Relativiser cette tragédie, c'est le tuer une seconde fois Hagay Sobol Universitaire, Président d'Association, Édité par Louise Auvitu
Le principal suspect dans l'enquête sur la mort de Clément Méric a été mis en examen. Le jeune militant d'extrême-gauche, décédé jeudi 6 juin après après avoir été battu à mort par des skinheads, continue d'émouvoir les Français. Quelles leçons faut-il tirer de ce drame ? Pour notre contributeur, la révolte est indiscutable.
La vie de Clément Méric s'est arrêtée à 18 ans, est-ce un drame ou une récupération. Faut-il renvoyer dos à dos les deux extrêmes ? Faire cela c'est rendre le mal banal et oublier que la France est un État de droit.
Notre société va si mal que cela choque de moins en moins de se battre plutôt que de débattre.
Il est plus facile de se battre
À peine sorti de l'adolescence, âge sans concession, la vie de Méric s'est arrêtée. À cet âge, on est de tous les combats, on veut changer le monde et pas toujours de la manière la plus subtile. Est-ce une raison pour légitimer sa mort ?
Non en aucun cas ! Pour Clément, son engagement était peut-être pour une façon de nous dire à nous adultes et parents que le monde que nous lui laissons, ainsi qu'à nos enfants, est dans un triste état. Qu'aurait-il pu devenir avec quelques années de plus. Avec une vie en plus ?
De l’autre côté, il faut se rendre à l’évidence, avoir le crâne rasé, vêtu comme un paramilitaire et armé d’un coup de poing américain, c’est rarement pour faire de la poésie. Peut-être que celui qui a porté de coup fatal, était "désorienté" et endoctriné, "ne cherchant qu’à ce défendre"… À se défendre de quoi du débat d’idées ? C’est en effet plus facile de se battre que de débattre.
Combattre le mal de toutes ses forces
Oui, c’est vrai, l’intolérance est dans les deux camps. Mais la France est un État de droit et les citoyens qui la composent ont le devoir de faire régner les principes républicains qui régissent notre vivre ensemble. "Tous ensemble". Sinon nous sombrerons à court terme dans la barbarie en légitimant la mort ici, et l’obscurantisme là-bas.
Aujourd’hui, les idéologies extrêmes sont responsables de deux vies gâchées. Combien demain si nous nous y habituons ? Si nous ne nous révoltons pas devant ce mal qui corrompt nos valeurs. Non, il ne faut pas s’habituer au mal, au point qu’il devienne banal. Il faut rester lucide pour le combattre de toutes ses forces.
Relativiser la mort de Clément, âgé à peine de 18 ans, l’âge de tous les possibles, c’est le laisser mourir une deuxième fois en renvoyant dos à dos "victime et meurtrier".
Oui ce monde est malade d’indifférence et de lâcheté. Se révolter face à ce drame n'est pas de la récupération, s'est simplement faire preuve d'humanité !
Communiqué de l’Action Antifasciste Paris-Banlieue
Voici la preuve incontestable et définitive qu’Esteban Morillo, l’assassin de notre camarade Clément, est un militant de Troisième Voie, groupe d’extrême droite dirigé par Serge Ayoub. On observe sur cette photo Esteban Morillo (vêtu d’un tee shirt Troisième Voie) en compagnie d’un certain nombre d’autres militants dont leur leader Serge Ayoub.
La révélation de ce cliché est l’occasion pour notre organisation de soulever certains points importants liés au dramatique assassinat de Clément.
Voici une semaine que notre camarade et ami nous a quitté et que nous devons faire face à une exposition médiatique importante. Si le traitement de l’information n’est pas uniforme, nous constatons néanmoins que certains médias, dans leur recherche du scoop et du sensationnel, se sont empressés de donner la parole à l’infâme Serge Ayoub, leader de l’organisation Troisième Voie dont l’assassin de Clément était donc militant. L’occasion était trop belle pour l’extrême droite et le comportement irresponsable de certains leur a permis d’étaler leur propagande mensongère et de jouir, une nouvelle fois, d’une exposition de grande ampleur à peu de frais.
Nous souhaitons également réitérer de façon claire et directe notre accusation portée au Front National et à sa présidente Marine Le Pen. Oui les liens existent et ils ont été largement mis en lumière ces derniers jours : sécurité du défilé du 1er Mai du Front National par certains membres des Jeunesses Nationalistes Révolutionnaires, diner en tête à tête entre Marine Le Pen et Serge Ayoub, présence de Marine Le Pen au local de Troisième Voie en 2008(1) ou encore soutien de Serge Ayoub et de Troisième Voie sur les marchés d’Hénin-Beaumont lors de la campagne du FN face à Jean Luc Mélenchon. A quand des investigations supplémentaires sur ces liens avérés entre les mouvances d’ultra droite et le Front National ?
Pour notre part, nous appelons à une grande manifestation unitaire face à la montée des idées de l’extrême droite. Rendez-vous le Dimanche 23 Juin à 15h à Paris (lieu à définir).
Toujours antifascistes !
http://rebellyon.info/Rassemblement-et- ... on-en.htmlA L’APPEL DU COLLECTIF 69 DE VIGILANCE CONTRE L’EXTREME-DROITE
RASSEMBLEMENT DIMANCHE 16 JUIN 17H AU VEILLEUR DE PIERRE (BELLECOUR)
ET MANIFESTATION SAMEDI 22 JUIN A 14H PLACE BELLECOUR
HOMMAGE A CLEMENT MERIC
Suite au rassemblement du jeudi 6 juin ayant réuni plus d’un millier de personnes place de la Comédie, le collectif 69 de vigilance contre l’extrême-droite appelle à un rassemblement le 16 juin à 17h et à une manifestation le 22 juin à 14h, pour rendre un nouvel hommage à ce militant assassiné par des fascistes à Paris le mercredi 5 juin 2013.
Comme nous l’avons clamé haut et fort lors du rassemblement du 6 juin, nous n’oublierons pas et nous ne pardonnerons pas : il est de notre devoir à tous et à toutes de rappeler une nouvelle fois que nous ne plierons pas face aux violences idéologiques et physiques des extrémistes ; et ce qu’il s’agisse du Front National, des identitaires, des Jeunesses Nationalistes, du GUD ou des JNR impliquées dans le meurtre de Clément.
A LYON, LA VIOLENCE DEPUIS 3 ANS N’EXISTE QUE DU COTE FASCISTE : PLUS DE 40 AGRESSIONS RECENSEES ET ENVIRON 500 JOURS D’ITT DEPUIS 2010
Depuis plus de trois ans, le CV69 essaie d’informer, d’alerter la population et les autorités du danger que représentent la présence et l’installation des groupes extrémistes dans la ville de Lyon. Des dossiers ont été montés, des récapitulatifs d’agressions ont été transmis, les liens ont été démontrés mais pour le moment, aucune décision concrète (mise à part la fermeture du local néonazi de Gerland il y a deux ans) n’a été prise...
Et ce, alors que les violences continuent : un deuxième membre des identitaires a été condamné fin mai pour fait de violences (2e condamnation en quelques mois) ; leur local « La Traboule » continue de diffuser une idéologie de haine (avec par exemple la tenue d’une soirée « Printemps Français », groupement dont l’interdiction pour faits de violence a été un temps envisagée) ; le GUD Lyon ne compte plus ses membres emprisonnés ou en attente de procès et les Jeunesses Nationalistes de Gabriac continuent de déverser leur homophobie et leur envie de dictature fasciste (il est à noter que ces deux dernières organisations soutiennent ouvertement le meurtrier de Clément).
Et malgré ce que veulent faire croire ces groupuscules, les faits de violence ne sont pas le fait des antifascistes !
LE 16 JUIN ET LE 22 JUIN, TOUS ET TOUTES DANS LA RUE POUR :
◦ demander justice pour Clément MERIC
◦ exiger la fermeture de tous les locaux fascistes identifiés comme foyer de haine raciste et xénophobe (La Traboule dans le 5e arrondissement et le local de Terre et Peuple à Villeurbanne par exemple)
◦ l’arrêt des poursuites contre les militantEs antifascistes interpelléEs le 9 mai dernier
◦ la fin des complaisances avec les groupuscules fascistes et leurs leaders
Rassemblement dimanche 16 juin à 17h devant le Veilleur de Pierre/ Bellecour
Manifestation unitaire et populaire le samedi 22 juin à 14h / Bellecour
Pïérô a écrit: un obscur ploum du coin de Grasse (le Kuhing d'ici et gloubi là bas)
23 juin, Mobilisation antifasciste unitaire : la direction confédérale choisit de ne pas s'y joindre !
Suite à l'agression mortelle du militant antifacsiste et libertaire Clément Méric, à l'émotion et à la colère légitimes suscitées par ce nouvel accès de violence des groupsucules d'extrême droite, de nombreuses organisations politiques, syndicales et associatives ont décidé d'appeler le dimanche 23 juin à une vaste mobilisation antifasciste. Le contenu de l'appel unitaire (voir ci dessous et Le Lien ici) met en cause à la fois les discours trompeurs et nationalistes des extrêmes droites françaises comme les responsabilités des gouvernements actuel et précédent dans l'application de politiques libérales, sécritaires et xénophobes qui alimentent justement les idéologies de haine et de violence raciste que le large spectre de la classe politique a condamné récemment.
Mais quel est notre étonnement que de constater que notre Confédération n'a pas daigné signer un tel appel et la mobilisation qui en découle? A part quelques syndicats Cgt (qui se comptent sur les doigts d'une main), nous n'y figurons pas. Alors que les militants et militantes Cgt se heurtent quotidiennement aux discours fascisants et racistes qui gangrènent les esprits de bon nombre de travailleurs et de chômeurs. Que les camarades de toutes sensibilités font montre d'une incroyable inventivité sur le terrain pour damer le pion aux sirènes nationalistes et xénophobes, en tentant de tout faire pour enclencher des dynamiques de luttes sociales.
Eh bien la Confédération dans une information aux organisations de la Cgt, provenant du secrétariat confédéral, justifie sa non signature par le fait que l'appel unitaire antifasciste ne contient pas "l'expression des valeurs auxquelles nous sommes attachés". S'ensuit un rappel de l'engagement de notre confédération à combattre le racisme et à dénoncer les thèses du FN depuis quelques années. Mais quelles valeurs dans cet appel seraient incompatibles avec celles de la Cgt?!!! Au contraire, c'est la décision de ne pas rejoindre cette mobilisation et l'appel qui est incompatible avec les valeurs de classe, antiracistes et antifascistes de la Cgt !
Cette position est incompréhensible. Elle n'est pas tenable! Nous souhaitons vivement que notre confédération revienne sur cette décision qui ne fait que semer le trouble dans nos rangs militants et jeter la suspicion sur la direction confédérale.
Nous appelons à ce que l'appel unitaire antifasciste soit débattu et rejoint par un maximum de syndicats Cgt et que ces derniers interpellent la direction confédérale afin qu'elle revienne sur sa décision, qu'elle prenne toutes les mesures adéquates pour mobiliser largement sur des bases sociales le dimanche 23 juin prochain à Paris et le samedi 22 juin dans les villes où sont prévues des rassemblements et manifestations. Notre combat syndical pour le progrès social est indissociable de notre combat contre les idées d'extrême droite qui gangrènent et entravent notre action auprès de tous les travailleurs et travailleuses.
Le fascisme tue. Ensemble, combattons-le !
Le 5 juin, des militants d’extrême-droite ont tué Clément Méric, syndicaliste étudiant et militant antifasciste. Ce meurtre nous indigne et nous révolte ; il s’inscrit dans la suite de très nombreuses agressions commises par des groupes d’extrême-droite ces derniers mois. La situation exige des actes forts, permettant de mettre un coup d’arrêt à la propagation de ces idées et pratiques nauséabondes.
Dans le respect de leurs différences, les organisations soussignées appellent à s’unir pour rendre hommage à Clément et pour éliminer la haine fasciste.
Confortés par des partis qui reprennent des propos et des pratiques de l'extrême droite, les groupes fascistes refont surface. Les dernières actions contre le mariage pour tous et toutes ont été l'occasion pour eux d'être mis sur le devant de la scène. Nous dénonçons la banalisation du FN et de ses idées xénophobes et racistes.
L'exclusion, le rejet de l'autre, la fermeture des frontières, la désignation de boucs émissaires, la dénonciation de l'immigration comme responsable de tous les maux sont des attitudes qui, l'histoire en témoigne, conduisent au pire. L’Etat entretient un climat délétère en organisant des expulsions massives qui participent à la stigmatisation des immigré-es et des Roms. Au contraire, il est nécessaire d’agir avec détermination contre les commandos fascistes.
Odieux et inacceptable en lui-même, le meurtre de Clément dépasse le drame individuel. Agressions contre les lesbiennes, bi-es, gays et les personnes trans, contre les immigré-es et les personnes issu-es de l'immigration, les musulman-es, actes antisémites, violences envers des militant-es antifascistes et des organisations progressistes, se sont multipliées dans toute la France comme à travers toute l'Europe. Le mensonge, la haine, la violence, la mort, voilà ce que porte l’extrême-droite, de tout temps et en tous lieux.
Ce n’est pas une question morale ; le fascisme se nourrit des peurs face à l’avenir : 5 millions de chômeurs et chômeuses, 8 millions de personnes vivant sous le seuil de pauvreté, 3,5 millions de mal logé-es, accroissement de la précarité, conditions de travail dégradées, licenciements, fermetures d’entreprises... Face à l’explosion des inégalités et aux politiques d’austérité, il faut reconstruire l’espoir collectif en une société plus juste. La question de la répartition des richesses que nous produisons est fondamentale. L’extrême-droite est à l’opposé de ces valeurs.
Utiliser la mort de Clément serait méprisable. A contrario, c’est honorer sa mémoire que de dire publiquement et ensemble ses engagements syndicaux et antifascistes, et de poursuivre encore plus nombreux-euses et déterminés-es ses combats pour la liberté et une autre société.
Unité contre le fascisme et l’extrême-droite !
Manifestation à Paris, dimanche 23 juin à 15h
Des manifestations seront aussi organisées en commun dans d’autres villes.
Nos organisations se réuniront de nouveau après la manifestation : éradiquer la menace fasciste nécessite un travail dans la durée et l’organisation de collectifs locaux. Nos organisations sont différentes, mais elles ont un point commun essentiel : le refus de l’intolérance, du nationalisme, de la haine, et de l’exclusion ; tout le contraire de ce que veut imposer l’extrême-droite !
Le fascisme et l’extrême-droite ne sont pas des courants politiques avec lesquels on dialogue ou on compose. Leur système est basé sur la violence physique, la haine, l’asservissement des peuples.
Premiers signataires (au 13 juin) :
AC !, Act Up Paris, Action antifasciste Paris Banlieue, Alternative Libertaire, APEIS, ATTAC France, CADAC, CEDETIM/IPAM, CGT Educ’action Versailles, CGT Educ’action Créteil, CNDF, CNT, Collectif Antifasciste Paris Banlieue, Collectif CIVG Tenon, CONEX (Coordination nationale contre l’extrême droite), Collectif de Saint Denis contre le FN et l’extrême droite, Confédération paysanne, Convergence et Alternative, DAL, DIDF, EELV, FA, FASE, FASTI , Fédération Anarchiste, FIDL, FSU, Fondation Copernic, Gauche Anticapitaliste, Gauche Unitaire, GISTI, Jeudi Noir, Justice et Libertés, L’appel et la pioche, La Horde, La LMDE, Les Alternatifs, Lesbian and Gay Pride Lyon, Les Debunkers, Marche Mondiale des femmes, Marches européennes contre le chômage, MRAP, Mémorial 98, MJCF, MNCP, M’PEP, NPA, PCF, PCOF, PG, Pink Bloc Paris, Ras l’Front Marne-la-Vallée, Ras l’Front 38, République et Socialisme, Réseau pour un avenir sans fascisme, SGEN-CFDT Académie de Versailles, SLU (Sauvons l’université), SNESUP-FSU, Solidaires Etudiant-Es, SOS Racisme, Sortir du colonialisme, Syndicat des avocats de France, Syndicat de la magistrature, UNEF, Union syndicale Solidaires, UNSP, VISA (Vigilance et initiatives syndicales antifascistes)…
La réponse de la Cgt en interne :
Information aux organisations
Secrétariat de la Direction confédérale
14 juin 2013
L’agression mortelle de Clément Méric a immédiatement fait réagir la CGT dans un communiqué confédéral le 6 juin dernier. Ce sont aussi de nombreuses organisations de la CGT qui se sont déclarées choquées par cette violence mortelle. Dans ce cadre, nombreuses manifestations à l’appel de plusieurs organisations, associations et partis politiques ont exprimé leur indignation et leur condamnation des thèses racistes et xénophobes.
Notre confédération a, en avril 2011, édité une brochure « Le front national ou l’imposture sociale ». Cet argumentaire reste la base de notre analyse et doit, plus que jamais, nourrir nos interventions, autant avec les autres acteurs du mouvement social, qu’avec les salariés.
La CGT a été contactée par Solidaires pour signer un appel à la manifestation du 2 juin 2013 « Le fascisme tue, combattons-le ».
La CGT a décidé de ne pas signer l’appel, dans lequel nous ne retrouvons pas l’expression des valeurs auxquelles nous sommes attachés.
Pour autant, nous considérons que le syndicalisme a une responsabilité pour mobiliser les énergies et les intelligences en direction du monde du travail, de la jeunesse, des privés d’emploi et des retraités.
Aussi, nous devons amplifier avec les organisations syndicales de salariés et de jeunesse, un travail collaboratif pour une série d’initiatives qui relient le combat contre les thèses d’extrême droite et les exigences sociales exprimées par les revendications.
Nous souhaitons le faire avec l’ensemble des organisations syndicales de salariés et de jeunesse qui le décideront. La FSU a d’ores et déjà invité les organisations syndicales qui le souhaitent réfléchir à des modules de journée d’étude, de formation.
Nous le savons le terreau des idées de l’extrême droite, du racisme, de la xénophobie trouvent ses racines dans la peur de l’avenir, le chômage de masse, l’explosion de la précarité, des inégalités générées par des politiques patronales et gouvernementales qui tournent le dos depuis trop longtemps à la satisfaction des besoins du monde du travail, des jeunes, des privés d’emploi, des retraités et ce dont a besoin le pays pour se développer : une autre répartition de la richesse créée par le travail pour le progrès social.
C’est le sens de l’engagement de la CGT avec les salariés au quotidien. C’est le sens de l’engagement de la CGT partout où les intérêts des salariés sont en jeu, à l’exemple de la Conférence sociale les 20 et 21 juin prochains.
La Permanence confédérale
Béatrice CAUSSADE
Secrétariat de la Direction confédérale
Pour Clément : La rage au cœur, ne jamais oublier, ne jamais pardonner
sud sciences po
lundi 17 juin 2013
Peu de jours ont passé et pourtant ils nous semblent une éternité : depuis la mort de Clément, nous sommes pris-es dans une effervescence qu’il est dur de maîtriser. Rien, sans doute, peut-être pas même les années et l’expérience que nous n’avons pas, ne peut préparer quiconque à enterrer un ami et camarade.
Si le temps de recueillement et de deuil dont nous avons besoin ne nous est pas accordé, c’est que le meurtre de Clément est un meurtre politique. En tant que tel, il appelle une réponse politique. Ce monde ne s’arrête pas par égard pour nos larmes ; par respect pour Clément, pour ses luttes, nous ne pouvons pas baisser les bras, aujourd’hui moins que jamais. Il nous faut relever la tête, transformer notre douleur en colère, et notre rage, en force. Ce sont tout à la fois cette irrépressible douleur, cette irrépressible colère, rage, et force, qui habitent ces lignes par lesquelles nous voulons restituer à la mort de Clément le sens qu’il aurait voulu qu’on lui donne : un sens politique.
Dimanche 2 juin, trois jours avant l’assassinat de Clément, la Ligue de défense juive (LDJ), milice ultra-nationaliste pro-Israël, considérée comme une organisation terroriste et interdite sur les sols étasunien et israélien mais tolérée en France, a revendiqué l’attaque d’un jeune homme prénommé Mounir et de l’avoir plongé dans le coma.
Mardi 4 juin, un couple de femmes est violemment agressé après un rassemblement de « veilleurs » anti-mariage : l’une d’elles, transportée en urgence à l’hôpital, reçoit 90 jours d’ITT.
Jeudi 6 juin, Rabia, jeune femme portant le foulard, est violemment agressée par « deux individus au crâne rasé », portant des bombers et appartenant très vraisemblablement à l’extrême-droite. Alors qu’elle cherche à porter plainte, la police lui conseille de rentrer chez elle et de ne pas « ébruiter l’affaire ».
Le même jour, alors que nous occupons les rues de Paris et d’ailleurs en hommage à Clément et à son combat antifasciste et que M. Valls gesticule dans tous les sens en parlant de dissoudre les JNR, une des plus grosse rafles de sans-papier-e-s des dernières années a lieu à Paris.
Le 7 juin, nous apprenons la relaxe requise par le parquet pour le policier responsable de la mort de Moushin et Lakhamy à Villiers-le-Bel en 2007.
La liste est encore longue.
Clément n’a pas été assassiné seulement par une bande de fascistes. Il n’a pas été assassiné seulement par l’extrême-droite reconnue comme telle. Clément est plus largement la victime de la montée à grande vitesse des idées les plus nauséabondes et de leur banalisation, en France et ailleurs en Europe. Clément a aussi été tué par le racisme – et en particulier l’islamophobie –, la xénophobie, l’homophobie d’Etat. Nous avons vu l’homophobie défiler dans nos rues sans complexe pendant des mois. Cela fait des années que l’islamophobie occupe l’espace politique et médiatique, accompagnée de son lot de menaces, de vexations, d’agressions – de plus en plus violentes. La « bête immonde » ne naît pas seule. La confiance dont fait preuve l’extrême-droite est permise par et se nourrit des discours et des pratiques racistes, xénophobes, homophobes, provenant des institutions de pouvoir.
Clément était un homme, hétérosexuel, cisgenre, blanc, étudiant à Sciences Po. Il a été tué parce qu’il était militant antifasciste, libertaire. Il a été tué comme pourraient l’être les lesbiennes, bi-e-s, gays, trans’, qui auraient le malheur de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment. Il a été tué comme pourraient l’être les non-blanc-he-s, les immigré-e-s, indigènes, musulman-e-s, qui sont l’objet du racisme le plus décomplexé. Sa mort émeut l’opinion comme rarement la mort des victimes non-blanc-he-s des crimes policiers, des ratonnades et autres assassinats racistes ont ému l’opinion.
Malgré le poids de la douleur, nous ne pouvons pas l’ignorer. Cela n’enlève rien à notre peine, et, si c’est encore possible, cela accroît notre rage et notre détermination à lutter. Clément était antifasciste : il se battait pour la défense d’une égalité radicale des droits, et aux côtés de tou-te-s celles et ceux que l’extrême-droite considère comme des ennemi-e-s à abattre – les minorités sexuelles et les trans’, les immigré-e-s, indigènes, musulmans, les militant-e-s politiques. Clément dénonçait sans relâche la banalisation voire l’institutionnalisation des idées et pratiques des droites extrêmes.
Tant que, jusque parmi nous, jusque dans la gauche radicale voire révolutionnaire, nous ne purgerons pas notre discours des moindres vestiges de nationalisme, tant que nous ne combattrons pas constamment et durablement le racisme, l’islamophobie, les chasses aux Roms et aux sans-papier-e-s, l’homophobie, le sexisme, nous creuserons, nous aussi, le lit de la « bête immonde » que l’on voit grossir. C’est ce combat-là que nous devons continuer. Contre le fascisme, par tous les moyens nécessaires.
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