Notes de LECTURES : « ILS SE SERVENT COMME DES PORCS - ON SE DEFEND COMME ON PEUT » par
FANCH AR RUZ et MUNIN Voici avec cet ouvrage l'histoire en images et en mots d'une belle amitié associée à une lente convergence d'idées sur ce qui nous entoure et les questions que l'on se pose pour que le changement arrive enfin.
"chi va piano, va sano e va lontano"...
Cette aventure reliée est celle de Fanch qui affiche fièrement sa bretonitude et se présente comme très productif dans ses dessins politico-humoristiques .
Il est associé à Munin qui s'est chargé de la lourde tâche d'écrire le texte.
Les deux compères font leurs classes idéologiques dans les écrits de papi Marx plus ou moins maltraité à la Ligue Communiste Révolutionnaire pour Fanch ou au Parti Communiste français pour Munin.
Mais le Trotskiste et le Stalinien, comme ils osent se nommer eux-mêmes, n'en sont pas tout à fait puisque aussi bien comme l'autre restent critiques envers leurs organisations respectives :
-"Pourquoi Krivine a-t-il eu les commandes de la LCR pendant quarante ans ?" se demande Fanch.
-" Le PCF est-il vraiment la (seule) maison du communisme dont les deux auteurs se réclament ?" s'interroge Munin .
le fond et l'idéal commun qui unit les deux auteurs dépassent les positionnements .
Immédiatement identifiés dès leur première rencontre au tournant du siècle, la graine de l'amitié sera alors plantée.
Aujourd'hui il en sort cet ouvrage rétrospectif militant comme une goutte d'eau qui ferait déborder le vase.
Munin et Fanch Ar Ruz se défendent comme ils peuvent mais ils le font bien.
Ils nous livrent l'épopée illustrée de cette décennie passée et ils n'épargnent personne .
Bien sur Banquiers, politiciens réactionnaires et militaires d'ici et d'ailleurs en prennent pour leurs grades au fur et à mesure que l'histoire avance.
Les sociaux-démocrates de tous poils passent aussi à la casserole et on se rappelle, non sans sourire, au détour d'une caricature bien croquée, les épisodes parfois drolatiques qui ont secoué le Parti Socialiste.
On revit la retraite anticipée de Lionel Jospin ou le néo libéralisme mystique d'une Ségolène Royal ébouriffée.
Point de compromis ni de compromissions quand il s'agit de dénoncer la récupération de l'écologisme par le système par ceux et celles qui le lui vendent pour favoriser les carrière politico-médiatiques des José Bové, Eva Joly, Cohn Bendit ou Nicolas Hulot.
La couleur de peau de la jeune arriviste qui fut un temps ministre, Rana Yade, ne fait oublier aux deux auteurs qu'une barricade n'a que deux cotés et que seule sa position par rapport à elle compte.
Même si le phénomène ne date pas de dix ans, les politiciens professionnels du PCF sont également épinglés et, on assiste à la lente dégringolade de ce parti au fur et à mesure que les pages se tournent.
Et puis il y a Mélenchon à l'ego gonflé à l'hélium ou Besancenot qui au travers des shows télévisés et des dédicaces n'aurait peut-être pas grand chose à lui envier sur ce terrain.
Tout le monde y passe et, il aurait été illusoire que les anarchistes en sortent indemnes.
La critique est acerbe à leur égard mais elle exprime bien les points faibles que connait un certain pan du mouvement anarchiste : théâtralisme, immaturité, reproduction de rapports de forces contre lesquels ils se battent pourtant
Munin et Fanch déplorent ici l'absence de perspective claire et globale pour une société nouvelle.
Ils semblent le regretter puisqu'ils avouent que le point faible du marxisme dont ils se réclament encore se cristallise sur la question de l'Etat qui institutionalise et fossilise les rapports de dominations.
Ils parlent cependant d'un renouveau du mouvement anarchiste avec la reprise de foyers évoqués ici et là. Malgré la perplexité on pourrait y comprendre un espoir.
Peut-être faut-il alors rappeler aux deux auteurs que l'anarchisme est porteur d'un projet clair et immédiat qui dépasse les petites communautés autogérés où les plans de marijuana cotoient les tomates.
Ce projet est celui de la révolution sociale, La séquence révolutionnaire simple et concrète qui va de la grève unificatrice à La coordination horizontale pour la mise en place d'une société non-marchande où sans transition les ressources naturelles et des moyens de les transformer sont rendues à l'ensemble de l'humanité où tout le monde peut enfin trouver sa place.
C'est semble-t-il, le schéma qui se profile au court de la décennie qui suit 2000 2010.
Espérons donc que le prochain tome qui s'intitulerait "ils ne se servent plus comme des porcs" et, en attendant savourons celui ci.
Fanch ar Ruz :Fanch et Munin