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Messagede Nico37 » 13 Fév 2011, 13:38

Shell au Nigéria : la lutte pour la responsabilité Ben Amunwa 8 février 2011

La version originale de cet article a été publiée en anglais par Pambazuka. Il a été traduit par Abel Page, traducteur bénévole pour rinoceros.

Ben Amunwa étudie comment l’issue du procès Wiwa contre Shell affecte la crise en cours dans le Delta du Niger, ainsi que les implications du règlement judiciaire pour les droits humains, la justice environnementale et le contrôle des ressources dans la région.

Le règlement judiciaire du procès emblématique Wiwa contre Shell en juin 2009 a marqué une petite mais importante étape pour la douzaine de plaignants impliqués. Ils accusaient Shell de complicité de violations des droits humains, parmi lesquelles des crimes contre l’humanité, des exécutions sommaires, des tortures et des détentions arbitraires. Les abus ont eu lieu pendant la répression militaire des années 90, lorsque 300 000 personnes de la communauté minoritaire Ogoni se sont mobilisées derrière l’écrivain et activiste Ken Saro-Wiwa pour protester contre les dévastations environnementales et sociales causées par Shell, Chevron et les autres compagnies opérant dans la région pétrolière du Delta du Niger. Ces manifestations furent les plus importantes jamais vues contre les compagnies pétrolières. En conséquence, Shell s’est engagé avec les militaires nigérians dans une campagne de violence aveugle en Ogoniland, culminant dans l’exécution sommaire de Saro-Wiwa et de huit autres activistes le 10 novembre 1995.

Pendant les 12 années suivantes, une bataille juridique s’est engagée au Tribunal du District de New York. Les avocats des plaignants ont rassemblé un dossier substantiel des pièces à conviction, incluant des mémos confidentiels de la compagnie, des emails et des dépositions de témoins, mettant en lumière la complicité de Shell dans les violations des droits humains commises en Ogoniland. Des illustrations vivides de l’étroite relation entre Shell et les militaires ont finalement été rendus publics dans le sillage du procès, dans le cadre duquel Shell a finalement accepté de payer 15,5 millions de dollars US aux plaignants.

Agissant dans les coulisses se trouvait Osamede Okhomina, un cadre du secteur pétrolier défiant les stéréotypes. Il est originaire du Delta du Niger et est titulaire d’un Master de philosophie de l’Université de Cambridge. Son entreprise, Energy Equity Resources, basée sur le papier dans la Marble Arch à Londres et à Victoria Island, Lagos a joué le rôle d’intercesseur dans la négociation du règlement judiciaire à du procès Wiwa. EER a aidé les deux parties à mettre en place le Kiisi Trust, un fonds de 5 millions de dollars US créé grâce avec l’argent du règlement, pour « des initiatives en Ogoniland de dotations éducationnelles, de développement des compétences, de développement agricole, de programmes pour les femmes, de soutien aux petites entreprises et d’alphabétisation des adultes ».

Un court communiqué d’EER publié le jour du règlement indique : « M. Okhomina a insisté … sur l’importance qu’EER accorde à la création d’un fonds en fiducie permettant aux communautés locales de profiter directement des bénéfices de la production pétrolière… EER croit que cette approche offre un avenir meilleur à l’ensemble des personnes concernées, et il espère que sa contribution à la résolution de ce procès sera vue en ce sens. »

C’est probablement une source de soulagement que cette contribution d’EER se soit vite évanouie dans la tempête médiatique qui a englouti Shell. Cependant, l’attitude d’EER, une compagnie de prospection pétrolière et gazière bien moins importante, mérite d’être considérée.

La mise en place de « fonds en fiducie » (trust funds) dans le Delta du Niger est un type de réponse émergent à ce que l’UNDP appelle la « scandaleuse » situation de développement de la région. Malgré leur échelle limitée, ils pourraient avoir davantage de potentiel que les piles de projets de développement communautaires abandonnés qui avaient été initiés par Shell et les autres groupes pétroliers.

Pendand plus d’une décennie, ces compagnies ont utilisé la « philanthropie stratégique » pour acheter le consentement des communautés où elles extraient le pétrole et le gaz. Suite à l’exécution de Saro-Wiwa et au naufrage du Brent Spar (silo flottant de stockage de pétrole (ndt)), Shell a pris conscience du besoin de restaurer son image globale, ce qui a mené à l’invention de la « Responsabilité sociale des entreprises » (RSE). Aujourd’hui, l’échec de la RSE dans le Delta du Niger est un secret de polichinelle. En 2001, une étude des projets communautaires de Shell a montré que sur les 80 initiés, 20 n’existaient pas, 36 étaient partiellement mis en œuvre et seulement 25 fonctionnaient de manière efficace.

Malgré cela, Alice Ajeh, la directrice des relations internationales de Shell au Nigéria, basée à La Haye, croit que la RSE est la réponse. Confrontée à une marée d’emails protestant contre les pratiques de Shell au Nigéria, elle insiste sur le fait que Shell a dépensé 242 millions de dollars US l’an dernier pour le développement des communautés – « le plus important investissement communautaire réalisé par Shell dans le monde. » Pendant son séjour à Port Harcourt, un rapport confidentiel de WAC Global Services pour Shell concluait que ces investissements créaient des « inégalités sociales » et augmentaient les conflits et la violence au lieu de bénéficier aux communautés.

Même en supposant qu’une partie des projets de développement communautaire de Shell existe et fonctionne effectivement, ceux-ci ne sauraient compenser les dévastations sociales et environnementales illégales causées par les marées noires récurrentes causées par la compagnie, le torchage du gaz et sa sur-dépendance envers les forces de sécurité nigérianes.

Bien que l’ensemble des problèmes de ces régions ne puisse évidemment pas être attribué à la compagnie, les activités de Shell exacerbent clairement l’insécurité, la corruption et la pauvreté.

Les forces de sécurité gouvernementale sont souvent à la solde des compagnies pétrolières internationales ; or ces mêmes forces sont responsables d’un nombre inconnu d’exécutions sommaires, d’assassinats, de torture et de détentions. D’après une organisation locale de défense de droits, le Centre pour l’Environnement, les Droits de l’Homme et le Développement (CEHRD), pas plus tard qu’en décembre 2009, des soldats armés chargés de surveiller un distributeur de Shell à K-Dere en Ogoni, ont torturé un homme et sa femme, les battant sévèrement avec la crosse de leurs pistolets et des fouets, jusqu’à ce qu’ils vomissent du sang. Ces agissements sont réguliers de la part des forces de sécurité payées, nourries et logées par Shell.

Le Delta du Niger n’est en aucun cas une économie « pauvre ». Des profits abasourdissants sont pompés dans ses criques par Shell, Chevron et les autres compagnies sur une base journalière. Le FMI estime que le Nigéria a gagné 75 milliards de dollars US en revenus pétroliers entre 2004 et 2007. Pourtant, la région du Delta est appauvrie par des décennies d’une corruption battant tous les records à tous les niveaux de l’élite politique nigériane, un vol continu bénéficiant de l’assistance des multinationales pétrolières et des banques occidentales.

Cette semaine, la Police Métropolitaine poursuit les proches de l’ancien gouverneur du Rivers State James Ebori pour l’avoir aidé à blanchir 30 millions de dollars US entre 2005 et 2007. Parmi ses actifs gelés se trouvent des fonds issus d’un contrat lucratif de la compagnie d’Ibori, Mex Engineering, pour la fourniture de péniches aménagées à Chevron et Shell. Scotland Yard suspecte que ce contrat cache une affaire de corruption, mais les entreprises le nient. Malgré l’opposition politique et une tentative du parlementaire conservateur Tony Baldry pour obstruer les poursuites au Royaume-Uni, le procès devrait avoir lieu au tribunal de Southwark Crown à Londres et pourrait révéler des faits préjudiciables liés au contrat.

Avec des compagnies pétrolières et tous les échelons du gouvernement nigérian largement embourbés dans la corruption, il y a besoin de mécanismes plus transparents et indépendants pour contrôler et tracer les revenus pétroliers. Les fonds fiduciaires comme le Kiisi Trust pourraient constituer un moyen pragmatique et temporaire de s’assurer que les communautés des villages bénéficient de leurs ressources.

Cependant, les fonds fiduciaires ne peuvent rien en ce qui concerne l’injustice fondamentale qu’illustre le procès Wiwa – les violations des droits humains par les compagnies pétrolières. La production pétrolière reste intimement liée à de choquantes violations des droits de l’homme. Comme l’a déclaré Saro-Wiwa au jury qui le condamna à mort : « Les militaires n’agissent pas seuls. Ils sont soutenus par un troupeau de politiciens, avocats, juges, universtaires, hommes d’affaires, tous cachés… »

Le procès Wiwa a montré le « pouvoir de la mémoire contre l’oubli ». Tant que les compagnies pétrolières continueront à conduire leurs affaires sur le dos des droits humains, elles seront toujours en dernière instance démasquées, tenues pour responsables et forcées à réparer.

Ben Amunwa est le coordinateur de la campagne Remember Saro-Wiwa de PLATFORM.
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Messagede SchwàrzLucks » 10 Jan 2012, 14:53

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A Port-Harcourt, le 9 janvier.REUTERS/Austin Ekeinde

Grenades lacrymogènes et tirs en l'air de la police mardi 10 janvier à Bauchi, dans le nord du Nigeria. Le pays est entré dans le deuxième jour d'une grève générale, pour protester contre la hausse du prix des carburants, au premier jour de laquelle six personnes ont trouvé la mort lundi.

De nombreux commerces étaient fermés dans les grandes villes du pays, le plus peuplé d'Afrique avec 160 millions d'habitants et principal producteur de pétrole du continent. La circulation automobile était faible, les quelques taxis en activité avaient accroché des branchages sur leur capot pour signifier leur solidarité avec les manifestants. Dans la capitale économique Lagos, une marche était prévue, mais en milieu de matinée seule une centaine de personnes s'étaient rassemblées.

"Nous ne suspendrons pas la grève avant que le gouvernement n'écoute la voix de la raison et revienne sur sa décision, a indiqué Daniel Ejiofor, un des manifestants. Nous appelons les Nigérians à persévérer car la victoire est au bout." La grève générale avait paralysé le pays lundi, avec des dizaines de milliers de manifestants défilant dans les rues. Mais des heurts parfois violents ont eu lieu avec les forces de l'ordre et six personnes ont trouvé la mort : trois à Lagos et trois dans la grande métropole du Nord, Kano.

TENSIONS CROISSANTES

Les syndicats exigent que le gouvernement rétablisse les subventions dont la suppression, le 1er janvier, a entraîné une brusque hausse des prix de l'essence qui affecte la plupart des Nigérians, tant pour les transports que pour l'alimentation des générateurs d'électricité. Le litre à la pompe est ainsi passé du jour au lendemain de 65 nairas (0,30 euro) à au moins 140 nairas alors que la majorité des Nigérians vivent avec moins de deux dollars par jour.

Mais si l'activité était largement à l'arrêt dans les grandes villes, la production de pétrole, 2,4 millions de barils par jour, n'a pas été affectée par la grève, ont assuré des responsables du secteur. Le mouvement de grève, d'une durée indéterminée, se produit dans un contexte de tension croissante entre chrétiens et musulmans.

Lundi, des manifestants ont tenté d'incendier une mosquée dans le Sud, à majorité chrétienne. Le pape Benoît XVI s'est personnellement inquiété lundi de cette montée des violences interconfessionnelles, tandis que les Etats-Unis ont "vivement" condamné "ces actes de violence continus attribués" au groupe islamiste Boko Haram.

Lien : http://www.lemonde.fr/afrique/article/2 ... r=RSS-3208
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Messagede ivo » 10 Juin 2012, 20:38

Attaques meurtrières dans des églises au Nigeria
fr info
Deux églises ont été la cible d'attaques meurtrières ce matin au Nigeria. A Biu Town dans le nord, des hommes armées ont ouvert le feu à l'extérieur de l'église avant d'entrer dans le bâtiment. Au moins une personne est morte et plusieurs autres ont été blessées selon le responsable d'une association chrétienne sur place.

A Jos dans le centre du pays, un kamikaze a fait exploser sa voiture devant l'entrée d'une église, ce qui a provoqué l'effondrement du bâtiment. Selon des sources gouvernementales l'explosion a fait trois morts, dont le poseur de bombe, et 41 blessés.

Depuis plus d'un an, le Nigeria subit une série d'attaques contre des lieux de culte en majorité chrétiens revendiquées par le groupe islamiste Boko Haram. Depuis mi-2009, les attentats de ce groupe jihadiste ont fait plus de 1.000 morts.
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Messagede ivo » 07 Mar 2013, 10:00

Expulsions forcées dans l'Etat de Lagos, au Nigeria
http://www.rfi.fr/afrique/20130306-expu ... os-nigeria
Au Nigeria, à Lagos, les autorités ont commencé à détruire un bidonville fin février sans proposer de solutions aux populations concernées. Une situation dénoncée par Amnesty International. Pour Yves Prigent responsable d'un programme de lutte contre la pauvreté au sein de l'organisation, le gouverneur de Lagos ne respecte pas les droits des expulsés.

Yves Prigent
Responsable de la campagne «Exigeons la Dignité» à Amnesty International France

Le 23 février dernier, sans avoir prévenu la population, des bulldozers sont arrivés dans un quartier de la ville de Badia, dans la région de Lagos, et au bout d'une journée, trois cents maisons avaient été détruites
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Messagede Pïérô » 18 Jan 2015, 03:23

Comment Boko Haram prospère sur les inégalités, l’analphabétisme, la corruption et l’arbitraire

Au Nigeria, 2015 a commencé avec un massacre, probablement le plus meurtrier jamais perpétré par la secte islamiste Boko Haram. Plus de quinze villages totalement détruits, des centaines de personnes tuées. Le groupe né au début du 21ème siècle dans le nord-est du pays va toujours plus loin dans la violence. Au-delà de la religion, il prospère sur le terreau d’une zone de grande pauvreté, délaissée par le pouvoir central et qui ne profite pas de la manne pétrolière. Face à Boko Haram, les forces de sécurité sont elle-aussi dénoncées pour leur brutalité arbitraire et leurs pratiques de la torture.

... http://www.bastamag.net/Comment-Boko-Haram-prospere-sur
Image------------ Demain Le Grand Soir --------- --------- C’est dans la rue qu'çà s'passe --------
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Messagede Lila » 18 Avr 2015, 18:52

Nigeria : des centaines de filles manifestent pour les lycéennes retenues par Boko Haram

Aujourd’hui, un an jour pour jour après l’enlèvement des 276 lycéennes par Boko Haram, du Champ de Mars à Paris et un peu partout dans le monde, le slogan « Bring Back Our Girls » a résonné comme une complainte qui ne trouve toujours pas de résonance dans le champ politique.

A Paris, derrière la banderole « Bring Back Our Girls », les manifestants, un ballon rouge à la main, ont exigé le retour des lycéennes nigérianes saines et sauves.

Au Nigeria, des mouvements spontanés continuent de réclamer le retour de ces jeunes lycéennes. « Bring Back Our Girls » « Rendez-nous nos filles » ont chanté 219 jeunes filles en tête d’un cortège, vêtues de rouge et portant chacune autour du cou le nom d’une des lycéennes toujours portées disparues. Elles manifestaient ce matin dans les rues d’Abuja (capitale du Nigeria) jusqu’aux grilles du ministère de l’Education, pour demander la libération inconditionnelle des lycéennes.

Quand la tempête médiatique est retombée, les membres de la campagne #Bringbackourgirls ont continué à se réunir pour faire pression sur les autorités d’Abuja, accusées d’avoir tardé à réagir après cet acte barbare.


+ images et vidéo : https://sanscompromisfeministeprogressi ... oko-haram/
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Messagede Lila » 21 Avr 2015, 17:43

Nigeria. Des femmes et des jeunes filles enlevées et contraintes de participer aux attaques de Boko Haram

Au moins 2 000 femmes et jeunes filles ont été enlevées par Boko Haram depuis le début de l’année 2014 et nombre d’entre elles ont été réduites en esclavage sexuel et formées au combat, a déclaré Amnesty International à l’occasion du premier anniversaire de l’enlèvement des écolières de Chibok.

Fondé sur près de 200 témoignages, dont 28 émanant de femmes et de filles qui se sont échappées, un nouveau rapport intitulé « Notre métier est d’abattre, de massacrer et de tuer. » Boko Haram fait régner la terreur recense de nombreux crimes de guerre et crimes contre l’humanité commis par Boko Haram, notamment le meurtre d’au moins 5 500 civils, alors que le groupe semait la terreur dans le nord-est du Nigeria en 2014 et début 2015.

Le rapport d’Amnesty International apporte de nouvelles informations sur les méthodes brutales employées par le groupe armé dans le nord-est du Nigeria. Les hommes et les garçons y sont régulièrement embrigadés ou systématiquement exécutés, tandis que les jeunes femmes et les filles sont enlevées, emprisonnées et parfois violées, mariées de force et contraintes de participer à des attaques armées, parfois dans leur propre ville ou village.

« Les preuves apportées dans ce rapport-choc, un an après l’enlèvement des jeunes filles de Chibok, mettent en évidence l’ampleur et la cruauté des méthodes de Boko Haram », a déclaré Salil Shetty, secrétaire général d’Amnesty International.

« Des hommes et des femmes, des garçons et des filles, des chrétiens et des musulmans ont été enlevés et brutalisés par Boko Haram dans un règne de la terreur qui a frappé des millions de personnes. Les récentes victoires militaires représentent peut-être le début de la fin pour Boko Haram, mais il reste encore énormément à faire pour protéger les civils, résoudre la crise humanitaire et entamer le processus de reconstruction. »

Le rapport contient des éléments de preuve visuelle, en particulier des images satellites qui montrent l’ampleur des dévastations que Boko Haram a laissées dans son sillage.

Enlèvements

Les 276 écolières enlevées à Chibok ont suscité l’attention du monde entier grâce à la campagne #BringBackOurGirls. Mais ces écolières portées disparues ne représentent qu’une petite partie des femmes, des filles, des jeunes hommes et des garçons enlevés par Boko Haram.

Boko Haram a pour habitude de conduire directement les femmes et les filles enlevées dans des camps situés dans des endroits reculés ou dans des camps de transit improvisés, comme celui établi dans la prison de Ngoshe. Elles sont alors déplacées de ces camps de transit vers des maisons situées dans des villes et villages, où elles sont endoctrinées pour leur imposer la version de l’islam prônée par le groupe en vue de leur mariage.

Aisha, 19 ans, a raconté à Amnesty International comment elle avait été enlevée lors d’un mariage en septembre 2014, avec sa sœur, la mariée et la sœur de la mariée. Elles ont été conduites par Boko Haram dans un camp à Gullak, dans l’État d’Adamawa, où se trouvaient environ 100 jeunes filles enlevées. Une semaine plus tard, Boko Haram a forcé la mariée et sa sœur à épouser des combattants du groupe. Ils ont également appris à Aisha et aux autres femmes et filles à se battre.

« Ils apprenaient aux filles à tirer. Je faisais partie de celles qui étaient formées au tir. J’ai également été entraînée à utiliser des bombes et à attaquer un village, a raconté Aisha à Amnesty International. Cet entraînement a duré trois semaines après notre arrivée. Ensuite, ils ont commencé à envoyer certaines d’entre nous sur le terrain. J’ai participé à une opération dans mon propre village. »

Aisha a expliqué que pendant les trois mois où elle a été retenue en captivité, elle a été violée à plusieurs reprises, parfois par des groupes allant jusqu’à six combattants. Elle a également été témoin du meurtre de plus de 50 personnes, dont sa sœur.

« Certaines ont refusé de se convertir. Certaines ont refusé d’apprendre à tuer. Elles ont été enterrées dans une fosse commune dans la brousse. Ils regroupaient les cadavres et les jetaient dans un grand trou, mais qui n’était pas suffisamment profond. Je ne voyais pas le trou, mais on sentait souvent l’odeur des cadavres quand ils commençaient à se décomposer. »

Massacres

Depuis le début de l’année 2014, Amnesty International a recensé au moins 300 raids et attaques menés par Boko Haram contre des civils. Lors des incursions dans les villes, les combattants ciblaient systématiquement l’armée ou la police en priorité pour s’emparer des armes et munitions avant de s’en prendre à la population civile. Ils tiraient sur tous ceux qui tentaient de s’échapper et rassemblaient les hommes en âge de combattre pour les exécuter.

Ahmed et Alhaji, âgés de 20 et 18 ans, ont dû s’asseoir avec d’autres hommes pour attendre de se faire trancher la gorge après la prise de Madagali par Boko Haram le 14 décembre 2014. Ahmed a raconté à Amnesty International que son instinct le poussait à s’enfuir, mais qu’il n’a pas pu le faire. « Ils nous massacraient avec des couteaux. Deux hommes se chargeaient des exécutions. [...] Nous étions tous assis par terre et nous attendions notre tour. » Alhaji n’a réussi à s’échapper que lorsque la lame d’un des bourreaux de Boko Haram n’était plus assez affûtée pour trancher d’autres gorges. « Avant d’arriver à mon groupe, ils avaient tué 27 personnes devant mes yeux. Je les ai toutes comptées parce que je voulais savoir quand mon tour allait arriver. » Il a raconté qu’au moins 100 hommes qui avaient refusé de rejoindre Boko Haram avaient été exécutés à Madagali ce jour-là.

À Gwoza, Boko Haram a tué au moins 600 personnes lors de l’attaque du 6 août 2014. Des témoins ont raconté à Amnesty International que tous ceux qui essayaient de s’échapper étaient poursuivis. « Ils se rendaient en moto dans les environs, dans chaque coin de rue et abattaient les gens. Ils ne tiraient que sur les hommes. »

Des milliers de personnes ont pris la fuite dans les montagnes environnantes, où les combattants de Boko Haram les pourchassaient et les faisaient sortir de force des grottes où elles se cachaient à l’aide de grenades lacrymogènes. Les femmes ont alors été enlevées. Les hommes ont été tués.

Incendies et pillages : nouvelles images satellites de la destruction de Bama

Des images satellites réalisées à la demande d’Amnesty International ont permis à l’organisation de montrer l’ampleur des dégâts causés par Boko Haram.

Elles comprennent notamment des images de Bama avant et après l’attaque, commandées pour le rapport. Elles montrent qu’au moins 5 900 structures, dont l’hôpital, soit environ 70 % de la ville, ont été endommagées ou détruites par les combattants de Boko Haram lorsqu’ils ont battu en retraite au moment de la reprise du contrôle de la ville par l’armée nigériane en mars 2015.

Des témoins interrogés par Amnesty International ont décrit les rues de Bama jonchées de corps et expliqué que des personnes avaient été brûlées vives dans des bâtiments. Une femme a dit : « Quand les militaires se sont approchés des casernes [à Bama] et en ont presque pris le contrôle, ils [les militaires] se sont ensuite retirés. Ensuite, les insurgés ont commencé à tuer des gens et à incendier des maisons. »

La vie sous l’emprise de Boko Haram

Le rapport décrit le règne de la terreur imposé aux populations soumises à Boko Haram. Peu après avoir pris le contrôle d’une ville, Boko Haram rassemblait la population et annonçait de nouvelles règles imposant des restrictions des mouvements, en particulier aux femmes. La plupart des foyers devenaient alors dépendants des enfants pour trouver de la nourriture, ou attendaient les visites des membres de Boko Haram qui leur distribuaient de la nourriture pillée.

Boko Haram faisait régner sa loi en infligeant des châtiments cruels. L’absence aux prières était passible de flagellation publique. Une femme qui a passé cinq mois sous le contrôle de Boko Haram à Gamborou a raconté à Amnesty International qu’elle avait vu une femme recevoir 30 coups de fouet pour avoir vendu des vêtements d’enfant et un couple se faire exécuter publiquement pour adultère.

Un garçon de 15 ans originaire de Bama, épargné par Boko Haram en raison de son handicap, a expliqué à Amnesty International qu’il avait été témoin de 10 lapidations. « Ils lapident des gens les vendredis. Ils rassemblent tous les enfants et leur demandent de jeter des pierres. J’ai participé à la lapidation. [...] Ils creusent un trou, entèrent le corps et lancent des pierres sur la tête de la personne. Quand elle meurt, ils laissent les pierres jusqu’à ce que le corps se décompose. »

Le rapport souligne également les tensions croissantes entre chrétiens et musulmans. De nombreux chrétiens interrogés par Amnesty International pensent que des musulmans ont dit à Boko Haram où ils se trouvaient ou n’ont pas partagé les informations sur les attaques imminentes, ce qui a instauré un climat de méfiance entre des communautés qui vivaient jusque-là en harmonie. Boko Haram a détruit des églises et tué des chrétiens qui refusaient de se convertir à l’islam, mais le groupe a aussi pris pour cible des musulmans modérés.

Amnesty International appelle Boko Haram à cesser de tuer des civils, et le gouvernement nigérian à prendre toutes les mesures légales possibles pour garantir leur protection et restaurer la sécurité dans le nord-est du pays. La communauté internationale doit également continuer à aider le nouveau gouvernement du Nigeria à répondre à la menace que représente Boko Haram.

« Le changement de gouvernement au Nigeria est l’occasion d’aborder différemment la sécurité au Nigeria après l’échec cuisant de ces dernières années », a déclaré Salil Shetty.

« Les personnes enlevées doivent être secourues et des enquêtes doivent être ouvertes sur les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité. Les cadavres doivent être exhumés des fosses communes, tout autre homicide doit être évité et les responsables de ces souffrances épouvantables doivent être traduits en justice. »

Les informations sur Boko Haram recueillies par Amnesty International doivent être prises en compte par la Cour pénale internationale dans le cadre de son examen préliminaire en cours sur la situation dans le nord-est du Nigeria.

Complément d’information

Amnesty International a déploré à plusieurs reprises que les forces de sécurité n’en fassent pas plus pour protéger les civils des atteintes aux droits humains commises par Boko Haram. Rares sont les enquêtes dignes de ce nom qui ont été effectuées et les membres de Boko Haram qui ont été poursuivis pour des crimes relevant du droit international.

Le rapport s’appuie sur 377 entretiens, parmi lesquels 189 entretiens avec des victimes et témoins des attaques de Boko Haram, 22 avec des responsables locaux, 22 avec des sources militaires et 102 avec des défenseurs des droits humains. Des femmes, des hommes et des enfants, qu’ils soient musulmans ou chrétiens, ont témoigné. Presque toutes les personnes interrogées ont demandé à ne pas être identifiées pour des raisons de sécurité ; par conséquent, tous les noms cités dans le rapport sont des pseudonymes.

Amnesty International a recueilli ces éléments au cours de quatre voyages de recherche en 2014 et 2015 à Maiduguri, ainsi que dans des camps pour personnes déplacées à l’intérieur de leur pays situés dans le nord-est du Nigeria et dans un camp de réfugiés du nord du Cameroun. De nombreux entretiens ont aussi été réalisés par téléphone depuis Londres.

Amnesty International a recensé 38 cas d’enlèvements par Boko Haram. Soixante-dix-sept témoignages sur des enlèvements ont été recueillis, dont 31 émanant de témoins oculaires et 28 de femmes et filles enlevées par Boko Haram et qui ont réussi à s’échapper.

« Notre métier est d’abattre, de massacrer et de tuer. » Boko Haram fait régner la terreur
https://www.amnesty.org/fr/documents/af ... 0/2015/en/


https://www.amnesty.org/fr/press-releas ... m-attacks/
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Messagede bipbip » 26 Mar 2017, 11:03

Lagos (Nigeria): plus de 5 000 personnes expulsées de leur logement en un week-end

Le vendredi 17 mars 2017, la police et l’armée nigériannes ont procédé à une opération de destruction-expulsion de logements d’une ampleur inouïe, avec un résultat assez horrible puisqu’apparemment près de 5 000 personnes ont perdu leur logement en un week-end, toutes habitantes du bidonville d’Otodo-Gbame, situé à Lagos, capitale du Nigeria.

Lors de cette intrusion policiaro-militaire, de violents affrontements éclaté, les habitant-e-s s’opposant aux forces de l’ordre avec leurs faibles moyens et leur colère immense.

L’État justifie évidemment son opération de destruction par l’illégalité des habitations de fortune visées. Car au Nigeria comme ailleurs, il n’est pas illégal de vivre dehors, sans logement ni rien ; ce qui est illégal, c’est d’occuper un terrain ou un logement qui est une « propriété privée » (ou « d’État », ce qui revient à peu près au même). Ce qui est illégal, ce n’est pas de dominer et d’écraser les autres en bénéficiant d’un système qui produit toujours plus d’inégalités socio-économiques, ce qui est illégal c’est d’essayer de survivre par ses propres moyens.

Coups de feu, gaz lacrymogènes et bulldozers ont fait partie des moyens utilisés par les forces de l’ordre pour venir à bout de leur opération.

Des associations de défense des droits de l’homme ont même indiqué que les autorités de la ville de Lagos ont ignoré une ordonnance du tribunal interdisant l’expulsion forcée des résidents de cette zone…

... https://fr.squat.net/2017/03/23/lagos-n ... expulsees/
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Re: Nigéria

Messagede bipbip » 11 Avr 2017, 14:31

Corruption au Nigeria: nouveau rapport accablant contre Shell

L’ONG Global Witness et Finance Uncovered ont publié lundi un rapport accablant contre les groupes pétroliers ENI et Shell, accusant ce dernier d’avoir « su » que l’argent versé pour l’acquisition d’un gros contrat pétrolier n’irait pas au gouvernement nigérian, mais à des individus.

... http://www.anti-k.org/2017/04/11/corrup ... tre-shell/
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Messagede Lila » 09 Sep 2018, 19:28

« Au Nigeria, Heineken a formé des prostituées pour booster ses ventes »

Le journaliste d’investigation Olivier van Beemen revient sur les compromissions et dérives du groupe néerlandais en Afrique.

Les Africains raffolent de la bière, qu’elle soit brune ou blonde et même s’ils en boivent proportionnellement moins qu’ailleurs dans le monde. Les sociétés brassicoles, qui comptent sur le développement de la fameuse classe moyenne africaine, le savent et se frottent les mains. Car grâce à des coûts de production plus faibles que sur d’autres continents, la bière rapporte en Afrique près de 50 % de plus qu’ailleurs. Certains marchés, comme le Nigeria, sont parmi les plus lucratifs du monde.

Heineken, deuxième brasseur mondial, est présent sur le sol africain depuis plus d’un siècle et dispose aujourd’hui d’une cinquantaine de brasseries réparties dans seize pays. Après un premier ouvrage sur le groupe néerlandais en 2015, le journaliste d’investigation Olivier van Beemen, collaborateur du Monde Afrique, publie Heineken en Afrique, une multinationale décomplexée (éd. Rue de l’Echiquier). Son enquête montre des pratiques immorales et douteuses en termes de management, de marketing et de développement.

à lire : https://www.lemonde.fr/afrique/article/ ... _3212.html
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Lila
 
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