Notre culture dans les pochoirs - série 72 :
http://www.atelierdecreationlibertaire. ... -serie-72/
Grapus, c’est un nom qui reste mythique pour les graphistes aujourd’hui, associé à des formes éclatantes, joyeuses et libres, mais aussi en consonance parfaite avec les sujets qu’elles portaient, des sujets en gestation et en lutte, des sujets politiques.
Grapus est né de mai 68 (et plus précisément de l’Atelier populaire n°3, celui des Arts Déco, où se sont rencontrés François Miehe, Gérard Paris-Clavel et Pierre Bernard, rejoints un peu plus tard par Jean-Paul Bachollet et Alex Jordan), en a refusé certains travers gauchistes (en prenant notamment leur carte au PCF, manière pour eux de sortir d’un entre-soi petit-bourgeois pour espérer s’adresser aux classes populaires) tout en en perpétuant et diffusant l’énergie créatrice et subversive (ce qui n’a pas toujours facilité leurs rapports avec les directions communistes) : communistes parmi les gauchistes (“crapules staliniennes”, une des étymologies de leur nom), gauchistes parmi les communistes – toujours en décalage.
Grapus expose, 37 ans après leur séparation, dans une usine (manière de montrer que le travail des formes est un travail), à Thiers dans le Puy-de-Dôme : la capitale de l’industrie du couteau, quoi de plus évident pour ceux qui l’avaient entre les dents !
Ces dernières années, plusieurs recherches ont été menées et publiées sur le groupe, notamment “Comment, tu ne connais pas Grapus ?” de Léo Favier et les Études sur le collectif Grapus menées sous la direction de Catherine de Smet et Béatrice Fraenkel. Mais c’est la première (et, espérons, pas la dernière) rétrospective du collectif depuis que les chemins de ses membres se sont séparés : cette année-là (1990) avait lieu une grande expo Grapus à Tokyo ; et la dernière en France remontait à 1982, au Musée de l’Affiche : alors que celui-ci devait se transformer en “Musée de la publicité”, l’équipe de Jack Lang avait alors refusé qu’il prenne la parole pour cette inauguration devant les sulfureuses affiches de Grapus, qui avaient dues… être recouvertes de draps blancs.
En conclusion, la parole à Grapus :
« Créateur collectif dans une société qui ne révère que l’individualisme, dans laquelle les artistes sont divisés, opposés, hiérarchisés, marginalisés, – seuls ! – pour lutter contre l’aigreur et le découragement, pour regarder en face l’absurdité honteuse qui ne veut pas mourir, une préface à 01, POUR APPRENDRE !
Faire de la communication sociale dans une société où tout se publicite c’est combattre l’idée que la culture est élitaire, le syndicalisme démodé et la politique sale ! Mais aussi convaincre des culturels, des syndicalistes, des camarades d’investir une part importante de leur budget d’austérité pour exprimer leurs idées, les populariser dans une relation d’émotion nouvelle, donc hasardeuse, combattre la langue de bois sans lui substituer le miel publicitaire.
Les paroles du changement sont encore à trouver, à sculpter, à peindre, à mettre en musique, en poème, en vibration…
Alors viv(r)e la dialectique avec fromage et dessert ! »
[Grapus, janvier 1979]
-Sébastien-
Utilisateurs parcourant ce forum : Aucun-e utilisateur-trice enregistré-e et 1 invité