Syndicalisme et prostitution, questions embarrassantes

Re: Syndicalisme et prostitution, questions embarrassantes

Messagede Pïérô » 03 Aoû 2012, 13:34

Dans la continuité et les divergences exprimées entre AL et le STRASS et les tumultueuses, « Quel rapport entre prostituée et femme de ménage ? » texte d'Irène Pereira paru en novembre 2010 sur le site de l’IRESMO, http://iresmo.jimdo.com/

Quel rapport entre prostituée et femme de ménage ?

Il semble qu’une nouvelle tendance militante [1] et dans la recherche scientifique [2] consiste à s’intéresser (de nouveau ?) aux comparaisons et aux rapports entre travail ménager et travail sexuel. Cette comparaison peut adopter à notre sens deux perspectives opposées.

La comparaison, et donc les liens entre travail domestique de nettoyage - salarié ou non - et travail sexuel, peut apparaître dans un premier temps surprenante, mais elle possède en réalité une certaine récurrence et des ramifications diverses dans l’histoire de la pensée féministe.


De la théorisation libertaire à la théorisation féministe radicale matérialiste

Il est possible de voir dans l’homologie entre mariage et prostitution un premier jalon de cette comparaison. Dès le XIXe siècle, ce que l’on pourrait qualifier déjà de femmes féministes et d’hommes pro-féministes soulignent le fait que le mariage, en tant que contrainte sociale, avec ses implications économiques en termes de patrimoine, peut être comparé à la prostitution [3]. Cette comparaison est en particulier courante dans les écrits des auteurs libertaires de la première moitié du XXeme siècle. Elle les conduit à prôner l’abolition du mariage, celui-ci étant assimilé à une forme de prostitution. La femme (mariée ou prostituée) contracte avec un homme, pour un rapport sexuel, tout comme l’ouvrier contracte avec son patron. Dans les deux cas, il s’agit d’un échange économique masquant un rapport d’exploitation [4].

Cette comparaison libertaire entre mariage et prostitution est reprise dans les années 1970 par les féministes radicales matérialistes. On trouve en particulier dans les travaux des anthropologues féministes matérialistes des analyses qui tentent de montrer qu’il existe, d’une part, une contrainte sociale à l’hétéro-sexualité qui se traduit en particulier dans le mariage et, d’autre part, un continuum économico-sexuel entre mariage et prostitution. Cette théorisation de l’exploitation à la fois économique et sexuelle de la femme, qui serait à l’origine du mariage en tant qu’institution sociale, Colette Guillaumin l’appelle « sexage » [5]. La théorisation d’un continuum entre les deux formes d’échange qui masque un rapport d’expropriation est effectuée pour sa part par Paola Tabet [6].


Les ramifications empiriques actuelles de la comparaison

Cette comparaison et l’analyse des liens entre travail domestique et prostitution trouvent actuellement de nouvelles ramifications heuristiques dans la recherche en sciences sociales. L’enjeu actuel de ces travaux consiste à montrer que l’exploitation économico-sexuelle des femmes ne se limite pas à la sphère domestique, mais est présente sous des formes homologues dans l’économie capitaliste. Cette tendance marque le passage d’une analyse féministe matérialiste radicale, qui se centrait sur le mode de production domestique, à une analyse intersectionnelle, qui analyse l’interdépendance des systèmes de classe, de race et de sexe.

Il est possible de penser par exemple aux travaux de Jules Falquet [7] sur les femmes migrantes, qui montrent comment celles-ci sont aujourd’hui contraintes au rôle de femmes de service : employées à domicile ou par des entreprises de nettoyage comme femmes de ménage, contraintes à la prostitution dans des réseaux internationaux de proxénétisme....

Il y a donc un continuum entre l’échange économico-sexuel dans le mode de production domestique, qui se caractérise par du travail gratuit, et l’échange capitaliste marchand. L’imbrication des systèmes apparaît alors par le fait que des femmes migrantes des classes populaires peuvent être substituées à des femmes issues de la bourgeoisies ou des classes moyennes supérieures pour effectuer non plus gratuitement, mais sous condition d’une rétribution monétaire, du travail domestique de nettoyage ou de soin des enfants.

Le continuum de l’échange économico-sexuel dans le mode de production domestique et dans le mode de production capitaliste apparaît également dans ces analyses de la manière suivante. Dans le mariage [8], en tant que contrat, il existe un échange non directement monétaire de différents services de care : activités sexuelles, ménage, soin des enfants... Dans le mode de production capitaliste, avec les infirmières, qui assurent par exemple aux Pays-Bas des services d’aide sexuelle pour les personnes handicapées, on pourrait noter la même continuité entre ces différentes tâches.


Deux grilles d’analyse opposées d’une telle comparaison

Il nous semble qu’il est possible d’adopter deux grilles d’analyse diamétralement opposées dans une telle comparaison. Une première grille d’analyse est celle que nous qualifierions de libérale. Elle consiste à analyser la prostitution (mais également le mariage) comme un contrat dans lequel deux partenaires libres et égaux échangent leur consentement. Dans la prostitution, la femme prostituée (ou l’homme homosexuel prostitué [9]) sont des petits entrepreneurs qui vendent un service. De même, la femme de ménage indépendante (c’est-à-dire qui ne travaille pas pour une société de nettoyage, mais qui est employée à domicile au noir ou par le biais de chèques emploi service) serait une petite entrepreneuse qui vend librement des heures de ménage à des femmes des classes moyennes supérieures ou de la bourgeoisie.

A l’opposé, une autre grille d’analyse, que l’on peut appeler matérialiste, consiste à considérer que le rapport entre une femme de ménage “indépendante” et son employeuse est celui de travailleuse à patronne et qu’il s’agit d’un rapport d’exploitation économique. Dans une telle conception, elle ne vend pas un service - c’est à dire un produit fini-, mais elle vend sa force de travail - c’est-à-dire un temps de force vitale dont l’employeur à intérêt à tirer le maximum pendant le temps où il la loue [10]. Par conséquent, si on continue de manière conséquente une telle homologie entre prostitution et travail de nettoyage, si les femmes de ménage n’ont pas des clientes, mais des patronnes, alors les “clients” des prostituées ne sont pas des clients mais des patrons. Il y a donc, si l’on suit une telle homologie, un rapport d’exploitation économique entre la prostituée et son “client”.

Si maintenant, il s’agit d’effectuer une comparaison sur le terrain syndical : les femmes de ménage indépendantes qui se syndiqueraient dans le secteur du nettoyage peuvent désirer lutter pour une amélioration de leur convention collective ou contre le recours au travail au noir. La logique voudrait qu’elles organisent dans ce cas des grèves contre leurs patronnes. En ce qui concerne la stratégie qui consiste à revendiquer auprès de l’Etat une amélioration de la législation, il ne s’agit pas de la stratégie habituellement employée par les syndicats de travailleurs, mais par les corporations de métier. Les buralistes par exemple ont des syndicats de métier qui effectivement font du lobbyisme auprès de l’Etat pour faire reconnaître les intérêts de leur corporation de petits patrons.

Il y a notre avis une confusion entre deux logiques dans les propos du Strass (Syndicat du travail sexuel) et des Tumultueuses. Un syndicat de travailleurs lutte contre l’exploitation pratiquée par un patron, à la différence d’un syndicat de petits entrepreneurs, qui fait du lobbyisme auprès de l’État. Que le Strass ou les Tumultueuses aient une analyse libérale de la société, c’est une grille en soi, avec laquelle on peut ou non être d’accord. Ce qui apparaît plus étonnant, c’est de vouloir masquer cette analyse sous des atours marxistes et vouloir y convertir des militants d’extrême gauche.

En ce qui concerne les revendications que l’on peut avoir pour améliorer les conditions de vie immédiates des prostitué(e)s, il nous semble qu’il existe deux logiques opposées. La logique libérale consiste à vouloir faire reconnaître juridiquement la prostitution comme un métier auquel seraient attachés des droits, comme par exemple pour la corporation des médecins ou celle des buralistes.

La position féministe matérialiste consiste à revendiquer des droits pour les personnes. Si les féministes matérialistes revendiquent l’abolition du mariage et de la prostitution, c’est qu’elles ne revendiquent pas des droits attachés au couple ou à un métier, mais aux individus. Les revendications immédiates pour défendre les droits des prostitué(e)s doivent donc selon cette logique être des droits pour des individus, et non la lutte pour la reconnaissance d’un métier.


Notes

[1]
Si des femmes de ménage indépendantes s’organisaient pour défendre leurs conditions de travail, les accuseriez-vous d’avoir des revendications “capitalo-libérales” ? Refuseriez vous aussi de les soutenir sous prétexte qu’elles se font exploiter de manière honteuse et peuvent être considérées comme un symbole de l’asservissement des femmes ?

Extrait de la « Réponse des Tumultueuses au dossier prostitueurs de l’AL », 11 octobre 2010 : http://www.tumultueuses.com/Reponse-des-TumulTueuses-au

Cette réponse fait suite à une série d’échanges, dans l’ordre chronologique :

. le dossier sur la prostitution paru dans le numéro de l’été 2010 d’Alternative libertaire : http://www.alternativelibertaire.org/sp ... ubrique196

. la réponse du Strass datée du 24 août 2010 : http://site.strass-syndicat.org/tag/alt ... ibertaire/

. la réponse d’Alternative libertaire au Strass datée du 15 septembre 2010 : http://www.alternativelibertaire.org/sp ... rticle3712

[2] L’équipe de recherche du GMT (Genre, mobilité, travail) propose une séance de séminaire le 15 novembre 2010, intitulée : « Corps et sexualité au travail - Travail salarié à domicile et travail sexuel : quelles frontières ? » : http://www.univ-paris8.fr/RING/spip.php?article1135

[3] M. Vernet, L’amour libre, 1907 : http://www.marievictoirelouis.net/docum ... teurid=122

[4] M. Acharya, Les éléments de la prostitution dans le mariage, L’en dehors, n°202-203, 15 mars 1931: http://tresors.oublies.pagesperso-orang ... ariage.htm

[5] M.-B. Tahon, Sociologie des rapports de sexe, p38, Presses universitaires de Rennes/ Presses universitaires d’Ottawa, 2003.

[6] Paola Tabet, La grande arnaque- l’appropriation de la sexualité des femmes, Actuel Marx, numéro 30, 2001 ; Paola Tabet, La grande arnaque - Sexualité des femmes et échange économico-sexuel, Paris, L’harmattan, 2004.

[7] J. Falquet, Hommes en armes et femmes “de service” : tendances néolibérales dans l’évolution de la division sexuelle et internationale du travail, Cahiers du Genre, Travail et mondialisation. Confrontations Nord/Sud, 2006, numéro 40, pp 15-38 ; J. Falquet, De gré ou de force. Les femmes dans la mondialisation, Paris, La Dispute, 2008.

[8] Il pourrait être possible de se demander si l’analyse libertaire et féministe matérialiste du mariage comme un échange économico-sexuel contraint reste encore opérante dans les sociétés occidentales. En effet, le mariage n’implique plus dans notre droit une inégalité juridique entre les époux.
Néanmoins, une telle conclusion nous semblerait faire fi de l’interaction entre le mode de production domestique et le mode de production capitaliste. En effet, les femmes sur le marché du travail gagnent en moyenne 25% de salaire de moins que les hommes. Elles occupent bien plus souvent des temps partiels afin de pouvoir s’occuper des enfants. Il est ainsi possible de conclure que si les femmes dans nos sociétés semblent bien plus souvent demandeuses du mariage que les hommes, cela est la conséquence d’une telle inégalité sociale. En effet, les femmes peuvent voir, dans la prestation compensatoire, un mécanisme de protection qui leur permettra d’obtenir une compensation économique pour le travail gratuit qu’elles ont effectué alors qu’elles étaient mariées et qui a en général grevé leur carrière professionnelle par rapport à celle de leur conjoint.

[9] C’est-à-dire traité comme du féminin, car l’homosexualité masculine est bien souvent assimilée, nous semble-t-il, à une dévirilisation, à une féminisation. Cela est, nous semble-t-il, encore plus vrai, pour la prostitution masculine.

[10] Sur la manière dont il est possible de caractériser les emplois de service comme du travail productif où s’exerce une expropriation de plus-value, voir : J. Gouverneur, Une conception purement sociale de la valeur et du travail productif, texte provisoire de 2006 : http://hussonet.free.fr/jgproduc.pdf
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Re: Syndicalisme et prostitution. Quelques questions embarra

Messagede Pïérô » 22 Aoû 2012, 01:38

STRASS, un cheval de Troie du capitalisme

Prostitution Le cheval de Troie du capitalisme

Le Strass (Syndicat du travail sexuel) a consacré une grande partie d’un article paru dans la revue Contretemps en ligne à répondre aux arguments d’Alternative libertaire contre la constitution d’un syndicat du travail sexuel, visant en particulier à faire reconnaître un statut professionnel de travailleuses indépendantes aux prostituées. Le débat continue.

A l’été 2010, Alternative libertaire publiait un dossier qui réaffirmait sa position abolitionniste [1]. Rapidement, le Strass (Syndicat du travail sexuel) publiait une réponse sur son site, elle même suivie d’une mise au point en ligne d’Alternative libertaire [2]. Le débat continue suite à deux articles parus dans la revue en ligne Contretemps 3 et dans le journal CQFD du 15 janvier 2012.

Le Strass présente son initiative de créer un syndicat comme le fait d’« inscrire [sa] lutte dans celle de l’ensemble des travailleurs et travailleuses, et comme une lutte de classe ». Or c’est là, nous semble-t-il, que réside le malentendu. Comme nous l’avons déjà dit, le Strass n’est pas un syndicat de travailleurs au sens du mouvement ouvrier, mais un syndicat de défense d’une corporation de métier. L’unité de cette organisation consiste dans la défense du travail sexuel en tant que métier spécifique. Or l’unité de la lutte de l’ensemble des travailleurs, à partir de l’émergence du système capitaliste, repose sur l’opposition à l’exploitation salariale. C’est donc la lutte contre l’exploitation de la force de travail dans le cadre d’un lien direct de sujétion qui constitue la base du syndicalisme ouvrier. De ce fait, les travailleurs exploités par un patron et les artisans – ou travailleurs indépendants – n’ont pas les mêmes intérêts économiques. Les premiers luttent contre leur employeur pour augmenter leur salaire ou améliorer leurs conditions de travail. Les seconds se plaignent plutôt des taxes professionnelles auxquels ils sont assujettis.


Modèle machiste

Lorsque le Strass nous répond que le sigle CGT contient aussi le mot « travail », il commet une méprise sur le sens de ce terme. Cette notion ne signifie pas ici la défense d’un métier spécifique, mais la défense du « parti du travail » (c’est-à-dire des travailleurs) contre le « parti du capital ».

Prenons la situation actuelle des travailleurs et travailleuses du sexe de l’industrie pornographique, il s’agit effectivement de personnes qui sont dans une relation de sujétion comparable à celles d’autres industries. Si l’on revient dans le passé, avant la légalisation de la pornographie, seuls quelques films étaient produits chaque année en toute illégalité et dans des situations qui pouvaient s’accompagner de contraintes violentes à l’égard des actrices. Aujourd’hui, l’industrie pornographique est une industrie légale et florissante du capitalisme qui rapporte des profits très importants. Pour autant, cela n’empêche pas que les conditions dans lesquelles sont tournés ces films puissent s’accompagner encore de violences sexuelles à l’égard des actrices. En outre, l’imaginaire capitaliste de la sexualité pornographique machiste et violent est devenu le modèle de la sexualité pour nombre d’adolescents.


Service marchand

Le réglementarisme visant à instaurer un statut professionnel légal aux prostituées risque lui aussi de n’être en définitif que le cheval de Troie du capitalisme. On nous répond que les politiques abolitionnistes ne sauraient être la solution, qu’elles ne font que rendre la prostitution davantage cachée. Mais à l’inverse, on peut constater que les pays qui ont adopté des politiques réglementaristes n’ont pas fait disparaître les réseaux de prostitution et l’esclavage sexuel qui continue de se développer en parallèle. Refuser le réglementarisme, antichambre du libéralisme, c’est refuser l’extension du domaine du capitalisme. Ce dernier se caractérise par une tendance à transformer tous les domaines de notre existence en marchandises.

La sexualité deviendrait ainsi tout simplement un service marchand réalisé par un travailleur du sexe. Pourtant, même lorsqu’on lit Marx, « manger, boire, procréer, etc., sont aussi des fonctions authentiquement humai-nes » 5, mais ce n’est pas du travail. La sexualité humaine se spécifie par le fait qu’elle puisse être tournée exclusivement vers la recherche du plaisir – y compris pour les femmes – et il ne nous semble pas judicieux de lutter pour la faire reconnaître comme un travail.

Irène (AL Paris Nord-Est)

[1] Voir Alternative libertaire n° 197 de juillet-août 2010, disponible en ligne sur http://www.alternativelibertaire.org

[2] http://www.alternativelibertaire.org


http://www.alternativelibertaire.org/sp ... rticle4642
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Re: Syndicalisme et prostitution. Quelques questions embarra

Messagede Pïérô » 24 Sep 2012, 23:06

Un article qui tape pas mal dans "Basta!"

Féminisme

Se prostituer librement, nouvel adage du néolibéralisme patriarcal ?

La « liberté de se prostituer », ultime argument du post-féminisme ? Pour Sophie Péchaud, présidente de l’Association européenne contre les violences faites aux femmes au travail (AFVT), derrière cet oxymore se cache plutôt une théorie économique bien éloignée de toute pensée novatrice : le capitalisme. Ou quand la pénalisation de la prostitution devient une atteinte à la « liberté du consommateur »...


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Se prostituer librement, voilà l’aboutissement ultime du post-féminisme, entend-on de manière dominante depuis longtemps, et plus encore depuis que la ministre des droits des femmes a affirmé sa volonté de pénaliser les clients de prostituées.

Depuis, tous les médias se sont empressés de donner la parole aux agent-e-s de la marchandisation du sexe. Cet été, une émission sur France Inter [1] à travers la voix d’une productrice clairement de parti-pris, a ouvertement fait l’apologie de la « libre prostitution » pendant deux heures, réduisant la position abolitionniste au rang des combats féministes les plus ringards et dépassés.

« Faire le choix de se prostituer librement » représenterait désormais ce qu’il y a de plus visionnaire et progressiste, car « louer » son sexe, son anus ou sa bouche pour en faire commerce serait affirmer sa liberté sexuelle en disposant de son corps comme on l’entend. Pénaliser les clients de prostituées serait une atteinte aux libertés individuelles, à la « liberté du consommateur » dans une société ultra-sécuritaire [2].

La prostitution, produit capitaliste

À l’image de cette prétendue dérive répressive, la nouvelle loi sur le harcèlement sexuel tendrait à « faire du contrôle social, à mettre en place les mesures de l’ordre moral » [3]. Tribunes, articles, interviews, portraits.... Les bons petits soldats de la société patriarcale sont de sortie pour le retour de bâton. Discours progressiste ? Rebelle ? Punk ? Libertaire ? Vaste blague ! Néo-libéral, capitaliste, ringard, dépassé, sénile, snob... oui. « Post-féministe », c’est-à-dire après la mort du féminisme, certainement.

Car derrière la soi-disant « liberté de se prostituer », se cache (à peine) une théorie économique éculée vraiment très loin de toute pensée novatrice : le... le... capitalisme. Et une organisation politique et sociale tout à fait subversive : le patriarcat. Fichtre ! Le capitalisme et le patriarcat, c’est le nouveau féminisme !

Les personnes se réclamant d’un « nouveau féminisme » plus libre, plus « fun », ne disent rien de plus que les plus vieux théoriciens du libre-marché et toutes celles et ceux qui refusent de s’émanciper de structures patriarcales ancestrales. Tant qu’il y a de l’offre et de la demande... Ce bon vieux paradigme économique a la peau dure et les dents bien acérées. Qu’importe les personnes pourvu qu’on ait l’argent.

La liberté de se prostituer ? Une chimère !

Sur France Inter le 23 août, on a pu entendre ceci : « Vous avez des femmes qui pour arrondir leur fin de mois, se vendent pour quelques heures. Que ce soit triste, d’accord, mais c’est leur problème, ce n’est pas le nôtre » [4]. Tout est dit. Ce n’est pas le leur, ce n’est pas le problème de celles et ceux qui n’ont pas besoin d’arrondir leurs fins de mois.

Ces hérauts du « féminisme moderne » vantent une illusion présentant la prostitution comme un choix, une liberté, un travail. Or, gagner de l’argent, subvenir à ses besoins, est une contrainte vitale pour toutes les personnes non-rentières, soit l’immense majorité de la population. En faisant de la prostitution le « must » de la ré-appropriation de sa sexualité, ils et elles transforment de fait cette dernière en contrainte et non en plaisir. Quelle audace ! « La liberté de se prostituer » n’est qu’un oxymore de plus, une association de malfaiteurs.
 Comme toutes les chimères, elles ne sont jamais là où on les croit.

Sophie Péchaud, présidente de l’Association européenne contre les Violences faites aux femmes au travail (AVFT)


Notes

[1] Emission « Les Mutants » - Agathe André Le post-féminisme (1/2) : mères, épouses, victimes... et si les femmes étaient les ennemies de leur libération ? (18/08/2012) Le post-féminisme (2/2) : sexualités licites et illicites, le post-féminisme sera Queer ! (19/08/2012)

[2] Elisabeth Badinter (deuxième actionnaire et présidente du conseil de surveillance du groupe Publicis, créé par son père), dans l’émission Le post-féminisme (2/2) : « Pourquoi l’Etat doit se mêler de légiférer la sexualité ? Je trouve ça très grave.(...) C’est leur liberté d’adulte et du consommateur, si cette femme est consentante. »

[3] Alain Gérard Slama, dans l’émission « On refait le monde » / RTL / (02/08/2012)

[4] Régine Desforges, France inter, « 5 minutes avec Bruno Duvic » (23/08/2012)

http://www.bastamag.net/article2602.html
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Re: Syndicalisme et prostitution. Quelques questions embarra

Messagede Pïérô » 18 Avr 2013, 07:37

"Anatomie d’un lobby pro-prostitution – Étude de cas: le STRASS, en France" :
http://sousleparapluierouge.wordpress.c ... en-france/
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Re: Syndicalisme et prostitution. Quelques questions embarra

Messagede bipbip » 15 Juin 2013, 00:42

Agression à la foire à l'autogestion, Morgane Merteuil et le STRASS à la manœuvre

LA VIOLENCE, JUSQU’OÙ ?

Publié le juin 13, 2013 par zeromacho

En France, une fois de plus, des soutiens de la prostitution s’en prennent avec violence à des membres de Zéromacho. Une fois de plus, ils agressent et insultent des personnes engagées pacifiquement contre le système prostitueur : tel est leur mode d’action contre les abolitionnistes qu’ils poursuivent aussi de leur haine sur les réseaux sociaux.

Alors qu’un jeune homme vient d’être tué à Paris pour ses idées, quelles conclusions tirer de ce nouvel incident violent ?

***

Les 8 et 9 juin 2013, cinq membres de Zéromacho tenaient un stand à la Foire à l’Autogestion à Montreuil (dans la banlieue parisienne). Le 9 juin à 15h30, Morgane Merteuil, porte-parole du STRASS (syndicat du travail sexuel), et une dizaine d’autres personnes les ont agressés et insultés grossièrement pendant près d’une heure. Elles venaient du stand du Pink Bloc, accueilli dans cette Foire au même titre que Zéromacho.

Plutôt que de défendre des personnes prostituées sur le terrain, le STRASS choisit de poser à la victime des abolitionnistes ! C’est d’autant plus désolant que les femmes dans la prostitution, qui sont les victimes réelles des violences du système prostitueur, se passeraient bien d’être présentées comme « libres et heureuses d’exercer ce “métier’’ » ; elles apprécieraient plutôt qu’on se préoccupe d’elles…

Depuis des années, presque chaque fois qu’une réunion publique au sujet de la prostitution est organisée en France, elle est perturbée par l’irruption violente de quelques personnes qui prétendent défendre les « droits des prostituées » mais ne représentent qu’elles-mêmes.

C’est pourquoi les réunions se font plutôt sur inscription, avec filtrage des entrées. Lors du dernier meeting, le 13 avril 2013, à la Machine du Moulin-Rouge, organisé par le collectif Abolition 2012 (groupant 54 associations, dont Zéromacho), une quinzaine d’opposants n’ont pu que vociférer près de l’entrée et jeter un liquide rouge sur le trottoir, en prétendant que les abolitionnistes voulaient leur mort.

Lors de cette Foire à l’Autogestion, l’intervention du service d’ordre et d’autres participants a réussi à contenir les agresseurs de Zéromacho. Qu’en sera-t-il une prochaine fois ?

***

Cette violence mise en œuvre par le STRASS et apparentés n’est-elle pas le signe qu’ils n’ont rien d’autre à opposer aux arguments de Zéromacho ?

Comme le manifeste (voir page manifeste) proclame « Oui à la liberté sexuelle ! Oui au désir et au plaisir partagés », ils ne peuvent pas accuser les Zéromachos d’être « anti-sexe ».

Comme la première demande de Zéromacho aux pouvoirs publics est de cesser de pénaliser les personnes prostituées et d’offrir des solutions alternatives à la prostitution, afin de rendre effectif le droit de n’être pas prostituée, nous accuser d’être leurs ennemis relève de la mauvaise foi.

Nous, Zéromachos, résistons pacifiquement à leur violence, en faisant appel à l’intelligence, en proposant le dialogue. N’avons-nous pas tous, eux comme nous, intérêt à vivre dans un monde sans prostitution ? Un monde où la sexualité ne sera ni un service marchand procuré par la violence, ni une expression de la domination machiste, mais un lieu d’exercice de la liberté, dans le respect de l’autre et de ses désirs.
http://zeromacho.wordpress.com/2013/06/ ... ommunique/
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Re: Syndicalisme et prostitution. Quelques questions embarra

Messagede Pïérô » 30 Juil 2013, 14:34

Un Manifeste contre la pénalisation des prostituées et de leurs clients tourne actuellement, à l'initiative du STRASS, avec appel à signatures. Il amalgame la pénalisation des prostituées (contre laquelle toute abolitionniste conséquente s'élève sans aucun doute) et la pénalisation des clients. Si la pénalisation des clients fait débat il est clair qu'il y a là encore un joli tour de passe-passe pour faire avaler la couleuvre de la défense du système prostitutionnel.
La liste des signatures est publié sur le blog de Christine Le Doaré, http://christineld75.wordpress.com/2013 ... omment-518, et on le retrouve aussi là avec les signatures internationales : http://openfsm.net/projects/faldi-fsm/l ... forum_view , elle est longue et étonnante.

Appel à signatures :

Manifeste contre la pénalisation des prostituées et de leurs clients

Quelles que soient nos opinions sur la prostitution, nos organisations sont unanimes pour affirmer que les prostituées ne doivent pas être pénalisées. Pour cela, le délit de racolage public doit être abrogé au plus vite et sans conditions.

Nous sommes également unanimes à considérer que la pénalisation des clients ne fera pas disparaitre la prostitution, mais accentuera la précarisation des prostituées en les forçant à davantage de clandestinité, et en les éloignant des associations de soutien et de santé communautaire, et des structures de soins, de dépistage et de prévention.

Isolé-es les un-es des autres, les prostitué-es seront davantage exposé-es à des risques de violences, d’exploitation, et à des contaminations au VIH sida et IST. Cette mesure va renforcer le statut d’inadapté-e social-e des prostitué-es, statut stigmatisant qui doit être supprimé. Considérer que les prostitué-es doivent être traité-es comme des mineur-es sans capacité d’exprimer leur consentement, les place dans une catégorie de citoyen-nes à part, favorise le stigma et les pratiques de discriminations. Au contraire, nous voulons qu’elles et ils soient protégés par le droit commun.

Nous, organisations signataires de ce manifeste, demandons l’abrogation immédiate du délit de racolage public et nous opposons à toute pénalisation des clients des prostitué-es, sous quelque forme qu’elle soit.


Acceptess-Transgenres, Acthe, Act Up-Paris, Act Up-Sud Ouest, Aides, les Amis du Bus des Femmes, An Nou Allé, Arap-Rubis (Nimes), Arcat-Santé, ArisCentre LGBTI (Lyon), ARPS (Association Réunionnaise pour la Prévention des Risques liés à la Sexualité ), ADRPP (Association pour les droits, la reconnaissance et la protection des prostitué(e)s), ASUD (Auto Support des Usagers de Drogues), ANA (Avec Nos Ainées), Autres Regards (Marseille), Black Caucus France (Union française des étudiant/e/s & diplômé/e/s africain/e/s & ultramarin/e/s), Cabiria (Lyon), CGLBT (Centre Gay Lesbien Bi et Trans de Rennes), Cégom (Collectif des États généraux de l’outre-mer), Collectifdom, Collectif féministe 8 mars pour toutes, Collectif Droits et Prostitution, Collectif Existrans, Collectif des prostituées du 16ème arrondissement de Paris, Collectif des prostituées de Gerland, Collectif des travailleuSEs du sexe de Perpignan et des Pyrénées Orientales, les DurEs à Queer, Elus Locaux Contre le Sida, l’En Dehors, Fédération Anarchiste, Fédération Total Respect / Tjenbé Rèd, Femmes de la Terre, les Flamands Roses, FRISSE (Femmes, réduction des risques et sexualités),
GARCES (Groupe d’Action et de Réflexion Contre l’Environnement Sexiste - collectif féministe de Sciences Po), GayKitschCamp, Grisélidis (Toulouse), HF-Prévention Santé, I.P.P.O (Bordeaux), Itinéraires Entr’Actes (Lille), Kingsqueer de Kingsqueer, Ligue des Droits de l’Homme, Ligue de l’Enseignement, Médecins du Monde, Minorités, la Mutinerie, les Myriades Transs, NPA (Nouveau Parti Anticapitaliste), Observatoire des Transidentités, l’OII Francophonie (Organisation Internationale Intersexe), Onzième Dom (Union des Français/es d’outre-mers du XIème arrondissement de Paris), ORTrans (Objectif Respect Trans), OUTrans, Paroles Autour de la Santé (Guadeloupe), le Pink Bloc, le Planning Familial, Rainbow Caucus France (Union française des étudiant/e/s & diplômé/e/s LGBT), Sans Contrefaçon, SIS Association, les Sœurs de la Perpétuelle indulgence – Couvent de Paname, Couvent de Paris, et Couvent des 69 Gaules, Solidaires Etudiants, Solidarité Sida, Syndicat des Avocats de France, Syndicat de la Magistrature, STRASS (Syndicat du Travail Sexuel), STS (Support Transgenre Strasbourg), Tjenbé Rèd Prévention, les Tumultueuses, Warning


Il est encore temps d'interpeller certaine organisations, associations et syndicats...


Prise de position dans le courrier de La Marche Mondiale des femmes n°228 du 14 juillet 2013

Nous ne signerons pas la « pétition contre la pénalisation des prostituées et de leurs
clients »
- Abolition 2012

Un certain nombre de personnalités ou d’associations ont été, sont actuellement ou seront sollicitées par des associations lobbyistes du système prostitueur pour signer une pétition « contre la pénalisation des prostituées et de leurs clients ». Nous les appelons à ne pas signer cette pétition et disons aux initiateurs/initiatrices et signataires de cette pétition :

N’expliquez rien, brouillez les messages, appelez à signer les paresseux de l’entendement et les maniaques du néo libéralisme - tout peut se vendre ; mélangez des magistrats qui, en principe, ont à rendre la justice, des hommes qui refusent de voir supprimer leurs privilèges de dominants, des femmes et des hommes qui pensent que le nec plus ultra est de vendre ses orifices à l’usage unilatéral du plaisir de clients ; ne dites rien sur la réalité de la prostitution et des témoignages des survivantes de cette violence totale. Vous aurez alors une pétition malhonnête avec une longue liste de signatures de groupuscules soutenus par quelques ordres qui n’ont pas encore accepté l’égalité entre les femmes et les hommes, qui n’ont pas encore pu imaginer ce que pourrait être une société de réelle liberté sexuelle.

Pour vivre notre sexualité, nous n’avons pas besoin d’une catégorie d’être humain, esclave du plaisir de ceux qui ne jouissent que de la domination et de la chosification de l’autre.
Pour vivre notre sexualité, nous n’avons pas besoin de marchandiser le corps de l’autre, de le
soumettre parce qu’elle/il est pauvre
Pour vivre dans une société de liberté et d’égalité, de respect de l’autre, nous devons rendre justice aux victimes de violence et faire en sorte que des hommes cessent d’organiser le plus violent et destructeur système d’exploitation au monde, la prostitution.

Cette pétition occulte les conséquences de la prostitution sur les personnes prostituées, ce qu’elles ont vécu dans leur enfance et adolescence. Cette pétition, qui reconnait que les personnes prostituées subissent des violences, les y enferme. La passe elle-même est une violence agie par les clients à laquelle s’ajoutent les violences qui entourent la prostitution commises par les proxénètes et les clients.
Evidemment, il ne faut pas pénaliser les victimes de ces violences et ce n’est pas stigmatisant que de reconnaître que des millions d’être humains sont soumis à la violence et au plaisir d’une minorité d’hommes.
Seule une loi d’interdiction de l’achat d’actes sexuels peut protéger et permettre une réelle prévention du devenir client pour une réelle égalité entre les femmes et les hommes.
Le droit commun, c’est que chacun-e, toutes et tous puissions vivre dans une société qui condamne la violence, l’atteinte à la dignité et qui donne les moyens aux victimes de reconstruire leur vie.
La citoyenneté est la participation à la construction d’une société d’égalité où chacun-e est respecté, où la loi dit le droit et où les plus fragiles sont protégé-es. La liberté est inconciliable avec la complaisance pour les actes d’exploitation et de domination, complaisance dont font preuve les signataires de cette pétition


Le manifeste de la honte et de notre colère !

Un manifeste « contre la pénalisation des prostituées et de leur client » lancé par le STRASS et Act-Up Paris notamment, est depuis quelques semaines proposé avec insistance, à la signature du monde associatif. *1.

Que dit-il ?

Il affirme fort justement que les personnes prostituées ne doivent pas être pénalisées et que le délit de racolage doit être abrogé. C’est vrai, et en effet, abolitionnistes comme réglementaristes s’accordent sur cette mesure, d’ailleurs déjà votée par le Sénat ; il est fort probable qu’elle le sera aussi à l’Assemblée Nationale.

Cette question n’est donc pas polémique, ne fait même aucun doute : il faut abroger le délit de racolage, les prostitué-e-s victimes de violences ne sont pas coupables et ne doivent pas être stigmatisées.

En revanche, ce qui fait polémique, c’est la position sur la pénalisation du client.

Affirmer que la pénalisation du client va renforcer la précarisation des prostituées, les éloigner du système de santé et de la prévention est plutôt fantaisiste.

En outre, le tour de force consiste à lier le destin des prostitué-s-e à celui de leurs clients !

Pourtant, il suffit d’y regarder de près : dans tous les pays abolitionnistes*2., la prostitution qui a amplement diminué, n’a pas disparu au fond des bois, elle a lieu en plein centre-ville. Les prostitué-e-s ont accès aux aides sociales et à la prévention en matière de santé. Logiquement, comme elles ne sont plus dans la clandestinité, elles peuvent imposer plus facilement le port du préservatif et surtout porter plainte en cas de violences. En réalité, l’abolition inverse la charge pénale et la reporte sur le client et d’ailleurs, toute personne un tant soit peu sensée le sait, ce qui met toute personne prostituée en danger, c’est le risque induit par le fait d’être seule et vulnérable avec le client, que ce soit dans la rue, dans une voiture, dans un appartement, ou dans un bois. Peu importe le mode de rencontre, le danger c’est le client lui-même !

Les clients prostitueurs qui consomment du sexe tarifé enrichissent les proxénètes sur le dos de femmes le plus souvent pauvres, racisées et/ou violentées dans leur jeunesse. La demande du client est à l’origine du système prostitueur, 3e marché criminel mondial. Une économie criminelle coupable de violences inouïes à l’encontre de femmes et d’enfants déplacés, dressés, violés, torturés. Pourquoi tant d’indulgence à leur égard, pourquoi cette impunité alors que la prostitution est bien une violence sexuelle ?

Alors, commencer ce manifeste en posant « quelle que soit notre position sur la prostitution » pour finir par amalgamer une position sur la pénalisation des prostituées avec une position sur la pénalisation du client alors que les deux peuvent parfaitement diverger, n’est pas très honnête. Mais de la part d’un lobby pro-prostitution est-ce étonnant ? Comment peut-on ainsi se laisser abuser par un groupuscule majoritairement constitué de « dominas » masculins qui soumettent d’autres hommes et ne représente en rien l’écrasante majorité des femmes prostituées, elles-mêmes principalement contraintes ?

Mais surtout, rien n’est dit des constats catastrophiques et alarmants des pays qui ont légalisé la prostitution et s’inquiètent désormais de la situation qu’ils ont pourtant installée. Ces pays sont débordés par des mafias proxénètes de plus en plus puissantes, la traite s’est intensifiée, les profits financiers sont gigantesques. L’exploitation des personnes prostituées est grandissante : on constate un développement des pratiques de plus en plus violentes et dégradantes, avec des prix au rabais, des femmes soldées. Il faut lire les dossiers des magazines allemand « Der Spiegel » et hollandais « De Volkskrant » pour s’en convaincre et comprendre de quoi il est vraiment question.

La France, pays abolitionniste qui n’applique pas correctement cette politique puiqu’elle pénalise les prostituées et fait preuve d’une complaisance envers les clients, pourrait-elle commettre les erreurs des pays réglementaristes en s’engageant à son tour dans cette voie ? Il serait pourtant temps de mettre en oeuvre une véritable politique abolitionniste pour se donner les moyens de combattre l’une des pires violences sexuelles patriarcales que la loi ne condamne pas. Les abolitionnistes ne veulent plus de mesures isolées, mais l’adoption d’une loi globale afin de : renforcer la lutte contre la traite, abroger le délit de racolage, adopter de sérieuses alternatives sociales ; lancer des actions de prévention et d’éducation et pénaliser le client. Eduquer au respect du principe d’inaliénabilité de l’être humain et à l’égalité femmes-hommes, c’est le rôle de l’état, pas de renforcer le proxénétisme !

Nous en avons assez que le slogan féministe des années 70 « liberté de disposer de son corps», soit récupéré par des lobbys aux fins de marchandisation. *3. Nous en avons assez des récupérations successives de nos luttes, assez de la culture du viol et des ravages de la libéralisation de la prostitution !

Que des groupuscules de la nébuleuse radicale libertarienne, Verts en tête, des associations de santé communautaire, aient signé ce Manifeste ne nous surprend guère. En revanche, d’autres signatures sont plus étonnantes. C’est vrai de nos jours, Internet est devenu le lieu d’une mobilisation perpétuelle et il est possible de signer chaque jour nombre de pétitions, sans guère avoir le temps de les lire toutes en détail.

Tout de même, signer c’est s’engager, alors, je demande à tous les signataires de cette pétition d’assumer leur soutien et de m’expliquer, nous expliquer, pourquoi, aux côtés de petits entrepreneurs libéraux et d’un lobby ultra-minoritaire, ils jugent bon, sur le dos des femmes exploitées et violentées dans la prostitution, de s’ériger en défenseurs de la domination masculine, du libéralisme et du système patriarcal ?

*1. Il n’est pas encore publié sauf sur une page FB, il devait être publié à la rentrée ; pour l’instant, il était adressé avec insistance pour ne pas dire, harcèlement, aux associations et formations, pour les conduire à signer. L’objectif était ensuite de prétendre que le monde associatif soutient le lobby pro-prostitution.

*2. Pays abolitionniste : la France est abolitionniste mais n’applique pas correctement cette politique : en effet, elle ne pénalise que la personne prostituée (délit de racolage), le client prostitueur n’étant lui jamais inquiété.

Le délit de racolage vient d’être abrogé par le Sénat, il devrait l’être à l’AN (doit être voté par les deux chambres), les abolitionnistes préfèreraient quant à eux, une loi globale.

Pays abolitionniste et loi globale : à l’instar de la Suède, l’Islande et d’autres encore, des pays qui ne pénalisent pas la personne prostituée, qui mettent en place des politiques sociales et de santé (réinsertion…), qui éduquent et pénalisent le client prostitueur à l’origine des violences sexuelles et de la perpétuation et même de l’expansion du système prostitueur.

*3. "Libération sexuelle et liberté à disposer de son corps" ou Liberté et libéralisme c’est différent : http://christineld75.wordpress.com/2013 ... son-corps/

-Sites d’information sur les régimes politiques abolitionnistes (ne pénalise que le client prostitueur ; prohibitionniste : pénalise la personne prostituée comme le client prostitueur / interdiction ; réglementariste : régularise le proxénétisme (bordels, vitrines… le prostitueur devient un client comme un autre / et /ou un commerçant comme un autre) :

http://www.abolition2012.fr

http://www.mouvementdunid.org

http://www.prostitutionetsociete.fr

-Infomations sur le lobby pro-prostitution : http://scoop-it/u/fee-ministe

-Informations classées par rubriques (légales, rapports, articles, etc.) sur la prostitution. Régulièrement mis à jour : http://www.scoop-it/t/prostitution-les- ... ch-english
http://christineld75.wordpress.com/2013 ... omment-518
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Re: Syndicalisme et prostitution. Quelques questions embarra

Messagede bipbip » 03 Nov 2013, 01:03

« Morgane Merteuil, la porte parole du STRASS peut jouer l’indignation, tout ce qu’elle peut reprocher aux "343 raclures de chiottes" c’est d’utiliser l’expression "ma pute" ; sur tout le reste leur position est la même, leur vision du monde est la même, c’est la liberté bourgeoise perpétuant la domination éternelle.»

Contre le STRASS et son monde

La récente polémique autour de la prostitution ne doit pas laisser aux exploité-e-s l’impression que ce type de débat tombe du ciel, et ne concernerait que les convictions de chacun.

Ce qui se passe actuellement est un combat culturel entre deux parties de la bourgeoisie :
- Celle qui tient avant tout au maintien de l’ordre, quelle que soit la nature du désordre et que celui ci s’attaque aux prolétaires ou à l’Etat. C’est le camp de Najat Vallaud-Belkacem, ou d’une personnalité comme Ségolène Royale. Ce courant s’alarme d’une montée forte de la prostitution dans la société, revêtissant de nouvelles formes (comme les propositions de plus en plus fréquentes d’appartements contre services sexuels). C’est eux qui veulent faire du fait de payer un-e prostitué-e une contravention (le type d’infraction le moins grave en droit français).
- Celle partisane d’un libéralisme total en tous les domaines (économie, drogues, sexualité, religion...), et qui ne comprend pas qu’elle ne puisse pas disposer des prolétaires librement, du moment qu’elle a l’argent nécessaire. On retrouve dans ce courant des universitaires, un homme d’affaire comme Pierre Bergé, un politicien comme DSK, un cartoon comme South Park, ou le STRASS (Syndicat du Travail Sexuel).

Il semble naturel à tous que le STRASS soit assimilé au mouvement féministe et aux luttes sociales. Mais contrairement aux apparences, toute l’idéologie du STRASS est celle de la bourgeoisie ultra-libérale, où l’on retrouve les partisans de la GPA, de la libéralisation de la prostitution, jusqu’aux "transhumanistes" et autres cybernéticiens.

Sous prétexte de liberté, il devrait être permis à tout le monde d’acheter et de vendre n’importe quelle partie de lui. Or, pour nous qui voulons détruire le Capital, l’argent, la valeur et voulons que chacun puisse choisir sa vie et la réaliser librement, cette "liberté" pue le fric et les rapports autoritaires. La liberté sans éthique, la liberté dans le Capital, c’est celle des plus riches qui possèdent toujours plus de pouvoir sur les pauvres.

Pour nous qui pensons que personne ne devrait faire ce qu’il ne voudrait pas faire si l’argent n’était pas nécessaire à notre survie, la banalisation de la prostitution (par exemple, une blogueuse comme "Une cagole à Paris" parle de "plan de vie possible" concernant le fait de se prostituer) par les activistes du STRASS ou une partie du mouvement "queer" est scandaleuse. Elle désarme théoriquement les exploité-e-s, en leur disant que considérer le fait de se prostituer comme quelque chose de malheureux est "putophobe". Elle fait de la solidarité bienveillante entre pauvres – "je suis triste que tu fasses un métier qui implique qu’on utilise ton corps" – une oppression. Dire qu’on trouve la prostitution dégradante est, de la même manière, censé être putophobe. Quand ce n’est que l’expression d’une exigence de dignité humaine et de solidarité entre pauvres.

Et dans un mouvement de renversement digne des plus grandes magouilles idéologiques, les révolté-e-s se soulevant contre le fait que des riches payent des pauvres pour profiter de leur intimité deviennent des "putophobes", des dominants. Les personnes ayant choisi ce camp se mettent au service de la fraction la plus décadente et sans éthique de la bourgeoisie, qui profite aujourd’hui la première de l’existence de la prostitution.

Le coeur de la prostitution, la raison pour laquelle les bourgeois ne la répriment pas, ce sont des individus comme Dominique Strauss Kahn qui organisent des soirées infâmes où des riches couchent avec des prostitué-e-s en groupe, ce qu’ils appellent entre eux des "parties fines". Ces dégénérés sont partisans du plus grand libéralisme sur le sujet, pour pouvoir continuer leur passion répugnante : payer des pauvres pour les consommer entre riches. La scène finale du film "Requiem for a dream" donne un bon aperçu de ce que peuvent être ces soirées. On y voit deux jeunes femmes ayant besoin d’héroïne avoir des rapports sexuels entourés d’hommes en costards cravates, affublés de masque et leur lançant des billets.

D’où cette solidarité de la part des riches de droite de la pétition des "343 salopards" (pardon des "343 connards" euh ...) avec les clients du bois de Boulogne, souvent bien moins aisés financièrement (les pauvres consommant de la prostitution pouvant être à mon sens considérés avec autant de pitié que les flics, les matons et les militaires).

C’est le patriarcat soudé autour d’une logique de domination sans pitié : les hommes doivent pouvoir disposer des femmes et les riches des pauvres. Ceci avec l’assentiment du STRASS : on pouvait encore trouver récemment sur leur site une rubrique "nos clients nous aiment", un de leurs slogans, à coté du sinistre "travail sexuel libre" est "touche pas à mon client"...

Morgane Merteuil, la porte parole du STRASS peut jouer l’indignation, tout ce qu’elle peut reprocher aux "343 raclures de chiottes" c’est d’utiliser l’expression "ma pute" ; sur tout le reste leur position est la même, leur vision du monde est la même, c’est la liberté bourgeoise perpétuant la domination éternelle.

Celle qui se présente comme une "féministe postmoderne" participe d’un mouvement de banalisation de la violence faites aux femmes, aux trans, aux pauvres, et l’on pourrait se demander où s’arrête cette "liberté totale" : les bastons de SDF filmées et mises sur la toile contre rémunération, ça va, ou c’est limite ?

La question n’est pas d’appuyer l’Etat dans son entreprise de maintien de l’ordre, ni de servir la soupe aux dominants que sont les clients, la question c’est de s’attaquer à la domination d’où qu’elle vienne, pour arracher une vie qui mérite d’être vécue, sans capitalisme, sans riches, sans pauvres, sans machos, sans clients, sans Etat et sans argent.

Un amoureux de vivre à en mourir.

http://paris.indymedia.org/spip.php?article14404
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Re: Syndicalisme et prostitution. Quelques questions embarra

Messagede Pïérô » 15 Nov 2013, 01:54

Il y en a une qui trouve que l'appel des 34(3) machos fait écho à sa demande de libéralisation de son commerce. Il y en a même qui ont pensé que cela faisait partie de la revendication des prostituées en général, prostituées qui à mon avis aspirent à une autre vie, cette grande partie des prostituées réduite à l'état d'esclaves sexuelles. Et dans l'état de confusionnisme qui touche une partie du mouvement anar il y en a même qui pensent que c'est à mettre en forum pour participer à contredire ce qu'on appelle féminisme et abolition de la prostitution : http://forum.anarchiste.free.fr/viewtop ... 40#p154667 . (Il me semble de temps en temps important de souligner qu'il existe dans le mouvement anar des caricatures ambulantes, là à la cnt-ait de la tendance scissionniste toulousaine mais en cheville avec certains membres de la FA et qui en chœur participent à ranger au placard ce type de combat, fiers de mener sur un forum dont ils ont évacué toute forme de vie militante libertaire un super combat contre on sait plus bien quoi tellement ça devient confus, les communistes-libertaires étant poursuivis et éradiqués et les anarcho-capitalistes bienvenus).

La prostituée de luxe, une toute petite exception dans le monde de la prostitution.

"Anna, escort girl depuis deux ans, adresse une lettre ouverte aux abolitionnistes de la prostitution. Avec virulence, elle réclame le droit de disposer de son corps librement".

C'est dans "Prostitution: je suis une "pute de luxe", je préfère les "343 salauds" aux abolitionnistes" - le Plus

http://leplus.nouvelobs.com/contributio ... istes.html

Mais pourquoi ne pas dire le reste. Pourquoi ne dit-elle pas qu'elles sont 0,5 % à 2 % selon les pays mais que c'est d'elles que l'on parle lorsque l'on évoque la prostitution de grand confort, choisie, de luxe, "quand je veux, comme je veux", douche avant, douche après, champagne au frais.

Voilà ce qui fait fantasmer une large fraction des hommes sur la planète. Mais on est bien loin des horreurs de la prostitution ordinaire, de ses violences et de son racisme. Grosso modo, 99% de la prostitution constitue un véritable enfer sur terre, un enfer contre les femmes, à cause de la misère, de l'action des proxénètes et de celle des clients et parfois de la complicité des épouses des clients.

Sur cet écart lire :

FEMEN (1) : "L'Europe doit se défaire de sa vision romantique de la prostitution choisie. Ces situations existent certes, mais dans un infime pourcentage, et ne doivent pas servir d'excuse (facile et lâche) pour ignorer la souffrance de millions d'autres. Par ailleurs, ce sera faire preuve d'honnêteté que d'admettre que la prostitution n'est pas, la plupart du temps, exercée par des européennes. A Paris par exemple, les prostituées sont asiatiques à Belleville, ouest africaines à Barbès, slaves à Pigalle. La prostitution parisienne est exercée par des femmes pour assurer leur survie économique. Appelez ça un "choix" si vous le souhaitez, mais admettez qu'elles n'en ont pas tellement d'autres (ici la tautologie est nécessaire)."

http://www.huffingtonpost.fr/inna-schev ... ostitution

"La prostitution, c'est un nombre incalculable et quotidien de pénétrations vaginales, anales, buccales non désirées. La question de la santé des personnes prostituées ne peut être posée si l'on refuse d'ouvrir les yeux sur cette réalité. L'Inspection générale des affaires sociales (IGAS), dans son rapport sur la santé des personnes prostituées, alerte sur les divers et nombreux problèmes liés à l'exercice de la prostitution : maladies sexuellement transmissibles, addictions et pathologies liées à la précarité, problèmes gynécologiques, lésions secondaires consécutives à des violences…


in Ce sont les acheteurs de sexe qu'il faut pénaliser"
http://www.lemonde.fr/idees/article/201 ... #no_mobile

http://blogs.mediapart.fr/blog/christia ... ostitution?
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Re: Syndicalisme et prostitution. Quelques questions embarra

Messagede Pïérô » 26 Nov 2013, 12:54

Sur le collectif "8 mars pour toutes"

"8marspourtoutes" ou l’oubli d’un énorme détail de l’histoire féministe

Un petit groupe de femmes "féministes pro-sexe" 1. du collectif "8 mars pour toutes" 2. revendique de ne pas pénaliser le client prostitueur.

Il me semble qu’elles ont tout simplement oublié un énorme détail de l’histoire du féminisme.

Depuis toujours le féminisme lutte contre le système patriarcal. La principale raison d’être de ce système est de s’approprier les femmes en les opprimant par tout moyen, y compris la violence, dans le but principal de contrôler la sexualité et la reproduction ou pourrait-on dire, contrôler la sexualité pour maitriser la reproduction et la transmission des gênes autant que du patrimoine.

La prostitution fait partie de ce système coercitif d’appropriation des femmes.
Personne ne combat un système de domination et de violences avec des gentillesses. Surtout un système responsable des violences les plus inouïes et générant des profits criminels de plus en plus considérables.

Il faut croire que ces artistes, universitaires, journalistes et autres femmes évoluent bien loin des préoccupations quotidiennes de survie des 85 % de femmes prostituées étrangères contraintes d’exercer sur le sol français.
Quand on sait que cette "pénalisation" consiste en une contravention punie d’une amende et-ou d’un stage de sensibilisation, que les objectifs de ce dispositif sont de limiter les développements et l’emprise du système prostitueur, de faire évoluer les mentalités en matière de respect et d’égalité femmes-hommes, de faire reculer les violences, on reste sans voix devant tant de complaisance vis à vis des clients, oppresseurs et coupables de violences sexuelles !
Les femmes prostituées rencontrent des problèmes de santé sans nombre, et surtout, la plupart témoignent d’une sexualité brisée, car la prostitution ce n’est pas de la sexualité, mais bien de la domination et des violences sexuelles.

Que des femmes qui se prétendent féministes, puissent exprimer une telle complicité envers les clients prostitueurs est pour le moins dérangeant. Complices ou en lutte contre les violences de la domination masculine, il faut choisir !

Comme des milliers d’autres, et des millions au monde, demain samedi 23 novembre, pour la journée mondiale de lutte contre les violences faites aux femmes du 25 novembre, nous choisirons de défiler contre toutes les violences et surtout pour l’abolition de la plus archaïque et destructrice d’entre elles, la prostitution !

Manifestation Montparnasse 23 novembre 2013 _ 14 H

1. Le "féminisme" pro-sexe issu du milieu queer, apparaît dans les années 1980 aux États-Unis. Il prétend faire du plaisir et du travail sexuel des outils politiques dont les femmes devraient s’emparer, mais ne déconstruit en rien les schémas de domination et d’exploitation sexuelle. Comme si le seul fait que des femmes s’en emparent suffisait à y changer quelque chose.

2. collectif 8 mars pour tous, issu de groupuscules STRASS (syndicat des travailleurs du sexe), associations de santé communautaires telles que Act-Up …

http://christineld75.wordpress.com/2013 ... feministe/
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Re: Syndicalisme et prostitution. Quelques questions embarra

Messagede Pïérô » 29 Mar 2014, 17:49

Prostitution : Le Strass, syndicat ou lobby ?

Le Strass (Syndicat du travail sexuel) tire sa popularité au sein de larges pans de la gauche radicale de son appellation de syndicat. Suffit-il pour autant de se nommer ainsi pour avoir des pratiques qui s’en rapprochent ? Faisons un pas de côté par rapport au débat idéologique qui l’oppose aux abolitionnistes – dont AL – pour nous interroger sur ces pratiques et ce qu’elles ont – ou non – de syndical.

Un syndicat de prostitué-e-s, cela semble tomber sous le sens. S’organiser dans un syndicat, c’est bien le premier acte que des personnes peuvent entreprendre pour résister à l’exploitation qu’elles subissent dans l’activité d’où elles tirent leur revenu. Voilà bien une réponse concrète, pragmatique et de lutte de classes à l’oppression, la répression, la stigmatisation et aux violences que les prostitué-e-s subissent. D’où la popularité du Strass dans les milieux de la gauche radicale.

Militer au Strass, une affaire d’idées

Sans revenir sur les débats qui opposent le Strass et les abolitionnistes – dont AL – qui luttent contre les violences infligées aux prostitué-e-s, par l’État, les proxénètes et les clients, tout en visant l’abolition de la prostitution, il s’agit ici de poser la question des pratiques. Le Strass est la continuité syndicale de l’association Les Putes, fondée par des militants et militantes venu-e-s d’Act Up. Le Strass, comme Les Putes avant elle, excelle par conséquent dans ce qu’Act Up sait faire de mieux, à savoir l’agit-prop : imposer la prise en compte dans l’espace public, sur la base de dénonciations crues, d’un problème ou d’une population stigmatisée. Cela en fait-il un syndicat, comme il le proclame  ?

Sur son site internet  [1], on trouve surtout et pour commencer beaucoup de choses sur ses positions politiques : une Charte, un règlement intérieur, des statuts, les « positions du Strass »... Quand l’organisation se présente, c’est aussi pour mettre l’accent sur son idéologie, avant de finir brièvement par indiquer : «  Nous informons directement les travailleurSEs du sexe sur leurs droits et comment les faire valoir, en allant à leur rencontre et en mettant à leur disposition, en différentes langues, des fiches pratiques. Nous nous efforçons de les conseiller et de les soutenir dans leurs démarches  ». Le site dispose en effet d’une adresse à contacter en cas de violences, notamment pour bénéficier d’un accompagnement dans des démarches juridiques, et d’une rubrique « Nos droits » – mais, ce qui est étonnant pour un syndicat, ce n’est pas la plus fournie.

Les militantes et militants du Strass se font surtout connaître par leur hyperactivité sur internet  : communiqués de presse, intervention sur les réseaux sociaux... le plus souvent pour tacler les abolitionnistes (surnommé-e-s « abos »), supposé-e-s responsables de tous les maux des prostitué-e-s. L’organisation intervient également dans de nombreuses initiatives unitaires féministes ou LGBT, et y pratique couramment l’ultimatum vis-à-vis des organisations abolitionnistes : le Strass ne signe pas si ses mots d’ordre ne sont pas intégrés à l’appel, même quand le sujet de la mobilisation n’est pas celui de la prostitution.

Dans sa forme actuelle, les pratiques du Strass s’identifient davantage à celles d’un lobby menant une bataille d’opinion – en l’occurrence, au vu de l’actualité, contre la pénalisation des clients – qu’à celle d’un syndicat, outil concret pour des travailleurs et travailleuses.

Clients ou patrons ?

Le Strass pourrait répondre que c’est seulement lorsque les prostitué-e-s auront les mêmes droits que les travailleurs et travailleuses qu’elles pourront mener des batailles syndicales pour les faire valoir. Mais c’est le choix de ses cibles qui est troublant. Pour faire une analogie, est-ce que les syndicalistes qui orientent leur stratégie revendicative autour de l’amélioration des conditions de travail considèrent que leurs premiers ennemis sont ceux qui préfèrent discuter dès maintenant de l’abolition du salariat ? Non, car dans les deux cas, la cible, ce sont bien les patrons. À l’inverse, il a fallu que les clients révèlent leur vrai visage à travers le « Manifeste des 343 salauds » publié dans Causeur, contre la pénalisation des clients, avec une brochette de personnalités réactionnaires, pour que le Strass fournisse une analyse claire de la position des clients vis-à-vis des prostitué-e-s. Jusqu’à il y a peu son site comportait une rubrique « Nos clients nous aiment », avec des messages de clients – qu’on aurait peine à trouver sur le site d’un syndicat de travailleurs du commerce. Aujourd’hui le Strass leur répond : « votre possibilité d’être clients n’est qu’une preuve du pouvoir économique et symbolique dont vous disposez dans cette société patriarcale et capitaliste »  [2]...

Pour qui parle le Strass ?

Le Strass représente une petite frange de celles et ceux qui officient en « libéraux » et ne sont pas sous la coupe d’un mac ou d’un réseau – et pas l’ensemble des prostitué-e-s. De ce point de vue, la notion de « travailleurs et travailleuses du sexe » sur laquelle il s’appuie masque deux réalités. D’abord, elle relativise la vente de son corps en l’assimilant à la vente de sa force de travail. Ensuite, elle assimile à l’activité de salarié-e-s celle de personnes exerçant à leur compte. Cela ne veut pas dire que des personnes qui ne sont pas salariées ne seraient jamais exploitées, ni ne devraient s’organiser pour se défendre – qu’on pense par exemple aux mouvements de paysans. Mais cela impose de définir différemment la source de cette exploitation. En l’occurrence, elle vient des diktats imposés par ceux qui achètent, et du rapport de forces qui se construit avec eux. Dans ce cadre, la bataille contre la pénalisation des clients est étonnante, et revient à s’inscrire plutôt dans une défense de la liberté d’entreprise.

Cela, le Strass le dissimule par un ensemble de tours de passe-passe communicationnels. Hurler à l’assassinat des prostitué-e-s lorsqu’on tape sur le client, le consomm-acteur, par exemple. Ou encore, faire croire qu’on concilie féminisme et défense du système prostitutionnel par un discours sur la liberté. La radicalité du verbe et des attitudes vient ici entretenir une confusion entre la liberté d’entreprise des libéraux, et la liberté des libertaires.

Pour nous, libertaires, il n’est pas question de fermer les yeux sur les conditions d’existence des prostitué-e-s, et comme pour ce qui concerne les violences faites aux femmes il est clair qu’un cadre législatif protecteur relève de l’urgence. En même temps, réclamer des lois sert souvent dans le mouvement féministe à pallier l’absence d’une réelle dynamique collective, et nous n’entendons pas non plus entretenir l’illusion que cela permettra d’en finir avec la prostitution. Ce qui reste à construire, ce sont des luttes collectives sur le féminisme, mais aussi sur la question du revenu, de l’accès aux soins, aux papiers, etc.

Ella (AL Saint-Denis) & Pierrot (AL Tours)

http://www.alternativelibertaire.org/?P ... yndicat-ou
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Re: Syndicalisme et prostitution. Quelques questions embarra

Messagede Pïérô » 13 Aoû 2014, 13:19

STRASS, Morgane Merteuil : inversions et manipulations

Morgane Merteuil, STRASS, réglementaristes de la prostitution et inversion rhétorique au service de la manipulation.

Savez-vous que les personnes qui ne consomment pas assez de biens matériels sont responsables des ratées du système capitaliste ? Egalement, que les victimes du racisme sont responsables de l’inquiétude des occidentaux menacés par une société métissée et plurielle ?
Je vous sens crispéEs là, non mais c’est quoi ce discours néolibéral et raciste ? Inversion sémantique au service de la manipulation idéologique ? Oui, sans aucun doute !
Pourtant, quand Morgane Merteuil, porte-parole du STRASS*1. écrit que les clients et plus généralement les bénéficiaires du système prostitueur rendent service aux femmes en leur permettant de se prostituer quand les féministes abolitionnistes, elles, les mettent en danger, le procédé est rigoureusement le même mais peu y trouvent à redire.
Pourquoi sur le sujet de la prostitution tant de progressistes ont-ils l’esprit critique en berne, quand sur d’autres sujets, ils sont prompts à repérer les tentatives de manipulation à coups d’inversions sémantiques flagrantes ?

Le dernier texte de Morgane Merteuil est un chef-d’œuvre du genre. Elle y opère une double manipulation.
Elle s’appuie sur un texte de Joan W. Scott "Émancipation et égalité : une généalogie critique », donné lors d’une conférence Au-delà du patriarcat du colloque Penser l’émancipation (Nanterre, février 2014).

Le titre de Merteuil « Putes, corps désirants et émancipations », donne le ton, comme si juxtaposer des mots inconciliables suffisait pour convaincre de la pertinence du propos :
– « putes » ce qui signifie : femmes (le plus souvent, mais pas seulement) performant des rapports sexuels sans désir et pour de l’argent, sous la contrainte (le plus souvent, mais pas toujours) ; rien que l’utilisation du mot « pute » est douteux, il permet de détourner l’attention et d’effacer la violence de la réalité de la prostitution,
– « corps désirants » mais qu’est-ce donc qu’un corps désirant ? Un être désirant, oui, je vois, un corps désirant, déjà beaucoup moins, à moins que Morgane Merteuil ne reconnaisse l’état de distanciation / dissociation nécessaire pour se prostituer, l’esprit ici et le corps tout là-bas ?
Dans tous les cas, parler de « corps désirants » dans le cadre de la prostitution, alors que nombre de professionnels de santé et de féministes s’accordent à la qualifier de violence sexuelle intrinsèque et que les associations de défense de prostituéEs prétendent en faire un travail, est pour le moins contradictoire.
– « émancipations », le mot est au pluriel, c’est tout de suite plus signifiant.
C’est aussi un artifice pour associer l’émancipation des femmes musulmanes à celles des femmes prostituées, le STRASS ratisse large et aux côtés de ses amiEs des Indigènes de la République, Morgane Merteuil tente de nous convaincre que « féminisme musulman » et « féminisme pute », même combat ! *2.Voir "Des déchaînézs au genoux du patriarcat".

Le texte est à l’image du titre : une laborieuse tentative d’inversion des responsabilités, chaque argument étant maltraité jusqu’à l’absurde.
Bien entendu, les industries du sexe ne sont plus des industries ultra-capitalistes qui s’en mettent plein les poches sur le dos de femmes exploitées, les proxénètes comme les clients ne sont plus des instruments de la domination masculine et ne sont jamais responsabilisés, en revanche, les féministes abolitionnistes seraient des libérales « des franges répressives » et mettraient en danger les personnes prostituées.
De quelle manière et avec quels moyens, vous ne saurez jamais, ce qui compte c’est de semer le doute, de faire de la désinformation et de propager des mensonges.

Joan W. Scott prétend que « la rhétorique de l’émancipation sexuelle et de l’égalité entre les sexes, en ce qu’elle est soumise à un capital mondialisé qui fait du désir, et de sa capacité à l’assouvir, un préalable à la citoyenneté, contribue à la perpétuation de la domination de « populations minoritaires défavorisées », et notamment des femmes musulmanes ».
La théorie de Joan W. Scott est tout de même particulièrement perverse, elle suggère que l’émancipation des femmes occidentales, leur droit à une sexualité libre et désirante, leur volonté d’égalité, sont responsables de la domination des femmes musulmanes qui elles, n’auraient pas atteint ce niveau de liberté et ne pourraient donc, de ce fait, accéder au statut de citoyenne.
Entendez bien, les femmes musulmanes ne seraient pas opprimées par la domination masculine, l’interprétation masculine de textes religieux, le poids des traditions, non, du tout, elles seraient dominées à cause des féministes, des femmes occidentales libérées et seules dignes d’un statut de citoyenne !
Formidable exemple d’inversion des responsabilités et de manipulation rhétorique !
Les féministes universalistes « orientales » qui luttent dans les pays musulmans apprécieront cette obole au féminisme islamiste et plus encore au système patriarcal !
[Que des intervenants capables de telles manipulations soient invitéEs dans des universités françaises me laisse perplexe.]

Puis, entraînée dans son élan, non contente, comme Joan W. Scott, d’accuser « la communauté des nations » d’avoir choisi « le désir sexuel comme dénominateur commun universel dans la définition de l’humain », et par conséquent, selon Morgane Merteuil, d’être « islamophobe », [vous suivez j’espère ?], la porte-parole du STRASS extrapole et, seconde manipulation, se demande « si le rejet des revendications des travailleuses du sexe peut, lui aussi, correspondre un autre aspect du discours civilisationnel analysé ici par Joan W. Scott ».

Je vous épargne quelques paragraphes plutôt inintelligibles, pour arriver à ceci : « L’accent placé sur une sexualité libérée … fait écho au désir de consommer qui sert de moteur au marché, et permet de détourner l’attention des injustices économiques et sociales qui résultent de la discrimination et des formes structurelles de l’inégalité. On touche bien là à un des fondements de l’idéologie libérale, qui fait finalement reposer sur la volonté individuelle la capacité d’émancipation (sexuelle), sans prendre en compte les rapports de domination et de dépendance qui peuvent entraver celle-ci. Ainsi, dans le débat sur la prostitution, la position abolitionniste consistera essentiellement en une volonté de « responsabilisation » des clients…, sans que ne soient jamais abordées les causes économiques et structurelles qui peuvent pousser des femmes non seulement à exercer cette activité mais de manière plus générale à être dépendantes des hommes. »
Quel plus beau déni de la réalité des luttes féministes !
Un allié pareil, le patriarcat en rêvait, Morgane Merteuil l’incarne, il peut dormir sur ses deux oreilles.
Morgane Merteuil avance que la libéralisation de la prostitution et la soumission à des dictats religieux/coutumiers, sont des enjeux de luttes émancipatrices.
En réalité, les groupuscules d’activistes du STRASS, du collectif « 8marspourtoutes » et leurs quelques alliéEs politiques et universitaires s’emploient à faire diversion pour éviter toute atteinte sérieuse au système patriarcal et c’est à peu prés tout.

Constamment et simultanément les féministes combattent les systèmes d’oppression idéologiques, économiques et sociaux, dénoncent la pression des industries patriarcales et capitalistes du sexe qui ne cessent d’envahir nos sociétés hypersexualisées, combattent les inégalités femmes-hommes, etc.
Nous abordons la question de la prostitution, en tant que projet de société, à fortiori collectif, par opposition aux réglementaristes qui ne parlent jamais que de choix individuels de quelques « libérales/libéraux » qui exerceraient « librement » sans se préoccuper des millions de femmes déplacées, torturées, violées et prisonnières de proxénètes, de la traite.
Et tout ça, nous le ferions sans jamais interroger et combattre les raisons économiques et sociales qui poussent les femmes à se prostituer ?
Allons donc, nous ne cessons d’expliquer que désespoir, besoin d’argent et passage à l’acte favorisé par des violences sexuelles antérieures, sont les raisons qui poussent le plus souvent les femmes à se prostituer, quand elles n’y sont pas contraintes par un proxénète ou un réseau mafieux.
Une seule femme opprimée, une seule femme violée, une seule femme prostituée et ce sont toutes les femmes qui risquent elles aussi, de subir ce même destin.

Le féminisme n’a pas de sens s’il n’aboutit pas à libérer les femmes, toutes les femmes, de l’emprise de la domination masculine, de leur exploitation et de leurs violences.
La domination masculine vise à contrôler les femmes, leur sexualité, la reproduction ; les religions, les traditions, les institutions sont les instruments de ce pouvoir masculin.
La prostitution n’est jamais que l’un des plus archaïques moyens de s’approprier les femmes – et souvent les enfants, parfois des hommes – réduitEs à des commodité sexuelle au service des hommes. Le voile et plus encore la burqa, le niqab, n’ont d’autre fonction que d’effacer les femmes et de les désigner propriété exclusive du père ou du mari tout puissant.
Morgane Merteuil aura beau triturer la réalité dans tous les sens, nous inventer des concepts « d’épanouissement sexuel islamophobes », – quelle personne sensée peut accréditer une seule seconde l’idée que nos politiques publiques associent épanouissement sexuel et droits sociaux ? -, elle n’est jamais du côté des femmes, de leur libération, de l’abolition du patriarcat.
C’est d’ailleurs pour cette unique raison et manifestement pas pour la pertinence de ses analyses, qu’elle cumule tant de soutiens et d’intérêts médiatiques et politiques.

Une manipulation rhétorique aussi grossière que celle qui consiste à inverser les responsabilités et absoudre au passage les bénéficiaires des systèmes patriarcal et prostitueur, est lamentable mais ce qui l’est plus encore, c’est la complaisance dont elle bénéficie pour continuer sans vergogne, à la tête du STRASS et des réglementaristes de la prostitution, à salir le mouvement féministe et tenter de le diviser.

Christine Le Doaré


*1.STRASS : Syndicat des travailleurs du sexe

*2 : http://christineld75.wordpress.com/2014 ... riarcat-2/

http://christineld75.wordpress.com/2014 ... pulations/
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Re: Syndicalisme et prostitution. Quelques questions embarra

Messagede Pïérô » 30 Aoû 2014, 00:47

Info par Béatrice dans un post qui trouve sa place ici aussi

S'agissant du STRASS, un article intéressant sur ses origines ( émanation d'Act-Up ) et son histoire et relation avec d’autres organismes
et aussi avec le soutien d'associations et autres organisations politiques...

http://ressourcesprostitution.wordpress ... le-strass/
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Re: Syndicalisme et prostitution. Quelques questions embarra

Messagede Koala » 30 Aoû 2014, 09:23

Je suis ENTIEREMENT d'accord avec TOUT ce que tu viens de dire, MelusineCireduTemps, et tu poses les bonnes questions en plus... :clap:
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Re: Syndicalisme et prostitution, questions embarrassantes

Messagede Koala » 30 Aoû 2014, 09:32

MélusineCiredutemps a écrit:Syndicalisme et prostitution. Quelques questions embarrassantes - “Dones d’Enllaç”

Aborder la prostitution en termes syndicaux est trompeur – et faussement solidaire avec les femmes prostituées – lorsque l’on veut examiner cette réalité. Cela donne l’impression qu’il s’agit de la “défense organisée” d’un certain collectif de femmes. Mais, en fait, ce traitement de la question conduit à l’acceptation impuissante d’un phénomène de domination et de violence sexiste. Parler de l’organisation syndicale de la prostitution présuppose qu’il s’agit d’un travail, et que c’est un travail humainement acceptable. Cependant, la première hypothèse évacue tout un faisceau de questions sociales, raciales et de genre: quel type de « travail » est-ce, ce « travail » exercé au profit exclusif du plaisir masculin par des femmes ou des êtres féminisés? Et, singulièrement, par des femmes pauvres, placées dans des situations d’extrême vulnérabilité, étrangères ou appartenant à une minorité ethnique opprimée? La deuxième hypothèse n’est pas moins contestable: un «métier» qui connaît un taux de mortalité 40 fois plus élevé que la moyenne, un «travail» associé à des situations généralisées de stress, d’alcoolisme et d’addiction aux drogues devrait, au moins, susciter de vives interrogations et être mis en quarantaine à partir d’un point de vue strictement syndical. Les enfants qui extrayaient le charbon dans les mines anglaises du XIXème siècle – ou les enfants qui, de nos jours, travaillent dans les usines asiatiques pour le compte des grandes firmes de l’économie mondiale – effectuent incontestablement un travail. Le syndicalisme de classe considère, cependant, que ce travail devrait être interdit, car il a des effets dévastateurs sur ces enfants et parce qu’il ne permet pas leur développement en tant qu’êtres humains. Le syndicalisme, dont l’horizon historique est l’abolition de l’esclavage salarié, lutte quotidiennement pour réduire le taux d’exploitation du travail par le capital. Et il cherche à obtenir des conditions matérielles et morales plus favorables pour la classe ouvrière. Par conséquent, le syndicalisme classique considère qu’il y a des seuils de respect de la dignité et l’intégrité humaines en-dessous desquels ces relations contractuelles sont impossibles. Eh bien, parler de défense syndicale du «travail sexuel» implique de considérer que, dans la prostitution, ce seuil peut être établi. Et même que, à partir de là, il est tout à fait possible d’améliorer progressivement les conditions de travail pour les personnes prostituées. La réalité dément à chaque pas une telle prétention. La simple tentative d’application de certains paramètres syndicaux dans le monde de la prostitution conduit à une absurdité qui donne des frissons. Voyons quelques exemples... Quel serait l’âge légal pour l’exercice professionnel de la prostitution? Considérons-nous que, à l’âge de 18 ans, une fille est déjà prête à être possédée par tout individu disposé à payer un prix stipulé? Serions-nous prêts à admettre des “contrats d’apprentissage » à un âge plus précoce? A 16 ans, par exemple? Lorsque l’on sait que dans les pays industrialisés, l’âge moyen d’entrée dans le monde de la prostitution se situe en dessous de quinze ans, la conclusion logique serait que cette «période de formation» ne ferait que perfectionner ou professionnaliser – et, bien sûr, formaliser – une pratique avec laquelle ces filles seraient déjà «naturellement» familiarisées. Parlant de la formation... Les syndicats ne devraient-ils pas veiller à garantir son homologation à travers des diplômes accréditant cette qualification professionnelle? Soit dit en passant, cette option de «travail», enfin normalisée, devrait être proposée dans les écoles et les collèges, comme perspective d’avenir pour les jeunes, prioritairement pour les filles. Et, par la même occasion, les offres d’emploi dans l’industrie de la prostitution devraient être inclues, avec les autres offres, sur les panneaux de tous les bureaux des Agences pour l’Emploi. (On peut imaginer que le syndicalisme le plus rigoureux revendiquerait avec force que la gestion de ces demandes de «professionnelles du sexe» soit dans les mains d’un réseau public, en rejetant l’intrusion des entreprises de travail temporaire). En effet, si tel était le cas, une personne au chômage pourrait-elle refuser une offre d’emploi de prostitution correspondant au profil requis par l’employeur? Pourrait-elle continuer à bénéficier des allocations de chômage, si elle n’acceptait pas une telle proposition ? (Comment dites-vous? Que dans l’industrie du sexe existent d’autres circuits, un « marché du travail » tout à fait particulier ? Eh bien, ces circuits obscurs sont inacceptables pour le syndicalisme, qui exige sans cesse transparence et normalisation des rapports contractuels ! Il est impossible de défendre une catégorie socioprofessionnelle dans un cadre informel.)Le syndicalisme exige des contrats bien définis, reconnus et protégés par l’Etat. À ce propos, que serait un contrat de prostitution ? Seraient-ce des contrats permanents, fixes/discontinus «temporaires, saisonniers, de service» ? Sera-t-il possible d’y établir le droit de refuser certaines demandes des «clients» ? Comment définir une faute professionnelle ou fixer des barèmes de productivité ? Ces contrats, feraient-il l’objet d’une convention collective de l’industrie de la prostitution ? Les syndicats savent que pour que la défense des salariés soit effective, il est nécessaire d’élargir le champ de la négociation au maximum: l’individu isolé est faible face à l’employeur. On peut donc supposer, que le syndicalisme verrait de meilleures possibilités dans le cadre de l’industrie du sexe, négociant avec des employeurs reconnus, plutôt que sous un régime précaire de prostitution «artisanale», face à des misérables proxénètes de quartier. Nous pouvons supposer aussi que serait prévue une inspection du travail sérieuse. Quels devraient être les critères pour sanctionner un abus patronal ? Et éventuellement, comment le détecter et le prouver ? Sera-t-il possible de dénoncer le patron d’un bordel qui obligerait «ses filles», par exemple, à réaliser des «services sexuels» non désirés ? (C’est-à-dire que le syndicat reconnaîtrait le reste de ces services, comme des « actes désirés » par les femmes ?) Et ainsi de suite. Les domaines que le syndicalisme se doit d’aborder sont nombreux. Les maladies sexuellement transmissibles, seraient-elles considérées comme des maladies professionnelles? Et les troubles psychologiques et la toxicomanie directement liés à la pratique de la prostitution? Comment gérer un système d’arrêt-maladie? Et l’âge de la retraite... faudrait-il l’établir à 67 ans? Ou bien, considérions-nous que c’est un travail pénible justifiant une retraite anticipée ? Assez. Dans les conditions réelles des industries du sexe, un monde dominé par le crime organisé dans lequel sont exploitées des personnes préalablement conditionnées par tout un système proxénète, le fait d’évoquer l’action syndicale implique de décharger sur les femmes la responsabilité de leur situation et de la légitimer (au-delà de la promesse d’adoucir certains de ses aspects). Pire encore, une approche syndicale de la prostitution, comme activité professionnelle, conduit inévitablement à dynamiter les droits du travail de l’ensemble de la classe salariée, et porte directement atteinte à la liberté des travailleuses (qui, non seulement deviennent légalement susceptibles d’être prostituées, mais poussées effectivement à la prostitution). Un syndicalisme au service des intérêts des exploiteurs est un syndicalisme jaune. Et, dans ce cas, un syndicalisme ouvertement proxénète.


Rectificatif:je suis d'accord avec ce que tu viens de dire...il y a 2 ans!
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Re: Syndicalisme et prostitution, questions embarrassantes

Messagede Pïérô » 18 Déc 2014, 00:54

Qu’est-ce que le STRASS ?

I Qui est le STRASS ?

(article écrit en avril 2013 ; revu en juillet 2014)

Histoire et relation avec d’autres organismes

Le STRASS (Syndicat du Travail Sexuel) est une association loi de 1901 créée en 2009 lors des Assises européennes de la Prostitution1. Selon son site web, son objectif affiché est de défendre « toute personne amenée à échanger un service de nature sexuelle moyennant contrepartie et de toute personne salariée ou indépendante ou travaillant pour son propre compte exerçant une activité liée à la sexualité2 ». Sous ce dénominateur commun se regroupent principalement des prostitué-e-s et des acteurs et actrices de pornographie3. Le STRASS revendiquait en 2011, 462 adhérent·e·s4. Ceux-ci ne sont pas nécessairement des « travailleur·se·s du sexe », bien que seul·e·s ces dernier·e·s puissent voter en assemblée générale2.
A l’origine du STRASS se trouve un groupe intitulé « les Putes » fondé en 2006 par Thierry Schaffauser, alias Zezetta Star, et Jean-François Poupel, alias Maîtresse Nikita5.

Dès le départ, le groupe « les Putes », puis le « STRASS », fut étroitement lié à l’association Act-Up. Presque tous les membres du collectif « les Putes » ont fait leurs classes militantes au sein de cette association de lutte contre le sida, notamment les deux co-fondateurs5. Encore aujourd’hui, le siège social du STRASS se situe dans les locaux d’Act-Up2 et la majorité des communiqués de presse du STRASS sont également signés par Act-Up6. Enfin, la plupart des manifestations ou événements du STRASS sont également organisés en collaboration avec Act-Up7.


Image

Act Up-Paris et le STRASS font stand commun à la Fête de l’Humanité de 2012(8)

Le STRASS appartient également au collectif « 8 mars pour toutes », aux côtés d’associations dont il est proche9 : des associations féministes non abolitionnistes (TumulTueuses, Mouvement français pour le planning familial…), des associations de lutte contre le sida (Act-Up, Aides…), des associations de santé communautaire (Grisélidis, Cabiria,…) ou encore des associations LGBT (Etudions Gayment, Acceptess). On retrouve également dans les rangs de ce collectif le NPA (Nouveau Parti Anticapitaliste).

En ce qui concerne les partis politiques, le STRASS reçoit des soutiens essentiellement d’élu·e·s des Verts (à présent : Europe Ecologie Les Verts, EELV). Anne Souyris a un temps hébergé le siège social du STRASS à son adresse personnelle et une sénatrice des Verts leur a ouvert les portes du Sénat lors des « assises de la prostitution 2010 »10. Plus récemment, on apprenait que le STRASS était bénéficiaire de la réserve parlementaire 2013 d’Esther Benbassa, sénatrice EELV11.

A l’inverse, le STRASS s’oppose au mouvement abolitionniste, militant pour l’abolition de la prostitution. Les abolitionnistes sont principalement des féministes considérant que la prostitution est une violence masculine faites aux femmes. En France, dans le milieu associatif, l’abolitionnisme est principalement représenté par le Mouvement du Nid, l’Amicale du Nid, la Fondation Scelles, ou encore des organisations féministes comme le Lobby Européen des Femmes ou OLF (Osez le féminisme). L’ensemble de ces associations abolitionnistes sont regroupées dans le collectif Abolition 2012. Dès 2007, « les Putes » exigeaient l’ « abolition du Mouvement du Nid », affirmant que cette association était favorable à la loi sur la sécurité intérieure, et que les abolitionnistes étaient des « cathos intégristes »12.
Le STRASS apparait donc comme une émanation d’Act-Up, ayant pour objectif principal de lutter contre les mouvements abolitionnistes.

Les représentants du STRASS

Les membres fondateurs des « Putes », l’ancêtre du STRASS sont Thierry Schaffauser et Maîtresse Nikita. Ils ont coécrit Fières d’être Putes, paru en 2007. Maîtresse Nikita a été trésorière du STRASS de 2009 à 2011(13). Thierry Schaffauser a été, quant à lui, responsable des relations internationales du STRASS de 2009 à 2011(13). Il vit à Londres depuis 2007(14), et est devenu en 2009(15) président de la section « divertissement pour adulte » du troisième syndicat du Royaume-Uni, le GMB. Cette section, censée représenter les prostitué·e·s, les strip-teaseur·se·s, les acteurs et actrices pornos, et autres « travailleur·se·s du sexe, a été créée en 2002(17). Elle travaille en étroite collaboration avec une autre organisation, l’IUSW (International Union of Sex Workers). Bien qu’il s’agisse officiellement d’entités distinctes, l’IUSW et la section du GMB sont quasi indistinguables l’une de l’autre(17). Thierry Schaffauser a été membre de l’IUSW, mais en a été renvoyé fin 2011 pour avoir exprimé des réticences sur la forte influence des clients et des proxénètes dans cette organisation(17,18). Il aurait aussi quitté la section du GMB(17). En avril 2013 Thierry Schaffauser a annoncé sa candidature aux élections municipales dans le 17ème arrondissement de Paris, sous l’étiquette EELV.
Depuis juin 2011, l’équipe du STRASS est la suivante 4 (c’est ce qui était indiqué sur le site du STRASS en avril 2013. En juillet 2014, la page sur l’équipe du STRASS est en construction)


Image


Ayant débuté dans la prostitution en 2009, à l’âge de 23 ans, Morgane Merteuil a rejoint le STRASS au printemps 2011(19). Cécile Lhuillier, vice-présidente d’Act-Up, considère que son arrivée a redynamisé l’association 19. Elle a publié un pamphlet contre le féminisme abolitionniste en septembre 2012 intitulé Libérez le féminisme 20.

Tiphaine Besnard se décrit sur Rue89 comme « éducatrice sexuelle, auteure, performeuse »21. Diplômée d’un master d’histoire et de civilisations comparées, elle a publié un livre sur la prostitution au XIXème siècle22.
Maîtresse Gilda était déjà présente dans le groupe « les Putes » où elle s’occupait notamment du site-web23. Elle a commencé à se prostituer en 1994, mais le personnage de Gilda – une dominatrice SM travestie – n’est apparu qu’en 200724.
On note dans cette équipe des personnes issues d’autres associations. Ainsi Cornelia Schneider est aussi la fondatrice de Support Transgenre Strasbourg, une association défendant les droits des transgenres25. Isabelle Schweiger, quant à elle, est l’ex co-directrice de Grisélidis26.

Portes paroles
Reste du Conseil d’Administration
Trésorière
Secrétaire générale
Morgane Merteuil
Nicole Simovie
Tatiana M.
Cornelia Schneider
Chloé N.
Maitresse Gilda
Samantha
Manon
Maitresse Gilda
Tiphaine Besnard
Isabelle Schweiger

1. A propos du STRASS. STRASS – Syndicat du Travail Sexuel. Available at : http://site.strass-syndicat.org/about/. Accessed March 18, 2013.
2. Statuts. STRASS – Syndicat du Travail Sexuel. Available at : http://site.strass-syndicat.org/about/statuts/. Accessed March 18, 2013.
3. Tête haute. Act Up-Paris. 2009. Available at : http://www.actupparis.org/spip.php?article3716. Accessed May 9, 2013.
4. Une nouvelle équipe pour le STRASS. STRASS – Syndicat du Travail Sexuel. 2011. Available at : http://site.strass-syndicat.org/2011/06 ... -strass-2/. Accessed March 19, 2013.
5. Maîtresse Nikita, Schaffauser T. Fières d’être putes. L’Altiplano. 2007. Available at : http://www.laltiplano.fr/ouvrages/fieresdetreputes.php. Accessed March 18, 2013.
6. Communiqués de presse. STRASS – Syndicat du Travail Sexuel. Available at : http://site.strass-syndicat.org/category/communique/. Accessed March 18, 2013.
7. Actions. STRASS – Syndicat du Travail Sexuel. Available at : http://site.strass-syndicat.org/category/actions/. Accessed March 19, 2013.
8. CP du Strass : « Quand le PCF fait taire et exclut les travailleurSEs du sexe ». Collectif Droits & Prostitution. 2012. Available at : http://droitsetprostitution.wordpress.c ... s-du-sexe/. Accessed March 19, 2013.
9. 8 mars pour TOUTES ! Act Up-Paris. 2012. Available at : http://www.actupparis.org/spip.php?article4774. Accessed April 27, 2013.
10. Feu « Verts » au proxénétisme ! Lettre ouverte du Mouvement du Nid aux Verts. Mouvement du Nid. 2010. Available at : http://www.mouvementdunid.org/Feu-Verts ... sme-Lettre. Accessed March 19, 2013.
11. Réserve parlementaire 2013 : solidarité, culture et transparence. Esther Benbassa. 2013. Available at : http://estherbenbassa.eelv.fr/reserve-p ... nsparence/. Accessed March 19, 2013.
12. Le Pastt et les Putes exigent l’abolition du Mouvement du Nid. L’En Dehors. 2007. Available at : http://endehors.net/news/le-pastt-et-le ... ent-du-nid. Accessed March 19, 2013.
13. Une nouvelle équipe pour le STRASS. STRASS – Syndicat du Travail Sexuel. 2009. Available at : http://site.strass-syndicat.org/2009/12 ... le-strass/. Accessed March 25, 2013.
14. Profil de Thierry Schaffauser. Minorité. Available at : http://www.minorites.org/index.php/memb ... -2516.html. Accessed April 25, 2013.
15. Schaffauser T. La syndicalisation des travailleur·ses du sexe. Contretemps. 2011. Available at : http://www.contretemps.eu/interventions ... B7ses-sexe. Accessed April 25, 2013.
16. Schaffauser T. Sex workers bring good to the Labour movement. Blog de Thierry Schaffauser. 2012. Available at : http://thierryschaffauser.wordpress.com ... -movement/. Accessed April 25, 2013.
17. Bindel J. Prostitution en Grande-Bretagne – Un bien étrange syndicat au service des proxénètes. Sisyphe. http://sisyphe.org/spip.php?article4409. Published April 26, 2013.
18. Schaffauser T. IUSW fired me. Blog de Thierry Schaffauser. 2011. Available at : http://thierryschaffauser.wordpress.com ... -fired-me/. Accessed April 24, 2013.
19. Girard Q. Elle travaille aux corps. Libération. http://www.liberation.fr/societe/010123 ... -aux-corps. Published December 6, 2011. Accessed March 19, 2013.
20. Girard Q. Le féminisme « prosexe, proporno, proputes » de Morgane Merteuil. Next Liberation. http://next.liberation.fr/sexe/2012/09/ ... uil_843615. Published December 4, 2012. Accessed March 25, 2013.
21. La page de Tiphaine Besnard. Rue89. Available at : http://riverains.rue89.com/tiphaine-besnard. Accessed March 19, 2013.
22. Besnard T. Les prostituées à la Salpêtrière et dans le discours médical (1850-1914) : Une folle débauche. Editions L’Harmattan ; 2010.
23. Carré J-M. Travailleu(r)ses du sexe. Editions du Seuil ; 2010.
24. Sulzer A. Pour Gilda, le Strass c’est pas du toc. 20 minutes. http://www.20minutes.fr/paris/317609-Pa ... du-toc.php. Published April 3, 2009. Accessed March 25, 2013.
25. Trans’ : une fausse avancée, une interview de Cornelia Schneider. NPA. 2010. Available at : http://www.npa2009.org/content/trans%E2 ... -schneider. Accessed March 19, 2013.
26. Schweiger I. Droit et législation. Association prostitution Griselidis Toulouse. Available at : http://griselidis.com/joom/droit-et-l%C ... stice.html. Accessed March 19, 2013.



II Négation des violences dans la prostitution

Dénoncer les violences, c’est les perpétuer.

Si une chose frappe au premier abord dans le discours du STRASS, c’est cette affirmation surprenante : les abolitionnistes seraient les principaux responsables de la mort des prostitué·e·s.

En 2010, déjà, Maîtresse Nikita et Thierry Schaffauser n’hésitaient pas à désigner les abolitionnistes comme responsables de ce que les prostitué·e·s subissent, et leur conseillaient par ailleurs de taire la violence vécue dans la prostitution1 : « Lorsque les médias nous demandent des témoignages sur notre vécu, il est plus intéressant de refuser de parler de ce que nous avons subi pour ne parler que de ce qu’on nous fait subir, et donc désigner les responsables de la putophobie : les abolitionnistes, la police, les gouvernements etc. »

Sur le site web du STRASS, on peut lire un communiqué intitulé « Les discours abolitionnistes : première cause de mort chez les putes ! »2. Ce communiqué affirme – alors que pour le moment, aucune loi abolitionniste n’a été définitivement votée, et encore moins appliquée – que la situation des prostitué·e·s se dégrade du fait des politiques abolitionnistes. En réalité, le STRASS n’hésite pas à faire de la désinformation en prétendant que les abolitionnistes sont favorables à la criminalisation des personnes prostituées, et en amalgamant les positions abolitionnistes et prohibitionnistes. On peut par exemple lire sur le site du STRASS : « nous ne nous définissons pas non plus abolitionnistes, car ce courant a été récupéré et dévoyé par des prohibitionnistes »3 ou encore que « les politiques sécuritaires, anti-migration abolitionnistes / prohibitionnistes criminalisent les personnes prostituées et les migrant-e-s. »4. Enfin, le STRASS parle de « féministes prohibitionnistes »5.


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Mais non contentes de « tuer les putes » en favorisant supposément leurs agressions et leur contamination au VIH, les abolitionnistes accompliraient leur méfait par un autre biais encore : en… dénonçant les agressions et les violences à l’égard des prostitué·e·s (!)

Cet argument orwellien – dénoncer les violences, c’est les perpétuer – était déjà avancé à l’époque des « Putes », ancêtre du STRASS. Ainsi, ce groupe écrivit en 2006 à propos de Marie-Victoire Louis, une chercheuse abolitionniste au CNRS6 :

C’est à cause de discours comme le sien que les hommes peuvent se permettre de réduire les travailleuSEs du sexe à des corps appropriables. Ils ne font là que reprendre son discours et le mettre en pratique quand ils se permettent des violences à notre égard. […]

Elle est responsable de notre fragilité et du manque de prévention face au sida et autres IST. Marie Victoire Louis n’est qu’une PUTOPHOBE CRIMINELLE !

Morgane Merteuil le reprend dans une partie intitulée pompeusement « Performativité des discours stigmatisants » de son livre Libérez le féminisme7 :

Ce qui je crois me met le plus en colère lorsque j’entends des « féministes » anti-putes réciter leur propagande selon laquelle la prostitution est une atteinte à la dignité de la femme, qu’en vendant des services sexuels on commet l’irréparable, que le principe même de la prostitution est de faire des femmes de vulgaires objets sexuels, ce n’est pas simplement que ces considérations superficielles font abstraction de la complexité de la réalité telle que nous, putes, pouvons la vivre. C’est qu’à force d’asséner de telles contre-vérités, elles contribuent à les faire exister. Sans ces discours qui dévalorisent systématiquement les prostituées y aurait-t-il autant de femmes qui vivraient mal leur activité ? (p.94-95)
Plus loin, elle conclut suite au témoignage d’une jeune femme prostituée lui ayant dit qu’elle avait été traitée comme un objet sexuel par ses clients :

Parce que [les féministes anti-prostitution] propagent des discours selon lesquels être pute, c’est n’être rien d’autre qu’un objet sexuel qui ne mérite pas le respect et ne peut que subir les désirs des clients, elles créent ces réalités. (p.100)
Nous passerons sur le fait qu’elle déforme complètement les discours abolitionnistes : aucun·e abolitionniste ne prétendra jamais qu’un·e prostitué·e ne mérite pas d’être respecté·e !

En résumé : les féministes abolitionnistes, en dévoilant et condamnant les violences des clients prostitueurs, influencent ces derniers et les poussent à la violence. Dans ce cas, pourquoi le STRASS n’accuse-t-il pas non plus les féministes de viol ? En effet, selon la même logique, elles sont les premières responsables de cette violence, puisque ce sont principalement elles qui dénoncent les violences sexuelles et leurs conséquences. Ne les perpétuent-elles donc pas alors ?… Ne donnent-elles pas des idées aux hommes misogynes ? L’analyse par de Morgane Merteuil du phénomène des prophéties auto-réalisatrices semble visiblement s’arrêter au domaine de la prostitution. On notera cependant qu’elle considère comme « bourgeoise » l’idée selon laquelle un viol est plus traumatisant qu’une agression physique (Libérez le féminisme, p.93 et 101)7 … ce qui est pourtant un simple fait médical8 !

Mais peu importe l’irrationalité du propos : sur Twitter et les autres réseaux sociaux, l’affirmation « les abolos tuent les putes » est martelée comme un leitmotiv.


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A l’inverse, le STRASS ne dit pas un mot sur le rôle des clients ou des proxénètes dans les violences que subissent les prostituées. Morgane Merteuil dira lors d’une interview : « La plupart du temps, je suis mieux traitée par mes clients que par les féministes abolitionnistes ! »9 ou encore « [Nos clients] sont bien plus respectueux envers nous que les féministes abolitionnistes »10. Quand une militante abolitionniste, Christine le Doaré, lui fera remarquer sur Twitter que clients et proxénètes sont les premiers coupables de violence sur les personnes prostituées, Morgane Merteuil lui rétorquera simplement « Ta gueule ».


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Or plusieurs enquêtes montrent que les clients sont bien les principales sources de violences : insultes, viols, meurtres…11–13, et notamment dans les situations où les prostituées refusent de répondre à certaines demandes14. Alors que le STRASS accuse régulièrement les abolitionnistes d’être responsables de la contamination au VIH, pas un mot n’est dit sur les clients, pourtant régulièrement demandeurs de rapports non protégés15, et n’hésitant pas parfois à être violents pour en obtenir16,17.

Ainsi donc le STRASS tait la violence des clients et des proxénètes ; quand il admet son existence, il en impute la responsabilité aux abolitionnistes, qui influenceraient par leur discours le comportement des prostitué·e·s et des clients. A cause des discours abolitionnistes, les prostitué·e·s ne seraient plus en mesure de poser leurs limites, et les clients, quant à eux, adopteraient une vision négative de ces dernièr·e·s et se permettraient alors des violences à leurs égards. Enfin, les abolitionnistes seraient aussi responsables de la violence des proxénètes, puisque l’abolitionnisme favoriseraient la clandestinité des prostitué·e·s et les exposeraient ainsi à l’exploitation.
Négation de la traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle

Ce que l’on appelle traite des êtres humains a été définie dans l’alinéa a) du Protocole de Palerme de 200018 comme étant :
le recrutement, le transport, le transfert, l’hébergement ou l’accueil de personnes, par la menace ou le recours à la force ou à d’autres formes de contrainte, par enlèvement, fraude, tromperie, abus d’autorité ou d’une situation de vulnérabilité, ou par l’offre ou l’acceptation de paiements ou d’avantages pour obtenir le consentement d’une personne ayant autorité sur une autre aux fins d’exploitation.

Ce même alinéa précise que l’exploitation comprend celle de la prostitution d’autrui. Le protocole de Palerme affirme par ailleurs dans l’alinéa b) que le consentement d’une victime de la traite des personnes à l’exploitation est « indifférent », ce qui signifie que la traite est totalement interdite, même dans les cas où la victime y « consentirait ».

L’une des constantes du discours du STRASS est de nier l’ampleur de cette traite des êtres humains. Morgane Merteuil a même consacré un Scoop-it entier à cette thématique19, et Thierry Schaffauser a publié dans le Monde une tribune à ce sujet20. Schaffauser nie aussi l’ampleur de la traite en Allemagne quand il dit qu’elle compte moins de 1% de victimes de la traite21,22. Sa source : un forum de « travailleur·se·s du sexe » autrichien22. A l’inverse, un rapport de police rendu public en 2010 a signalé une explosion du trafic d’êtres humains23.

Comment le STRASS en vient-il à ces conclusions ? La fondation Scelles note, à propos de la tribune de Schaffauser parue dans le Monde, qu’il cite comme source « scientifique » un rapport mené par des militantes suédoises luttant depuis des années pour la légalisation de la prostitution, et financé par cinq groupes néerlandais et un autrichien, provenant donc de pays réglementaristes où le proxénétisme est autorisé24.

Par ailleurs, les représentant·e·s du STRASS tiennent aussi le raisonnement suivant : selon eux, les personnes trafiquées sont le plus souvent de simples « migrantes », parties en Europe dans le but de trouver du travail – en l’occurrence ici du « travail sexuel »25. En outre, il serait condescendant et paternaliste de présumer victime toute prostituée étrangère26. Parmi les cautions intellectuelles de ce genre de discours se trouve l’anthropologue Laura Agustin. Plusieurs de ses articles, publiés sur son blog The Naked Anthropologist27, sont répertoriés dans le Scoop-it de Morgane Merteuil.

Agustin explique que les femmes trafiquées ont des avantages à l’être. Ainsi elle dit en parlant de celles enfermées dans des appartements pendant plusieurs mois pour y être prostituées :

Ces circonstances où les femmes vivent dans des établissements du sexe et les quittent rarement avant d’être amenées ailleurs, sans qu’on le leur demande, reçoivent beaucoup d’attention dans les médias et il est pris pour acquis que cela comporte un déni complet de liberté. Mais dans de nombreux cas, les travailleuses migrantes préfèrent cet arrangement pour diverses raisons. En ne quittant pas la région, elles ne gaspillent pas d’argent et, si elles n’ont pas de permis de travail, elles se sentent plus en sécurité dans un environnement contrôlé. Si quelqu’un d’autre trouve les lieux de rencontre pour elles et prend leurs rendez-vous, cela signifie qu’elles n’ont pas à le faire elles-mêmes. Si elles sont venues au pays sur la base d’un visa touristique de trois mois, elles veulent consacrer autant de temps que possible à gagner de l’argent.28

Un autre avantage des femmes trafiquées serait celui de se prostituer pour payer les dettes qu’elles doivent à leurs proxénètes… autrement dit d’avoir la chance inouïe de fournir ce qu’on appelle un « travail servile », et donc d’être en situation de servitude pour dettes29 ! Doit-on préciser que la servitude pour dettes – le fait de devoir rembourser une dette en travaillant directement plutôt qu’avec de l’argent ou des biens – est considérée comme de l’esclavage par la majorité des pays, ainsi que par les conventions internationales30, et qu’elle est théoriquement abolie dans le monde entier ? Malgré ces considérations, Agustin relativise la violence du travail servile, considérant que le terme « servitude pour dettes » (debt bondage en anglais) est connoté trop négativement, et en arguant qu’après tout, beaucoup d’Américain·e·s sont eux-mêmes endetté·e·s – et que donc leur situation est comparable à celle des femmes trafiquées31. Elle omet par ailleurs de préciser que dans le cas précis de la servitude pour dettes, le travail accompli représente toujours une valeur supérieure à celle de l’emprunt initial32. En France et dans les autres pays européens, la grande majorité des prostituées nigérianes sont soumises à ce type d’esclavage33. Ces femmes sont emmenées en Europe, puis on leur dit qu’elles doivent payer leur voyage : le proxénète leur réclame une somme exorbitante, de l’ordre de 50 et 70 000 euros34, bien supérieure au prix réel du voyage du Nigéria en Europe (qui coûte de 1000 à 3000 euros). Cette dette doit être payée en se prostituant, à savoir en subissant plusieurs rapports sexuels non désirés par jour. Des pressions énormes sont mises sur les femmes prostituées pour qu’elles remboursent, avec parfois menaces de mort à la clé. Pourtant, Agustin écrit sur son blog31 :

La question n’est pas de savoir si les dettes sont totalement bonnes ou totalement mauvaises, mais de voir qu’elles existent partout, et que, oui, son asservissement est souvent considéré comme regrettable, mais comme acceptable – quelque chose dont le remboursement nécessitera de se battre, et qui fait partie d’une vie normale. C’est ce que pensent la plupart des migrants à propos des dettes qu’ils contractent pour voyager et travailler à l’étranger.
Morgane Merteuil reprend à son compte cette analyse relativiste sur la servitude pour dettes, quand, en mai 2012, elle déclare sur le forum du Parti Pirate26 :
Des personnes font appel à des réseaux de passeurs, envers qui elles contractent une dette ; arrivées en France, l’argent de leur passes sert notamment à rembourser cette dette et à envoyer du fric à leurs familles restées au pays. Je ne dis pas que c’est une situation "idéale", "enviable", mais cette personne n’est pas pour autant une victime de traite ou d’exploitation. En général, si tout se passe bien, une fois que la personne a remboursé sa dette, elle est "libre" (et si son "mac" refuse, elle devrait pouvoir porter plainte, sauf que, comme elle est venue illégalement en France, si elle va voir la police elle risque en réalité de se faire expulser).

Dans son post, Morgane Merteuil ne nie pourtant pas que les prostituées étrangères sont souvent des esclaves, puisque sous contrôle d’un « mac » qui peut choisir de les « libérer ». En dépit de cela elle ne les considère ni trafiquées ni exploitées ! Pourquoi donc ?

Selon le STRASS, le fait que certaines prostituées étrangères « consentiraient » à être trafiquées rendrait acceptable leur condition. Thierry Schaffauser, reprenant les analyses d’Agustin35, s’est exprimé à plusieurs reprises sur ce sujet sur le site Les Mots Sont Importants36,37 :

La définition de la traite est assortie d’une disposition qui affirme le caractère inopérant du consentement de la victime de la traite à l’exploitation elle-même. Cette clause est particulièrement importante en matière d’exploitation de la prostitution : elle supprime en effet toute distinction entre « prostitution forcée » et « prostitution volontaire ». La condition de la contrainte n’est donc pas nécessaire pour définir une victime de la traite et de fait, les politiques anti-traite pratiquent une discrimination active contre les travailleuses du sexe migrantes en refusant de prendre en compte leur volonté.
Il dit encore :

Il est précisé que le consentement de la victime est indifférent lorsque l’un quelconque des moyens énoncés dans cet alinéa a été utilisé. Ceci, pour les protéger des pressions. Cependant l’indifférence quant au consentement de la victime est utilisée afin de ne jamais avoir à écouter ce qu’elles ont à dire sur leur parcours, quand bien même de nombreux-ses travailleurs-ses du sexe migrant-e-s rejettent la qualification de victime.

Sur Twitter, aussi, il met en avant le concept de « exploitation consentie » et tient à préciser qu’il s’agit d’autre chose que du « travail forcé » :


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Il est évident que des personnes en condition de grande misère sont prêtes à consentir à n’importe quoi. On pourrait trouver des personnes prêtes à travailler pour un salaire inférieur à celui du SMIC. Cela ne change rien au fait qu’il s’agisse d’exploitation et qu’il est heureusement interdit d’employer quelqu’un pour des salaires trop faibles, et peu importe le consentement de l’employé·e. Les femmes prostituées et victimes de la traite peuvent parfois savoir qu’elles devront se prostituer en arrivant en France, et consentir à cela (néanmoins les cas de tromperie existent et ne sont pas rares). Par contre, il y a de fortes chances qu’on ne leur dise pas dans quelles conditions elles devront se prostituer.

Nous noterons aussi que sur Twitter, Morgane Merteuil fait aussi des déclarations étranges à propos des réseaux de traite, affirmant par exemple que la notion d’exploitation « c’est compliqué » :


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Il est tout de même étrange qu’un syndicat prétendant souhaiter que « les travailleurSEs du sexe, en particulier étrangères et en situation irrégulière, soient efficacement protégées contre le travail forcé, la servitude et l’esclavage ainsi que la traite à cette fin, en application du droit commun38 » prenne tellement à la légère les exploitations que subissent ces femmes.

Le STRASS met donc en avant des concepts douteux comme celui d’ « exploitation consentie » pour nier l’ampleur de la traite des êtres humains liée à la prostitution, en s’en tenant à une définition extrêmement étroite, soit l’existence de preuves de coercition de ces femmes et de violence physique à leur égard.

A ce sujet, on notera que Laura Agustin ne se contente pas de souligner le consentement des femmes adultes victimes de la traite pour mieux en minimiser la violence. Elle étend tout son discours aux mineur·e·s prostitué·e·s, arguant que la notion d’ « enfant » est relative et diffère d’une culture à l’autre39,40, ou encore que la majorité sexuelle varie d’un pays à un autre, et est donc arbitraire41. Comme pour les femmes adultes, Agustin met en avant le fait que les enfants trafiqué·e·s ne se considèrent pas comme des victimes, ne voient pas leurs trafiquants comme mauvais (après tout, dit-elle, il s’agit souvent de leurs parents) et qu’il s’agit à nouveau de « migrants » désirant juste gagner de l’argent en se prostitutant39. Ces arguments lui font dire qu’il ne s’agit donc pas de trafic, et elle prend soin de mettre « enfants trafiqué·e·s » entre guillemets. Enfin, elle déclare dans un article qu’il ne faut pas remettre en question le consentement d’un·e enfant à être prostitué·e42 :

"L’autre jour, j’ai dit que personne ne devrait prendre de décisions concernant le degré de volonté ou d’acceptation de la situation d’autres personnes, puis généraliser à d’énormes groupes de personnes. Une réponse a été : "Personne ne devrait non plus faire aucune hypothèse sur le degré de volonté d’une fille ou d’un garçon de 10 ans dans l’industrie du sexe ?" Après avoir relevé la rhétorique (utilisée de manière permanente par les abolitionnistes et les personnes contre la traite), j’ai répondu que, oui, personne ne devrait non plus faire d’hypothèses sur la situation des personnes de 10 ans. Comment savoir ce qui l’a conduite à vendre du sexe ? A quels choix a-t-elle été confrontée ? Que se passerait-il si elle était soudainement extraite de sa situation ?

Pour finir, on notera que d’après un communiqué de l’IUSW datant de 200743, Laura Agustin semble avoir été secrétaire de la section « divertissement pour adultes » du GMB. Or d’après une enquête récente par Julie Bindel44, cette section accueille en son sein des proxénètes qui font un lobbying intensif pour décriminaliser des lois contre les exploiteurs. Même les représentants du STRASS –d’ailleurs Thierry Schaffauser a été interviewé par Julie Bindel à ce sujet – confirment cette information44–46.
Conflits d’intérêt, avez-vous dit ?

1. Feu « Verts » au proxénétisme ! Lettre ouverte du Mouvement du Nid aux Verts. Mouvement du Nid (2010). at 2. Les discours abolitionnistes : première cause de mort chez les putes ! STRASS – Syndicat du Travail Sexuel at 3. alternative libertaire. STRASS – Syndicat du Travail Sexuel (2010). at 4. VIOLS, ON ÉTOUFFE ! STRASS – Syndicat du Travail Sexuel (2013). at 5. Les petites frustrations de Mme Bousquet ne légitiment pas son mépris des droits humains fondamentaux. STRASS – Syndicat du Travail Sexuel (2012). at 6. Vous ne soutenez pas les proxénètes et les prostitueurs ? Vous êtes ‘putophobe’ et criminelle ! Sisyphe (2006). at 7. Merteuil, M. Libérez le féminisme ! (L’Editeur, 2012).
8. Calhoun, K. Treatment of rape victims : facilitating psychosocial adjustment. (Pergamon Press, 1991).
9. L., N. Interview de Morgane Merteuil,secrétaire générale du STRASS. Radio Londres (2012). at 10. Prostitution : ‘Toutes les lois visant à protéger les femmes ont été néfastes’. France 24 (2011). at 11. Farley, M. et al. Prostitution and Trafficking in Nine Countries. Journal of Trauma Practice 2, 33–74 (2004).
12. Földhazi, A. & Chimienti, M. Marché du sexe et violences à Genève. Sociograph (2007). at 13. Busch, N. B., Bell, H., Hotaling, N. & Monto, M. A. Male Customers of Prostituted Women Exploring Perceptions of Entitlement to Power and Control and Implications for Violent Behavior Toward Women. Violence Against Women 8, 1093–1112 (2002).
14. Gould, C. & Fick, N. Selling Sex in Cape Town : Sex Work and Human Trafficking in a South African City. (Institute for Security Studies, 2008).
15. Legardinier, C. Prostitueurs, état des lieux. Prostitution et Société (2009). at 16. Une prostituée frappée pour avoir refusé un rapport non protégé. 7SUR7.be (2010). at 17. La prostituée refuse la pratique et le rapport non protégé, il s’énerve et frappe. Vaucluse Matin (2012). at 18. Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. (2000). at
19. Merteuil, M. #Prostitution : Désintox : stop aux mensonges | Scoop.it. at 20. Schaffauser, T. La majorité des travailleurs du sexe ne sont pas victimes de la traite des êtres humains. Le Monde (2012). at 21. Schaffauser, T. Prostitution et loi de pénalisation : analyse d’une hypocrisie orchestrée. le Plus (2011). at 22. Schaffauser, T. Trafficking figures in Germany. Blog de Thierry Schaffauser (2011). at 23. Dale, Y. German’s legalized prostitution brought more exploitation than emancipation to women. Examiner (2010). at 24. La pertinence de la transparence. Fondation Scelles (2013). at 25. Merteuil, M. & Simonin, D. Les travailleuses du sexe peuvent-elles penser leur émancipation ? Sur quelques effets excluants des discours abolitionnistes. Contretemps (2013). at 26. Merteuil, M. La prostitution : mafias, abolition, liberté, corps…. Forum du Parti Pirate (2012). at 27. Agustin, L. The Naked Anthropologist. at 28. Stuart. Prostitution – Abolition de la victime et défense postmoderniste du statu quo. Sisyphe (2011). at 29. Jeffreys, S. The Industrial Vagina : The Political Economy of the Global Sex Trade. (Routledge, 2008).
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