Alstom quitte Belfort : un nouveau Florange ?
Le constructeur ferroviaire a annoncé que la production de son site historique prendrait fin d’ici à 2018. Pour l’Etat actionnaire, un dossier sensible qui risque de s’inviter dans la campagne présidentielle.
Terminus. A Belfort, 400 salariés sur les 500 que compte l’usine historique d’Alstom devront partir à Reichshoffen (Bas-Rhin) et ailleurs… Faute de quoi ils perdront leur emploi. L’onde de choc provoquée dans tout le Territoire par l’annonce brutale de l’arrêt de la production des trains d’ici à 2018 sur ce site d’où est sorti le premier TGV est d’ores et déjà devenue nationale.
Et pour cause. Mercredi matin, au moment même où le constructeur ferroviaire et la SNCF vantaient leur «TGV du futur» aux journalistes parisiens, le DRH du groupe, Mathias Klemptner, balançait cette bombe sociale aux syndicalistes stupéfaits, réunis à Reichshoffen dans le cadre d’un European Works Forum. Dans la foulée, le directeur de l’usine de Belfort, Alain Courau, confirmait la mauvaise nouvelle sur place. Drôle de hasard de calendrier ou calcul cynique pour tenter de faire passer la douloureuse avec l’opération de com de la nouvelle génération de TGV ?
Pour la seconde hypothèse, c’est raté. Après les syndicats et les élus locaux, les ténors politiques parisiens sont montés au créneau jeudi. «Inacceptable», a tonné l’ex-ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg. «Brutal», a renchéri la ministre de l’Ecologie, Ségolène Royal. «Dans la méthode, pas acceptable», a embrayé l’ex-ministre de l’Economie Emmanuel Macron, gêné aux entournures : en mai 2015, il avait promis «zéro licenciement» en visitant l’usine de Belfort, casquette Alstom vissée sur la tête… Ce que n’a pas manqué de rappeler Nicolas Sarkozy en accusant Macron de «n’avoir rien fait».
Au gouvernement, on est passé en mode force de réaction rapide : le ministre de l’Economie, Michel Sapin, et son secrétaire d’Etat à l’Industrie, Christophe Sirugue, ont convoqué dès mercredi après-midi le PDG d’Alstom, Henri Poupart-Lafarge, pour lui «demander des comptes sur cette annonce». Un savon un peu hypocrite quand on sait que l’Etat, actionnaire d’Alstom, ne pouvait ignorer les menaces sur Belfort. La polémique devrait encore monter ce vendredi avec le défilé des candidats à la présidentielle aux «assises du Produire en France», organisées à Reims (Marne). Belfort a ainsi de bonnes chances de devenir, tels Gandrange et Florange, un symbole du renoncement de l’Etat stratège face à la doxa financière dominante.
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