Livreurs à vélo : pas de pizzas pour la fin du Mondial
Le Collectif des livreurs autonomes de Paris (CLAP) appelle à la grève les travailleurs de l’ensemble des plateformes de livraison de repas, à partir du dimanche 8 juillet. Le mouvement doit durer une semaine jusqu’à la finale du Mondial de football le 15 juillet.
Les livreurs de repas à domicile des plateformes de la foodtech remettent le couvert. Déjà au cours de l’été 2017, ils arrêtaient leurs livraisons pour Deliveroo, un des leaders du marché, afin de protester contre le changement de leur rémunération décidé unilatéralement par la direction de l’entreprise basée au Royaume-Uni. En 2018, la rétribution de leur travail est encore au centre de leurs revendications. Mais cette année, Deliveroo n’est plus seul en cause.
À partir du 8 juillet, une partie des coursiers d’UberEats, de Foodora, de Stuart, de Glovo et de Deliveroo ne livreront plus les pizzas, les sushis ou les salades fraîcheur. « Un mécontentement s’exprimait depuis un moment sur les groupes de discussion et les pages Facebook des livreurs. Nous les avons contactés pour voir ce que nous pouvions faire ensemble. C’est parti comme une traînée de poudre et nous organisons conjointement la grève », explique Adrien du CLAP. Les futurs grévistes ont délibérément choisi la dernière semaine du Mondial de football, synonyme de pic d’activité pour les entreprises de la foodtech, pour démarrer leur mouvement. Ils espèrent ainsi être en position de force en frappant les plateformes au porte-monnaie, même s’ils s’amputent eux-mêmes de revenus importants dans cette période.
Le mouvement de grève débute dimanche avec un rassemblement Place de République à Paris à 19 h, où une centaine de livreurs est attendue. Mais des actions sont d’ores et déjà programmées dimanche et tout au long du conflit, en plus de la grève. « Nous ne pouvons pas juste ne pas venir travailler, car nous sommes immédiatement remplacés », assure Adrien, sans dévoiler publiquement les intentions des coursiers. Un rassemblement est également envisagé à Nantes, et le CLAP espère que les livreurs de Bordeaux, investis dans le mouvement en 2017, et ceux de Toulouse, rejoindront la mobilisation. Ils savent déjà pouvoir compter sur ceux de Deliveroo à Londres, qui seront en grève le 13 juillet contre la modification de leur rémunération par la direction, et anticipent des actions chez les coursiers belges, notamment à Liège.
« Nous ne demandons pas le salariat, nous demandons un salaire décent »
En France, les revendications des livreurs sont avant tout salariales. Ils réclament une tarification minimum horaire, ainsi que des plages de travail et une activité garanties. Mais aussi des bonus prenant en considération la pénibilité de leur travail liée aux intempéries et aux emplois du temps décalés (nuit et week-end). « Sans salaire garanti, nous sommes obligés de charbonner. Nous nous mettons en danger, et mettons en danger la vie des autres », affirme Adrien. Actuellement, les sociétés Deliveroo et UberEats rémunèrent les autoentrepreneurs travaillant pour elles à la course. Foodora mixe un paiement horaire et à la livraison, pour un revenu compris entre 10 et 13 € brut de l’heure selon le militant du CLAP. Quant à Stuart, la filiale de La Poste, elle règle certains créneaux dans la journée à une tarification horaire. Mais pour un « salaire » dérisoire de 9 € brut.
N’étant pas salariés, les livreurs à vélo doivent prendre à leur charge les cotisations habituellement dévolues aux employeurs (25 % de leurs revenus), l’entretien de leur outil de travail, où encore les périodes non travaillées comme les congés. « Nous ne demandons pas le salariat, nous demandons un salaire décent », indique Adrien du CLAP qui souligne qu’avec l’augmentation du nombre de livreurs (plus de 9000 contre 7000 l’an passé pour Deliveroo), les « conditions de travail se sont vraiment dégradées ». Il imagine une rémunération brute autour de 15 €, et même 20 € pendant les horaires de rush du midi et du soir. Avec leur mouvement, les livreurs espèrent que le rapport de force permettra l’ouverture de discussions avec les plateformes, qui livrent quelque 38 millions de repas par an pour un chiffre d’affaires avoisinant les 2 milliards d’euros.
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