RickRoll a écrit:Je pense que nous devons déconstuire la masculinité et la féminité.
Quel est ton avis là dessus ?
Je suis tout à fait d'accord, c'est l'individu qu'il faut voir au-delà du sexe, de "l'origine", du langage, bref de l'apparence en général.
Je me permets d'ajouter, pour avoir entendu parfois que l'antisexisme conduisait à une sorte d'austérité sexuelle, à un jésuitisme robotique d'où tout désir devrait être absent, que cette déconstruction des genres permet au contraire de librer la sexualité de ses entraves moisies !
Petit développement là-dessus, parce qu'il y en a marre d'entendre "oui mais une féministe c'est moche" ou "oui mais les femmes au fond elles aiment les machos", ce qui montre bien combien nos désirs (même et surtout ls plus intimes) relèvent eux aussi grandement de la sphère politique.
Aujourd'hui, il y a un front d'émancipation qui est la sexualité et nos rapports "amoureux". Cette lutte, essentiellement initiée par les féministes et les mouvements anti-homophobes, consiste à nous réapproprier, patiemment, nos désirs sexuels ; à les redécouvrir, à s'y redécouvrir ; à s'y ouvrir, à les recréer.
Tout est à refaire. Nos désirs ont été considérablement appauvris, réduits à des rapports conjoints de soumission et de réification de l'autre, par la société patriarcale et marchande.
Nous avons construit et cristalisé nos désirs dans une éducation sociale, autour de fantasmes s'inscrivant dans un cadre sexiste et marchand, où le "partenaire sexuel" n'est plus qu'objet de domination ou de soumission, mais aussi de contractualité libérale. L'autre n'est vu que comme partenaire d'une transaction, à posséder, à louer, à acheter, dans le cadre de prestations vulgaires autour d'une esthétique appauvrie, limitée à des critères esthétiques dérisoires et artificiels, à la "performance" visuelle et mécanique, à la "zone érogène" et autres "points G", à l'asservissement du couple bourgeois...
Toute pseudo-liberté proposée dans ce cadre étriqué, même "débridée" (ah, les clubs échangistes)... conduit fatalement à la solitude, à être blasé, à perdre tout désir.
Abandonner le sexisme c'est donc aussi abandonner cette pauvreté de la réification de l'autre et de rapports de domination et de performance marchande, c'est casser ces schémas de libido avec lesquels la société marchande et patriarcale nous a intoxiqué-e-s.
L'amour reste à réinventer, avec chaque histoire, chaque individu, et dans le cadre plus large et plus politique d'une conscience globale de la nécessité de réinventer la société et ses rapports humains.
Prenons nos pieds à cent pour cent, et
pour cela, osons jeter à la benne l'éducation pornographique.
La zone érogène, c'est le cerveau, et on peut prendre son pied d'un rien si on sait s'en servir ! Une relation vis-à-vis d'autrui, moins cloisonnée, moins fonctionnelle, plus totale, plus sincère et dépouillée des artifices patriarcaux et marchands vaut infiniment mieux que la pornographie dans laquelle patauge la sexualité occidentale moderne.