Ulfo25 a écrit:Article Le Monde intitulé "La pratique de l'allaitement varie fortement en fonction du niveau social des mères". Personnellement je le trouve assez orienté dans le mauvais sens du terme. Comme si les femmes des couches dites "populaires" étaient sotes et qu'il faudrait pratiquer l'allaitement naturel à tout prix (ce qui obligerait pas mal de femmes à rester à la maison pour ça)
Je connais bien le sujet pour m'être longuement documentée. Cette question est en effet à la croisée des réflexions relatives au féminisme, à l'intérêt des enfants, à l'écologie, à la condition animale, au capitalisme et à ses avatars le consumérisme et le productivisme...
Il y a de nombreux arguments qui contredisent ce que sous-entend (peut-être involontairement) ton commentaire.
Sans entrer dans le débat sur les intentions affichées ou non affichées de cet article voici, en vrac, quelques infos intéressantes à propos de l'allaitement maternel :
- Le lait artificiel, qu'il soit produit de façon polluante et contraire à l’éthique en matière de souffrance animale ou qu'il soit issu des filières les plus réglos de l'agriculture biologique, coûte extrêmement cher, alors que le lait maternel est gratuit. Pourquoi une mère/ des parents devraient -illes gaspiller de l'argent pour acheter un substitut de quelque chose que le corps de la mère produit gratuitement en beaucoup mieux ?
- Le lait artificiel non bio contient TOUJOURS des OGM... Choisit-on de faire un enfant pour l'intoxiquer dès les premiers mois de sa vie avec un "aliment" hors de prix?
- Parmi les explications concernant la différence entre la france et les autres pays en matière d'allaitement maternel, il y a la forte pression exercée depuis plusieurs décennies (en qui tend, heureusement actuellement à perdre de son influence) par le lobbie de l'industrie agro-alimentaire de la viande et du lait, industrie non seulement capitaliste mais aussi particulièrement polluante et cruelle envers les animaux. Le lait de vache est destiné aux veaux, pas aux petit-e-s humain-e-s ! Le lait de vache contient environ 45 % de protéines alors que le lait d'humaine n'en contient, les premiers mois, que 5%, parce que ce dont les bébés humain-e-s ont besoin à cette étape là de leur vie ce n'est pas tant des protéines (contrairement aux veaux qui eux doivent très tôt renforcer leurs muscles pour se tenir sur leurs 4 pattes), mais des glucides et des oméga 3 pour permettre à leur cerveau de se développer. Le lait d'humaine est celui qui contient le plus de glucide et d'oméga 3. D'autre part, le terme « nourrice » encore utilisé pour désigner les assitantes maternelles vient du fait qu'autrefois les mères issues des classes dominantes ne nourrissaient pas leurs propres enfants. L'allaitement « rabaissant » la femme, du point de vue de la morale bourgeoise, à la condition animale à laquelle cette même morale assimilait les femmes du peuples, à commencer par les « nourrices », chargées de nourrire les enfants des bourgeoises. Les unes allaitaient à la chaine, chosifiées comme le sont actuellement les vaches, les autres étaient privées de cette expérience extraordinaire. De plus la composition du lait maternel évolue au file du temps afin de correspondre aux besoins nutritionnels de l'enfant qui changent au fur et à mesure qu'il grandit. Une nourrice qui allaitaient des enfants de bourgeoise depuis plusieurs année ne pouvait donc pas donner à ces enfants un lait adapté à leurs besoins. Oui, nous sommes des animaux, des primates et donc des mammifère. Et pour qui n'a pas l'esprit intoxiqué par les délires créationnistes et anthropocentristes, ce constat est plutôt merveilleux !
En ce qui concerne les aspects sociaux professionnels, parmi les mères prolétaires, il n'y a pas que celles qui travaillent, il y a aussi les chômeuses et dans les deux cas il faudrait réclamer une augmentation de la durée de l'arrêt maternité (temps pendant lequel la femme est indemnisée par la sécurité sociale en remplacement du salaire ou des allocations chômage) à au moins 6 mois après l'accouchement (temps correspondant à la durée minimum de l'allaitement intégrale préconisé par l'Organisation Mondiale de la Santé). Pour celles qui reprennent le travail et/ou trouvent un emploi, il est tout à fait possible de poursuivre l'allaitement en s'organisant avec un tire-lait, voir en tirant son lait à la mains (se traire en quelque sorte
), donc l'idée selon laquelle l'allaitement naturelle obligerait à « rester à la maison » ne tien pas. Par contre, on peut ne pas avoir du tout envie de retourner au tripalium et se prendre la tête avec des biberons que le bébé refuse boire parce que les biberons c'est nul comparé au sein de sa maman, ça c'est sur...
Il est notable que les pays occidentaux où l'allaitement maternel est les plus pratiqué sont souvent ceux dont la culture, les lois et les politiques sont les moins machistes (Scandinavie). D'autre part, les mères des pays pauvres allaitent, tant qu'elle le peuvent, leurs enfants et ce jusqu'à un âge très avancé. (Ce qui peut mettre en péril l'allaitement c'est surtout le manque d'eau potable et la famine car pour que les seins puissent fabriquer le lait il faut que la femme puisse boire de grande quantités d'eau et ne soit pas affamée). Tant qu'elles ont du lait elles détiennent le meilleur moyen de protéger leurs enfants contre la malnutrition, la soif et les maladies (car le lait maternel contient aussi les anticorps de la mère).
- En ce qui concerne l'intérêt de l'enfant, il y a les aspects nutritionnels, sanitaires, mais aussi psychologiques. Les tétées sont des moments de grande complicité et de tendresse entre la mère et son enfant. On peut observer dans les différents lieux qui accueillent des bébés et leurs parents (maternité, PMI, etc...) que les bébés nourri-e-s au biberon sont presque toujours celleux auxquel-le-s les parents collent une sucette (en guise de bouchon pour ménager les oreilles des adultes et en guise de substitut du sein maternel pour le bébés qui s’époumonent dès que la sucette tombe ou la crachent elleux-même en plus de s’époumoner, parce que ce qu'illes veulent c'est pas ce truc froid en silicone!) . Dès ses premières minutes de vie extra-utérine, le premier réflexe du bébé est de tourner la tête en direction du sein de sa mère (comme le font tous les bébés mammifères). Allaiter son enfant, même lorsqu'ille n'a pas faim mais juste un petit/gros chagrin, l’apaise et la-e réconforte efficacement.
J'ai en mémoire aussi tout ce que Elena Gianini-Belloti a décrit, à juste titre à ce sujet, dans
Du côté des petites filles. Il y a aussi l'aspect gustatif et donc en lien avec l'éducation au goût : le lait maternel prend les arômes de ce que mange la mère, c'est donc une façon simple et efficace d'initier l'enfant aux parfums des aliments. De plus, si l'enfant boit le lait de sa mère directement au sein, les arômes varient durant la tétée elle même.
- Du point de vue de la santé de la mère, l'allaitement permet à l'utérus de regagner plus rapidement sa place après l'accouchement, muscle le périnée, fait perdre les réserves de graisse accumulées durant la grossesse et diminue le risque de cancer du sein. Si on est bien conseillée et soutenue par les professionnel-le-s de santé spécialistes en la matière, on trouve vite une/des position(s) confortable(s) pour allaiter le bébé en toute sécurité et de façon reposante (On peut même s’endormir en allaitant son bébé et ce de façon sécurisée – ce qui est impossible en lui donnant le biberon). En étant bien installé-e-s la tétée est donc un temps de relaxation pour la mère et l'enfant.
- Nourrir son enfant avec son propre lait donne une grande autonomie économique et réduit considérablement la "charge de travail parentale" (pas de biberons à préparer, chauffer, stériliser, nettoyer). C'est bien plus pratique, moins fatiguant et rend les déplacement beaucoup plus facile (où qu'on soit, pas de biberons à trimbaler avec tout son attirail pour en conserver la bonne température et respecter les conditions d'hygiène, etc...). Le lait maternel est l'aliment le plus adapté aux besoins nutritionnels de l'enfant et il est toujours à la bonne température.