Les Tupperware mis en boîte par les ordonnances Macron
Sous le coup d’une décision de fermeture de leur usine, pour laquelle l’entreprise ne sera pas questionnée au regard de ses profits à l’échelle du groupe, les salariés français du géant américain exigent des conditions de départ décentes.
Les ordonnances Macron ont-elles tué les Tupperware français ? C’est la question qui traverse les esprits depuis l’annonce brutale, le 19 octobre 2017, de la fermeture du site de Joué-lès-Tours (Indre-et-Loire), laissant sur le pavé les 235 salariés du fabricant américain de boîtes alimentaires. Une mesure prise alors que la multinationale affiche des résultats presque insolents. « Le bénéfice du groupe est de 220 millions de dollars et la direction bloque aujourd’hui pour offrir aux licenciés une prime supralégale digne », dénonce Jean-Yves Bauche, représentant CGT au comité d’entreprise.
Les nouvelles lois ont permis la fermeture du site
Signées en septembre dernier, les ordonnances organisant la nouvelle loi travail modifient l’appréciation des difficultés économiques d’un groupe. Désormais, il est possible de les distinguer nationalement et d’autoriser, en conséquence, la fermeture du site français d’une multinationale. Un effet d’aubaine dont a pu bénéficier Tupperware, selon Jean-Patrick Gille, élu régional PS et spécialiste des questions du droit du travail. « La branche française a sans doute été en surproduction, victime des changements de goût de la clientèle, mais elle aurait pu envisager d’utiliser une activité réduite (chômage partiel – NDLR) plutôt que cette fermeture totale, explique-t-il. En fermant l’usine la plus performante d’Europe, la direction a clairement fait un calcul, celui d’agir là où la loi, en l’occurrence les ordonnances Macron, lui était le plus favorable. » Une position que ne partage pas du tout Fabienne Colboc, députée La République en marche de la circonscription de Joué-lès-Tours. « Ce n’est pas sérieux d’incriminer les ordonnances Macron. Cela fait trois ans que l’entreprise sort des machines de manière régulière et, il y a trois ans, les ordonnances n’existaient pas, insiste-t-elle. Aujourd’hui, il faut aller de l’avant et savoir comment attirer de nouveau des industries en France, et le gouvernement y travaille. » La députée, qui sera présente ce vendredi à la table ronde organisée à Bercy, assure soutenir les salariés. « Je ne suis pas sur le terrain parce que ce n’est pas mon rôle, mais je suis du côté du salarié sans pour autant juger l’entreprise qui a une culture stratégique proprement américaine. »
Sur le terrain, justement, et comme chaque jour depuis une grosse semaine, les « Tupp » multiplient les initiatives pour tenter de sensibiliser population locale et pouvoirs publics. Ils sont plusieurs dizaines à tenir le piquet de grève, souvent en couple. La plupart des automobilistes qui passent à proximité de l’usine klaxonnent en signe de solidarité, d’autres s’arrêtent pour leur apporter pains et croissants. À l’intérieur, c’est le silence complet : la production est arrêtée depuis le 23 décembre 2017. « Avec mes 43 ans d’ancienneté, je suis la plus ancienne du site », explique Chantal, dont le mari travaille aussi chez Tupperware, sur un site industriel où la moyenne d’âge culmine à 51 ans. « Ils me proposent 40 000 euros d’indemnités, alors que l’ancien directeur des ressources humaines est parti avec 410 000 euros. De l’argent, ils en ont ! »
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