Appel des militants de la Meuse Dimanche 11 avril 2010
Pour la création d'une nouvelle tendance dans le NPA.
Par des militants de la Meuse
INTRODUCTION
La situation au NPA n'est pas bonne : nombre de militants, surtout parmi les plus radicaux sont en train de s'en aller.
L'accumulation d'un certain nombre de décisions et d'orientations nationales les y pousse. Ce fut tout d'abord dès après les européennes, le revirement de notre CE vers un volontarisme unitaire sans aucun débat préalable dans l'organisation. Puis l'abandon progressif de notre critique des directions syndicales dès que celles-ci nous ont fait les gros yeux. Puis notre politique très unitaire (au prix de pas mal de renoncements) pour des élections régionales auxquelles nous n'avons même pas collectivement décidé de participer, en passant par les possibles « fusions démocratiques » avec le PS. Enfin l'affaire du voile, qui, quoi qu'on en pense, a révélé l'incapacité de notre direction à admettre publiquement que nous sommes un jeune parti au sein duquel tout n'est pas tranché, loin sen faut.
Plus la peine de tergiverser :
Il est désormais clair que les divergences stratégiques qui se font jour dans le NPA résultent de divergences politiques profondes. Manifestement, tout le monde n'a pas mis la même chose dans la création du NPA : Certains veulent un élargissement d’ouverture « à notre droite » en courtisant les autres organisations militantes traditionnelles et en ménageant les directions syndicales.
D’autres, comme nous, majorité des militants meusiens, réaffirmons que notre idée du NPA est et a toujours été un élargissement de l'ex LCR par la base, en s'adressant aux gens les plus révoltés et en les fédérant.
La stratégie développée aux élections régionales a mis en évidence cette divergence de façon très concrète : L'actuelle majorité du NPA pense qu'avoir des élus au prix d'une alliance "raisonnable" sera bon pour le développement des luttes et pour le mouvement révolutionnaire.
Telle n’est pas notre position. En tous cas cela dépend de ce qu’on entend par « raisonnable » et jusqu’où on est prêt à aller. Sans nier l'utilité d'avoir des élus qui soient nos portes paroles, il faut en relativiser ,l'importance : nous savons tous au NPA que cette importance est dérisoire
par rapport au développement des luttes.
Notre parti a pourtant véhiculé le message inverse au cours de la période qui s’achève. Il l'a fait en s'inclinant devant la bien pensance politico médiatique qui affirme que l'unité à gauche prime sur tout autre considérant dans la contexte actuel.
Cette stratégie d’alliance et d’ouverture, avec concessions, que nous sommes désormais un grand nombre à ne plus accepter, occulte complètement nos militants et sympathisants nouveaux, jeunes ou anciens, issus de nulle part, n'adhérant plus à cette façon de faire de la politique.
Parmi nous, beaucoup trouvent que le PS et la droite c'est la même chose ou presque, beaucoup trouvent que la gauche plurielle a discrédité, bien plus que la droite elle même, l'idée même d'une autre société, créant ainsi une désespérance sans précédent dans l'histoire de notre classe.
La stratégie mise en oeuvre ces derniers temps par notre parti occulte tous ceux qui comme nous, refuseraient d'être élus (et ne comprendraient pas que
nous ayons des élus) sur la même liste que celle d'un parti (le PS) dont les membres défendent le capitalisme, subventionnent les entreprises privées,
acceptent le nucléaire, théorisent la soumission aux lobbies comme moindre mal inéluctable, bref...trahissent nos idéaux.
C'est en ce sens que nous pensons qu'il n'existe pas de véritable fusion "technique" ou « démocratique »., Pour accepter ces fusions, notre parti a, dans bien des régions, institué la triste limite du Modem qui aurait été le casus belli: lisez pourtant le programme du Modem sur leur site et comparez-le avec celui du PS. Qui peut trouver plus de deux différences ?
Mais le Modem, c'est le diable et le PS lui est toujours fréquentable...
Notre position est donc la suivante : nous pensons que, si nous pouvons et devons faire cause commune avec les autres partis dits «de gauche radicale »
dans bien des combats, ce n'est pas en gommant nos divergences politiques avec ces organisations, et en diluant ces différences à n'importe quel prix au sein d'alliances électorales sans intérêt et sans lendemain que nous ferons progresser nos idéaux dans l'opinion.
Ce n'est pas non plus essentiellement chez eux que nous puiserons de nouveaux militants révolutionnaires ou encore, comme le pensent certains camarades que nous allons « peser sur les contradictions internes » de ces mouvements.
Pour nous, la limite à ces alliances est constituée par la visée même de ces partis qui souhaitent participer aux côtés du PS à la gestion des institutions, espérant -sempiternelle rengaine- peser sur les politiques mises en oeuvre.
Ce discours ressassé (la droite et la gauche c'est pas pareil, il faut rechercher les alliances…), cette perpétuelle resucée indigeste des mêmes comportements politiques, ne sont plus acceptés par une frange grandissante du peuple de gauche, des exclus et des précaires de toute sorte. C'est à cette frange que nous pensons qu'il faut désormais nous adresser en priorité et c'est là que réside notre profond désaccord.... pour l'instant.
En outre, nous considérons qu'il n'y a pas lieu non plus de ménager les directions syndicales qui mettent plus d'ardeur à briser les initiatives militantes (comme ce fut le cas du Collectif de Résistance Ouvrière en Meuse-Hte Marne) qu'à organiser la riposte sociale.
Là encore, nous venons de nous incliner progressivement devant l'idée dominante qu'il ne faut se couper de personne dans le milieu militant et donc taire ou gommer nos critiques et nos divergences.
Le moins qu'on puisse dire est que le résultat de cette capitulation n'est pas palpable.
En attendant, voici où nous en sommes localement : en Meuse, un petit département de 190 000 habitants, nous avons compté jusqu'à 80 adhérents,
dont 60 n'avaient jamais milité avant dans rien !
Ils sont venus sur des bases de clarté en entendant le discours tranché d'Olivier, relayé par la LCR Meuse puis par le NPA du départ et surtout parce qu'ils en avaient marre du PS du PC des verts mais aussi des syndicats qui ne font rien. S'ils sont venus en Meuse, ils pouvaient venir ailleurs.
Aujourd'hui, il y en a déjà une bonne vingtaine qui s'en sont allés à cause de notre politique d'alliance et l'hémorragie ne s'arrêtera pas là: cela c'est une partie de la réalité qu'il faudra bien que notre organisation prenne en compte dans ses raisonnements.
En revanche, dans l'autre partie de la réalité, celle qui domine les raisonnements actuels de notre direction, combien avons nous gagné de syndicalistes canal historique ou d'acteurs du mouvement social non révolutionnaires? Ceux la même que l'on veut ménager par notre discours et nos comportements politiques. Nous vous le demandons ! Ils préfèrent évidemment le parti de gauche et c'est très bien ainsi !
Pour la grande majorité des adhérents meusiens, nous ne voulons donc pas d'un parti large avec un pôle révolutionnaire, ce n'est pas ce qui a été
voté au congrès fondateur, en tous cas on ne l'avait pas compris comme ça.
Mais il est manifeste que certains travaillent pourtant dans ce sens au sein du NPA.
Les ex-positions B et C nous semblent difficilement conciliables et les efforts pour maintenir l'unité du parti de la part des camarades de l'ex position A (elle même hétéroclite) ne constituent pas une politique.
L'histoire des élections régionales met en exergue ces divergences et c'est plutôt positif.
Notre prochain congrès devra trancher.
Pour une large majorité de camarades meusiens, l'heure est à la clarification de la ligne politique au sein du NPA plutôt qu'à la vaine quête d'un rassemblement illusoire.
En ce qui nous concerne, nous demandons que ce débat ait lieu dès maintenant et nous entendons pousser pour un NPA vraiment révolutionnaire, qui ose dire et écrire publiquement ce que ses militants pensent, qui ose s'affirmer sans crainte des campagnes médiatiques défavorables et sans crainte des scores
électoraux.
PROPOSITION : C'est pourquoi nous appelons tous ceux qui partagent peu ou prou cette analyse à réfléchir d'ores et déjà à la mise en place d'une tendance organisée au sein de notre parti, tendance qui serait suffisamment forte pour peser sur l'orientation politique et stratégique générale du NPA, mais aussi qui redonnerait envie de militer à ceux qui ne se reconnaissent plus dans l'orientation majoritaire du parti.
Nous vous invitons à prendre quelques instants pour lire le texte ci-dessous.
LES CONTOURS DE LA TENDANCE QUE NOUS PROPOSONS
1°) Des délimitations stratégiques claires.Enoncer clairement dans notre expression publique la primauté des luttes sur les élections Refuser toute alliance ou fusion avec les partis de droite ou du PS, question de cohérence mais aussi de clarté pour aider à la compréhension de ceux qui sont encore abusés par la « gauche » capitaliste.
oser critiquer publiquement les stratégies des directions syndicales sans crainte de se faire «gronder » mais toujours avec le double souci a) de cohérence par rapport à ce qu'on prône au niveau des luttes b) d'éclairer ceux qui se laissent encore abuser par la fausse radicalité des confédérations syndicales, toutes devenues de formidables instruments de tétanisation et de désespérance de notre classe. (et de (re)donner envie de militer syndicalement à ceux qui ont fui les syndicats, dégoûtés par leurs directions)
ne pas avoir peur d'initier nous mêmes des luttes ou des soutiens, sans rechercher à tout prix le front unique et en avançant prioritairement nos propres revendications. Nous n'avons rien à y perdre.
Favoriser la convergence des luttes par la création de collectifs de résistance ouvrière ou de collectifs écologiques ou autres (plutôt que privilégier des collectifs unitaires avec d’autres partis dits « de gauche »)
2°) Audace dans l'expression de notre projet de sociétéLe capitalisme engendre l’exploitation des uns par les autres, la gestion irrationnelle des ressources, injustices, crises et dégâts écologiques.
Beaucoup martèlent cependant que c’est le meilleur des systèmes possibles, ou le moins mauvais, en faisant valoir par exemple que seule l’initiative individuelle (celle du sacro-saint « entrepreneur ») peut être motrice et entraîner richesse et progrès.
Pour nous, être au NPA signifie faire l’hypothèse qu’une autre société est possible, qu’on la nomme socialisme ou communisme, société dans laquelle on
produit non plus en vue du profit individuel mais en vue de la satisfaction des besoins collectifs (l’entreprise individuelle ne mène bien évidemment pas à la satisfaction des besoins de tous, contrairement à ce qu’affirme l’idéologie dominante). Une telle société implique que le comment et le pourquoi de la production soit décidé par ceux qui produisent et consomment (ce sont les mêmes), et doit donc à la fois faire disparaître l’exploitation, réaliser une démocratie véritable, et enfin apporter une solution aux problèmes écologiques en ajustant les moyens aux fins pour rationnaliser la production.
Une des raisons pour lesquelles nous lançons l'idée de cette tendance est qu’il nous semble que la perspective de cette nouvelle société n’est pas assez au cœur du discours actuel du NPA.
Nous faisons l’hypothèse que la lutte des classes ne peut être réelle sans cette perspective, et il nous semble devoir constater que cette dernière a été pour ainsi dire effacée de la conscience des exploités, qui pour la plupart n’ont plus d’autre horizon que d’obtenir, ou de préserver, quelques miettes au sein du capitalisme. Nous pensons qu’il y a eu une conscience révolutionnaire du prolétariat au XIXème et XXème siècles, et qu’elle a été progressivement émoussée et abolie pour être à la fin presque anéantie. Nous pensons qu’il y a là un patrimoine et une histoire qui doivent être préservés, conservés, et bien mieux encore retrouvés, et que la trame rompue entre les anciennes générations et les nouvelles doit être retissée. Selon nous, l’effacement historique de la perspective révolutionnaire est le signe d’une grande défaite du prolétariat, par laquelle cette classe a perdu son principal outil de lutte, l’idée qu’un autre monde était possible. Nous voulons renouer avec le passé pour ouvrir l’avenir, et nous pensons que le NPA doit être le lieu où ce retour aux sources doit se faire.
Il nous semble donc qu’une des tâches centrales du NPA doit être de porter cette perspective. A ceux qui au NPA nourrissent l’idée que tout cela vient
trop tôt, que les forces doivent se reconstituer peu à peu et que les conditions historiques ne sont pas adéquates, nous répondons que si nous n’attendons pas le « grand soir » pour demain matin et qu’on ne peut décréter le réveil de la conscience révolutionnaire du prolétariat, il nous semble que l’horizon du socialisme peut accompagner ce réveil en aidant à préciser les idées et à cerner les buts.
Nous ne prétendons rien d’autre que de simplement réintroduire son idée, la rendre de nouveau familière, et nous reprochons au NPA actuel de ne pas
proposer à ses militants et sympathisants autre chose que des luttes et revendications immédiates, qui certes sont incontournables et nécessaires, mais qui peuvent et doivent, selon nous, être accompagnées d’un discours plus large. Nous proposons bien évidement que cette perspective ne soit pas seulement théorique, que ce ne soient pas là que des idées et des discours, mais aussi une pratique, la pratique démocratique elle-même, au sein du parti, sans limitation, ce qui n’est pas sans implications (à préciser) sur le fonctionnement et l’organisation du dit parti, avec pour maxime que c’est en pratiquant une chose qu’on la connaît vraiment et qu’on la fait sienne.
3°) un fonctionnement vraiment démocratique… …qui devra avoir valeur d'exemple dans l'organisation La tendance que nous voulons devra peser sur la démocratie globale du NPA en empêchant l'expression publique de positions sur lesquelles le débat n'est pas tranché (exemple: voile) l'engagement du parti dans des stratégies n'ayant pas fait l'objet de choix internes larges, sanctionnés par des consultations des comités. (exemple :participation aux élections, alliances,)
4°)
un large prisme d'action et de militants L'objectif est de rassembler la frange radicale, sans exclure personne. Pas d' « ouvriérisme » absolu : un travers de notre tendance, si elle voyait le jour, et si elle était rejointe par les camarades investis en 1ère ligne dans les boîtes en luttes, serait de ne se consacrer qu’au seul travail en direction des ouvriers.
Même s’il faut agir encore plus activement dans cette direction, toutes les luttes sont à mener.
Les écolos radicaux, antiracistes, et surtout les précaires, doivent trouver toute leur place dans notre tendance. Comme d’ailleurs tente de la leur offrir l’ensemble du NPA, ce qui est incontestablement un des très bons côtés de notre parti.
Cette tendance, si elle voit le jour, ne doit bien sûr pas renier la tradition communiste révolutionnaire, au contraire, mais elle ne doit pas non plus mettre de barrière idéologique à l’entrée de militants vraiment révoltés par le capitalisme et qui ne se revendiquent pas de cette tradition. (idem NPA là encore) Il y a des sections un peu anars ou un peu rien du tout, qui ne se retrouvent plus dans la ligne floue du parti et qui doivent avoir leur place dans la tendance.
Pas de rejet non plus d'un certain « dilettantisme ». Le radicalisme ne s’exprime pas forcément dans l’assiduité ou dans la constance militante, et notamment chez les jeunes qu’il faut parfois talonner mais qui offrent un potentiel militant sur lequel on peut compter à coup sûr en certaines occasions.
Bref, offrir un cadre souple (pour le profil des militants), mais clairement délimité (pour la stratégie et les idées), peut permettre de ne pas rebuter et de ne pas laisser se diluer ce potentiel.
5°)
pas de comportement fractionnel ou oppositionnel Cette tendance, si elle voyait le jour, aurait certes vocation à devenir majoritaire dans le parti,
mais il faudrait qu'elle soit constructive et fraternelle, ouverte et perméable au débat, partie intégrante du NPA et agissant dans l’intérêt de celui-ci et non dans la méfiance et la recherche perpétuelle du conflit.
Par NPA-COMMERCY