L’impasse réformiste

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Messagede bipbip » 25 Aoû 2016, 09:58

L’impasse réformiste

Grenoble : Comment la mairie Les verts/PG confirme l’impasse réformiste

Alors que les partis de gouvernement sont en crise, une refonte de la sociale-démocratie s’opère entre la gauche réformiste antilibérale et les formations écologistes. La majorité municipale grenobloise actuellement à l’épreuve du pouvoir, en est devenue la vitrine. Alors qu’elle impose à son tour l’austérité, il est nécessaire — du local au global — de dépasser l’impasse réformiste.

En mai 2014 la mairie de Grenoble passait entre les mains d’une coalition « rouge-verte ». Emmenée par le maire Europe écologie Eric Piolle, le parti de gauche et plusieurs réseaux « citoyens ». La nouvelle majorité municipale entendait « refonder la démocratie locale », résister aux politiques d’austérité et poser les bases d’une alternative sociale et environnementale au néo-libéralisme. Alternative Libertaire Grenoble était revenue en mai dernier sur la réalité municipale grenobloise loin du mythe médiatique à travers une série d’articles.

En 2016, et deux mois après nos articles, c’est à un énième reniement total des engagements de campagne que les grenoblois.e.s assistent. Dans la suite des politiques d’austérité imposées par l’État et l’Union européenne, la commune de Grenoble voit ses dotations baisser de 20 millions d’euros. Asphyxié, Éric Piolle annonce par conférence de presse - sans concertation, ni discussion préalable avec qui que ce soit- une saignée sans précédent dans le budget socio-culturel local : restructuration à la baisse du service de santé scolaire, fermeture de deux « maisons des habitants » ainsi que trois bibliothèques municipales sans compter la suppression de 150 postes d’ici 2018.

Celui qui s’engageait à « valoriser le service public » explique aujourd’hui que ce dernier a été « trop sacralisé » et n’hésite pas à minimiser la fermeture des équipements municipaux en proposant des « distributions de livres en vélo » par des bénévoles.

Ces mesures seront « vendues » aux habitant.e.s de la ville par l’envoi d’une Lettre aux grenoblois.e.s, où le maire défend son choix en rejetant la responsabilité de ces mesures sur la gestion municipale des précédents mandats et en maquillant par des pirouettes et des effets de mots leur propre manque de courage politique. La capitulation politique de la majorité est d’autant plus cuisante que ce plan ne sera pas suffisant pour rétablir l’équilibre du budget... Grenoble doit donc s’attendre à d’autres coupes franches.

Alors que plusieurs milliers de travailleurs/ses en grève défilent à Grenoble contre une loi travail imposée par le PS-MEDEF, Eric Piolle nomme comme chef de cabinet une ex-experte en restructuration (plan de licenciement) issue d’une multi-nationale américaine pour exécuter son plan. Grenoble sera donc managée comme une entreprise à capital financier : la stupeur est totale.

De droite, de gauche ou écolo , l’austérité on la combat

La réaction des syndicats et associations ne s’est pas faite attendre. Loin de tomber dans le piège d’une quelconque « union sacrée » ou « soutien critique » derrière l’équipe municipale, la mobilisation unitaire de l’intersyndicale aux côté des collectifs d’habitant.e.s va organiser des rassemblements notamment devant les services concernés ou les élu.e.s seront pris à partie, faire signer une pétition à des milliers d’usagers, et s’en prendre trois fois au conseil municipal appelé à adopter les différentes composantes du plan, retardant d’autant leur vote.

Refus total – toujours - de concertation et de dialogue de la majorité municipale, maire en tête. C’est donc derrière un cordon de CRS que les parangons du « renouveau de la démocratie locale » confirment leur alignement sur la doctrine austéritaire nationale, quand PS et LR pavoisent et jouent l’opposition comme on joue une mauvaise pièce de théâtre.

Si la résistance du mouvement social démontre le refus de se résigner à l’austérité qu’elle soit « de gauche, de droite ou écolo », le coup moral de cette trahison, annoncée qui plus est pendant le mouvement contre la loi travail, est dur à encaisser. Certes la surprise n’est pas totale, une situation similaire est notamment en cours à Montreuil. Europe écologie est loin d’être un parti en rupture avec l’ordre néo-libéral dominant, et à bien des égards la majorité municipale a déjà démontré ses ambiguïtés politiques sur de nombreux sujet.

Il n’en reste pas moins que ce nouveau type de formation de gauche dite « réformiste » se plaçant en concurrence électorale avec les partis sociaux-démocrates classiques apparaît comme la seule alternative visible et concrète à des millions d’hommes et de femmes en lutte en France et en Europe. Or qu’il s’agisse de Syriza en Grèce, de Podemos en Espagne et maintenant de l’expérience de gestion grenobloise portée en exemple dans les médias par Mélenchon et les cadres d’EELV, ces expériences politiques s’écrasent piteusement dès les premières confrontations avec L’État et le Capital.

La crise sociale et économique s’aggrave, la contestation populaire monte partout en Europe. Pour survivre, la classe capitaliste est déterminée à imposer l’austérité à tous les peuples par leurs propres gouvernements prétendument représentatifs. C’est la formule de socialisation des coûts et de privatisation des profits qui est dictée à tous les échelons. Il devient nécessaire de proposer une alternative politique adaptée à la période. Plus que de repoussoir, les capitulations politiques comme celle de Grenoble doivent servir de leçon pour le mouvement social.

Le cadenas institutionnel

Il ne suffit pas de remporter la majorité à un suffrage pour disposer à souhait de tous les leviers d’action publique. La majeure partie du patrimoine immobilier et foncier appartient au privé, la gestion des principaux services publics dépend soit de partenariats avec le privé indéboulonnables ou de dotations publiques fléchées fixées par un échelon institutionnel supérieur. Vouloir se donner les moyens d’une politique ambitieuse revient soit à augmenter les impôts locaux de manière notable - mais cette option est d’une part encadrée par la loi, d’autre part contestable – soit à exproprier entreprises et patrimoines immobilier…ce qui est aujourd’hui anti-constitutionnel !

La marge d’action des élu.e.s qui porteraient localement un projet politique alternatif augmente théoriquement en arrachant plus de sièges dans les institutions. Cependant des mécanismes administratifs, réglementaires et juridiques les cadenassent à chaque échelon : la communauté de communes, les sociétés d’économies mixtes, les régions, etc. Une logique politique antilibérale ou anticapitaliste serait inévitablement diluée ou verrouillée par la logique gestionnaire des différents niveaux. Vouloir infléchir l’orientation politique en respectant le cadre réglementaire est voué à l’échec.

Il ne s’agit pas de remettre en cause la bonne foi éventuelle d’un prétendant à une élection mais accéder au poste d’élu.e est aujourd’hui un travail en soi. La professionnalisation de ce type de poste impose un bon niveau de maîtrise administrative et juridique qui crée de fait une sélection sociale dans l’accès à la fonction. Aujourd’hui l’écrasante majorité des élu.e.s est issue soit de la classe bourgeoise soit des couches moyennes supérieures. Mêmes pour les rares élu.e.s issu.e.s d’autres catégories sociales plus populaires ou d’un passé militant, les habits de la fonction entraînent progressivement l’abandon de la logique politique au bénéfice de la logique gestionnaire. (à ce titre, lire aussi le texte "Mairie écologiste de Grenoble : une ville « managérée » publié par un syndicaliste grenoblois en ce mois d’Août).

Les élu.e.s ne représentent qu’eux/elles-mêmes.

Toutes les conquêtes sociales et politiques réelles ont été obtenues par la grève et la rue, c’est-à-dire précisément quand les travailleur.se.s ne se contentent plus d’abandonner ponctuellement un pouvoir de décision à des élu.e.s mais portent l’affrontement sur leur terrain et pas sur celui de l’adversaire : 1936 (congés payés), 1945 (sécurité sociale), 1968 (augmentation de salaires et droits syndicaux). Autrement dit les blocages budgétaires et légaux ont tendance à sauter miraculeusement quand la bourgeoisie prend peur et que les travailleur.se.s tapent au portefeuille.

Partout en Europe des masses de plus en plus importantes se battent pour imposer leurs propres organes démocratiques et donc retrouver une certaine souveraineté vis-à-vis de l’État et des patrons. Le mouvement d’occupation des places en Espagne, puis en Grèce, sans oublier la Guadeloupe et Mayotte où des assemblées de travailleur.se.s fonctionnant sur le mandat impératif et la démocratie directe sont allées jusqu’à formuler une liste de revendications embrassant l’ensemble des problématiques économiques et sociales en sont des exemples.

Localement ces luttes aboutissent parfois à des avancées en termes de prises de décisions collectives plus démocratiques et plus autonomes des institutions, comme l’expérience de budgets participatifs à Porto-Alegre. Dans certains cas, elles peuvent aller jusqu’à la reprise en main de la commune sur de nouvelles bases économiques et sociales comme à Marinaleda en Andalousie. Ces îlots restent bien peu nombreux et confrontés à terme à la force de répression, de récupération et de réintégration du système. Quand les révolutionnaires voient ces expériences comme des paliers tendant vers un changement profond et irréversibles, les réformistes n’y voient qu’un aboutissement total voire une curiosité.

Il est de notre rôle en tant que forces anticapitalistes de porter une voix révolutionnaire face au discrédit des organisations dîtes réformistes. Ces dernières ne sont en réalité que les gestionnaires de l’austérité générale imposée par la classe capitaliste. Il ne faut pas que leur échec soit celui de l’ensemble des forces progressistes et qu’il profite à la caste politique habituelle.

Pour cela il est utile de renforcer les organisations de lutte, syndicales ou non, pour à terme leur donner la perspective révolutionnaire qui leur manque souvent jusqu’à nous emparer de nos outils de travail et administrer nous même nos lieux de vies selon le principe « de chacun selon ses moyens, à chacun en fonction de ses besoins ».

De ce fait donnons corps et chair au projet communiste libertaire, qui intègre clairement la nécessité d’une rupture radicale avec le système de gouvernance actuel. Travaillons les pistes pour rendre lisible avec les autres forces anticapitalistes une stratégie d’émancipation en dehors des sentiers balisés et des partis de gouvernement.

Alternative Libertaire Grenoble

http://alternativelibertaire.org/?Greno ... mairie-Les
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Re: L’impasse réformiste

Messagede bipbip » 29 Aoû 2016, 10:55

Podemos, Syriza: un bilan

Un bref bilan des deux expériences politiques de Podemos en Espagne & Syriza en Grèce, deux partis qui ont prospéré électoralement sur la défaite et la récupération du mouvement des places dans leurs pays respectifs.

La nuit debout, un phénomène d’occupation des places, semble aujourd’hui se répandre dans plusieurs grandes villes de France. Chez les organisateurs, il y a souvent la volonté de reproduire le mouvement des indignés, notamment les précédents Grecs et Espagnols de 2011. Dans ces deux pays, ces mouvements ont servi de marche-pieds pour le développement d’un courant politique social-démocrate de type nouveau. Ce courant, dit de gauche radicale (on peut se demander quelle radicalité, mais passons) est désormais au pouvoir en Grèce et fait jeu égal avec le PS en Espagne, ou il détient aussi les deux principales mairies (Barcelone et Madrid).

Syriza, un an après.
Syriza est un acronyme pour « coalition de la gauche radicale ». Elle dirige la Grèce depuis plus d’un an, alliée avec un petit parti de droite nationaliste, les grecs indépendants. Le dirigeant de ce parti, Pános Kamménos, un réactionnaire proche de l’église orthodoxe, est le ministre de la défense du gouvernement grec. C’est aussi un ancien ministre délégué de la Marine marchande dans un gouvernement de droite. Sa présence au sein du gouvernement à un poste aussi important est un profond gage de loyauté de Syriza aux institutions capitalistes, en particulier à l’armée et aux armateurs.
Et des gages, ce parti en a donné. Avant même d’être élu, plus Syriza se rapprochait du pouvoir, plus son discours se droitisait. Jusqu’à adopter quelques temps avant les élections de janvier 2015 un programme dit de Thessalonique, a peu près du même genre que le programme de Jospin en 2002. Il était question de mettre un terme à l’austérité, sans pour autant revenir sur toute les réformes, de relancer l’économie et de tenter d’endiguer la misère en mettant en place quelques mesures humanitaires ( coupons alimentaire, minimum d’électricité & gaz gratuit pour les très très pauvres). Ce programme, le parti n’a même pas pu l’appliquer.

De reniement en reniement, d’accord pourri avec les créanciers du pays en accords plus pourri encore, le gouvernement de cette fameuse gauche radicale s’est maintenu au pouvoir. Un peu comme dans ces concours ou l’on doit manger le maximum de hot-dog en temps limité, le gouvernement grec à avalé des dizaines de couleuvre en moins d’un an, et continue aujourd’hui à gérer un pays qui s’enfonce toujours plus dans la misère. Il organise les privatisations, coupe dans les retraites des plus pauvres… Bref fait exactement tout le contraire de ce qu’il promettait avant d’être élu… Tout en calmant la rue.

Podemos suit le même chemin.
Podemos, c’est un peu le petit frère de Syriza, qui marche dans ses traces. D’ailleurs le dirigeant de ce parti, Pablo Iglesias, s’est toujours refusé à critiquer son « ami » premier ministre grec, Alexis Tsipras. Podemos, comme Syriza, est né de la défaite du mouvement des places à remettre en cause les attaques brutales dont font l’objet les prolétaires depuis plusieurs années. Présenté comme le débouché électoral du mouvement indigné, il a rapidement pris une grande place sur l’échiquier politique espagnol. S’il n’est pas encore au pouvoir, il s’est profondément droitisé en quelques années, pour adopter finalement un programme économique social-démocrate, avec par exemple la retraite à 65 ans. Programme dont on peu penser, comme en Grèce, qu’il ne serait même pas appliqué au final.
Le parti a aussi présenté un ancien général d’état major aux dernières élections législatives, en précisant qu’en cas de victoire, ils en feraient leur ministre de la défense. Là aussi, même logique que Syriza dans la soumission aux institutions et à l’armée.

Finalement, les principaux changements qu’ont apportés ces partis, c’est un renouvellement de la classe politique. A une classe politique discréditée, ces partis opposent une nouvelle génération, des trentenaires qui ne portent pas de cravates et qui peuvent liker une de tes blagues sur facebook.
La misère est toujours là et les coups pleuvent toujours. Mais pour un temps, des nouveaux gentils gestionnaires essaient de bricoler avec quelques miettes. Et le comble, c’est que même ces miettes, le capitalisme d’aujourd’hui n’est plus en mesure de les laisser redistribuer.

http://www.19h17.info/2016/04/12/podemo ... -un-bilan/
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Re: L’impasse réformiste

Messagede bipbip » 30 Mar 2017, 17:54

L’effondrement international de la social-démocratie

Les résultats des élections aux Pays Bas marquent une nouvelle étape dans l’effondrement de la social-démocratie européenne. Celle-ci suit à l’échelle du sous-continent la voie ouverte par le Pasok en Grèce.

Les yeux rivés sur la potentielle poussée de l’extrême droite, les médias bourgeois sont presque tous passés à côté du principal résultat des élections néerlandaise. La faillite des travaillistes. Ils divisent leur score par 4, passent de 38 sièges et 24,8 % à 9 sièges et 5,7 %.

Cette déconfiture s’inscrit plus largement dans celle de la coalition sortante. Les travaillistes dirigeaient le pays conjointement avec la droite conservatrice. Celle ci se maintien en première position mais perd aussi des voix. Elle passe de 41 sièges et 26,5 % à 33 sièges et 21,3 %.
Les deux partis coalisés, qui avait réunis ensemble près de la moitié des suffrages, n’en comptent plus qu’un quart.

C’est le résultat d’une violente politique d’austérité menés par cette coalition. Citons notamment le recul de l’âge de départ à la retraite, qui passera à 67 ans dans quelques années. Une loi de plafonnement des indemnités de licenciement. Des mesures pour précariser les emplois, qui ont incités les entreprises à multiplier leurs recrutements en CDD au détriment du CDI. Le cocktail classique.

C’est toute la social-démocratie européenne qui s’écroule.

Parmi les précurseurs, le PASOK. Le parti grec à connu une chute encore plus spectaculaire que les néerlandais. Il est passé en quelques années de 44% à autour de 5, soit une division par près de 9 de son score électoral. Cet effondrement à coïncidé avec sa participation à un gouvernement d’union nationale avec la droite (ND) et un petit parti d’extrême droite (LAOS) visant à mettre en œuvre une politique d’austérité violente.

C’est aussi le cas du parti travailliste irlandais. Lui aussi partie prenante d’une coalition avec la droite jusqu’en février 2016, il passe de 19,4 % à 6,6 % .
En Allemagne le SPD avait obtenu 40,9 % aux législatives de 1998. Leur score est tombé à 25 % en 2013. Ils se sont ensuite allié avec la droite.
En Espagne, le PSOE est arrivé deuxième des dernières élections, mais avec 22 % des voix, il réalise l’un des plus faibles résultats de son histoire. La France s’inscrit à priori dans cette tendance.

Il est loin le temps, entre 1997 et 2002, ou la social-démocratie comptait jusqu’à douze gouvernements dans l’Union européenne (UE). C’est que la crise est passée par là. Or, si on résume le projet social-démocrate il s’appuie sur 3 piliers:
1. Renforcer l’intégration capitaliste européenne. ( Euro, plus de fédéralisme, investissement européens.)
2. Accompagner les mesures d’ajustements structurels (privatisations, précarité, bas salaires, coupe des retraites, de la sécu, du chômage).
3. Mettre en place quelques mesures sociales minimales contre « la grande pauvreté ». Afin de limiter les risques d’explosion sociale.
On retrouve ce schéma ailleurs qu’en Europe. C’était aussi la ligne politique du PT brésilien [1] ou encore de l’administration Obama.

Un projet : faire le bien du capitalisme malgré lui.

La ritournelle de la social-démocratie est simple : « le capitalisme c’est vachement bien, mais les capitalistes y vont un peu trop fort ! » Et du coup la « cohésion sociale » est menacée. En plus c’est mauvais pour la croissance. Donc, pour le propre bien du capitalisme, il faut le « réguler ». Ce discours à ses idéologues, en France des politiques comme M. Rocard, J. Delors. Il a aussi ses philosophes, la figure de proue étant J. Habermas, inspirateur d’une charte des droits fondamentaux pleine de belles phrases vides.
Le point d’orgue du projet social-démocrate, c’est la constitution Européenne. Déjà, les tendances électorales qui allaient dans les années suivantes mettre à mal ce courant politique bourgeois était là, dans le rejet de la constitution en France en 2005.

Puis, vint la crise.

Tout commence à sentir mauvais avec la crise. La raison en est simple. Le capital doit faire remonter le taux de profit. Alors il montre les dents, impose la mise en place de mesures d’austérité partout. Et la social-démocratie applique sans rechigner. Là ou elle est au pouvoir, elle mène une politique parfois inverse de ce qu’elle venait de promettre dans la campagne électorale. C’est le cas par exemple de la Grèce, ou les socialistes s’étaient fait élire sur un programme de redistribution sociale.
Elle participe aussi à diverses coalitions, rappelées plus haut. Prenons les 5 pays les plus ciblés par le FMI : Le Portugal, l’Italie, l’Irlande, la Grèce et l’Espagne. Partout, les sociaux-traitres comme on disait dans le temps, sont dans la boucle des mesures contre les prolos. Comme en France, ou en Allemagne.

Partout, ils ont opté pour le suicide de leur formation politique en mettant en œuvre les réformes. C’est d’une logique sans faille. Car il s’agit d’un personnel politique de gestionnaires. Leurs financement provient d’ailleurs essentiellement des états et de l’union Européenne, pas des adhérents à leurs partis. C’est d’ailleurs depuis longtemps l’hémorragie dans leurs rangs, et désormais, par exemple en France, il s’agit surtout d’élus. Ceux-ci, voyant le vent tourner, cherche du coup à se recaser. Ici, ils lorgnent sur Macron. En Grèce, une partie du personnel politique du PASOK s’est dispersé dans quasi l’ensemble des partis : on en trouve à la fois à droite (Nouvelle démocratie, ND) au centre (une nouvelle formation centriste, To Potami) à « gauche » (Dimar, la gauche démocratique) etc.

Aujourd’hui, le capital est en ordre de combat.

L’austérité est loin d’être terminée. Les attaques contre les exploités sont amenés à se poursuivre et se renforcer. Car il n’y a plus de miettes à lâcher pour tenter de nous amadouer. C’est fini, le temps de la carotte soc-dem. Voici donc venu le temps du bâton. Il n’y a plus de place pour une politique social démocrate. Le gouvernement Valls l’a bien montré. Loi travail, loi Macron, ANI, répression violente, état d’urgence, partout la police…

Face à nous, la seule réponse est désormais la violence du maintien de l’ordre. Dans ce contexte, le « gentil flic » social démocrate n’a plus de place dans le duo. Il s’était de toute façon tellement rapproché du méchant flic qu’on ne voyait pas la différence. Place désormais à un nouveau duo : le méchant flic de droite et le très méchant flic d’extrême droite. Selon les pays, les deux gouverneront ensemble, ou alors l’extrême droite servira d’épouvantail pour faire accepter la droite.

Syriza, Podemos, France Insoumise et cie : les gestionnaires de rechange ne vendent pas de rêves.

Reprenant le flambeau social démocrate, une flopée de nouveaux partis à émergé en Europe. Syriza en Grèce, Podemos en Espagne et cie. Nous écrivions déjà à leur sujet il y a quelques temps :

De reniement en reniement, d’accord pourri avec les créanciers du pays en accords plus pourri encore, le gouvernement de cette fameuse gauche radicale s’est maintenu au pouvoir. Un peu comme dans ces concours ou l’on doit manger le maximum de hot-dog en temps limité, le gouvernement grec à avalé des dizaines de couleuvre en moins d’un an, et continue aujourd’hui à gérer un pays qui s’enfonce toujours plus dans la misère. Il organise les privatisations, coupe dans les retraites des plus pauvres… Bref fait exactement tout le contraire de ce qu’il promettait avant d’être élu… (sans compter l’alliance avec la droite souverainiste… l’article entier en suivant ce lien).

C’est qu’il n’y a tout simplement pas le choix, pour les capitalistes européens. Même les programmes somme toute très modérés de Syriza ( qui ressemblait à celui de Jospin en 2002) c’est trop. Pas de miettes, pas de bons alimentaires, que dalle.

La social-démocratie, même « radicale » est toujours du côté de l’ordre.

Mélenchon a beau faire de grands discours. Podemos idem. Souvenons nous du Chili d’Allende. [2]
Bien sûr, pourra t-on objecter, il s’agissait d’un gouvernement qui se disait socialiste, là ou les partis politiques actuels, France insoumise et cie, sont juste keynésiens : ils ne font pas peur à la bourgeoisie, c’est leur faire beaucoup d’honneur que cette comparaison.

Mais des leçons sont à rappeler dans tout les cas. En premier lieu, l’état capitaliste est au service… du capital. Et la sociale-démocratie, fut elle radicale, défend toujours l’ordre. Elle préfère systématiquement risquer l’ écrasement plutôt qu’une révolution sur laquelle elle n’aurait pas de prise. [3]

Car la seule force sociale capable de s’opposer au capital, c’est les exploités. Quand on dit s’opposer, on parle dans la rue, par la grève. Mais aussi par les armes, pour défendre cette grève. En formant des barricades, pour se protéger des armes ennemies. Et dans l’offensive, pour éviter que les barricades ne soient encerclées et réduite.

Surtout, par la mise en œuvre de mesures communistes immédiates, pour s’attaquer au principal pouvoir des capitalistes : celui que leur procure l’argent.

Tout cela, dans une défiance totale envers celles et ceux qui prétendent nous représenter ou nous diriger. Regardez les. Nous sommes de plus en plus exploités eux n’ont que des appels au calme dans la bouche. Jusqu’à l’extrême gauche, ils condamnent les « casseurs » c’est à dire les exploitées en colère. Ils nous veulent de passifs électeurs et électrices. Qu’ils dégagent tous.


http://www.19h17.info/2017/03/16/social ... ondrement/
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Re: L’impasse réformiste

Messagede bipbip » 13 Avr 2017, 11:24

Le capitalisme peut-il être démocratique ?

Avec les « affaires » rattrapant de plus en plus de politiciens (dont Fillon, Le Pen et Macron), la « moralisation de la vie politique » ou la « démocratie réelle » deviennent de plus en plus centrales dans certains discours à gauche. En Espagne, où les affaires de corruption se sont multipliées, elle est le fer de lance du parti Podemos, qui sert de modèle à la France insoumise et à d’autres formations en Europe.

Évidemment, on ne peut que critiquer la concentration du pouvoir entre les mains du président de la République, les passages en force à coup d’articles 49.3 comme pendant la loi travail, l’immunité dont font la plupart du temps preuve les politiciens (Sarkozy ou les Balkany en sont de bons exemples), la mise à l’écart des petits candidats aux présidentielles et législatives.

Pour autant, pourrait-il y avoir une démocratie authentique dans le cadre du capitalisme ? En effet, le capitalisme place le champ économique « hors démocratie », entre les mains d’une minorité non élue, au pouvoir quasi héréditaire : les capitalistes. Or c’est bien la possession des moyens de production qui détermine qui dirige.

Tout s’entremêle aujourd’hui, et on voit de plus en plus de grands patrons ou de banquiers rentrant en politique, à l’image de Macron, et défendant ouvertement les intérêts des banques et des grandes entreprises. Mais quand bien même on se doterait, par exemple, de la proportionnelle intégrale, et que cela permettrait l’élection d’un gouvernement se disant indépendant du patronat, celui-ci serait rapidement confronté au dilemme suivant : soit il rentre ouvertement en conflit avec les capitalistes, soit il se condamne à ne légiférer que sur des questions périphériques qui n’inquiètent pas les patrons.

Or tous les exemples connus montre que ça n’est jamais un gouvernement qui prend l’initiative de l’affrontement avec les capitalistes, et qu’au contraire ceux-ci se retrouvent toujours à modérer le conflit et à capituler, comme lors du Front populaire en France, après ­l’élection d’Allende au Chili ou encore de Tsipras en Grèce plus récemment. On peut donc faire tous les plans sur la « VIe République » ou la « démocratie 2.0 », si on ne résout pas la question du pouvoir économique, on ne fait que brasser du vent.

Et les capitalistes ne se laisseront pas déposséder sans résistance, une révolution est donc incontournable. Malheureusement, l’histoire du XXe siècle fait que révolution rime encore souvent avec prise de pouvoir par une minorité éclairée dans les oreilles des exploité.es. Nous faisons, pour notre part, le pari d’un projet qui soit à la fois anticapitaliste, révolutionnaire et démocratique, fondé sur la socialisation des moyens de production : le communisme libertaire.

Gestion directe

Les moyens de production doivent être confiés à la gestion directe des travailleuses et des travailleurs organisés en assemblées d’entreprises. Des conseils de communes seront chargées de déterminer les besoins en terme de production, tout en trouvant l’équilibre avec les capacités de production et la préservation de l’écosystème. Ces conseils seront constitués de membres élu.es avec un mandat révocable, et soumis aux décisions d’assemblée générale sur les grandes décisions politiques. Ces conseils désigneront des représentants et représentantes selon les mêmes modalités (mandats révocables et impératifs) pour les échelons supérieurs (département, région, branche d’industrie…).

Dans toutes les révolutions, les travailleuses et les travailleurs se sont spontanément organisé.es en conseils de quartier et d’entreprise, cela en toute indépendance des gouvernements en place. Si bien que, ces conseils gagnant en force et prouvant qu’ils pouvaient organiser eux-mêmes la société, une situation de double pouvoir s’installe : les conseils d’un côté, le gouvernement de l’autre, ne pouvait se solder que par la disparition de l’un ou de l’autre.

Démocratie et capitalisme sont incompatibles. La question n’est donc pas de réfléchir à des mécanismes pouvant rendre celui-ci démocratique, mais plutôt de convaincre les classes populaires de la nécessité d’un affrontement de classe pour changer la société, tout en s’organisant de façon démocratique dès maintenant.

Grégoire (AL Orléans)


Et pour aller plus loin, n’hésitez pas à vous procurer notre Projet de société communiste libertaire, disponible à notre librairie. Un texte fondamental dans la définition de la révolution aujourd’hui, et de la finalité d’une transformation de la société.
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Re: L’impasse réformiste

Messagede bipbip » 31 Mar 2018, 21:05

La social-démocratie européenne : de l’impasse au déclin

Les récentes élections italiennes ont donné à voir, une nouvelle fois, le déclin de la social-démocratie européenne. Si les partis de centre-gauche – qu’ils se définissent comme « socialistes », « sociaux-démocrates » ou « travaillistes » – n’ont pas partout disparu du champ politique à la manière de la social-démocratie grecque (le PASOK), tous ont perdu à des rythmes différents une grande partie de leur base électorale et militante. Seul le Labour britannique connaît une embellie depuis la conquête du parti par une figure de sa gauche, Jeremy Corbyn.

Ainsi, après avoir conquis la quasi-totalité des régions, la plupart des grandes villes, le Sénat, puis la présidence de la République et l’Assemblée nationale en 2012, le PS français a ainsi connu un effondrement sans équivalent dans l’histoire politique du pays. En menant une politique agressivement néolibérale et autoritaire, Hollande et Valls (mais aussi Macron, secrétaire-général adjoint de l’Élysée puis ministre de l’économie et des finances) ont rapidement perdu le soutien de ceux et celles qui avaient soutenu le PS en 2012 en espérant une franche rupture avec dix ans d’une droite radicalisée, incarnée par Sarkozy.

Un tel déclin vient pourtant de loin. Dans cet article publié sous le titre « La « troisième voie » ou le néolibéralisme à visage souriant », et rédigé en juillet 2001, soit neuf mois avant la défaite de Lionel Jospin au premier tour de l’élection présidentielle en France, Gilbert Achcar le remet en perspective historique en montrant l’impasse prévisible dans laquelle la social-démocratie s’est enfermée en adoptant la stratégie dite de la « troisième voie », d’abord pratiquée par Tony Blair en Grande-Bretagne et théorisée par le sociologue Anthony Giddens.

... http://www.contretemps.eu/declin-social-democratie/
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