Réquisition des étudiant-es de filière de soin

Réquisition des étudiant-es de filière de soin

Messagede RickRoll » 10 Déc 2009, 22:22

Un coup de gueule, et un petit topic pour informer celles et ceux qui ne font pas partie de cette filière de formation de ce qui se trame. Éventuellement pour débattre également...

Vous n'êtes pas sans savoir que la campagne de vaccination contre la grippe H1N1 a commencé il y a quelques semaines. Après des débuts poussifs et suite à une bonne campagne de com, elle rencontre un franc succès.
Des files d'attentes jusque sur les trottoirs de certains gymnases... Des centres de vaccination devant ouvrir jusque 23h et le week-end... Et encore, même à ce rythme là on est pas prêt-es de vacciner la totalité de la population française. Mais bon c'est pas le débat.

Les étudiant-es des filières de santé (principalement étudiant-es infirmier-es et en médecine) étaient prévenu-es qu'une réquisition par les préfectures était possible, mais qu'elle serait marginale et que le temps de travail ne serait pas long. Et surtout que cette réquisition se ferait sur la base du VOLONTARIAT !

Hé bien ça n'a pas loupé. Les belles promesses de l'année dernière se sont envolées. Ce sont surtout les étudiant-es infirmier-es (EIDE) qui en pâtissent.

La réquisition a parfois lieu la veille pour le lendemain, et remplace les stages de formation !!! Il n'y a pas de respect du choix de l'étudiant-e qui se voit imposer de vacciner. Ainsi, toute une partie des EIDE ne vont pas faire tous les stages prévus cette année. Cela implique une moins bonne formation pour ces EIDE, qui sacrifient donc leur apprentissage pour répondre à une situation qui n'a rien d'urgente.

Les EIDE vaccinent parfois plus de 10h de suite, avec une maigre pause le temps d'avaler un sandwich (et encore il faut parfois se battre pour l'obtenir). Il n'y a quasiment pas de compensation financière car la réquisition "remplace le stage", donc n'est pas mieux rémunérée (même si le temps de travail, de 35h en stage, est beaucoup plus élevé pour la vaccination). Ainsi l'Etat dispose d'une main d'œuvre quasi-gratuite (40€ bruts d'indemnité par semaine par rapport à un-e infirmier-e diplomée payée 9,5€ brut de l'heure, sans compter les primes de week-end et de nuit) et corvéable à merci (on le sait, très peu d'étudiant-es connaissent leurs droits). A une autre époque on aurait appelé ça de l'esclavage.
Dans certains centres, les EIDE ont dû se battre pour pouvoir partir aux horaires prévus : les directeurs-trices de centre voulaient les faire rester jusque 23h !

Les conditions de vaccination sont déplorables, tant au niveau de l'hygiène qu'au niveau qualité. Les bonnes pratiques ne peuvent être respectées.

Bref, tout ça pue.

J'ai entendu la ministre de l'éducation, Valérie Pécresse, qui se félicitait que les étudiant-es participaient à la campagne de vaccination : "c'est leur devoir de service public", a-t-elle déclaré.
Mais le devoir de service public d'étudiant-es, Mme Pécresse, n'est pas de faire le travail de personnels diplômés dans des conditions déplorables, sans rémunération, et avec des horaires dégueulasses afin de rendre service à l'Etat. Le devoir de service public des futurs professionnel-les de santé c'est de se former au mieux, pour prendre en charge au mieux les personnes qui le nécessitent.
RickRoll
 

Re: Réquisition des étudiant-es de filière de soin

Messagede RickRoll » 13 Déc 2009, 13:23

Il y a déjà eu des manifestations à Paris devant le ministère de la Santé sans grands effets sur le terrain.


Vaccination anti-grippe A(H1N1): manifestation de plusieurs centaines d'étudiants infirmiers devant le ministère de la santé

PARIS, 4 décembre 2009 (APM) - Plusieurs centaines d'étudiants infirmiers et de cadres enseignants ont manifesté vendredi devant le ministère de la santé pour protester contre les conditions entourant les réquisitions des élèves pour procéder à des vaccinations contre le virus de la grippe A(H1N1).

Selon la préfecture de police de Paris, contactée par l'APM, le nombre de manifestants s'est élevé à 550.

L'appel à manifester avait été lancé une semaine auparavant par plusieurs organisations dont les syndicats SUD Santé, CGT, FO, CFDT et CFTC de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP).

Dans un communiqué diffusé le 26 novembre, SUD santé de l'AP-HP a dénoncé le fait que les étudiants volontaires se voyaient réquisitionnés dans des centres "sur des horaires impossibles et avec des trajets trop importants".

Les étudiants "qui avaient des petits boulots pour payer leur loyer sont obligés d'arrêter du fait des réquisitions aléatoires et non planifiées", a déploré également le syndicat.

SUD a également précisé que ses élus avaient été "horrifiés" par le spectacle donné dans un centre de vaccination où il n'y avait "pas de lavabos à proximité pour le lavage des mains et pas de savon" et où il existait "deux boîtes de gants pour la journée". "Dans d'autres centres, les étudiants nous signalent qu'ils n'ont pas de gants (...)", a ajouté le syndicat.

La CFDT santé-sociaux et la Coordination nationale infirmière (CNI) ont apporté leur soutien aux étudiants en soins infirmiers et aux cadres enseignants, vendredi dans des communiqués.

Evoquant l'élargissement des horaires d'ouverture des centres de vaccination, la CFDT a pointé en particulier les "problèmes de sécurité pour les personnels et les étudiants en soins infirmiers vaccinant dans les zones dites sensibles jusqu'à 22 heures" ainsi que la "désorganisation dans les Instituts de formation en soins infirmiers (Ifsi) des suppressions de cours pour les étudiants de première et deuxième années".

Soulignant également que "certains étudiants ont dû cesser le travail de week-end qui leur permettait de financer leurs études" et que des professionnels des établissements voient la "pénibilité" de leur exercice accrue par la suppression de jours de repos, la CFDT a demandé au ministère de "reconnaître à sa mesure l'investissement de ces professionnels et étudiants en soins infirmiers".

Elle a par ailleurs "dénoncé l'attitude de certaines directions menaçant les professionnels d'exercice illégal ou refusant l'embauche de jeunes IDE à l'issue de leur contrat, pour cause de non-inscription à l'Ordre infirmier".

Une délégation a été reçue vendredi après-midi au ministère de la santé, a-t-on appris auprès de l'avenue Duquesne.

san/ab/APM polsan


Une nouvelle manifestation serait prévue (info par Facebook) le 17 décembre devant le ministère de la Santé, organisée par les représentant-es étudiant-es des Ecoles de Soins Infirmiers de Paris. L'info a pas l'air de tellement tourner donc je sais pas ce que ça va donner...
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Re: Réquisition des étudiant-es de filière de soin

Messagede abel chemoul » 13 Déc 2009, 13:50

RickRoll a écrit:Une nouvelle manifestation serait prévue (info par Facebook) le 17 décembre devant le ministère de la Santé, organisée par les représentant-es étudiant-es des Ecoles de Soins Infirmiers de Paris. L'info a pas l'air de tellement tourner donc je sais pas ce que ça va donner...

Si ça tourne sur facebook, va y avoir des milliers de personnes, chez les jeunes ce truc a plus de pouvoir de mobilisation que la CGT!
il faut se rappeler que l'insurrection de la place Plum est partie de facebook au départ! :mrgreen:
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Re: Réquisition des étudiant-es de filière de soin

Messagede RickRoll » 13 Déc 2009, 16:59

... et on a vu le résultat : une organisation d'enfer, une sécurité assurée pour les participant-es, bref que du bonheur de participer à ce genre d'évènements.

Même certain-es internes se mettent à se révolter : voici une lettre ouverte signée par un certain nombre d'internes en psychiatrie, mais aussi leurs chefs de service et d'autres personnels soignants

Lettre ouverte à la population, à Madame la Ministre de la Santé et à Monsieur le Ministre de l’Intérieur,


"Nous sommes internes en psychiatrie. Ces derniers jours, comme de nombreux internes et médecins de toutes spécialités, nous avons été "réquisitionnés" dans des centres de vaccination, de la veille au lendemain, sans concertation ni respect des procédures légales.
Non seulement l'Etat semble faire preuve d'un amateurisme flagrant dans la gestion de cette pandémie, puisqu’ayant recours à des réquisitions sauvages alors même que l’arrivée du virus de la grippe H1N1 est annoncée depuis des mois, mais surtout nous avons le sentiment que cette stratégie gestionnaire ne tient aucunement compte des patients dont nous nous occupons quotidiennement. Patients dont nous devons annuler les rendez vous à l’hôpital ou au dispensaire, au dernier moment, parfois le matin même.

Or certains d’entre eux sont dans une souffrance majeure et nécessitent des soins très ajustés.

En tant que « psys », on nous parle des "schizophrènes dangereux", des patients abandonnés etc. Mais là, nous sommes contraints de les laisser tomber brutalement comme si les soins personnalisés que nous mettons en place avec précision ne comptaient pour rien. Tout ceci afin d’obéir à une stratégie dite de santé publique dont les modalités nous laisse dubitatifs.

Peut-on sérieusement soutenir que notre participation à l’effort de prévention passe avant tout autre acte médical ?

Alors même que les médecins traitants, naguère désignés comme les « piliers du dispositif de santé », n’ont pas été pleinement associés à cette campagne vaccinale, les internes se voient assigner à une place d’experts en vaccination… Ce qui s’apparente parfois à une mystification, tant la pratique quotidienne liée à notre spécialité peut s’éloigner de la médecine générale et de l’infectiologie. D’autant que ces mêmes internes, non thésés, se trouvent dans de nombreux cas être les seuls médecins dans les centres de vaccination.

Cette méprise frôle l’irrespect des personnes venant se faire vacciner, souvent angoissées par la pandémie et les interrogations suscitées par les vaccins.

Par ailleurs, la décision de rassembler un grand nombre de personnes dans un même espace en pleine période pandémique est-elle réellement plus judicieuse que la vaccination au un par un dans le cabinet du généraliste, pour limiter la transmission du virus ?

Enfin, qu’en est-il de notre sacro-sainte « indépendance professionnelle » et de notre liberté de jugement quand l’interrogatoire clinique et la prescription nous sont dictés ?


Nous espérons que ces méthodes autoritaires voire martiales, créant une sorte d’ « Etat d’exception », ne se pérenniseront pas car nous les jugeons inacceptables.

Il en va de notre dignité de questionner voire de refuser certaines pratiques, telles que la forme injonctive et autoritaire de certaines réquisitions sous forme de semonces et d'intimidations humiliantes.

La légitimité de ces questions est à la hauteur des enjeux qu’elles recouvrent, en particulier le respect des principes républicains et démocratiques.

Par souci de notre mission de service public, au service de l'intérêt général, et dans une démarche déontologique et éthique, nous souhaitons une politique de prévention qui nous permette de continuer à soigner dignement nos patients, et nous insurgeons contre ce dispositif martial non concerté qui nous transforme en instruments au service d’effets d’annonce médiatiques.

Nous acceptons de participer à des missions préventives, si elles sont rationnelles et ne s'exercent pas au détriment des usagers du service public."


Internes signataires : 54
Loriane BRUNESSAUX, Mathieu BELLAHSEN, Cyrielle BELA , Alexandre POUCHI, Clelia QUILES, Jean Arthur MICOULAUD, Michel HOFFMAN, Yann CRAUS, Alexandra de SEGUIN, Charlotte XAVIER DAVID, Mounia TERKI, Roxane ODOYER, Louise AVENET, Marie COUHADON, Claire GAUTHIER, Diane DAVOUDIAN, Anne CLARET TOURNIER, Claire GRASSET, Marie FLAQUIERE, Germain DILLENSEGER, Laure VARIN, Anna MARUANI, Mael LEBOURLOT, Nicolas DUSSERE, Vanessa MILHIET, Dewi BUSSARD, Céline DUTECH, Assia KHAR, Joachim MULLNER, Agnès GARRAUD, Sylvie HERSON, Agathe PERONY, Thomas MAURAS, Dorothée des NOYERS, Alexandre ALT, Maeva FORTIAS, Adeline DUMAS, Clara BERCOVITZ, Alexandra DEREUX, Wajdi MEHTELLI, Géraldine VOEGELI, Caroline PONTVERT, Sylvie BOIVIN, Laure CHANDELLIER, Elizabeth BURGESS, Céline DUTECH, Michel SPODENKIEWICZ, Laura MASI, Audrey RAMAT, Emilie BARTHE, Carole MOREAU, Anne MOROY, Marion AZOULAY, Camille DELARUE
Soutiens : 27
Patrick CHEMLA (chef de service), Roger FERRERI (chef de service), Michaël GUYADER (chef de service), Jean Pierre MARTIN (chef de service), Olivier BOITARD (chef de service), Jean Paul CHARDON (chef de service), Paul MACHTO (Psychiatre) , Bernard DURAND (psychiatre) , Guy BAILLON (psychiatre) , Philippe BICHON (psychiatre) , Hervé BOKOBZA (psychiatre) , Pierre SADOUL (psychiatre) , Anne TUFELLI (psychiatre) , Yves GIGOU (cadre infirmier), Serge KLOPP (Cadre infirmier), Leslie KAPLAN (écrivain), Heitor de MACEDO (psychanalyste) , Emile LUMBROSO (psychologue) , Paul PEREZ (psychologue) , Valérie VALLET (psychologue) , Florent GABARRON (psychologue) , Bénédicte MAURIN (éducatrice), Thierry TOUSSAINT (psychiatre) , François DARCEL (psychiatre) , Frédéric STEHLIN (psychiatre) , Elie WINTER (psychiatre) , Clotilde MAHAUT (psychiatre) .


A noter que la liste des signataires n'est pas à jour, peut-être qu'il y en a plus à ce jour.
RickRoll
 


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