Re: La terreur d’État
Posté: 01 Fév 2018, 16:59
A ceux qui se croient libres
Le texte qui suit brosse un tableau du durcissement de la stratégie repressive de l’État pénal dans les 15 dernières années. Il est la préface au livre « A ceux qui se croient libres » qui retrace la vie passée derrière des barreaux de Thierry Chatbi, écrit par Nadia Menenger. A l’heure où les surveillants de prison avancent des revendications sécuritaires sa lecture ou relecture semble tout à fait opportune.
Cela fait dix ans que Thierry s’est suicidé. Même si la réalité s’est considérablement dégradée, son témoignage reste cruellement d’actualité. [...] Les gouvernements de droite et de gauche se sont succédés et la logique est restée la même ; le tout-sécuritaire, la surveillance, le fichage et l’enfermement de masse se sont développés pour imposer une société de plus en plus inégalitaire.
L’expérience de 1981, avec l’arrivée de Mitterrand au pouvoir, aurait dû nous alerter, aussi bien sur les méthodes que sur les projets politiques du gouvernement actuel. Ne plus nous laisser abuser ni par les colloques consensuels sur les grands thèmes de la récidive, du sens de la peine, ni par les cris d’orfraie de la droite et de l’extrême droite dénonçant la politique laxiste d’un gouvernement qui voudrait vider les prisons et donner « le feu vert aux voyous ».
Toute cette comédie ne suffit pas à masquer une continuité bien plus profonde : la nécessité pour l’État d’encadrer, de réprimer, d’enfermer tous ceux qui sont progressivement éjectés du monde du travail ou qui le contestent. Depuis trente ans la courbe des incarcéré(e)s suit la même progression que celle du chômage. L’État et ses aficionados nous bombardent de discours anxiogènes pour nous faire avaler que la sécurité c’est la liberté. La surmédiatisation de faits divers sordides, les attentats, la crise endémique sont autant de prétextes pour renforcer l’appareil législatif et répressif qui réduit « pour notre bien » les espaces de liberté C’est ainsi que l’État se dote d’outils de renseignement de plus en plus intrusifs pour écouter l’ensemble de la population. Puisque selon lui nous n’avons rien à nous reprocher, nous n’avons donc rien à cacher.
De plus en plus d’actes, de mots et d’intentions deviennent des délits passibles d’enfermement. Ce qui relevait encore récemment d’une simple contravention vaut aujourd’hui des peines de prison fermes (incitation à la rébellion, outrage, conduite en état d’ivresse…). Le moindre délit est sévèrement réprimé surtout si l’auteur est jeune, pauvre et d’origine étrangère. Dans les années 1970 la peine maximum effectuée se chiffrait autour de dix-huit ans, aujourd’hui elle dépasse les trente ans ! Et dans l’emballement, l’institution judiciaire ne préserve même plus les apparences. Ainsi, dans plus de 90 % des cas des peines fermes sont prononcées lors de jugements en comparution immédiate, c’est-à-dire sans instruction, avec un avocat commis d’office, à la chaîne, en quelques minutes, et pour des peines pouvant aller jusqu’à dix ans.
... https://paris-luttes.info/a-ceux-qui-se ... ibres-9479
Le texte qui suit brosse un tableau du durcissement de la stratégie repressive de l’État pénal dans les 15 dernières années. Il est la préface au livre « A ceux qui se croient libres » qui retrace la vie passée derrière des barreaux de Thierry Chatbi, écrit par Nadia Menenger. A l’heure où les surveillants de prison avancent des revendications sécuritaires sa lecture ou relecture semble tout à fait opportune.
Cela fait dix ans que Thierry s’est suicidé. Même si la réalité s’est considérablement dégradée, son témoignage reste cruellement d’actualité. [...] Les gouvernements de droite et de gauche se sont succédés et la logique est restée la même ; le tout-sécuritaire, la surveillance, le fichage et l’enfermement de masse se sont développés pour imposer une société de plus en plus inégalitaire.
L’expérience de 1981, avec l’arrivée de Mitterrand au pouvoir, aurait dû nous alerter, aussi bien sur les méthodes que sur les projets politiques du gouvernement actuel. Ne plus nous laisser abuser ni par les colloques consensuels sur les grands thèmes de la récidive, du sens de la peine, ni par les cris d’orfraie de la droite et de l’extrême droite dénonçant la politique laxiste d’un gouvernement qui voudrait vider les prisons et donner « le feu vert aux voyous ».
Toute cette comédie ne suffit pas à masquer une continuité bien plus profonde : la nécessité pour l’État d’encadrer, de réprimer, d’enfermer tous ceux qui sont progressivement éjectés du monde du travail ou qui le contestent. Depuis trente ans la courbe des incarcéré(e)s suit la même progression que celle du chômage. L’État et ses aficionados nous bombardent de discours anxiogènes pour nous faire avaler que la sécurité c’est la liberté. La surmédiatisation de faits divers sordides, les attentats, la crise endémique sont autant de prétextes pour renforcer l’appareil législatif et répressif qui réduit « pour notre bien » les espaces de liberté C’est ainsi que l’État se dote d’outils de renseignement de plus en plus intrusifs pour écouter l’ensemble de la population. Puisque selon lui nous n’avons rien à nous reprocher, nous n’avons donc rien à cacher.
De plus en plus d’actes, de mots et d’intentions deviennent des délits passibles d’enfermement. Ce qui relevait encore récemment d’une simple contravention vaut aujourd’hui des peines de prison fermes (incitation à la rébellion, outrage, conduite en état d’ivresse…). Le moindre délit est sévèrement réprimé surtout si l’auteur est jeune, pauvre et d’origine étrangère. Dans les années 1970 la peine maximum effectuée se chiffrait autour de dix-huit ans, aujourd’hui elle dépasse les trente ans ! Et dans l’emballement, l’institution judiciaire ne préserve même plus les apparences. Ainsi, dans plus de 90 % des cas des peines fermes sont prononcées lors de jugements en comparution immédiate, c’est-à-dire sans instruction, avec un avocat commis d’office, à la chaîne, en quelques minutes, et pour des peines pouvant aller jusqu’à dix ans.
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