Anarchie et Ecologie

Anarchie et Ecologie

Messagede fabou » 19 Juil 2009, 15:07

Une critique acerbe mais nécessaire ...

Décidemment, l’empreinte écologique et le carbone nous font mal à la tête …

Décidément, le propre de l’écologisme est d’avancer caché. Et ce n’est pas les habits neufs du vice-président Bové(1) qui nous montrent le contraire. Le réchauffement climatique vend déjà ses tonnes équivalent-carbone. Et voilà que, le commerce de la fin du monde nous propose encore l’une de ses jolies prestations, l’empreinte écologique(2). Or, nous prétendons que, sous des atours dissimulés, l’empreinte écologique proclame fondamentalement une même soumission au mécanisme de l’appropriation capitaliste. Il ne s’agit que de rendre la soumission plus durable.

Dans la cacophonie exercée par nos jardiniers de la planète, l’empreinte écologique correspond à un calcul savant de la surface utile pour produire la même chose. La conclusion «heureuse» est que cette surface fictive n’existe pas et que «nous» devrions réduire notre empreinte écologique simplement pour survivre. L’empreinte révèle par conséquent le gaspillage consumériste propre à «nos» sociétés et l’absurdité de «notre mode de vie» de riches. En doutions-nous ? Voyons donc par où le bât blesse.

Sensée se référer à un contre emploi du PIB, l’empreinte écologique prétendait intégrer les données environnementales aux contraintes de l’industrie afin de mesurer la pression exercée sur les écosystèmes par le mode actuel de production capitaliste(3). Présentée sous la forme d’un calcul scientifique des énergies consommées rapportées à la biomasse disponible, l’empreinte écologique met l’accent sur la productivité des surfaces(4). Ainsi, dans le travail universitaire original, la bio capacité moyenne de la planète est évaluée à 1,3 ha par personne, c’est à dire que chacun consommerait la production de 1.3 ha. L’idée économico-écologique de la mesure de l’empreinte devrait ainsi permettre d’adapter l’économie marchande aux limites de la planète et de poursuivre un « développement » continuel.

Néanmoins, de multiples critiques ont été portées sur le système de mesures(5) de l’empreinte écologique. En se référant à des surfaces supposées être bio-équivalentes, le calcul amoncelle des unités bien hétérogènes (agrosystèmes et océans par exemple) et simplifie la valeur marchande des écosystèmes. Bref, le soi-disant algèbre savant n’est en fait qu’un piètre exercice de mathématiques appliquées. Les agents de la force verte en retiennent pourtant l’idée que, faute de mieux, l’empreinte écologique rendrait visible la surexploitation industrielle de nos campagnes, ici rebaptisés écosystèmes pour faire plus joli. De toutes façons, le calcul rabâche toujours que la planète ne constitue finalement qu’une ressource, et une ressource, évidemment, on l’exploite. Simplement, «nous» ne le ferions pas de manière raisonnable.

En protestant contre une exploitation incontrôlée, une surexploitation de la terre, les tenants de l’empreinte écologique réussissent ainsi un premier petit tour de passe-passe en cachant que le capitalisme est essentiellement un mode d’appropriation insupportable. Les commerçants du WWF insistent d’ailleurs sur la finitude du monde pour en contrôler une meilleure vente puisque nous ne «possédons» pas les 3,2 planètes nécessaires pour continuer une telle surexploitation(6). Qu’on ne s’y trompe pas! Ni écolo-simplets, ni pathologiquement sceptiques, nombre de ceux qui luttent en écologisme veulent aussi combattre le capitalisme et pas seulement les débordements effarants du système marchand. Mais la lutte écologiste n’a jamais été fondamentalement anti capitaliste. L’écologisme constitue d’abord un couvert qui dissimule les errances de la marchandisation du vieux monde. Ceci n’empêche rien de l’intérêt de la résistance.

Le second non-dit de la mesure de l’empreinte est le postulat de la socio-équivalence de l’exploitation. En tant que consommateur, le prolétaire exercerait une empreinte équivalente à un patron. Le conflit social est évacué au profit d’un simple souci d’économiser le monde(7). Il n’est alors pas étonnant que l’économie devienne la loi la plus sacrée de l’écologie et même du vieux monde qui poursuit ainsi son pseudo-développement. Ce n’est plus les exploiteurs qui ont engagé une guerre tyrannique en nous exploitant mais l’«humanité entière» qui exerce une pression consumériste contre son propre monde. Comme dans un système religieux, l’économie de la fin du monde organise une individualisation de la faute. Ici, les humains du nord plus «riches» (d’objets pauvres) sont plus vilains que les humains du sud (plus pauvres d’une agriculture vivrière). Si chacun trie bien sa petite poubelle, la planète serait sauvée.

Il est, bien sûr, vrai que le capitalisme fait déborder ses déchets, ce qui est bien dommage pour les bourgeois puisque l’écrémage des détritus permettrait de relancer une économie nouvelle, la marchandisation des ordures. Mais les déchets inondent décidemment beaucoup trop dans notre vie quotidienne. Aussi, les tenants de l’empreinte entament-ils une troisième oraison secrète, la culpabilisation individuelle. L’objectif est ici d’organiser une soumission intériorisée limitant l’usage de la police aux plus rétifs à la pauvreté monastique. Chacun devrait réduire son empreinte écologique en consommant «mieux», c’est à dire en usant de produits estampillés écologiquement «marchandables». Notons que, en sollicitant un certain dénuement volontaire, l’empreinte écologique relève tout de même l’inutilité pratique de nombre d’objets manufacturés. Mais là n’est pas son objectif primitif. Il s’agit bien davantage d’obtenir l’adhésion des exploités à ce mode d’exploitation. Car en définitive, les écolo-marchands prônent bien un système de régulation par le marché lui-même, les consommateurs «pratiquant» la rationalisation des échanges économiques selon les pseudo lois d’offre et demande. Ou bien, pour le dire plus clairement, l’empreinte sollicite un capitalisme plus consensuel. C’est pourquoi il ne faudrait ni que les pauvres soient trop visibles, ni que les réticences au processus de régulation ne parlent trop fort.

Voilà donc que s’organise aussi la grande confiscation de la parole. Seuls les mots écolo-sacrés ont le droit de cité. On distribue même gratuitement des films bibliques comme «une vérité qui dérange» ou encore «home». L’écologiquement correct est devenu la règle du capitalisme. Et puis, même la misère devient moins forte : en proposant le rationnement volontaire, chacun peut expliquer aux pauvres combien cette « richesse » (pourtant tant vantée pendant des décennies) est une mauvaise fortune. La pauvreté résolue des pauvres devient une norme bien-pensante. De toutes façons, la police va veiller à parfaire ce nouveau paradigme. L’état devient le grand Ubu qui serait capable de faire plier l’organisation marchande vers un monde écologiquement vendable. Le «citoyen» de base est réclamé pour participer à cette œuvre peu banale de délation de son prochain, chacun étant sollicité pour devenir auxiliaire de la police écologique.

Car oyez, oyez, bonne gens ! Vous devez vénérer la religion verte puisque vous êtes aussi coupables de la gabegie planétaire. Et pour éveiller «vos consciences», on peut craindre qu’on envoie la nouvelle police verte. Munie d’un dépliant pédagogique, elle expliquerait aux prolétaires que le volume de leurs déchets les condamne à payer davantage encore de leur personne. «C'est l'Etat, c'est l'autel de la religion politique sur lequel la société naturelle est toujours immolée»(8). Si l’écologisme demande encore de l’état, toujours plus de police et d’état, ce n’est que pour protéger les cabrioles de la marchandise. Plus que jamais, le capitalisme reste un vulgaire mode d’exploitation des êtres humains. C’est cela la réalité de son empreinte.

Les prolétaires ne se laisseront pas aller sans résistances ni révoltes à cette misère écolo-marchande. Rien n’est devenu aussi visible que l’exploitation quotidienne. Les pseudo alternatives économiques dévoilent de plus en plus l’indigence de leurs principes. « Quel que soit le nom que prend le gouvernement, quelles que soient son origine et son organisation, son rôle essentiel est partout et toujours d'opprimer et d'exploiter, et de défendre les oppresseurs et les exploiteurs » rappelait Malatesta. Si l’espoir reste une catégorie électorale malveillante, la validité marchande de l’écologisme ne possède aussi qu’une durée commerciale limitée. Et voilà, la date de péremption des exploiteurs s’approche.

Fabien Bon (faucheur volontaire) & Thierry Lodé (professeur d’écologie évolutive)


1. Elu en 2009 vice-Président de la commission agricole au parlement Européen.

2. ou « Ecological footprints »

3. Rees W.E. 1992. Ecological footprints and appropriated carrying capacity: what urban economics leaves out. Environment and Urbanisation 4 (2): 121–130.

4. Wackernagel, M. & W. Rees. 1996. Our Ecological Footprint: Reducing Human Impact on the Earth. New Society Publishers.

5. Grazi, JC, JM van den Bergh and P. Rietveld 2007. Welfare economics versus ecological footprint: modeling agglomeration, externalities and trade. Environmental and Resource Economics 38(1): 135-153 ou encore Fiala, N. 2008. "Measuring sustainability: Why the ecological footprint is bad economics and bad environmental science". Ecological Economics 67 (4): 519–525

6. Ces marchands de la nature, le WWF, proposent d’ailleurs une individualisation du calcul de votre empreinte avant de vous inviter à racheter votre bonne conduite en consommant chez eux.

7. « Pour produire nos conditions d'existence, nous devons de toute urgence nous comporter en copropriétaires responsables. Nous redonnerons alors à l'économie son premier sens, celui du verbe " économiser " » ose énoncer Bernard Perret dans Le capitalisme est-il durable.

8. Bakounine M 1867. Fédéralisme, socialisme et antithéologisme.
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Messagede fu hsang » 19 Juil 2009, 15:20

tiens je sais pas si tu connais mais je le mets ce site en lien ^^

http://ecolib.free.fr/
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede fabou » 19 Juil 2009, 15:29

Oui je connais c'était un réseau animé par Christian Sunt, ce réseau n'existe plus. Il s'est transmuté en mouvement des Objecteurs de Croissance, qui n'ont plus grand chose de libertaire ... (participation aux élections européennes sur les listes "europe-décroissance", ne remette pas en cause l'Etat, discussions en négociations avec le NPA en vue d'une alliance "Anticapialiste et décroissante" aux régionales etc...)

Sinon que penses tu de cet article ??
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede fu hsang » 19 Juil 2009, 15:48

ok , merci de l info , j savais pas que c etait eux qui c etait presente aux elections europeennes , bref une approche citoyenniste de l affaire

perso , l article , je le trouve bien , il m apprend rien (je t expliquerais plus tard pourquoi ), mais au moins il est clair et comprehensible , il replace l ecologie a sa place , c est a dire a l exterieur de l echiquier republicano-capitaliste et proche de l anarchie

moi perso , en ce moment je fais des HQE, bioclim et autres , et perso c est la meme merde que ce que je faisais avant , tout ça passe par des archi et autres normes acceptes par les tenants , le bois est toujours aussi pourri (pas seche plus longtemp ) , on utilise autant de produits merdiques si ce n est plus pour etancher les maisons a ossatures bois selon les directives europeennes , bref , le capitalisme est devenu vert apres etre devenu humain
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede fabou » 19 Aoû 2009, 18:10

fu hsang a écrit: le capitalisme est devenu vert apres etre devenu humain


Le capitalisme n'a jamais voulu devenir "humain" ou "vert", c'est sa recherche interminable de nouveaux marchés à conquérir qui le pousse à se diversifier dans la "liberté" (téléphones portables), "l'écologie" (éoliennes et commerce équitable) et le "bien-être".

Le capitalisme n'a jamais cherché à avancer masqué, c'est nous (l'être humain en général) qui sommes aveugles.

Pour revenir au texte, nous démontrons que l'écologisme n'est pas, fondamentalement, anticapitaliste; Son but n'est que de "préserver la planete" afin d'assurer la pérénité de la production.
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede Anti-K » 20 Aoû 2009, 14:30

Texte intéressant. Où l'on voit bine que la gouvernance écologique à laquelle se prêtent de nombreux-ses écologistes n'est qu'un prologement du Monde capitaliste sous de nouvelles formes.

Quelques textes pour prolonger la réflexion autour de cette question :

le texte de compagnon-ne-s de la coordination contre la société nucléaire sur le grenelle et tutti quanti :

http://www.infokiosques.net/spip.php?article655

Et ce texte extrait de Haute tension, la feuille d'info du CRAN (collectif radicalement antinucléaire) sur le grenelle :

RETOUR SUR LE GRENELLE DE L’ENVIRONNEMENT : L’ECOLOGISME D’ÉTAT CETTE SCIENCE POLICIÈRE.

C’est avec pas mal de retard que nous revenons sur le grenelle de l’environnement de novembre 2007.
Pour mémoire ce Grenelle mêlant Etat, syndicats professionnels, ONG environnementales et scientifiques triées sur le volet a été mis en place par le duo Sarkozy- Borloo. Le but affiché, répondre aux nouveaux défis environnementaux.
Six groupes de travail ont été constitués : climat et santé, Biodiversités et ressources naturelles, adopter des modes de production et de consommation durables, construire une démocratie écologique, promouvoir des modes de développement écologiques favorables à l’emploi et la compétitivité (sic!)

Inutile de préciser que pour pas mal de militant-e-s radicaux, tout était déjà dit dans le terme « grenelle ». Le souvenir encore vivace du linceul de 68, ce pacte négocié entre le Parti Communiste, son prolongement syndical la CGT, et l’Etat gaulliste pour maintenir la paix sociale, signifiait de la plus évidente des manières ce qui se jouait ici : un enterrement. La guerre sociale ( bien plus modérée que celle de 68 ) engagée contre les dégâts environnementaux les plus manifestes du capitalisme industriel devait être éteinte par la négociation. Les écologistes d’Etat étaient déjà prêts au déminage de la situation. Greenpeace, Hulot, Bové, WWF et consorts devenaient de nouveaux Séguy, d’une époque où les catastrophes générées par les raffinements les plus récents ou plus anciens du capitalisme ne cessent de se propager.
Ca fait longtemps que l’écologie politique travaille à désamorcer cette contradiction majeure du capitalisme industriel qu’est la limite environnementale. L’idée même de développement durable, oxymore orwellienne, n’ a eu de cesse de nous faire gober que le capitalisme méritait d’être sauvé malgré les dégâts qu’il générait. Et finalement ce Grenelle, malgré la défaite électorale des verts, signifiait la victoire de l’écologisme, l’écologie d’Etat, cette écologie qui sous couvert d’humaniser le capitalisme, en soutient les fondements même, et les pratiques les plus autoritaires et militaires.
C’est un nouveau mode de gouvernance qui commence à être négocié, une gouvernance écologique au profit du capital.

Bien évidemment, les résultats réels de ce Grenelle sont catastrophiques, des OGM qui continuent d’être promues dans une co-existence toute fictive avec la production non-OGM (les effets de contamination sont ainsi masqués) et une répression accrue sur les faucheurs, aux autoroutes qui ne seront construites « qu’en cas de nécessité »... Quant au ferroutage, il ne pose aucunement la question de la nécessité des flux de marchandises (pourquoi acheter de la fraise espagnole par exemple?), et surtout pas la question de ses besoins énergétiques, notamment en électricité… et ne parlons pas des sujets non abordés comme celui des ondes électro-magnétiques du portable aux lignes THT...
Au delà, ce sont quelques nouveaux marchés que l’on finit de lancer à grand renforts de lois, de l’éco-construction à l’agriculture bio industrielle, en passant par les pseudo-véhicules propres. Le marché automobile plutôt stagnant regagne ainsi en vigueur et le travailleur pauvre devra changer de caisse pour aller bosser, ou saisir son vélib’ et autre foutaise sous surveillance électronique. Bref, s’adapter au meilleur des mondes écolo-capitaliste en faisant fi des situations sociales, une sorte d’écologie hors-sol. Celle-là même qui « ne voit plus une rivière, mais un taux de nitrate , un seuil tolérable et non des poissons morts» et qui élève en batterie des écolocrates, technocrates écolos imposant des réponses techniques au déferlement incontrôlé et dévastateur de la technique.
Pour ce qui nous concerne, la promesse de ne pas construire de nouveau sites nucléaires est un marché de dupes, puisque la France dispose déjà de 58 sites nucléaires prêts à être équipés de nouveaux réacteurs, comme sur le site de Flamanville. Et c’est d’autant plus intéressant de construire sur des sites existants, que ça désarme davantage les oppositions. A Flamanville, par exemple, plus question d’occuper le site comme dans les années 70. On occupe pas un site nucléaire en activité…. Qui plus est quand la population ne vit plus que du nucléaire, et s’y soumet… sous le poids de l’argent ou du désenchantement des défaites passées !
D’ailleurs les récents accords passés avec la Chine et la Libye, finissent de nous démontrer que le développement durable, c’est un poil de renouvelable et une grosse louche de nucléaire.

L’esprit du grenelle c’est également un pan entier dédié à l’éducation à la société du développement durable. Une sorte de dressage à devenir de bons éco-citoyens-consommateurs. Depuis 2003, l’Etat imprime sur les programmes scolaires la marque du développement durable. Ainsi, une circulaire de juillet 2004, impose à l’enseignement élémentaire et secondaire une dose de développement durable. Cette circulaire « s’inscrit dans la stratégie nationale en faveur du développement durable, adoptée par le gouvernement en juin 2003, qui souligne le rôle déterminant du système éducatif. ».
Ce même rôle d’endoctrinement vers le développement durable tel qu’il est promu par l’Etat est également présent dans la prévention des risques industriels, et notamment des risques nucléaires. En Haute-Normandie, Arlette, la tortue d’alerte, nous apprends à nous protéger du risque nucléaire : « Si vous entendez la sirène d'alerte, vous devez immédiatement "vous mettre à l'abri", c'est-à-dire : Rentrer dans une habitation, fermer portes et fenêtres, obturer les aérations (cheminées... ), couper les ventilations mécaniques. » Un magnifique remake de la propagande des films de l’armée américaine compilés dans « Atomic Café » où l’on conseillait au bon peuple yankee de se coucher sous des tables pour se protéger des rayonnements des bombes russes… Par ailleurs autour des sites, comme en Nord-Cotentin, de nombreuses visites scolaires sont organisées par l’exploitant, AREVA ou EDF.

Le Codirpa (Comité Directeur pour la gestion post accidentelle) n’est pas véritablement autre chose dans la logique de l’habituation au pire. Ce magnifique prolongement des programmes COWAM ou SAGE prépare avec l’aide d'écologistes émérites comme l’ACRO (laboratoire indépendant) ou Monique Sené (GSIEN), l’après catastrophe en France. Comment organiser la dépollution, gérer les déchets, dimensionner les indemnisations ? Bref comment continuer à vivre après que le nucléaire ait dévasté une région ou un pays.
On voit immédiatement en quoi ce programme n’est qu’un clone des programmes CORE ou ETHOS qui en Biélorussie et ukraine « gère » l’après catastrophe. Bien évidemment non pas en remettant en cause les causes même de la catastrophe, le nucléaire et la société qui va avec, mais en travaillant uniquement sur les conséquences de celles-ci. Qui plus est, ces programmes d’après Tchernobyl entendent apprendre aux populations locales à diminuer leurs risques d’exposition et renvoient ainsi la responsabilité des maladies aux habitant-e-s eux-même, qui ne respectent pas les bonnes nomenclatures de protection.

L’irruption réelle de la catastrophe ne laisse quant à elle aucune place à la démocratie. Elle est autoritaire et policière. L’expérience de la Nouvelle Orléans en est l’une des dernières manifestations. Lors du dernier ouragan Katrina, les populations se sont tout autant confrontée à l’ouragan qu’à l’armée et la police protégeant la marchandise contre les pillard-e-s souvent noirs assoiffés et affamés. Les quartiers pauvres ont été les plus touchés , tandis que les prisonnier-e-s crevaient noyés ou était parqué dans des zoos….
Ceux et celles qui ont connus les luttes antinucléaires de Chooz à Plogoff en passant par Flamanville se souviennent de la violence de l’Etat nucléaire, la même que celle de la rue Gay Lussac et des barricades de 68...

C’est bien un Monde qui continue de travailler, celui-là même où le nucléaire s’est édifié et a contaminé la vie et la pensée. La nouvelle gouvernance écolocrate, qu’elle s’exprime dans le grenelle ou ailleurs, n’est au final qu’en appendice de ce Monde-là.
Ce n’est pas tant les conclusions de ce Grenelle qu’il s’agit de dénoncer que ce grenelle même. Ni les organisations environnementalistes (ONG), ni les tenants de l’écologie politique n’ont véritablement dénoncé cette nouvelle gouvernance. Tout juste, certains comme le réseau sortir du nucléaire ont dénoncé ce Grenelle parce qu’il ne parlait pas de nucléaire ou visait à sa relance, tandis que le plus souvent c’est le jeu des concurrences de boutique qui jouait, Greenpeace travaillant ainsi à l’éviction du réseau sortir du nucléaire…

Plusieurs textes qui nous semblent intéressants ont traités cette question du grenelle de l’environnement :
Le texte « notes sur l’écologisme d’Etat et le capitalisme vert » des compagnon-ne-s de la coordination contre la société nucléaire qui a largement inspiré ce texte parut notamment dans l’a-périodique cette semaine.
Le texte de Roger et bella Belbéocq, « les écologistes contre la sortie du nucléaire » parut dans le bulletin Stop Nogent-Sur-Seine n°115
Le texte de l’OLS , « de Grenelle à l’ONUE, sauver la planète pour sauver le capital » parut dans Offensive.
Le texte « Quelques remarques sur le grenelle de l’environnement » par JV parut sur le site ami Subversion.

L’ensemble de ces textes sont disponibles sur notre site (catégorie textes et analyses) :
http://www.anartoka.com/cran/
Ou auprès du collectif:
CRAN(a)no-log.org

Haute tension n°2 - mai 2008
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede fabou » 20 Aoû 2009, 18:07

Je ne connaissais pas le CRAN. En tout cas, ils ont pondu un super texte de critique de l'écologisme !

Je pense qu'il faut continuer la critique de cette idéologie néfaste pour l'homme, sa liberté et son environnement;
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede fabien.g » 24 Aoû 2009, 12:27

fabou89 a écrit:Je pense qu'il faut continuer la critique de cette idéologie néfaste pour l'homme, sa liberté et son environnement;


Je trouve que tu y vas un peu fort là.
L'écologie reste avant tout l'étude (science) des interactions entre les êtres vivants et avec leur environnement. A la base ça n'a rien de mauvais en soi. Ce n'est pas parce que le capitalisme s'en est emparé qu'il faut jeter le bébé avec l'eau du bain.

L'écologie politique (la vraie, pas celle de l'autre débile par ex) consiste à préserver ces équilibres environnementaux et à faire en sorte que l'être humain et ses activités s'intègrent dans le tableau en harmonie avec tout le reste. Ce qui implique de foutre le capitalisme et sa société de consommation à la poubelle.
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede fabou » 25 Aoû 2009, 16:36

Je ne parlais pas de l'écologie en tant que science mais de l'écologisme en tant qu'idéologie. A mon sens, ce n'est pas la même chose. Je ne critique pas l'étude des interactions entre les êtres vivants et avec leur environnement (l'écologie en tant que science) mais le fait de considérer la planète comme une ressource qu'il faudrait juste "mieux gérer" afin de prolonger dans le temps sa productivité.
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede RickRoll » 25 Aoû 2009, 16:55

D'un autre côté il faut gérer les ressources naturelles, étant donné qu'on est 7 milliards. Tout le monde ne peut pas se servir n'importe comment, on peut pas pratiquer la prise au tas.
Il faut tenir compte du rythme de renouvellement des ressources dans l'équation, pour qu'on puisse exploiter ces ressources jusqu'à ce qu'on en aie plus besoin.
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede fabien.g » 25 Aoû 2009, 17:56

fabou89 a écrit:Je ne parlais pas de l'écologie en tant que science mais de l'écologisme en tant qu'idéologie. A mon sens, ce n'est pas la même chose. Je ne critique pas l'étude des interactions entre les êtres vivants et avec leur environnement (l'écologie en tant que science) mais le fait de considérer la planète comme une ressource qu'il faudrait juste "mieux gérer" afin de prolonger dans le temps sa productivité.


Je suis un peu moins tranché que toi. Je dirais qu'il ne faut pas considérer la planète QUE comme une ressource qu'il faut mieux gérer.
Le fait est que cultiver un champ, c'est exploiter une ressource (un sol) et qu'il faut apprendre à beaucoup mieux gérer la chose. Et on se rend compte objectivement que la meilleure façon de faire va à l'opposé de l'idéologie capitaliste.
Un bout de nature, soit on le laisse sans activité humaine, soit on le gère. Donc hormis certains grands espaces qu'il faut laisser "purs" 100% laissés comme ils sont naturellement, le reste il faut le "gérer", je ne vois pas quel autre mot peut convenir.
Je suis contre l'agriculture intensive car elle tue les sols et nécessite la consommation énormément de ressources pour fonctionner. Un agriculteur "bio" qui essaye d'obtenir le meilleur rendement possible (augmenter la productivité), ça ne me choque pas du tout, bien au contraire. Dans ce cas, c'est plus que "prolonger dans le temps sa productivité" ; en maintenant l'équilibre naturelle on assure une productivité "éternelle".
fabien.g
 

Re: Anarchie et Ecologie

Messagede Seitanarchist » 30 Aoû 2009, 15:14

Le capitalisme n'a jamais voulu devenir "humain" ou "vert", c'est sa recherche interminable de nouveaux marchés à conquérir qui le pousse à se diversifier dans la "liberté" (téléphones portables), "l'écologie" (éoliennes et commerce équitable) et le "bien-être".


ça c'est interessant ce que tu dis. Au lieu de faire des affiches à la sauce " à bas la capitalisme vert " (refoulement pratique de la question écologique) il faudrait simplement dire la vérité :
c'est à dire qu'il n'y pas de capitalisme vert. Comme il n'y pas de capitalisme social, ou de "capitalisme à visage humain" :
il n'y a que le capitalisme, qui conquière des marchés et vise l'accumulation du capital quoi qu'il arrive : donc la mise en concurrence des êtres humains et la destruction des environnements sociaux réels et de la planète toute entière en tant qu' ensemble d'écosystèmes : le capitalisme, c'est l'industrie, c'est l'exploitation, c'est le travail à la chaine, c'est tout ça.
Je ne suis pas nostalgique d'une période féodale où la technique ne permettait pas encore tout ça, mais simplement que la technique qui se développe dans le cadre d'une société d'exploitation n'est pas rationnelle et se développe de manière autonome : suivant "ses propres intérêts", ceux du capital. Donc le reste... rien à cirer.

Il est donc inutile, et même néfaste (puisque cela participe au mythe pratique selon lequel il serait possible de réduire les "effets") de vouloir, d'une manière ou d'une autre, moraliser le capitalisme.
On voit bien aujourd'hui l'impasse dans laquelle celà nous conduit :
Si on ne reproche pas directement au système de production de ne pouvoir être écologiquement rationnel, on se retrouve prisonnier de son double discours, de ses grenelles de l'environnement (mélange batard entre l'exposition coloniale de 1936 et le grenelle social de 1968), les affiches de propagande des ministères invitant le peuple à être "écolo-responsables" et autres conneries de la nov-lang pour devenir des "éco-citoyens" dans les grandes décharges publiques qui nous font office d'habitats urbains (pour ceux et celles qui ont le plaisir de vivre en ville) : où on peut se prendre 70€ d'amende pour avoir pissé par terre et où on continue de faire des crises d'asthme et des pneumonies à répétition tellement l'air est pourri.

Image
"Nous vous devons plus que la lumière"

D'accord avec ce que tu dis aussi sur écologie et écologisme.
On voit bien d'ailleurs pourquoi les politicards parlent "d'écologisme" là où les les militants, activistes, etc, particulièrement engagés dans ces questions (que ce soit Earth First, ou l'ELF, ou d'autres groupes anglosaxons ou internationaux) parlent d'écologie profonde, ou d'écologie radicale.
Modifié en dernier par Seitanarchist le 30 Aoû 2009, 15:44, modifié 1 fois.
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede Seitanarchist » 30 Aoû 2009, 15:20

D'un autre côté il faut gérer les ressources naturelles, étant donné qu'on est 7 milliards. Tout le monde ne peut pas se servir n'importe comment, on peut pas pratiquer la prise au tas.
Il faut tenir compte du rythme de renouvellement des ressources dans l'équation, pour qu'on puisse exploiter ces ressources jusqu'à ce qu'on en aie plus besoin.


Au contraire Rick Roll, la prise au tas ne signifie pas seulement "se servir sans réfléchir dans la corne d'abondance".

voici ce qu'en dit Kropotkine dans "la conquête du pain" :

« Dites en un mot que si telle denrée ne se trouve pas en quantités suffisantes, et s'il faut la rationner, c'est à ceux qui en ont le plus besoin qu'on réservera les dernières rations ; dites cela et vous verrez si l'assentiment unanime ne vous sera pas acquis. »

«Le même système prévaut aussi dans les grandes villes, pour une denrée, au moins, qui s'y trouve en abondance, l'eau livrée à domicile. Tant que les pompes suffisent à alimenter les maisons, sans qu'on ait à craindre le manque d'eau, il ne vient à l'idée d'aucune compagnie de réglementer l'emploi que l'on fait de l'eau dans chaque ménage. [...] Mais si l'eau venait décidément à manquer, que ferait-on ? On aurait recours au rationnement ! Et cette mesure est si naturelle, si bien dans les esprits, que nous voyons Paris, en 1871 [durant la commune], réclamer à deux reprises le rationnement des denrées pendant les deux sièges qu'il a soutenus. »
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede Seitanarchist » 30 Aoû 2009, 15:28

Autre réflexion intéressante sur la gestion des biens communs :
Garett Hardin, "écologue" américain, écrit en 1968 un article "The Tragedy of Commons" ou Tragédie des biens communs dans lequel il expose et interroge ces questions de conciliation de l'intérêt individuel et de l'intérêt commun.

Il y invalide la thèse d'Adam Smith (économiste classique) selon laquelle la poursuite de l'intérêt individuel sert toujours le bien commun, produit de l'idéologie du "laissez faire" (principe d'économie classique).

Dans l'idéal des "écolo-capitalistes", "le principe de la Tragédie des biens communs ne peut s'appliquer, dans un "marché libre", qu'aux ressources ne pouvant être appropriées par personne : l'atmosphère, la biodiversité et l'océan sont des exemples".

Or, ces ressources ne sont pas les seules à être "vitales" (pour les humains ou les autres animaux) et quand bien même certains capitalistes se les approprient quand même, comme ils s'approprient le vivant.

http://fr.wikipedia.org/wiki/Trag%C3%A9die_des_biens_communs

Pendant du même principe, dans l'économie de marché, la "tragédie des anti-communs", dont la conséquence directe est le gaspillage :

La tragédie des anticommuns est un phénomène où des agents économiques rationnels gaspillent une certaine ressource en la sous-utilisant. Cela se produit lorsque des individus possèdent un droit d'exclusivité sur une ressource, que le coût engendré pour utiliser cette ressource de manière collaborative n'en vaut pas les bénéfices tirés.
http://fr.wikipedia.org/wiki/Trag%C3%A9die_des_anticommuns
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede conan » 30 Aoû 2009, 16:06

Pour faire simple, il n'y a d'écologie qu'anticapitaliste, autogestionnaire, relocalisée, fédéraliste, débarrassée de l'idée absurde d'une humanité séparée d'une nature qu'elle n'aurait qu'en gestion. En un mot, il n'y a d'écologie qu'anarchiste.
Je conseille vivement les travaux de Tertrais à ce sujet.
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