sur le nucleaire ... et son monde
uand le programme électronucléaire de la France a été rendu public en
1974 avec le rapport d'Ornano
http://www.dissident-media.org/infonucl ... ornano.pdf il y a eu
des mouvements « antinucléaires » mais aucun, à l'exception d'Erdeven
http://www.ainfos.ca/07/mar/ainfos00206.html n'était contre cette
électronucléarisation massive, mais seulement contre la construction d'une
centrale chez eux. Ces mouvements locaux, y compris lorsqu'ils
entraînaient la participation massive d'antinucléaires extérieurs comme à
Plogoff
http://www.dissident-media.org/infonucl ... logoff.pdf n'ont
rien changé au programme nucléariste de l'état. S'il y a eu échec de
l'antinucléaire ce n'est pas parce qu'il n'a pas pu empêcher l'industrie
de se lancer à fond dans le nucléaire, mais parce qu'il n'a pas développé
dans l'opinion publique une réaction de défense contre cette industrie.
Pourquoi ? C'est la question et les réponses à cette question qui me
paraissent importantes en ce moment où rien ne semble possible pour
arrêter ou même ralentir la nucléarisation de la France comme le montrent
la construction de la nouvelle usine d'enrichissement d'uranium par
centrifugation (Georges Besse II
http://www.dissident-media.org/infonucl ... besse.html )
visant à remplacer Eurodif et celle du réacteur EPR
http://www.dissident-media.org/infonucl ... anger.html à Flamanville
http://www.dissident-media.org/infonucl ... lamen.htmlIl me semble important de rappeler que le programme d'Ornano qui
accélérait le processus d'électronucléarisation a pris prétexte de la
crise pétrolière de 1973
http://www.dissident-media.org/infonucl ... rance.html pour
lancer un programme qui avait été minutieusement mijoté depuis bien des
années (voir les exploits de la Commission Péon, commission pour la
Production d'Électricité d'Origine Nucléaire, créée en 1950). Cette
commission devait convaincre les industriels français à investir dans les
travaux nucléaires sans avoir aucun risque financier en cas de désastre
nucléaire nucleaire_sans_assurance.html L'activité de cette commission
Péon [1] dont on trouve maintes traces dans le Journal Officiel n'a
intéressé aucun mouvement antinucléaire.
Dès les années 1970 le problème majeur qui a préoccupé le mouvement était
de savoir s'il devait être totalement indépendant de la politique ou s'il
ne devait être qu'un appui aux quelques individus antinucléaires largement
minoritaires dans les syndicats (CFDT) ou les partis (PS). Mais ce qui est
plus significatif c'est d'examiner l'argumentaire antinucléaire des années
70. Dans chaque numéro de la Gueule Ouverte, une référence pour les
antinucléaires, il y avait une page entière de Reiser sur le solaire, le
vent.
Globalement l'essentiel n'était pas le désastre possible d'un accident
nucléaire qui avait pourtant été bien analysé aux Etats-Unis en février
1957 par des scientifiques de Brookhaven dans le rapport WASH 740
http://www.dissident-media.org/infonucl ... sh740.html et qui donnait
une vue d'ensemble de l'ampleur de la catastrophe assez voisine de
Tchernobyl
http://www.dissident-media.org/infonucl ... herno.html [2].
Jusqu'en 1979 (accident de Three Mile Island aux Etats-Unis
http://www.dissident-media.org/infonucl ... mi_25.html ) parler d'un
désastre nucléaire dans une réunion antinucléaire des Amis de la Terre, du
PSU, de la CFDT ou autres, était très mal vu, on se faisait traiter de
catastrophiste et accuser violemment de rendre le mouvement « incrédible
». Vu de maintenant on ne comprend plus du tout l'argumentation dite «
antinucléaire » de cette époque. La radicalisation antinucléaire était
évidemment totalement incompatible avec les alliances
écolo-gico-politicardes qui étaient à la mode. Les partis politiques et
les syndicats étant en totalité pronucléaires, une alliance avec eux
impliquait une certaine souplesse.
L'échec de l'antinucléaire en France ce n'est pas d'avoir été incapable de
bloquer la nucléarisation mais de ne pas avoir développé dans la
population la conscience des dangers inacceptables de l'énergie nucléaire
qui aurait permis de la bloquer.
Quand on examine les raisons développées par les « antinucléaires » pour
la critiquer on s'aperçoit qu'elles n'avaient rien de bien convaincant.
Remplacer l'électricité nucléaire par du vent, du soleil, arguments
majeurs de la stratégie antinucléaire, revenait à dire à des gens sensés
que les solutions proposées pour arrêter le nucléaire n'étaient pas
crédibles.
Lorsque, avec Tchernobyl le désastre nucléaire a enfin été pris en compte
le résultat n'a pas été celui escompté « il faut arrêter le nucléaire »
mais une sorte de fatalisme « il n'y a pas de solution, on n'a pas le
choix » puisque la solution de l'électricité à partir des combustibles
fossiles a été écartée, le charbon diabolisé
http://www.dissident-media.org/infonucl ... ortie.html et
encore plus lorsque l'effet de serre
http://www.dissident-media.org/infonucl ... _disc.html a été mis sur
le devant de la scène.
Il n'y a pas eu, de la part des écologistes patentés, une approche
pragmatique applicable au cas français pour une sortie d'urgence. Comment
produit-on donc majoritairement l'électricité en Allemagne
http://www.dissident-media.org/infonucl ... onnes.html et dans
tous les autres pays du globe ?
Les publications écologistes évitent soigneusement d'utiliser les mots
charbon et fioul, le gaz a meilleure presse mais ce n'est que depuis peu
qu'il se développe en France. On trouve maintenant des tas de publications
écologistes, antinucléaires (?) qui décrivent d'une façon précise toutes
les conséquences d'un désastre possible et envisageable (voire, envisagé)
et qui se terminent par un programme de solutions totalement
irrationnelles comme de proposer des centrales à charbon qui ne produisent
pas de gaz carbonique ! (Il n'est même pas fait état de la possibilité de
le « séquestrer »).
Il y a quelques années, dans une interview sur France-Culture, le
responsable nucléaire de Greenpeace-France, Jean-Luc Thierry, attribuait
l'échec du mouvement antinucléaire français au fait qu'il n'avait pas
produit du « rêve ». C'est évident que si le mouvement a totalement échoué
c'est parce qu'il n'a produit que du rêve. Ce n'est pas qu'avec du rêve
qu'on va convaincre les gens. En définitive il m'apparaît clairement que
l'échec du mouvement antinucléaire est finalement le résultat de
l'argumentation développée par les militants « antinucléaires ». Ils ont
été plus efficaces que les nucléocrates pour convaincre la population que
la sortie du nucléaire était impossible. Il faudra en tenir compte pour
les responsabiliser s'il y a un désastre.
Roger Belbéoch, mai 2008,
extrait de La lettre d'information n°117
http://www.dissident-media.org/stop_nog ... SN_117.pdfdu Comité Stop Nogent
http://www.dissident-media.org/stop_nogent[1] Philippe Simonnot, "Les nucléocrates", Ed. Presses universitaires de
Grenoble, 1978.
[2] R. Belbéoch, "Un peu d'histoire ça ne fait pas de mal", La Gazette
Nucléaire n°213/214, mai 2004.
[expediteur/expeditrice <infonucleaire(a)altern.org> -
http://www.dissident-media.org/infonucleaire ]