INTERVIEW RICH BEYER, PDG DE FREESCALE Les échos du 05/05/10Le fabricant de semiconducteurs sort de plusieurs années de restructurations. Il devrait prochainement entrer en Bourse, explique son PDG aux Echos. Le 13ème fabricant mondial de semiconducteurs devrait prochainement entrer en Bourse. Ex-division semiconducteurs de Motorola, Freescale a été rachetée en 2006 par un consortium mené par le fond Blackstone, pour un montant record de 17,6 milliards de dollars. Ont suivi des années de restructuration -17.000 licenciements au total -y compris en France, où le groupe fermera d’ici 2011 son usine de Toulouse qui emploie 827 personnes. La semaine dernière, Freescale a publié un chiffre d’affaires trimestriel en hausse de 22%, à 1 milliard de dollars, et a réduit ses pertes opérationnelles à 61 millions de dollars, contre 251 un an plus tôt.
On évoque actuellement la possibilité d’une entrée en bourse de Freescale. Confirmez-vous ?
Nous verrons le timing, mais ce serait dans la logique des choses. Notre conseil d’administration va se réunir pour en discuter. Ce qui est sûr, c’est que cette introduction serait un signal fort en direction du marché, qui marque notre retour aux affaires.
Freescale a vécu de lourdes années de restructuration. Où en êtes-vous aujourd’hui ?
Nous avons en effet fait face à d’importantes difficultés ces derniers temps. Il y avait, dans le milieu des semiconducteurs, des incertitudes sur nos capacités à rebondir, et il est vrai que le déclin de nos ventes pouvait conduire à une crise majeure. Aujourd’hui, nous redressons la barre. Nos résultats trimestriels le montrent. Notre business a commencé à redémarrer au troisième trimestre 2009, avec une reprise dans notamment l’automobile, qui pèse pour 35% de nos revenus. Au quatrième trimestre, le secteur industriel a également redémarré, et la bonne nouvelle, c’est que l’activité communication tend également à rebondir, avec des équipementiers comme Cisco, Alcatel qui investissent de nouveau. Nous sommes sortis de la récession.
Comment expliquez-vous cette reprise ?
C’est d’abord l’ensemble du marché qui redémarre très vigoureusement, bien davantage que prévu. Les pays émergents, comme la Chine, l’Inde, ou le Brésil tirent clairement le mouvement, mais le rebond est également visible aux Etats-Unis, voire en Europe. Cette reprise est selon moi une forme de rattrapage. Durant la crise, les consommateurs ont été très conservateurs sur leurs dépenses, s’inquiétant du chômage, de leur logement, et réduisant drastiquement leurs achats. Le mouvement a peut-être été trop fort, et maintenant, les gens rattrapent leurs achats. Les programmes publics de soutien, comme la prime à la casse dans l’automobile, ont également eu un effet décisif.
Et concernant Freescale ?
Nous avons su nous redresser grâce à un strict contrôle des dépenses, en restructurant notre activité, coupant les recrutements, et réduisant les frais fixes. Egalement, nous nous sommes attelés à notre problème de dette. Nous avons emprunté de l’argent à de meilleurs taux pour rembourser les échéances. Cela nous a permis de réduire notre dette de 10 à 8 milliards de dollars, et de repousser nos échéances de remboursement à la fin de cette décennie, plutôt que 2014. Et dans le même temps, nous avons maintenu nos dépenses de marketing et de recherche et développement, ce qui nous a permis de nous renouer avec les ventes.
Avez-vous fait évoluer votre modèle de fabrication ? Actuellement, nous nous concentrons sur les technologies plus accessibles, comme celles basées sur du 8 pouces de diamètres de plaques de silicium. Nous nous situons entre les fabricants fabless [sans usines, NDLR] et ceux qui intègrent toute la chaîne. Ainsi, 70% de notre production se fait en interne, le reste étant sous-traité.
Vous avez décidé de fermer le site de Toulouse en 2011. Pourquoi cette décision ?
La fermeture de Toulouse est une décision économique. Nous développons là-bas des puces sur des tranches de silicium de 6 pouces de diamètre, soit de vieilles technologies. On a retardé au maximum l’échéance, mais l’usine était obsolète. Il ne s’agit pas de délocalisation, de fermer pour ouvrir ailleurs, mais d’une problématique d’innovation. D’ailleurs, si je regarde les indicateurs de productivité, celle du site Français est tout à fait comparable à celle de nos sites japonais ou américains. De même, le soutien du gouvernement français a été excellent.