Contre le système prostitutionnel: libertaire vs libéral

Re: Contre le système prostitutionnel: libertaire vs libéral

Messagede Pïérô » 17 Mar 2014, 01:15

La postmodernité proxénète

par Sylviane Dahan

Nous assistons depuis quelques semaines à une intense campagne en faveur de la normalisation de la prostitution. Une campagne particulièrement intense en Catalogne. Que l’on s’achemine vers l’indépendance ou pas – l’idée de l’autodétermination est loin d’enchanter banquiers, employeurs et grandes entreprises du pays – nos élites dirigeantes envisagent la prostitution comme un important « créneau commercial ». Mais son épanouissement serait impossible sans une acceptation sociale préalable. Et c’est bien ce à quoi l’on nous convie : nombreux reportages à la télévision publique catalane banalisant le « travail du sexe », articles et interviews dans les journaux à grand tirage... Tout cela coïncidant avec le Congrès du Téléphone Portable, dont les participants ont fait augmenter de manière spectaculaire la consommation de sexe tarifé à Barcelone.

Les arguments avancés par le lobby des industries du sexe ne manquent jamais d’imagination – et de cynisme – s’adaptant convenablement aux circonstances et au public. Ils n’en sont pas, pour autant, moins exécrables. Ainsi, presque sans interruption, nous avons eu droit à l’énième récit de la « prostituée libre et heureuse » à qui tout semble sourire dans la vie ; on nous a présenté une académie pour apprendre « le métier de pute », un métier spécialement recommandé aux femmes qui ont « un penchant pour le sexe » ; on nous a annoncé aussi la naissance d’une coopérative auto-organisée de femmes prostituées (coopérative qui est, soit dit en passant, gérée par un homme). Et finalement, on nous a expliqué que, renonçant à tout « moralisme », notre société devait comprendre qu’en temps de crise, la prostitution devient une véritable option pour les femmes. Et, pour donner à cette opération publicitaire un semblant de rigueur scientifique, voici l’anthropologue Dolores Juliano qui monte au créneau, tentant de nous convaincre que, tandis que les hommes en difficulté sont enclins à la délinquance, la prostitution constitue une « stratégie de survie » propre aux femmes. Comment si cette « stratégie » tenait à la nature féminine ou au libre arbitre des femmes... plutôt qu’à la structure patriarcale de la société et à la domination violente des hommes !

L’une des caractéristiques principales de ce type de campagne consiste à hisser au rang de porte-paroles et représentants des femmes en situation de prostitution certaines ONG qui interviennent auprès d’elles – recevant des subventions et les aidant à supporter leur prostitution, mais pas à en sortir – ainsi que de soi-disant « syndicats de prostituées » - où il n’y a pratiquement aucune femme, qui n’ont jamais négocié le moindre contrat… et qui sont essentiellement des façades médiatiques. Cette constellation bigarrée et bruyante essaye toujours de manipuler, avec une rhétorique corporative, une minorité de femmes prostituées, pour s’en servir comme d’un bélier contre le féminisme abolitionniste, contribuant à réduire au silence l’écrasante majorité des femmes, violentée et exploitée. Il faut reconnaître que les industries du sexe font preuve d’une extraordinaire habilité pour raconter à chacun ce qu’il a envie d’entendre pour rassurer sa conscience. À la gauche, on parle de syndicalisme et de conquête des droits. Chez les féministes, on évoque l’autonomie personnelle et le droit à son propre corps. Aux mouvements alternatifs, on parle de coopératives. Chez les libéraux, on s’épanche sur la responsabilité individuelle. Et chez les gays, on invoque la liberté sexuelle. L’acceptation de la prostitution est vendue avec l’emballage approprié à chaque auditoire. L’intelligentsia postmoderne, qui a perdu tout horizon de progrès social pour l’humanité, a livré aux grands proxénètes une belle palette terminologique.

Au bout du compte, cependant, la prostitution demeure un commerce entre hommes ; un commerce où la femme, déshumanisée, devient une marchandise. Et c’est avant tout cette réalité que les discours banalisant la prostitution entendent masquer. Ce qui est caractéristique de ces campagnes, c’est la dissimulation du proxénète et du « client ». Tout est présenté comme s’il s’agissait d’une affaire de femmes. Elles deviennent responsables de leur prostitution. C’est leur choix ou leur malheur. Mais, en tout cas, c’est leur problème. Et que personne n’en fasse des « victimes » ! Voici une autre perversion du langage. Ceux qui plongent les femmes dans la prostitution s’érigent en défenseurs de leur « autonomie » et tentent de les soulever contre les abolitionnistes avec cet argument massue : « Je ne veux pas être une victime ». Personne ne veut en être une. Mais être victime constitue une situation, pas une identité. Nous sommes victimes d’innombrables injustices, d’exploitation et d’oppressions multiples. Nous ne sommes pas pour autant des êtres inertes, incapables de rébellion. Mais, justement, la révolte commence avec la prise de conscience de l’oppression et avec l’identification de l’oppresseur. Lorsque les partisans de la régularisation de la prostitution proclament que « les femmes prostituées ne veulent pas être considérées comme des victimes », ils cachent en fait les bourreaux et nous conduisent à une impasse.

La prostitution ne peut être abordée par la casuistique d’une prétendue distinction, toujours trompeuse, entre « prostitution libre » et « forcée ». C’est le modèle de société qui est en cause. Une société qui accrédite la prostitution comme « travail du sexe » certifie une relation d’inégalité qui affecte, de façon structurelle, tous les hommes et les femmes, sans exception. Dès lors que l’on admet l’existence légitime de ce commerce, toutes les femmes deviennent susceptibles d’être prostituées : il n’y a qu’à trouver le prix de chacune. De ce point de vue, rien d’essentiel ne distingue une anthropologue postmoderne des centaines de filles chinoises qui peuplent les discrets appartements transformés en bordels du centre-ville, ou des filles roumaines qui font le trottoir près du port. Notre intellectuelle « pense » la prostitution comme un travail acceptable pour les femmes. Cependant, il s’agit presque toujours d’un travail pour « les autres femmes » : le plus souvent, celles dont la « culture » prédispose à l’adoption d’une telle « stratégie ». Au fond du relativisme culturel, si caractéristique de la postmodernité, on trouve tout simplement le racisme. Et, au fond de cette « amoralité » qui se veut « transgression », on peut aisément reconnaître la pulsion irrépressible du néolibéralisme qui prétend lever toutes les barrières, qui aspire à tout transformer en marchandise.

La prostitution, en tant qu’entreprise multimilliardaire construite sur l’exploitation des femmes et le déni de leur humanité, représente la symbiose parfaite entre le patriarcat et le capitalisme. Que leurs avocats postmodernes nous pardonnent, mais plus que jamais, nous voulons pour notre pays l’adoption du modèle nordique, solidaire et respectueux des femmes prostituées et défenseur du droit de toute personne à ne pas l’être, implacable avec les proxénètes et belligérant avec les « clients ». La lutte s’annonce extrêmement rude. D’un côté comme de l’autre, les enjeux sont importants. Si le féminisme et la gauche ne se réveillent pas, nous allons devenir le plus grand bordel de l’Europe du Sud. Dans ce cas-là, nous tournerions le dos à toute perspective réelle d’émancipation et de progrès social.

Action féministe 26 -N | 27 février 2014 à 23:23 |Catégories : Articles, Ouvrez vos yeux ! | URL : http://wp.me/p1O7e3-pe

Traduit du castillan par Martin Dufresne (de la collective TRADFEM) et l’auteure, Sylviane Dahan.

http://collectif-libertaire-antisexiste.fr.nf/
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Re: Contre le système prostitutionnel: libertaire vs libéral

Messagede Pïérô » 19 Mar 2014, 09:05

Le féminisme dit « pro-sexe » fait le sale boulot du patriarcat.

de la chroniqueuse Glosswitch, publié dans The New Statesman, le 7 mars 2014.

Et ce que nous appelions l’oppression est maintenant cool à nos yeux.

Le féminisme peut être effrayant pour toute femme qui a grandi sous le patriarcat. Vous êtes habituées à un ensemble de règles très fixes : être passive, se soumettre aux autres, respecter l’autorité masculine, craindre la violence des hommes, ne jamais transgresser. C’est triste, mais au moins vous savez à quoi vous en tenir. Puis arrive le féminisme et ces certitudes disparaissent - ou du moins c’est ce qui se passait avant. Les choses sont différentes maintenant.

Il fut un temps où le mot « féministe » était en soi transgressif. Aujourd’hui, les gens s’y objectent rarement. Amère ironie : la phrase « je suis féministe mais » est devenue une expression utilisée pour renforcer la domination masculine. « Je suis féministe mais je n’ai rien contre l’objectification, le travail non payé, le harcèlement sexuel, ou me faire traiter de conne ! » Cela suggère que nous sommes revenues au point de départ. Le féminisme aurait ramé dans tous ces enjeux pour réaliser, en fin de compte, que les adultes avaient raison dès le départ. Tous ces trucs que nous qualifions d’oppression ? C’est maintenant TRÈS cool à nos yeux.

C’est ainsi qu’on en arrive au féminisme dit « pro-sexe » ou « sexe-positif » - celui qui, par son existence même, suggère que tous les autres types de féminisme sont destinés à de misérables puritaines desséchées qui n’avaient besoin que d’une bonne baise (idéalement, de modèle pénis-dans-le-vagin). Je suis certaine que l’intention de départ était excellente : ce n’est pas le sexe, mais le contexte des interactions sexuelles en régime patriarcal qui doit être remis en question, et la rhétorique féministe n’a pas toujours fait cette distinction.

Néanmoins, quelles que soient les motivations en cause, nous avons atteint un point où le féminisme « pro-sexe » fait de lui-même le sale boulot du patriarcat, Toutes ces bonnes filles qui ont grandi dans la peur d’enfreindre les règles ? Elles ont découvert un moyen de faire exactement ce qui est exigé d’elles sans en reconnaître l’impact sur les autres femmes. Tous les vieux stéréotypes sont bien vivants, et en cours de remise en état par des vierges idéologiques qui se prennent pour des putains.

Il devrait être possible de critiquer la politique du genre dans la prostitution sans se voir diagnostiquée « putophobe ». Il devrait être possible de remettre en question l’objectification sexuelle pratiquée en page 3 (du Daily Mail britannique) sans être accusée de « slut-shaming ». Il devrait être possible de s’opposer aux sifflets des hommes sur la rue sans que l’on suggère que vous êtes classiste, naïve et réprimée sexuellement. Il devrait être possible d’avoir sa propre opinion sur le statut juridique de la prostitution sans être considérée comme pire que les clients agresseurs et les violeurs.

Malheureusement, il est devenu impossible de faire aucune de ces choses en raison d’une attitude qui n’est ni pro-sexe, ni féministe, mais qui se présente comme telle. En fait, il s’agit d’une arnaque sexiste, qui réduit les comportements sexuels à un modèle d’offre féminine et de demande masculine.

L’idéologie qui sous-tend le féminisme « pro-sexe » est conservatrice et sans imagination, terrifiée par un no man’s land sexuel si jamais le patriarcat devait dégager l’espace qu’il occupe actuellement. Et pourtant, c’est un fait que celles qui s’interrogent sur l’objectification ne craignent pas la baise. Ce ne sont pas les puritaines pâmées cramponnées à leur collier de perles qu’imaginent d’un commun accord misogynes et féministes « pro-sexe ». Elles poussent simplement une étape plus loin leur soutien à la sexualité, en reconnaissant que personne n’effectue des choix dans le vide, mais que chacun-e a besoin d’être respecté-e comme être sexuel autonome. Cela vous inclut mais m’inclut aussi, ainsi que des milliards d’autres personnes. C’est là que les choses se compliquent. Tout ne se résume PAS à vous. Ou à moi non plus. Nous avons besoin d’un monde qui accueille nos différences, mais créer ce monde exige un changement fondamental de tout le contexte de choix sexuels.

Ne mâchons pas nos mots : le féminisme a pour but d’abattre le patriarcat. Il n’est pas là pour lui faire des câlins et des excuses. Il n’est pas là pour apprendre aux femmes comment s’adapter à une vie de subalternes. Il n’est pas là pour promouvoir une réaction joviale et tolérante à un sifflement, une main au cul, une langue au fond de la gorge, ou un viol. Et si vous pensez que « tout cela ressemble un peu à un jugement de valeur », je comprends tout à fait. Je sais que des mots comme « patriarcat » et « domination masculine » mettent les gens mal à l’aise (je parlerais même de « feminisme-phobie » s’il n’était pas temps d’arrêter de faire de toute dissidence une pathologie). Je sais que certaines femmes éprouvent une peur profonde de la façon dont le féminisme pourrait transformer leur paysage sexuel. Il est difficile d’appuyer quelque chose qui est en fin de compte bon pour tout le monde - mais pas spécialement pour vous. En dernière analyse, le féminisme n’a rien à faire du détournement des mots (comme l’autonomisation, le choix, la liberté) pour recouvrir les choses que nous ne voulons pas voir. Nous sommes là pour abattre tout l’édifice, pas pour repeindre les murs.

Je ne passe pas de jugements sur ma propre histoire sexuelle ou sur mon comportement actuel. Je ne juge pas les autres femmes pour le leur. Mais je juge le contexte où sont engoncées nos identités sexuelles : je le trouve étriqué. Je ne m’attends pas à ce que vous soyez nécessairement d’accord, mais je m’attends à ce que vous permettiez à de tels jugements d’être exprimés, car sans un tel processus, il ne peut y avoir aucun changement. Dans son essai Taming the Shrew ? Choice feminism and the fear of politics (http://ptw.uchicago.edu/Ferguson11.pdf), Michaele L. Ferguson décrit comment notre peur d’un féminisme politisé signifie que nous reculons face à une analyse structurelle, rejetant toute forme de jugement comme une attaque personnelle :

Le féminisme réduit à la notion de choix personnel, c.-à-d. le féminisme néolibéral, suggère à tort que, comme les choix sont individuels, ils n’ont pas de conséquences sociales ; les femmes sont donc soulagées de la responsabilité d’examiner les implications plus larges de leurs décisions.[...] Par conséquent, le féminisme néolibéral est radicalement dépolitisant : il nous décourage de se former un jugement sur la valeur des différents choix possibles, il nous décourage de rendre compte publiquement des choix que nous effectuons, il interrompt toute discussion critique sur quels choix devraient être évalués et quels choix ne sont que des illusions, il embrasse sans réserve le consumérisme et, ce qui est le plus problématique pour l’avenir du féminisme, il dissuade les femmes de s’impliquer politiquement [... ]

Si nous ne pouvons pas remettre en cause la notion de choix, nous ne pouvons pas remettre en question le patriarcat ou quelconque des autres hiérarchies avec lequel il s’entrecroise. Faute de contexte, nous sommes perdues. Nous avons besoin d’espace pour explorer quelles autres possibilités peuvent s’ouvrir pour nous.

Cette exploration ne fait pas de nous des bigotes, des putophobes ou des puritaines. Elle ne fait pas non plus de nous des gens qui ne se trompent jamais. Elle fait de nous des gens qui continuent à remettre en question ce qui nous entoure, en termes théoriques et pratiques. Elle fait de nous des personnes prêtes à se salir les mains. Cela signifie que quels que soient nos vécus, nos antécédents et nos choix sexuels, nous ne sommes pas au-dessus de la mêlée.

Mais je ne veux pas me placer au-dessus de la mêlée ou avoir toujours raison. Je ne veux pas voir tous les choix considérés isolément, scellés hermétiquement et étudiés sous vide. Je ne veux pas que mon droit à baiser soit subordonné à ce que d’autres se fassent baiser. Il doit y exister une autre solution.

Adaptation française : TRADFEM

Source : http://www.newstatesman.com/lifestyle/2 ... ys-work-it
http://grenoble.indymedia.org/2014-03-1 ... xe-fait-le
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Re: Contre le système prostitutionnel: libertaire vs libéral

Messagede Béatrice » 03 Avr 2014, 12:14

Les "sugar babies", nouvelle forme de prostitution étudiante ?

Où commence la prostitution, où s'arrête le flirt ? Les "sugar babies" sont des jeunes femmes, souvent étudiantes, mises en relation sur Internet avec des hommes fortunés et plus âgés. Ces "sugar daddies" leur payent leurs études ou leur loyer en échange de leur compagnie au restaurant ou au théâtre... Mais aussi, souvent, au lit. Cette "activité" semble se développer en France, avec plusieurs sites internet dédiés à ces rencontres.

http://www.franceinfo.fr/societe/le-plu ... 2014-04-03

« Sugarbabies », « sugardaddies »… ou la cocotte relookée :

Au masculin, l’argent. Au féminin, les mensurations. Fallait-il vraiment arriver au 21ème siècle pour voir triompher pareille division des rôles ? L’intense médiatisation de sites destinés à mettre en lien des messieurs fortunés et de jeunes "étudiantes" fauchées, comme seekingarrangement.com, désormais en ligne en version française, ne peut que contribuer à faire de nouvelles recrues. Naturellement, jamais le mot fatal – prostitution - n’est prononcé, pas plus que celui de proxénétisme.

Lancé selon le journal Le Monde par un entrepreneur diplômé d’une grande école américaine en 2006, le site seekingarrangement.com prétend compter un million d’étudiantes parmi ses abonnés (dont "7000 françaises") et revendiquerait 2,7 millions de membres dans le monde ; des chiffres impossibles à vérifier mais destinés à donner l’illusion d’un site de rencontres comme un autre, apprécié et bien achalandé : un plan de com’ relayé avec complicité par les médias.

Le but du site est présenté sous un dehors bon chic bon genre, et pour tout dire parfaitement hypocrite. Il s’agit de recruter des hommes ("sugar daddies", "papas gâteaux") cherchant de jeunes femmes ("sugar babies") pour les accompagner au restaurant ou à des soirées et qui, en contrepartie, leur offriraient de l’argent ou des cadeaux. Restaurant, cadeaux, on voit que l’euphémisme est de rigueur.

La réalité ? Le même éternel schéma éculé, les mêmes normes archaïques : des hommes, souvent d’âge mûr, utilisent leur statut de dominants pour obtenir un droit de cuissage théoriquement aboli mais réactualisable moyennant finances. Des femmes, jeunes ou très jeunes, qui sont renvoyées à leur statut d’objets sexuels, loin de toute prétention intellectuelle à parler à égalité. Chacun à sa place : à eux le pouvoir sexuel et financier, à elles la soumission et les agressions qui en découlent. L’ensemble est habillé, si l’on peut dire, de la présentation qui sied à l’époque. La cocotte entretenue d’antan se voit remplacée par la demoiselle sexy, inévitablement « décomplexée ». Un coup de baguette magique, celui du vocabulaire, est censé neutraliser cet avatar de la domination masculine pour en faire un conte pour enfants : « sugar » (sucre) « daddies » (papas) et autres « babies » repeignent ce paysage prostitutionnel en monde de tendresse filiale et de sucreries.

Derrière l’image « ludique », c’est le capitalisme le plus froid qui parvient, sans entrave, à imposer ses lois. On fait confiance à la réussite du créateur du site qui revendique, pour sa prometteuse carrière, "une position de leader sur un créneau en pleine expansion Outre-Atlantique". Ainsi, les mères maquerelles se sont réincarnées en jeunes loups du e-commerce. Et pour les « clients », il est clair que l’argument de "l’étudiante", qui fait partie du plan de marketing, est particulièrement vendeur.

Aux Etats-Unis où la prostitution est interdite, personne n’a trouvé le moyen d’interdire le site ou de faire arrêter son responsable. On peut se demander ce que viendrait à faire la France si la loi destinée à faire reculer le système prostitutionnel, et qui prévoit la pénalisation des « clients », était définitivement votée. On pense plus encore à son volet « prévention » dont l’urgence, une nouvelle fois, est ici parfaitement illustrée.

http://www.prostitutionetsociete.fr/sug ... dies-ou-la
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Louise Michel
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Re: Contre le système prostitutionnel: libertaire vs libéral

Messagede Pïérô » 13 Avr 2014, 15:46

Pourquoi voit-on autant de gens de gauche vouloir faire du "travail du sexe" la nouvelle norme ?

Oui, nous allons contrer la stigmatisation. Mais s’il-vous-plaît, chères féministes, ne perdons pas de vue la domination masculine.

par Katha Pollitt, le 2 avril 2014, The Nation


À gauche, la prostitution a longtemps été vue comme une chose négative : c’était un élément de l’avilissement général de la classe ouvrière et un assujettissement des femmes, sous le capitalisme. Les femmes qui vendaient du sexe étaient des victimes, forcées par les circonstances à un mode de vie pénible et humiliant, et le socialisme allait les en libérer.

Aujourd’hui le commerce du sexe est devenu le « travail du sexe » : un simple emploi de service, avec des bons côtés et des mauvais côtés. Et si vous suggérez que les femmes qui le pratiquent sont quoi que ce soit d’autre que des agents libres, voire des personnes en situation d’« empowerment » si elles gagnent suffisamment d’argent, vous êtes simplement quelqu’un de coincé. Le méchant d’aujourd’hui n’est pas le proxénète ou le prostitueur mais les féministes de la deuxième vague avec leur perspective primitive où l’homme-est-l’ennemi, ainsi que les « sauveteurs » comme Nicholas Kristof, qui présument savoir ce qui est le mieux pour les femmes.

Ce discours est omniprésent dans les nouvelles revues branchées de gauche. Par exemple, sur le site de The New Inquiry, vous pouvez répondre à un quiz satirique intitulé, « Êtes-vous victime de la traite ? » Évidemment, si vous lisez The New Inquiry, il y a peu de chances pour que vous soyez victime de la traite ; si vous êtes une travailleuse du sexe, il y a de bonnes chances pour que vous soyez étudiante diplômée ou journaliste ou peut-être militante, bref une femme très instruite qui dispose d’autres options et leur préfère celle-ci.

Et c’est là que les choses se compliquent. Parce que dans quels autres domaines du travail verrait-on des gauchistes demander à des artisans médaillés de parler au nom des travailleurs non qualifiés ? Autant demander à un chef pâtissier ce que c’est que de dispenser de la purée de pommes de terre dans une cafétéria d’école. Dans le discours du travail du sexe, il semble que la subalterne n’a pas droit à la parole.

Un livre de Melissa Gira Grant, Playing the Whore (Jouer la Pute), publié par Verso et coédité par le magazine Jacobin, est un bon exemple de ce phénomène. Il multiplie les références marxistes – OK, OK, le travail du sexe est un travail, j’ai compris ! – et met énormément l’accent sur les champs universitaires branchés du langage et de la représentation, de l’image des travailleuses du sexe au cinéma et en publicité. « Les travailleuses du sexe ne devraient pas avoir à défendre l’existence du travail du sexe pour avoir le droit d’être à l’abri de tout préjudice, écrit Grant, – qu’il s’agisse d’une arrestation, d’une agression ou du stigmate d’une identité qui vous colle à la peau. Une enseignante au primaire, Melissa Petro, l’a appris à ses dépens quand elle a perdu son emploi après que le New York Post ait mis la main sur un article où elle avait parlé de la période où elle était « escorte ».

Tout cela est bien beau mais la réalité est plus complexe. Grant enfonce joyeusement des portes ouvertes en raillant le féminisme anti-porno des années 80 mais elle ne semble pas remarquer de différence entre ces luttes passées – une cause fut-elle jamais vaincue de façon aussi décisive ? – et les opposantes actuelles à l’exploitation sexuelle commerciale, qui incluent des femmes sorties de la prostitution. Elle qualifie de « féministes carcérales » les partisanes du « Modèle suédois » qui interdit l’achat mais pas la vente de services sexuels – arrêter les acheteurs plutôt que les prostituées. Les femmes qui se battent contre la traite à des fins sexuelles cherchent, affirme-t-elle, à bâtir des empires sans but lucratif, « des emplois pour les filles » et sont indistinguables de sauveteurs paternalistes comme Kristof.

Fait révélateur, Grant ne dit quasiment rien des femmes au cœur de ce débat : celles qui sont asservies et contraintes – les immigrantes illégales, les adolescentes, les fugueuses et les rejetées, dont plusieurs survivantes de trauma sexuel, ainsi que des transgenres et autres exclues de la norme sociale. Je pense aux pauvres comme les femmes d’origine chinoise ou coréenne qui sont charriées chaque matin par bus du Queens vers les salons de massage du comté de Nassau, ou aux toxicomanes réduites au « sexe de survie » dans le Bronx, ou aux adolescentes honduriennes importées par un restaurateur branché du New Jersey, protégé par des amis haut placés – ces jeunes filles et ces femmes ne figurent nulle part dans les pages de Grant. Elle ne se soucie pas plus de femmes comme celles avec qui travaille Liberty Aldrich, du Center for Court Innovation, et qui massivement souhaitent quitter la prostitution et qui ont besoin d’aide pour le faire - pour obtenir un certificat d’études secondaires, un endroit pour vivre, des contacts auprès de gens qui auraient leur intérêt à coeur.

Le cliché selon lequel le « travail du sexe est un travail » suggère que la prostitution est assimilable à n’importe quel autre emploi de service – celui de serveuse étant l’exemple rebattu. Je doute que beaucoup de serveuses seraient d’accord avec cela, et je ne pense pas que quiconque chez Jacobin leur pose la question. Mais pense-t-on réellement que ce n’est que le puritanisme ou la peur d’être arrêtée ou attaquée ou stigmatisée qui maintient la grande majorité des femmes dans des emplois conventionnels ? Peut-être y a-t-il réellement une différence entre une fellation et une tranche de tarte, une différence qui est occultée lorsque tous les genres de travaux de service sont réduits à une seule catégorie, une différence à laquelle les jeunes féministes de gauche d’aujourd’hui ne veulent pas penser. De reconnaître que le travail du sexe est de l’exploitation (...)


la suite ici : http://ressourcesprostitution.wordpress ... a-pollitt/
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Re: Contre le système prostitutionnel: libertaire vs libéral

Messagede Béatrice » 20 Avr 2014, 09:44

STRASS, Morgane Merteuil : inversions et manipulations

Morgane Merteuil, STRASS, réglementaristes de la prostitution et inversion rhétorique au service de la manipulation.

Savez-vous que les personnes qui ne consomment pas assez de biens matériels sont responsables des ratées du système capitaliste ? Egalement, que les victimes du racisme sont responsables de l’inquiétude des occidentaux menacés par une société métissée et plurielle ?
Je vous sens crispéEs là, non mais c’est quoi ce discours néolibéral et raciste ? Inversion sémantique au service de la manipulation idéologique ? Oui, sans aucun doute !
Pourtant, quand Morgane Merteuil, porte-parole du STRASS*1. écrit que les clients et plus généralement les bénéficiaires du système prostitueur rendent service aux femmes en leur permettant de se prostituer quand les féministes abolitionnistes, elles, les mettent en danger, le procédé est rigoureusement le même mais peu y trouvent à redire.
Pourquoi sur le sujet de la prostitution tant de progressistes ont-ils l’esprit critique en berne, quand sur d’autres sujets, ils sont prompts à repérer les tentatives de manipulation à coups d’inversions sémantiques flagrantes ?

Le dernier texte de Morgane Merteuil est un chef-d’œuvre du genre. Elle y opère une double manipulation.
Elle s’appuie sur un texte de Joan W. Scott "Émancipation et égalité : une généalogie critique », donné lors d’une conférence Au-delà du patriarcat du colloque Penser l’émancipation (Nanterre, février 2014).

Le titre de Merteuil « Putes, corps désirants et émancipations », donne le ton, comme si juxtaposer des mots inconciliables suffisait pour convaincre de la pertinence du propos :
- « putes » ce qui signifie : femmes (le plus souvent, mais pas seulement) performant des rapports sexuels sans désir et pour de l’argent, sous la contrainte (le plus souvent, mais pas toujours) ; rien que l’utilisation du mot « pute » est douteux, il permet de détourner l’attention et d’effacer la violence de la réalité de la prostitution,
- « corps désirants » mais qu’est-ce donc qu’un corps désirant ? Un être désirant, oui, je vois, un corps désirant, déjà beaucoup moins, à moins que Morgane Merteuil ne reconnaisse l’état de distanciation / dissociation nécessaire pour se prostituer, l’esprit ici et le corps tout là-bas ?
Dans tous les cas, parler de « corps désirants » dans le cadre de la prostitution, alors que nombre de professionnels de santé et de féministes s’accordent à la qualifier de violence sexuelle intrinsèque et que les associations de défense de prostituéEs prétendent en faire un travail, est pour le moins contradictoire.
- « émancipations », le mot est au pluriel, c’est tout de suite plus signifiant.
C’est aussi un artifice pour associer l’émancipation des femmes musulmanes à celles des femmes prostituées, le STRASS ratisse large et aux côtés de ses amiEs des Indigènes de la République, Morgane Merteuil tente de nous convaincre que « féminisme musulman » et « féminisme pute », même combat ! *2.Voir "Des déchaînézs au genoux du patriarcat".

Le texte est à l’image du titre : une laborieuse tentative d’inversion des responsabilités, chaque argument étant maltraité jusqu’à l’absurde.
Bien entendu, les industries du sexe ne sont plus des industries ultra-capitalistes qui s’en mettent plein les poches sur le dos de femmes exploitées, les proxénètes comme les clients ne sont plus des instruments de la domination masculine et ne sont jamais responsabilisés, en revanche, les féministes abolitionnistes seraient des libérales « des franges répressives » et mettraient en danger les personnes prostituées.
De quelle manière et avec quels moyens, vous ne saurez jamais, ce qui compte c’est de semer le doute, de faire de la désinformation et de propager des mensonges.

Joan W. Scott prétend que « la rhétorique de l’émancipation sexuelle et de l’égalité entre les sexes, en ce qu’elle est soumise à un capital mondialisé qui fait du désir, et de sa capacité à l’assouvir, un préalable à la citoyenneté, contribue à la perpétuation de la domination de « populations minoritaires défavorisées », et notamment des femmes musulmanes ».
La théorie de Joan W. Scott est tout de même particulièrement perverse, elle suggère que l’émancipation des femmes occidentales, leur droit à une sexualité libre et désirante, leur volonté d’égalité, sont responsables de la domination des femmes musulmanes qui elles, n’auraient pas atteint ce niveau de liberté et ne pourraient donc, de ce fait, accéder au statut de citoyenne.
Entendez bien, les femmes musulmanes ne seraient pas opprimées par la domination masculine, l’interprétation masculine de textes religieux, le poids des traditions, non, du tout, elles seraient dominées à cause des féministes, des femmes occidentales libérées et seules dignes d’un statut de citoyenne !
Formidable exemple d’inversion des responsabilités et de manipulation rhétorique !
Les féministes universalistes « orientales » qui luttent dans les pays musulmans apprécieront cette obole au féminisme islamiste et plus encore au système patriarcal !
[Que des intervenants capables de telles manipulations soient invitéEs dans des universités françaises me laisse perplexe.]

Puis, entraînée dans son élan, non contente, comme Joan W. Scott, d’accuser « la communauté des nations » d’avoir choisi « le désir sexuel comme dénominateur commun universel dans la définition de l’humain », et par conséquent, selon Morgane Merteuil, d’être « islamophobe », [vous suivez j’espère ?], la porte-parole du STRASS extrapole et, seconde manipulation, se demande « si le rejet des revendications des travailleuses du sexe peut, lui aussi, correspondre un autre aspect du discours civilisationnel analysé ici par Joan W. Scott ».

Je vous épargne quelques paragraphes plutôt inintelligibles, pour arriver à ceci : « L’accent placé sur une sexualité libérée … fait écho au désir de consommer qui sert de moteur au marché, et permet de détourner l’attention des injustices économiques et sociales qui résultent de la discrimination et des formes structurelles de l’inégalité. On touche bien là à un des fondements de l’idéologie libérale, qui fait finalement reposer sur la volonté individuelle la capacité d’émancipation (sexuelle), sans prendre en compte les rapports de domination et de dépendance qui peuvent entraver celle-ci. Ainsi, dans le débat sur la prostitution, la position abolitionniste consistera essentiellement en une volonté de « responsabilisation » des clients…, sans que ne soient jamais abordées les causes économiques et structurelles qui peuvent pousser des femmes non seulement à exercer cette activité mais de manière plus générale à être dépendantes des hommes. »
Quel plus beau déni de la réalité des luttes féministes !
Un allié pareil, le patriarcat en rêvait, Morgane Merteuil l’incarne, il peut dormir sur ses deux oreilles.
Morgane Merteuil avance que la libéralisation de la prostitution et la soumission à des dictats religieux/coutumiers, sont des enjeux de luttes émancipatrices.
En réalité, les groupuscules d’activistes du STRASS, du collectif « 8marspourtoutes » et leurs quelques alliéEs politiques et universitaires s’emploient à faire diversion pour éviter toute atteinte sérieuse au système patriarcal et c’est à peu prés tout.

Constamment et simultanément les féministes combattent les systèmes d’oppression idéologiques, économiques et sociaux, dénoncent la pression des industries patriarcales et capitalistes du sexe qui ne cessent d’envahir nos sociétés hypersexualisées, combattent les inégalités femmes-hommes, etc.
Nous abordons la question de la prostitution, en tant que projet de société, à fortiori collectif, par opposition aux réglementaristes qui ne parlent jamais que de choix individuels de quelques « libérales/libéraux » qui exerceraient « librement » sans se préoccuper des millions de femmes déplacées, torturées, violées et prisonnières de proxénètes, de la traite.
Et tout ça, nous le ferions sans jamais interroger et combattre les raisons économiques et sociales qui poussent les femmes à se prostituer ?
Allons donc, nous ne cessons d’expliquer que désespoir, besoin d’argent et passage à l’acte favorisé par des violences sexuelles antérieures, sont les raisons qui poussent le plus souvent les femmes à se prostituer, quand elles n’y sont pas contraintes par un proxénète ou un réseau mafieux.
Une seule femme opprimée, une seule femme violée, une seule femme prostituée et ce sont toutes les femmes qui risquent elles aussi, de subir ce même destin.

Le féminisme n’a pas de sens s’il n’aboutit pas à libérer les femmes, toutes les femmes, de l’emprise de la domination masculine, de leur exploitation et de leurs violences.
La domination masculine vise à contrôler les femmes, leur sexualité, la reproduction ; les religions, les traditions, les institutions sont les instruments de ce pouvoir masculin.
La prostitution n’est jamais que l’un des plus archaïques moyens de s’approprier les femmes – et souvent les enfants, parfois des hommes – réduitEs à des commodité sexuelle au service des hommes. Le voile et plus encore la burqa, le niqab, n’ont d’autre fonction que d’effacer les femmes et de les désigner propriété exclusive du père ou du mari tout puissant.
Morgane Merteuil aura beau triturer la réalité dans tous les sens, nous inventer des concepts « d’épanouissement sexuel islamophobes », – quelle personne sensée peut accréditer une seule seconde l’idée que nos politiques publiques associent épanouissement sexuel et droits sociaux ? -, elle n’est jamais du côté des femmes, de leur libération, de l’abolition du patriarcat.
C’est d’ailleurs pour cette unique raison et manifestement pas pour la pertinence de ses analyses, qu’elle cumule tant de soutiens et d’intérêts médiatiques et politiques.

Une manipulation rhétorique aussi grossière que celle qui consiste à inverser les responsabilités et absoudre au passage les bénéficiaires des systèmes patriarcal et prostitueur, est lamentable mais ce qui l’est plus encore, c’est la complaisance dont elle bénéficie pour continuer sans vergogne, à la tête du STRASS et des réglementaristes de la prostitution, à salir le mouvement féministe et tenter de le diviser.

Christine Le Doaré

http://christineld75.wordpress.com/2014 ... pulations/
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Re: Contre le système prostitutionnel: libertaire vs libéral

Messagede Béatrice » 21 Avr 2014, 18:55

Christine Le Doaré était l'invitée de l'émission "Femmes libres" sur Radio Libertaire le 16 avril dernier pour y parler du 8 mars ( journée mondiale de lutte pour
les droits des femmes ) et notamment du STRASS avec Elisabeth CLAUDE co-animatrice de l’émission Femmes libres, l’une des 2 émissions féministes de la bande FM,
chaque mercredi de 18h30 à 20h30.

http://media.radio-libertaire.org/backu ... i_1830.mp3

( à partir de la minute 6 (00.06.00), avant des chansons, des sons…)
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Re: Contre le système prostitutionnel: libertaire vs libéral

Messagede Lila » 18 Mai 2014, 17:35

30 arguments pour l’abolition de la prostitution
Dossier de Prostitution et Société numéro 181
8 pages pdf : http://www.prostitutionetsociete.fr/IMG ... 2-2013.pdf
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Re: Contre le système prostitutionnel: libertaire vs libéral

Messagede Béatrice » 26 Mai 2014, 20:21

Soulignant l'aspect légal de la "prostitution choisie", la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH) se prononce
contre la pénalisation des clients :

http://www.metronews.fr/info/prostituti ... HoAsYxhi8/
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Re: Contre le système prostitutionnel: libertaire vs libéral

Messagede Pïérô » 27 Mai 2014, 00:28

Avec une coquille dans le titre, qui veut tout dire...
"Prostitution : la pénalisation des clients désapprouvée par la Commission des droits de l'homme"
C'est toujours un problème, avec grand "H" ou petit "h" il n'y en a que pour certains dans le domaine des "droits", et cette commission fait encore le jeu des droits de l'homme dans un sens aussi patriarcal que réactionnaire. :mrgreen:
Image------------ Demain Le Grand Soir --------- --------- C’est dans la rue qu'çà s'passe --------
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Re: Contre le système prostitutionnel: libertaire vs libéral

Messagede Lila » 29 Mai 2014, 20:19

10 mythes sur la prostitution, la traite et le Modèle nordique.

Quand la Coalition Contre la Traite des Femmes – Australie (CATWA) a annoncé la publication de notre nouveau rapport sur le Modèle nordique, les défenseurs de l’industrie du sexe ont commencé à cibler notre page Facebook.

Quand j’ai renchéri sur le succès de ce modèle dans une tribune pour The Conversation, une poignée d’hommes, et une éminente féministe australienne, ont passé des heures à diffuser des inexactitudes à propos des politiques publiques de l’approche nordique sur la prostitution, dénigrant toute personne assez stupide pour croire que l’on puisse contrer une industrie florissante faisant commerce du corps des femmes.

Ces inexactitudes et mensonges sont familiers à quiconque a écrit ou dit quoique ce soit qui critique publiquement l’industrie du sexe. Les mêmes prétentions, généralement sans référence à des éléments pertinents, sont répétées tellement fréquemment dans certains milieux qu’elles en sont pratiquement devenues des mantras. Si vous le dites assez souvent, ça devient vrai, non ?

Avec le souci d’offrir une réponse de plus de 140 caractères à ces critiques ô combien prévisibles, voici une liste de réponses aux mythes les plus communs qui m’ont été balancés par les pro-prosto :

1) Je suis travailleur-euse du sexe, je choisis le sex work et j’adore ça.

C’est une des ritournelles les plus populaires et elle est considérée par bon nombre des gens qui l’utilisent comme une sorte d’« échec et mat » argumentaire, comme si tout individu déclarant aimer le sex work faisait magiquement disparaître tous les autres constats de violence, de syndrome de stress post-traumatique et de traite omniprésents dans la prostitution.

Maud Olivier, la députée socialiste qui a récemment déposé en France le projet de loi pénalisant l’achat d’actes sexuels, a balayé du revers de la main ce qu’elle a appelé « l’hypocrisie » de ces critiques : « Donc il suffit qu’une seule prostituée dise qu’elle est libre pour que l’esclavage des autres soit respectable et acceptable? » a-t-elle demandé à ses collègues parlementaires.

Mais le refrain « J’aime le sex work » continue à être mis de l’avant comme un argument massue à l’encontre de la généralisation prêtée aux féministes radicales, et à d’autres intervenantes, comme quoi les systèmes prostitutionnels sont universellement nocifs pour les femmes.

Cet argument reflète plusieurs quiproquos au sujet de l’analyse radicale, du concept d’oppression structurelle et de débats éculés au sujet de la conscience aliénée. Ce n’est pas parce que vous aimez quelque chose que ce n’est pas nocif (de même qu’aimer quelque chose ne le rend pas automatiquement féministe.) Les féministes radicales critiquent aussi les normes de beauté comme étant nocives, et dire que vous choisissez de porter des talons hauts ne rend pas cette critique fausse. Ni que ces féministes vous détestent si vous en portez (celle-là, je l’ai entendu chez beaucoup en premier cycle) ou si vous êtes en situation de prostitution.

De même, quand une personne ayant une démarche radicale souligne que le libre choix est un conte de fée, que toutes nos actions s’inscrivent dans certaines conditions matérielles, cela ne veut pas dire que nous sommes tous et toutes infantilisées, telles de petits drones incapables de prendre des décisions par nous-mêmes. Cela veut juste dire que nous n’évoluons pas dans un vide culturel à prendre des décisions complètement étrangères aux structures existantes, telles que les inégalités économiques, le racisme et le sexisme.

2) Seules les travailleuses et travailleurs du sexe sont qualifiés pour parler de la prostitution.

Ce mythe est souvent utilisé en tandem avec le premier. Voici d’ailleurs le meilleur/pire exemple que l’on m’en ait balancé à la figure

Bien sûr, ce genre d’échanges peut faire partie d’un problème plus vaste, le recours foireux à une expérience personnelle pour couper court aux recherches et disqualifier de larges orientations sociales (par exemple, « le sexisme n’existe pas car je ne l’ai jamais vu ! »); mais il y a davantage dans ce genre d’interactions au sujet de la prostitution. Répéter sans cesse que seul.e.s les travailleurs et travailleuses du sexe en activité ont qualité pour commenter l’industrie du sexe, c’est d’une part tenter de museler les voix des survivantes de ce commerce et, d’autre part, c’est prétendre que les conséquences de la prostitution ne concernent que celles et ceux et qui s’y trouvent.

Il est vrai que l’opposition féministe à la prostitution s’est beaucoup concentrée sur les atteintes subies par les femmes dans la prostitution – et à juste titre : ces atteintes sont graves et de nature endémique. Mais, comme le montrent les adeptes du modèle nordique, l’existence de systèmes prostitutionnels est aussi un obstacle à l’égalité de genre pour tout le monde.

Tant que l’on peut vendre et acheter comme objets sexuels des femmes (et oui, il y a des hommes prostitués, mais s’il vous plaît soyons honnêtes et admettons que parler de « personnes » ne sert ici qu’à occulter le fait que la très grande majorité de ces personnes sont des femmes), la prostitution devient un enjeu pour toutes les femmes. Les Suédoises et Suédois ont reconnu cela avec la mise en place de la première disposition à interdire l’achat de sexe en 1999, et la ministre française des Droits des femmes est justement en train de réexpliquer cela en ce moment.

3) Tous les travailleurs et travailleuses du sexe sont contre le modèle nordique.

Tout d’abord, il est important de souligner que pour chaque lobby de l’industrie du sexe comme Scarlet Alliance qui s’oppose au modèle nordique, il existe au moins une association de survivantes qui le défend.

Cette assertion selon laquelle toute femme ayant la moindre expérience de l’industrie du sexe déteste le modèle nordique est une tactique argumentative utilisée par un certain nombre de lobbies de l’industrie du sexe de par le monde et elle s’appuie lourdement sur le mythe numéro deux. Cette prétention s’accompagne presque toujours d’un lien vers le blog de la lobbyiste Petra Ostergren qui prouve (nous dit-on) que toutes les femmes dans la prostitution détestent le modèle nordique et qu’elles préféreraient une légalisation généralisée.

Il est clair qu’il existe un nombre d’adversaires très bruyant.e.s au modèle nordique au sein de l’industrie du sexe et qu’ils et elles disposent de tribunes très bien placées. Mais on peut difficilement affirmer que ces organisations représentent toutes les femmes en prostitution dans le monde, ou qu’un billet occasionnel sur un blog (avare de références ou d’autres preuves) démontre que le modèle nordique est un échec.

4) Le modèle nordique nie l’agentivité des travailleurs du sexe.

Un des points que les critiques semblent avoir bien du mal à comprendre concernant le modèle nordique, c’est qu’il consiste en fait à pénaliser les acheteurs, et non à restreindre les personnes en prostitution. C’est pour cela qu’il décriminalise les personnes prostituées. Ce modèle n’élude aucunement la possibilité du « choix » de la prostitution, il pose plutôt le fait que l’achat de femmes dans les systèmes prostitutionnels est une chose que l’État devrait décourager activement.

L’équation est vraiment très simple : le modèle nordique reconnaît qu’une baisse de demande pour la prostitution et de demande pour la traite des personnes entraîne logiquement une baisse de la prostitution et de la traite, d’où une baisse du nombre de femmes exposées à ces genres particuliers de violence et, par là, de meilleures chances de réaliser l’égalité des sexes.

Si vous pensez que l’État doit encourager l’accroissement de l’industrie de la prostitution et traiter celle-ci comme une forme légitime d’emploi pour les femmes, alors vous disconviendrez de cette stratégie, mais ça ne signifie pas que le modèle nordique nie l’agentivité de qui que ce soit.

5) Le modèle nordique amalgame prostitution et traite.

La plupart des partisans du modèle nordique ont la même conception de la traite que celle promulguée dans le Protocole des Nations Unies visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, [http://www.ohchr.org/Documents/ProfessionalInterest/ProtocolTraffickingInPersons_fr.pdf] (à l’article 3a). C’est une conception de la traite un peu plus nuancée que la version populaire dans la plupart des grands médias : « des gens avec un pistolet sur la tempe que l’on déplace en travers de frontières ». Et c’est peut-être là que naît la confusion.

Cependant, même en utilisant la version plus réaliste de l’ONU des mécanismes de coercition et de traite, le modèle nordique ne prétend pas que toute femme prostituée subit nécessairement la traite.

Par contre, ce que le modèle nordique reconnaît, c’est qu’il existe un lien entre le marché de la prostitution et la traite aux fins d’exploitation sexuelle, à savoir que la demande d’actes sexuels est le facteur qui alimente cette traite. Si vous voulez moins de traite, eh bien il faut réduire le marché de la prostitution.

Cette logique s’appuie notamment sur une récente étude menée auprès de 150 pays par des économistes britanniques et allemands, montrant que « la principale conséquence d’une légalisation de la prostitution légalisée est qu’elle mène à une expansion du marché prostitutionnel, accroissant le traite des personnes ».

6) Le modèle nordique ne fonctionne pas et repousse la prostitution vers « la clandestinité ».

L’affirmation voulant que le modèle nordique n’a pas réduit la demande de prostitution est habituellement lancée et répétée sans preuve, mais on prétend même parfois que l’évaluation menée par le gouvernement suédois sur sa législation aurait établi l’échec du modèle. Comme le juriste Max Waltman l’a démontré, il n’en est rien. L’étude commandée par le gouvernement suédois pour son évaluation officielle indique que la prostitution de rue a diminué de moitié.

« Ha ! », disent les critiques, « cette étude a utilisé une méthodologie boiteuse, et la prostitution est juste entrée dans la clandestinité. » C’est à voir, mais cet argument ne prend pas en compte d’autres sources, dont la recherche indiquant que le nombre de personnes qui achètent du sexe en Suède a dégringolé et le rapport de policiers qui ont intercepté des communications entre trafiquants où ceux-ci déclarent que la Suède est devenue un « marché pourri ».

Il est également utile d’examiner ce que la notion de « clandestinité » est censée signifier dans ce contexte, puisque dans les systèmes où la prostitution est légale et dépénalisée, comme dans certains États australiens, on entend par « clandestinité » la prostitution de rue. Donc, si la prostitution a quitté la rue, où est-elle passée ? Sur Internet et à l’intérieur, répondent les critiques, ce qui est assez curieux vu que les défenseurs de la légalisation vantent fréquemment les avantages de la prostitution intérieure.

7) Le modèle nordique empêche des femmes de gagner leur vie.

Ce mythe est le plus intrigant de tous, car il sert en fait d’aveu que le modèle nordique fonctionne, en contradiction directe du mythe numéro six : le modèle ne peut « priver les femmes d’un gagne-pain » que s’il réduit, concrètement, la demande de prostitution. Par ailleurs, ce mythe occulte le fait que les programmes de réinsertion sont un élément essentiel du modèle nordique, offrant accès à une grande variété de services, dont ceux de reclassement et de soutien à l’emploi.

Des slogans et hashtags comme #nothingaboutuswithoutus (utilisés par plusieurs groupes, et pas seulement les organisations de l’industrie du sexe) apparaissent régulièrement en regard de cette affirmation, comme si la seule option satisfaisante disponible était que tout le monde accepte le marché prospère de la prostitution parce que certaines personnes veulent qu’il en soit ainsi.

Et on ne parle pas de n’importe quelles personnes mais bien des « travailleurs » – si vous gobez le slogan « le sex work est un travail ». En mettant de côté les problèmes liés à l’idée que la prostitution soit un métier comme un autre, si nous acceptons cette prémisse, alors le raisonnement est illogique, car il n’existe pas une industrie dont les travailleurs déterminent si celle-ci doit continuer ou non.

Voyez par exemple les industries du charbon et de la foresterie en Australie. Ce sont des secteurs dont les gouvernements ont déterminé la nocivité pour différentes raisons et qui, – tout en demeurant potentiellement lucratifs – n’ont plus de caution sociale pour continuer à fonctionner librement. Les travailleurs de ces industries sont souvent outrés de voir leurs emplois menacés, d’où la revendication par leurs syndicats de « mesures transitoires équitables » fournissant reclassement et facilité d’accès aux services sociaux et à de nouveaux emplois pour les travailleurs affectés (ça vous rappelle quelque chose ? Le modèle nordique, bien sûr). Mais ces syndicats ont, pour la plupart, renoncé à prétendre que les industries nocives en question devraient perdurer simplement pour éviter à leur main-d’œuvre la disruption d’une période de chômage.

Si le sex work est un travail, et la prostitution une industrie comme les autres, alors, comme les autres industries, elle doit se prêter à une discussion publique étendue et à des changements éventuels de politique, y compris la possibilité que des gouvernements n’en veuillent plus.

8) Le modèle nordique a rendu la prostitution dangereuse.

Disons d’abord les choses clairement : la prostitution est dangereuse. Suggérer que le modèle nordique est ce qui la rend dangereuse est malhonnête. De telles assertions passent sous silence les études prouvant que les formes classiques de légalisation et de décriminalisation ne font rien concrètement pour protéger les femmes en prostitution de risques extrêmes de violences physiques et sexuelles, ainsi que de traumatismes psychologiques.

Les systèmes de légalisation nourrissent une demande accrue et créent parallèlement, en proximité, une industrie illégale en pleine expansion. Il est donc faux de prétendre que là où la prostitution est légalisée, toutes les femmes prostituées se retrouvent en fait dans des systèmes légaux. En outre, les niveaux de traumatisme observés s’avèrent identiques entre les divers systèmes de prostitution légale, dépénalisée et criminalisée.

En fait, malheureusement, même le modèle nordique n’est pas capable de protéger entièrement de ces impacts les femmes qui sont encore dans la prostitution – tant qu’il y a de la prostitution, il y aura des dégâts – mais l’idée que le modèle nordique aggrave ces conditions est tout à fait fausse.

Cette assertion d’une « violence accrue » est liée à une étude largement citée du lobby ProSenteret, dont l’auteure conclut que les femmes en prostitution ont signalé, après l’introduction du modèle nordique en Norvège, une augmentation de certains actes violents de la part des prostitueurs, dont le fait de tirer les cheveux et de mordre. Ce que ces comptes rendus passent habituellement sous silence, cependant, c’est que la même étude a également constaté dans les signalements des femmes, une baisse marquée d’autres formes de violence, dont les coups de poing et le viol.

Quant à la prétention voulant que les femmes en prostitution ne soient pas en mesure d’accéder à des services sociaux adéquats, ceci pourrait bien être un enjeu sur le terrain. Si c’est le cas, le problème doit absolument être abordé. Mais il s’agit là d’une question de mise en œuvre plutôt qu’une faille du modèle lui-même.

La première version du modèle nordique, introduite en Suède, faisait partie d’une loi omnibus sur la sécurité des femmes, la réforme Kvinnofrid, qui a consacré plus d’argent et de soutien du gouvernement à une variété de services de lutte contre la violence anti-femmes, et notamment en prostitution. Nous avons vu cela aussi en France, avec le dépôt d’une loi dépénalisant les femmes en prostitution en parallèle à des mesures visant à contrer d’autres formes de violence anti-femmes.

9) Le modèle nordique est en fait une croisade morale déguisée.

Malgré le fait que le modèle nordique ait toujours été introduit par des gouvernements progressistes et socialistes, on continue à affirmer qu’il s’agit d’une sorte de manœuvre religieuse ou conservatrice pour restreindre la libre expression sexuelle, plutôt qu’un moyen efficace de lutte contre la traite et la violence anti-femmes.

Mais tout cela dépend peut-être de comment vous définissez une « croisade morale ». Si vous voyez le mouvement pour l’égalité des femmes comme une « croisade morale », alors je suppose que oui, c’en est une. Si vous tenez à rejeter tous les éléments probants en faveur du modèle nordique et qu’au lieu de cela vous voulez en débattre d’un point de vue « moral », alors faites-le. Mais celles et ceux qui pensent que la violence contre les femmes est une mauvaise chose auront certainement le dessus dans cette discussion.

10) Les universitaires qui étudient la prostitution se font de l’argent sur le dos des femmes en prostitution.

Il s’agit d’un ajout relativement récent à la liste des techniques de musellement utilisées contre les féministes qui contestent l’industrie du sexe. La première fois que je suis tombée sur une telle accusation était dans la section commentaires de cet article, puis dans des e-mails personnels qui y ont fait suite pour m’expliquer charitablement que je ressemblais aux hommes qui violent des femmes en prostitution parce que je me servais des expériences des travailleuses du sexe sans les payer.

Là, permettez-moi d’être très claire : les universitaires font de la recherche. Pour beaucoup, comme moi, il s’agit souvent de rassembler les recherches existantes et, en les utilisant comme éléments de preuve, de créer un raisonnement qui peut être défendu. C’est notre boulot. Et c’est notre boulot, quel que soit le sujet ou le domaine auquel nous travaillons.

S’engager dans des débats publics au sujet du modèle nordique et convoquer des recherches pertinentes n’est en aucune façon une tentative de parler à la place des femmes en prostitution. Il s’agit d’un effort pour étendre les résultats de cette recherche à un plus vaste auditoire. Si ce travail est perçu comme menaçant par l’industrie du sexe, cela ne suggère-t-il pas que le modèle nordique est efficace, justement?

Meagan Tyler est maître de conférences en sociologie à l’Université de Victoria, en Australie. Ses recherches portent principalement sur la construction sociale du genre et de la sexualité. Son travail dans ce domaine a été publié dans la revue Women’s Studies International Forum et Women and Therapy, ainsi que dans plusieurs recueils, dont Pornography Everyday (Boyle dir., 2010) et Prostitution, Harm and Gender Inequality (Coy, dir., 2012). Le premier livre de Meagan, Selling Sex Short: The pornographic and sexological construction of women’s sexuality in the West, a été publié en juillet 2011.

Source : http://feministcurrent.com/8347/10-myth ... dic-model/

Traduction : TRADFEM

http://ressourcesprostitution.wordpress ... -nordique/
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Re: Contre le système prostitutionnel: libertaire vs libéral

Messagede Béatrice » 03 Juin 2014, 19:16

Les revenus de la prostitution bientôt intégrés dans le calcul de la richesse nationale ?

Pour doper la croissance en panne dans les pays européens, il suffirait de recourir à l'argent de la prostitution et de la drogue. C'est ce que pourrait laisser à penser le système européen des comptes nationaux (SEC 2010) publié par Eurostat, la direction de la Commission européenne chargée de l'information statistique à l'échelle communautaire.

Le nouveau standard européen entrera en vigueur à partir de septembre 2014
. Cet épais et indigeste document détaille les éléments à prendre en compte dans les statistiques de comptabilité nationale en vue de les harmoniser et de les rendre comparables.


La suite de l'article :
http://www.lemonde.fr/economie/article/ ... _3234.html
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Re: Contre le système prostitutionnel: libertaire vs libéral

Messagede Pïérô » 09 Juin 2014, 15:12

Sur la Commission Nationale Consultative des Droits Humains

19 femmes pour 40 hommes de quoi s’agit-il ?

Un indice ? N’oubliez pas, nous sommes en France, pays des Droits de l’Homme et non des Droits Humains. Trouvé ? Oui, c’est bien la CNCDH (Commission Nationale Consultative des Droits de l’Homme).

Elle a rendu le vendredi 23 mai dernier, un avis sur la loi d’abolition de la prostitution. Cet avis est plutôt difficile à traduire en termes de politique à appliquer en matière de prostitution.

Souvenons-nous, l’Assemblée Nationale, cohérente avec la position abolitionniste de la France, vient de voter en faveur de la pénalisation des clients prostituteurs ; de leur côté, inquiètes des résultats déplorables dans les pays qui ont légalisé la prostitution, les instances Européennes ont pris de fermes recommandations abolitionnistes (Résolution du Parlement européen du 26 février 2014 sur l’exploitation sexuelle et la prostitution et leurs conséquences sur l’égalité entre les hommes et les femmes, qui reconnaît que la prostitution est contraire aux principes régissant les droits de l’homme et contraire aux principes de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne *1 ; Résolution de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe du 8 avril 2014 relative à la prostitution, à la traite et à l’esclavage moderne en Europe *2).

Le contexte Français et européen rappelé, on ne peut que s’étonner de l’avis de la CNCDH qui réussit tout de même l’exploit de se référer à plusieurs textes européens, sans mentionner ces récentes et notables résolutions abolitionnistes.

Plus globalement, cette décision donne l’impression que la Commission a peiné à conclure, préférant en fin de compte, rester dans un entre deux inefficient.
D’un côté, elle reconnaît l’intérêt d’une politique abolitionniste, mais de l’autre, elle craint, sans pour autant apporter d’arguments convaincants, que la pénalisation des clients n’entraîne des effets négatifs.
Plus étrange encore, elle déconseille la pénalisation des clients, mais le regrette en remarquant que c’est dommage de se priver de l’effet pédagogique d’une telle mesure.
Comment dire ?
Cela aurait été trop cohérent d’aller jusqu’au bout de l’analyse et reconnaître que toute demande des clients de la prostitution nourrit la traite, puis d’y mettre un terme ?
Les clients consomment des « produits », de plus en plus jeunes, de plus en plus vulnérables, sans se préoccuper de leur vie, sans savoir si les prostituées ne sont pas captives, menacées, brutalisées.
Eduquer à une sexualité libre et désirante, à l’égalité, au respect de l’autre et surtout à refuser l’exploitation sexuelle d’un être humain par un autre, ne sont-ce pas des orientations et préconisations que l’on attendrait de la part d’une commission sensée défendre les Droits Humains ?

Dans son rapport, la CNCDH se dit préoccupée par le risque de clandestinité et d’éloignement de la prostitution dans des lieux reculés. Mais à quoi fait-telle exactement allusion ?
Ignore-t-elle que la prostitution a déjà lieu sur des aires d’autoroutes désertes, sur des routes isolées, des abords de bois, de parcs et dans divers lieux que l’on peut qualifier de « reculés » ?
Ne sait-elle pas que les prostituées assassinées le sont autant dans un appartement, une ruelle, un parc ou un bois ; que le risque permanent provient soit des proxénètes qu’ils appartiennent ou non à des réseaux, soit des clients eux-mêmes ?
La situation d’isolement avec le client, dans n’importe quel lieu que ce soit, en plein centre-ville, dans une chambre d’hôtel, une voiture, un parc, un quai, une villa ou un hôtel de luxe rend toute personne prostituée vulnérable.
L’activité, l’acte prostitutionnel, voilà le danger.
La CNCDH n’a-t-elle pas pris le temps d’interviewer les procureurs des pays abolitionnistes ?
Dommage, parce qu’ils expliquent que la prostitution résiduelle continue de se produire dans les centres villes et que cet argument ressassé en boucle par les défenseurs du lobby prostitueur ne repose sur aucune réalité.
En revanche, dans les pays abolitionnistes, les programmes d’accompagnement de sortie de la prostitution autant que les mesures de prévention, tout comme la pénalisation des clients sont bien parvenus à drastiquement réduire cette forme archaïque et sexiste d’exploitation et à protéger efficacement les personnes prostituées qui choisissent malgré tout de se prostituer car elles ne sont plus pénalisées.

Dans quelles contradictions s’est enfermée la CNCDH pour à la fois reconnaître qu’il faut continuer de pénaliser la prostitution de personnes « vulnérables *3 », tout en affirmant que pénaliser les clients, risquerait de pousser les personnes prostituées dans « des lieux encore plus reculés » ?
Il faut savoir ! Les personnes prostituées vulnérables ne risqueraient rien à être poussées dans des « lieux reculés » ?
Si les clients de prostituées vulnérables peuvent et doivent être pénalisés, sans que la Commission ne s’inquiète du risque de clandestinité les concernant, alors à fortiori, ce risque n’est pas plus réel pour des prostituées moins vulnérables.
En réalité, les risques encourus par les personnes prostituées, tout le monde les connait, ils consistent à subir toutes sortes de violences : la violence sexuelle intrinsèque à la prostitution, les violences relatives à leur état de santé, qu’il s’agisse de contracter une IST autant que de développer des addictions à toutes sortes de substances pour tenir et une mauvaise prise en charge générale, enfin les violences physiques et psychologiques, qu’elles émanent des clients ou des proxénètes.

Je vois au moins deux raisons à cet avis particulièrement confus et qui une fois de plus s’intéresse au faible pourcentage de prostituées réellement « libres » au dépend de toutes celles qui subissent, captives ou non de réseaux mafieux.
La première raison est que le lobby prostitueur n’a pas ménagé ses efforts et mobilisé des soutiens de poids.
Mise à part son amitié avec Dominique Strauss Kahn, que connaît Monsieur Badinter des réalités de la prostitution ? M. Lilian Mathieu, chantre de la légalisation de la prostitution, est-il le seul sociologue en France ?
Les associations gays de lutte contre le sida ne voient la question de la prostitution que par le prisme hygiéniste de la seule lutte contre le sida, sans jamais considérer les personnes dans leur globalité ni s’intéresser aux droits des femmes ou à l’égalité femmes-hommes.
Le STRASS n’est pas un syndicat représentatif mais un groupuscule qui verrait d’un bon œil la légalisation du proxénétisme à l’Allemande se développer chez nous ; je suis curieuse de savoir si le nombre de femmes prostituées membres du STRASS fait un ou deux chiffres, la CNCDH le leur a-t-elle demandé ?
Il ne semble pas que les « survivantes » de la prostitution qui pourtant, savent de quoi elles parlent et peuvent s’exprimer sans subir de pression depuis qu’elles ont quitté le milieu prostitutionnel, aient été auditionnées.
La seconde raison est que cette décision n’a pas été adoptée à l’unanimité, loin s’en faut, mais plutôt de très peu : 4 abstentions, 16 voix contre, 20 voix pour.
Heureusement cet avis n’est que consultatif et passera vite aux oubliettes de l’Histoire.

A l’évidence, cet avis rendu par une écrasante majorité d’hommes, à contre-courant de toutes les mises en garde contre le dangereux développement du business criminel de la prostitution, ménage les clients prostitueurs et plus généralement les vieilles prérogatives sexistes d’une prétendue sexualité masculine irrépressible.
La domination masculine et ses industries du sexe sont toujours à la manœuvre quand il s’agit de se raconter des histoires à bon compte sur le dos des femmes.
Tout de même, je suis étonnée que les hommes ne soient pas plus nombreux à se lever contre la prostitution qui les caricature tant et les rabaisse au niveau d’opportunistes prédateurs.

Les violences sexuelles sanctuarisées par les valeurs libérales et patriarcales d’une commission dont le rôle est pourtant de défendre les Droits Humains et donc aussi les droits des femmes.
Le corps des femmes n’est pas une marchandise, un produit, ni même un service à disposition des hommes, alors vivement une société paritaire et féministe, car ce que nous impose cette société machiste et libérale, nous ne le supporterons plus longtemps.

Dissolution de cette Commission des Droits de l’homme et place à une commission des Droits Humains paritaire, humaniste et féministe !

****************************************************************************

*1 Résolution du Parlement européen du 26 février 2014 sur l’exploitation sexuelle et la prostitution et leurs conséquences sur l’égalité entre les hommes et les femmes, qui reconnaît que la prostitution est contraire aux principes régissant les droits de l’homme et contraire aux principes de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne : http://www.europarl.europa.eu/news/fr/n ... tu%C3%A9es

*2 Résolution de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe du 8 avril 2014 relative à la prostitution, à la traite et à l’esclavage moderne en Europe http://assembly.coe.int/nw/xml/News/New ... ng=1&cat=8

*3 prostituées vulnérables : femmes enceintes, etc.

http://christineld75.wordpress.com/2014 ... -sagit-il/
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Re: Contre le système prostitutionnel: libertaire vs libéral

Messagede Tobold Sonnecor » 12 Juin 2014, 14:11

Christine Le Doaré...

Serieusement ?

Y'a encore des gens dans le milieu militant qui la prennent au sérieux, qui la prennent comme référence ?

C'est quand même quelqu'un qui nous explique que les trans ne peuvent pas être féministes, vu que les MtF performant le genre féminin sont complices du systeme patriarcal et sexiste; et que les FtM sont des traitresses qui choisissent de rejoindre le camp des oppresseurs.

Quelqu'un qui partage sur son facebook et son twitter les élucubrations des transphobes canadienNEs qui nous disent que les trans sont juste des hommes qui veulent coucher avec des lesbiennes...

Je sais juste pas qui serait prêt à subir ce processus qu'est la transition, qui serait prêt à risquer de subir des insultes, des agressions, des viols correctifs, des meurtres, la marginalisation, si juste l'optique c'est "gniiii je vais coucher avec des lesbiennes"...

Au bout d'un moment il faut être un poil sérieux...

Sans oublier son classique "les filles voilées dehors"...

Franchement, le strass c'est vraiment pas ma tasse de thé, mais pitié pas CLD...

De toute façon tous les débats ces derniers mois sur la prostitution ont été n'importe quoi... Entre les videos dignes de La manif pour tous ou farida belghoul "attention si on vote pas cette loi, on va proposer comme orientation scolaire la prostitution" d'un coté, les frasques de Thierry Schaffauser de l'autre...

Enfin bref, arrêtez avec CLD, c'est comme citer Caroline Fourest...
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Re: Contre le système prostitutionnel: libertaire vs libéral

Messagede Pïérô » 12 Juin 2014, 15:34

Je ne considère pas cete personne comme référence, et je ne lis pas toute ses productions, là ça me paraissait pertinent.
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Re: Contre le système prostitutionnel: libertaire vs libéral

Messagede Béatrice » 12 Juin 2014, 17:21

Tobold Sonnecor a écrit:Christine Le Doaré...

Serieusement ?

Y'a encore des gens dans le milieu militant qui la prennent au sérieux, qui la prennent comme référence ?

Personnellement oui, en rapport direct avec le sujet de ce topic auquel je te renvoie et où j'avais mis moi aussi "en référence" Christine Le Doaré qui était l'invitée de l'émission "Femmes libres" sur Radio Libertaire le 16 avril dernier.
viewtopic.php?f=75&p=155448#p146665

Tobold Sonnecor a écrit:Franchement, le strass c'est vraiment pas ma tasse de thé, mais pitié pas CLD...

Përsonnellement, le STRASS ce n'est pas ma tasse de thé non plus, loin de là :mrgreen: mais mettre Christine Le Doaré au même niveau que le STRASS pour toute argumentation est quelque peu "fallacieux" !

Tobold Sonnecor a écrit:De toute façon tous les débats ces derniers mois sur la prostitution ont été n'importe quoi... Entre les videos dignes de La manif pour tous ou farida belghoul "attention si on vote pas cette loi, on va proposer comme orientation scolaire la prostitution" d'un coté, les frasques de Thierry Schaffauser de l'autre...

Et bien là encore, ton propos est on ne peut plus déroutant, pour ne pas dire plus en faisant un curieux amalgame "du tout et son contraire"...
« Simple, forte, aimant l'art et l'idéal, brave et libre aussi, la femme de demain ne voudra ni dominer, ni être dominée. »
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