La Maison de la Grève de Rennes
(rue de la Barbotière – 07 86 14 88 22 –
agi-rennes@riseup.net)
appelle à une coordination des assemblées
inter-professionnelles de Bretagne
L'heure de la défaite ne sonnera pas. Les liens, les solidarités et les
formes de lutte pratiqués ces deux dernières semaines désencombrent
l'horizon. Les limites et hésitations que nous avons rencontrées ne nous
amputent pas. Au contraire, elles viennent nourrir nos expériences et une
histoire commune. Aujourd'hui, comment continuer la grève ? Quels rythmes
adoptons nous pour ne pas s'épuiser en quelques jours ? Comment peuvent
faire grève ceux qui n'en n'ont même pas la possibilité ? Quelles cibles
envisagées ? Quelle coordination pouvons nous mettre en place ?
Pour toutes ces questions, nous appelons à une coordination régionale
inter-professionnelle dimanche 7 novembre, à partir de 10h30. Cette
invitation s'adresse à tous ceux – syndiqués ou non syndiqués, salariés,
chômeurs, lycéens, etc. - qui veulent penser ensemble comment continuer la
grève.
Jusqu'au début du mouvement contre la réforme des retraites, un sentiment
général d'impuissance n'a pas cessé d'accompagner les dernières grèves.
Rien d'étonnant quand les dispositifs législatifs (service minimum,
préavis de grève obligatoire, etc;) et la frilosité des bureaucraties
syndicales s'accordent pour vider la grève de sa portée conflictuelle, de
son caractère d'arrêt de la production, pour n'en retenir qu'une forme
symbolique.
Ces deux dernières semaines, quelque chose a changé. Ce sentiment
d'impuissance a désormais cessé. Le mouvement anti-CPE de 2006 avait
diffusé le mot d'ordre de « blocage des flux », la grève générale de 2008
en Guadeloupe l'a pratiqué à l'échelle d'une île entière. Et,
aujourd'hui, le blocage se répand comme la forme de lutte minimale
rendant à la grève sa puissance et son effectivité : la suspension,
l'arrêt de la machine économique.
Au blocage s'ajoutent des pratiques presque oubliées. Alors que le
capitalisme nous démunit de toutes solidarités et organisations
collectives, nous isole par une gestion de la crise toujours plus
draconienne, la grève a été l'occasion de gestes communs. Il s'agit des
assemblées inter-professionnelle pour partager – par-delà les
corporatismes et identités socio-professionnelles – nos analyses de la
situation et coordonner nos actions, des caisses de grèves pour
s'entraider financièrement, des cantines de grévistes alimentées par des
paysans en lutte, l'occupation de locaux vides pour doter la grève d'une
Maison commune et imaginer conséquemment comment faire durer la grève.
Ce mouvement de grève est né de la contestation de la réforme des
retraites et annonce une série d'autres (réforme sur la sécurité sociale,
sur le chômage, etc.) qui feront de nos vies un plan d'austérité. Dans
les manifestations, devant les piquets de grèves, sur les actions de
blocage, beaucoup se demandaient si nous laisserons la rationalité
économique broyer toujours plus nos conditions d'existence.
Pourtant rien de cela n'a pu empêcher la reprise du travail. D'un côté,
les centrales syndicales ont refusé d'assumer le rapport de force en
appelant à des journées d'actions nationales très espacées. De l'autre,
un sentiment d'épuisement a gagner les grévistes confrontés aux
tentatives médiatiques, politiques et policières de remettre le pays en
marche. Logiques tentatives quand ce qui éclate aux yeux de tous c'est
l'évidence que les savoirs et capacités réels d'arrêter l'économie sont
aux mains des grévistes.
Les raffineries ont su donner le ton. Désormais, nous savons que le nerf
de la guerre se situe à l'endroit des infrastructures logistiques et des
flux économiques qui nourrissent le pays. A l'heure où la crise est
utilisée pour nous rendre toujours plus productifs, une des forces de
cette grève est d'éprouver collectivement que nos connaissances partagées
nous donnent les possibilités de tout arrêter.
Ce que nous créons depuis deux semaines – les liens, les solidarités, les
formes de luttes, ne sont pas à laisser à eux-mêmes sous prétexte d'un
retour au travail. Puisqu'ils sont la matière de nos victoires à venir.
S'en ressaisir et les faire grandir s'imposent à quiconque croit et veut
imaginer d'autres possibilités que cette réalité capitaliste.
A Rennes, c'est dans cette perspective que nous occupons la Maison de la
Grève. Ces deux dernières semaines nous ont inscrit dans un processus qui
ne cesse pas aux premiers signes d'essoufflement. Si nous étendons et
densifions ce qui est né depuis le début de cette grève, nous n'aurons
pas à attendre la prochaine réforme pour tout recommencer. Au contraire,
nous pouvons être en mesure de décider de nos propre rythmes, de choisir
quand et comment continuer l'offensive.
Suite aux différentes assemblées inter-professionnelles de Rennes, trois
pistes de réflexions sont proposées pour se donner des perspectives de
luttes communes :
1/ Il nous faudrait enquêter pour établir une cartographie des flux,
secteurs et entreprises clés de l'économie rennaise. Ces connaissances
techniques nous donneraient les moyens de la bloquer effectivement. Cette
dynamique pourrait être reprise dans chaque ville et nous permettre de
cordonner des actions entre plusieurs villes.
2/ Ne pas arrêter veut dire rendre effectif les pratiques de solidarités
directes qui ont commencé à se mettre en place. Pérenniser les caisses de
grève, l'approvisionnement pour les cantines de grévistes et réfléchir
aux autres structures dont nous aurions besoin pour faire durer la grève.
Ce processus n'est possible que si nous nous attachons à multiplier les
complicités entre personnes de divers secteurs et si nous recherchons
ensemble comment peuvent faire grève ceux qui n'en ont pas la possibilité
directe (des pistes commencent à fleurirent : techniques de coulage,
grèves tournantes au sein d'une même boîte, blocages tournants grâce aux
coordinations avec d'autres secteurs, etc. ).
3/ La Maison de la Grève est un outil pour se doter d'un imaginaire
commun. Nous entendons pas là des moments de débats, de films, de
séminaires pour échanger sur ce que nous voulons, inventer d'autres
horizons et d'autres manières de vivre plus désirable. A la maison de la
Grève et dans d'autres endroits en France des nouvelles pratiques et
formes d'organisations sont expérimentées. Leur donner de la consistance
et les répandre est une arme indispensable pour une mise en échec
pratique et politique du pouvoir.
-L'assemblée inter-professionnelle de Rennes-
Programme
- Samedi 6/10 : 11h00, place de la gare, manifestation suivie d'une action
de blocage
19h00, apéritif et repas à la Maison de Grève
- Dimanche 7/10 : à partir de 10h30, coordination.
Si des personnes désiraient se rendre à Rennes dès samedi, il est possible
de dormir à la Maison de la grève. Des repas seront prévus, ainsi qu'un
espace pour enfants.
Et bien entendu, si des villes d'autres régions souhaitaient participer à
la coordination, elles sont les bienvenues.
- Contacts :
agi-rennes@riseup.net – 07 86 14 88 22 -
Pour se rendre à la Maison de la Grève :
Rue de la Barbotière, arrêt de bus Paul Bert, lignes 4, 6 et 11