une institutionnalisation mortifère.

Comment s’opposer au mouvement d’exclusion du syndicalisme par les conseils sociaux et économiques et les conseils d’entreprise, si ce n’est par l’action revendicative dans l’entreprise, culminant par le recours à la grève reconductible ? C’est bien le défaut de ces mouvements qui fait la force de Macron.
Grève ou institutionnalisation ? Il n’y a plus de 3e voie « négociation »…

https://www.facebook.com/infocomcgt/pos ... 5781891388
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Re: Mouvement et manifs, questions de stratègie

Messagede bipbip » 27 Oct 2017, 00:35

En finir avec la dispersion, foutre le bordel tous ensemble

Salariés du public, du privé, jeunes, chômeurs et retraités sont visiblement disponibles, par dizaines ou centaines de milliers quasiment chaque semaine depuis la rentrée, pour engager sérieusement la lutte contre le gouvernement et le patronat. Ce constat provoque de plus en plus de discussions sur la stratégie des directions syndicales parmi les militants syndicalistes et les salariés les plus déterminés à stopper l’offensive menée par Macron et ses sbires. Quand vont donc cesser les appels dispersés, secteur par secteur, public d’un côté, privé de l’autre, syndicat par syndicat ?

Gagner face à Macron, c’est possible !

Une première évidence s’impose : si ces quatre journées avaient été regroupées les unes derrière les autres la même semaine, cela aurait forcément donné une autre force et une autre dimension au mouvement, pour commencer à faire vivre la réalité de la grève qui peut bloquer l’économie. Une deuxième évidence s’impose ensuite : pourquoi découpler la mobilisation du public et du privé ou celle des cheminots de celle des fonctionnaires ou des métallos ou des salariés de la santé alors que nous sommes tous attaqués et que c’est seulement tous ensemble qu’on peut gagner ? Des évidences peut-être. En tout cas de plus en plus partagées parmi celles et ceux qui sont les plus mobilisés... mais bien loin de ce que sont en train de nous concocter les dirigeants des principales organisations syndicales pour la suite du calendrier de mobilisation.

En finir avec la stratégie de la dispersion

De la réunion intersyndicale du 9 octobre n’est sorti que l’appel de la seule CGT à la mobilisation le 19 octobre, car aucune autre direction syndicale n’a jugé bon d’appeler à quoi que ce soit. Solidaires peut critiquer les appel aux journées « saute-moutons » de la CGT mais n’a aucune stratégie alternative à cette heure. L’appel au 19 a été d’ailleurs timide du côté de la CGT elle-même : dans certains départements, la CGT n’a même pas clairement appelé à la grève ni à manifester. Une nouvelle réunion des directions nationales des syndicats se tient le 24 octobre : il y sera question d’une nouvelle journée de mobilisation au mois de novembre. En clair : il est urgent d’attendre. La CGT compte cette fois sur FO pour un appel commun contre les ordonnances sur le travail. Mais le même jour aura lieu aussi une intersyndicale de la Fonction publique… le comble serait qu’on se retrouve avec deux journées séparées public/privé !

Refuser la mascarade du « dialogue social »

Pendant ce temps-là, le ballet des « discussions» a repris à l’Élysée et à Matignon, cette fois sur la réforme de la formation professionnelle et de l’assurance chômage. Tous les dirigeants syndicaux ont accepté l’invitation du président et du Premier ministre, y compris ceux de Solidaires. Mais sourire à Macron et serrer la main de Philippe sous les flashs des photographes, c’est entrer dans leur jeu, car l’objectif du gouvernement est clair : il prétend ouvrir des négociations, puis il mènera sa politique comme il l’a décidé, c’est-à-dire uniquement dans l’intérêt des patrons ! En prétendant discuter avec les organisations syndicales sur d’autres sujets que la loi travail, le gouvernement veut nous faire croire que les ordonnances, c’est plié et dans la poche, et qu’il faut passer à autre chose. Le compte rendu interne à la CGT de la rencontre entre Martinez et Macron n’a pas dû faire très peur au gouvernement puisqu’il se conclut par ses lignes : « En résumé, Macron a pris quelques engagements et nous ne manquerons pas de vérifier que ceux-ci seront tenus. »

Imposons notre calendrier : celui pour gagner !

Macron, lors de son interview de dimanche soir, s’est (mal) défendu d’être le président des riches et a effectivement assuré qu’il allait tenir ses engagements ! Sur son agenda proche figurent notamment les attaques contre l’assurance chômage : les « fainéants » seront bientôt moins indemnisés, et moins longtemps. Une raison supplémentaire pour ne plus rester l’arme au pied.

Le gouvernement peut reculer. Il l’a fait une première fois devant la menace des routiers de bloquer le pays. La deuxième fois s’est déroulée en toute discrétion, jeudi 12 octobre, pour les salariés des ports et docks : il ne sera pas non plus possible dans ce secteur de négocier entreprise par entreprise sur des questions cruciales pour les salariés, et la primauté de la convention collective sur les ordonnances travail est garantie. Le gouvernement ne s’exprime bien sûr pas sur ces reculades, car il ne veut pas que cet exemple puisse être contagieux. Car c’est la preuve qu’il est tout à fait possible de défaire ce qui a été fait et voté, et que le gouvernement serait bien incapable de résister à une mobilisation massive des travailleurs.

Jusqu’à présent, c’est lui qui a imposé son agenda. C’est maintenant à nous de le bousculer et d’imposer notre calendrier social : avant la ratification des ordonnances par le Parlement mi-novembre, il faut une manifestation nationale et une vraie journée de grève interprofessionnelle pour démarrer le mouvement d’ensemble, qui passe inévitablement par la grève reconductible.

Marie-Hélène Duverger
dans l'hebdo L'Anticapitaliste n° 401 (19/10/17)

http://anticapitalisme-et-revolution.bl ... re-le.html
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