Anarchie et Ecologie

Re: Anarchie et Ecologie

Messagede fabou » 19 Fév 2010, 22:10

up

Vous en pensez quoi de ce petit article ici ???
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede abel chemoul » 20 Fév 2010, 16:10

j'en pense qu'il n'a ni queue ni tête, je n'arrive pas à en voir l'intérêt. c'est visiblement écrit par des écolo (toi et ton oncle) mais des écolo pas contents de l'écologisme capitaliste. Les paragraphes commencent par des phrases au participe passé, ce qui donne une impression bizarre, comme un récit journalistique, c'est très désagréable, ça donne l'impression, comme dans les reportages télés, qu'on présente quelque chose de véridique, absolu, etc... tellement absolu qu'on enchaine les opinions sans les justifier, comme si elles étaient vraies du simple fait d'être énoncées, comme dans les mass medias! le dernier paragraphe sur les prolétaires qui se laisseront pas faire est symptomatique de cet article. Pourquoi ils vont pas se laisser faire? moi j'ai plutôt l'impression du contraire, ils se foutent de l'écologie, capitaliste ou non.


sinon, j'ai l'impression que c'est un peu la théorie gaïa, faut pas exploiter la Terre, etc... calculer l'impact de l'homme c'est capitaliste parce que ça renvoie à une idée d'exploitation.

La seule impression claire que me laisse cet article c'est que tu as beaucoup d'admiration pour ton oncle.
(le fait que vous ayez chacun un canalblog avec votre nom dedans m'a fait rire! (m'a fait rire gentiment, la réflexion n'est pas méchante) qui imite qui dans l'affaire? :D )
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede fabou » 20 Fév 2010, 16:35

Cet article est un des premiers articles qui critiquait l'écologisme politique. Depuis, d'autres ont écris sur ce thême (Patrick Mignard ...).

Il a d'ailleurs suscité pas mal de débat sur L'En Dehors, le Forum anarchiste et le forum marxiste révolutionnaire (avec des positions pour le coup ultra caricaturales).

Le probleme de l'écologisme politique c'est qu'il se pose la question "comment continuer à exploiter la planete (et les humains) de la même façon mais plus lontemps ?". En d'autres termes, l'écologisme politique ne souhaite que garantir la durabilité du systême marchand.

Je te rassure, j'ai horreur des trips "gaia" betement primitivistes. Mais je pense que nous devons en finir avec la société industrielle et ne plus chercher à "produire plus, pour vendre plus" mais tout simplement à vivre mieux, en respectant l'être humain. Et il me semble que le meilleure façon de respecter l'être humain, c'est aussi de respecter son environnement

Sur ce sujet j'avais écris un truc : http://graindesel.fr.gd/Remettre-la-transformation-radicale-de-la-soci-e2-t-e2--%E0-l-h-ordre-du-jour.htm en aout 2008.


sur mon oncle : oui je l'aime bien. Si il a un canalblog, c'est parce qu'il est nul en informatique et qu'il peut comme ça gérer son blog facilement, même si la plupart du temps c'est moi qui le gère !
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede Tuxanar » 21 Fév 2010, 22:42

L'écologisme politique n'est pas vraiment la continuation de notre mode de vie actuelle plus longtemps. C'est juste obliger les précaires, les travailleurs à moins consommer pour permettre aux plus riches de continuer de conserver leur mode de vie.

Par contre, je ne comprend pas trop ce que tu entends par système marchant. Je comprend ce qu'est le système capitaliste, la société de consommation. Mais système marchand, je vois pas trop.

Si tu entends système marchand comme synonime de capitalisme, je doute que le capitalisme s'effondrerait sans décroissance, je pense que tu te trompes. Sans décroissance, il y aura toujours la propriété des moyens de production et par là même exploitation de l'homme par l'homme.

Pour moi, il ne peut y avoir d'écologie radicale que dans un monde post-capitaliste, et pas avant.
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede Pïérô » 22 Fév 2010, 01:17

Il y a pourtant des luttes à mener aujourd'hui sur ce terrain, des alternatives à porter, et le mouvement libertaire est présent depuis longtemps d'ailleurs sur ce terrain qu'il n'est pour moi pas question de délaisser (lutte anti nucléaire, anti OGM, etc...), dire "on verra après la révolution", c'est un peu léger je trouve. Parce que si tout est bouffé par les OGM on sera un peu emmerdé pour repenser l'agriculture, parce que s'il n'y a pas d'alternatives au nucléaire à opposer, c'est le nucléaire que l'on autogèrera, pour prendre des exemples. Et donc je ne pense pas que l'on doive traiter cette question autour de l'écologie par dessus la jambe. D'ailleurs les premiers à parler d'écologie politique ou d'écologie sociale étaient plutôt proches des libertaires, et il ne faudrait pas tout mélanger, et nottamment avec des franges de l'écologie politicienne, et ce n'est pas parce que le capital transforme actuellement des idées, mêmes alternatives, en marchés et en profits qu'il faut jeter le bébé avec l'eau du bain.
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede skum » 22 Fév 2010, 02:23

Tuxanar : système ou culture marchande c'est, outre l'accumulation de marchandises (M - A - M' = Marchandise(s) -> Argent-médiation pour -> acquérir davantage de Marchandises), considérer qu'un bien matériel (ou immatériel) produit "vaut économiquement". A partir de là, on peut critiquer le mode de production, et l'économie (politique) comme sphère séparée-fin en soi, où les biens sont produits "seulement"en vue d'être échangés càd marchandisés (valeur d'échange only) et non plus pour "l'utilité" sociale (valeur d'usage). Que l'économie ou le système soit capitaliste-marchand et/ou capitaliste-boursico-financier (Argent -> Plus d'Argent) ne change rien à la dynamique d'accumulation, ni au fétichisme de la valeur économico-marchande perdurant dans la tête des hommes, la structure sociale étant comme ça depuis plusieurs siècles, ce qui fait probablement de la gratuité sa pire ennemie.
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede skum » 22 Fév 2010, 22:54

Polémique pour nos amis altermondialistes...

Extrait d'un entretien avec l'auteur de la CRITIQUE DU TRAVAIL MARGINAL ET DE SA PLACE DANS L’ECONOMIE SPECTACULAIRE (1976), 26 ans après :

Si donc cet ancien texte s’est montré un tant soit peu prémonitoire quant à l’évolution du travail, et, forcément moins, pour celle de la consommation, peut-on encore lui trouver d’autres qualités rémanentes ?

[...]
Si on peut donc, sans regret, abandonner l’agrophilie aux poubelles de l’histoire, comme détritus non recyclable, c’est bien parce qu’elle est encore plus un phénomène du passé que ne l’affirmait ce texte de 1976. En effet, le caractère ponctuel et précisément daté de l’agrophilie tel que la Critique du travail marginal semblait le suggérer, s’avère parfaitement erroné. Trop plongé dans des références de psychologie individuelle, je n’avais pas pris garde, à l’époque, au caractère historiquement récurrent de l’engouement pour le travail rural, qui se présente chaque fois que le développement industriel se heurte à une limite paraissant provisoirement infranchissable (chute de productivité, faiblesse dans la concurrence internationale, pénurie de marchés, baisse du taux de profit pour quelque raison que ce soit) et que le retour à un mode de production plus ancien comble momentanément, sur un plan imaginaire, les angoisses collectives. Après avoir précisé que dans l’après 68, pour une fois, ce furent les ennemis présumés du système qui s’en firent les chantres, j’en donnerai à présent un autre exemple historique, mais un exemple assurément éloquent, en rappelant le courant d’idées qui fut très fort, dans les sombres années 1930 en Allemagne, à la fois chez Sombart (Die Zukunft des Kapitalismus, 1932), qui est resté une référence en tant qu’économiste, mais surtout chez un certain Friedrich Fried, qui n’est plus connu que des historiens spécialisés dans le nationalisme conservateur et dans le national-socialisme.

Fried avait publié coup sur coup deux best-sellers, intitulés respectivement Das Ende des Kapitalismus, en 1931, puis Autarkie, en 1932. Dans ces livres, Fried propageait l’idée que le peuple allemand avait besoin « d’une redécouverte de son propre sol », d’un « retour à la campagne des masses humaines déversées dans les grandes villes », d’un « renforcement de l’agriculture et d’une modération progressive de l’influence urbaine ou, plutôt, de l’influence exercée par les grandes villes », et, sachant que ce repli ne pouvait maintenir le niveau de consommation existant, Fried ajoutait que la liberté et l’indépendance valaient mieux que la consommation, et qu’un peuple qui se battait pour cela « devait aussi pouvoir renoncer au café, aux oranges ou au chocolat » (produits d’importation procurant des plaisirs et donc vaguement soupçonnés de décadence)[11]. Sombart, de son côté, réclamait que la population paysanne, qui n’était plus que de 30 % en 1932, rejoigne rapidement le niveau de 1882 (42,5 %) : « le chemin qui mène à une plus grande indépendance nationale est clairement prédéfini : c’est celui d’un mouvement de renouveau agraire [12], qui semble également devoir jouer un rôle important dans la structure interne de notre système économique »[13].

La lecture de ces ouvrages devint une source d’inspiration importante pour Hitler, qui coiffa cette idéologie d’une stratégie militaire définie à la fin de la Première Guerre Mondiale par Ludendorff, et orienta ce conglomérat idéologique syncrétique dans le sens agressif du Drang nach Osten et de la conquête du Lebensraum. Ce que les conservateurs avaient imaginé comme un retour de l’Allemagne à ses « racines », les nazis le conçurent comme un programme d’extension territoriale à l’Est, la Pologne et l’Ukraine notamment devant donner des terres arables suffisamment vastes à une économie allemande ainsi « rééquilibrée ». Du paysan comme figure idéale (qui se rapprochait encore davantage que le prolétaire industriel du Arbeiter au sens de Jünger) Hitler écrivait: « l’homme déchiré entre son corps et son esprit ne peut développer ses forces. Seul celui qui est unifié extérieurement et intérieurement, celui qui est enraciné dans son terroir, le paysan encore et toujours, en est capable. Et notamment pour la raison que la nature même de son activité le contraint à prendre un grand nombre de décisions. Il ne sait pas si demain il pleuvra, et doit pourtant commencer la moisson. Il ignore si demain, le gel couvrira la campagne, et pourtant il se met à semer. L’ensemble de son travail l’expose sans cesse aux aléas et nonobstant ces circonstances, il doit décider de tout. […] La possibilité de préserver le caractère sain d’un milieu paysan comme fondement de la nation toute entière ne peut même pas être surestimée. La plupart des maux dont nous souffrons aujourd’hui proviennent du rapport malsain entre population urbaine et population rurale. De tous temps, une masse constante de petits et moyens paysans représentait le meilleur remède contre la pathologie sociale que l’on observe de nos jours. C’est aussi la seule solution pour qu’une nation puisse trouver son pain quotidien dans le cycle interne de son économie ». Voilà une « analyse » que bien des « radicaux » d’aujourd’hui ne renieraient pas, et qu’ils approuveraient même chaudement et à la lettre ¾ à condition, bien sûr, qu’on n’indique pas le nom de son auteur.

On connaît l’issue catastrophique de la politique de conquête hitlérienne, cherchant à annexer des territoires agricoles et des populations colonisables par l’Allemagne, puisque ces excès militaires, en déclenchant la Seconde Guerre Mondiale, mirent le feu à la planète. Mais l’idéologie du retour à la campagne et à la nature, si elle ne mène certes pas nécessairement à un si funeste aboutissement militaire, ne permet guère de prolongements historiques estimables ; et il est d’autant plus notable qu’en s’étendant à l’ensemble du spectre politique, de l’extrême gauche des naturistes de Monte Verità à l’extrême droite de la Kraft durch Freude, elle avait gommé et entremêlé toutes les orientations précises au cours des années précédant l’avènement du nazisme. Formait-elle un pathos indifférencié qui pouvait servir de vivier à tout et à son contraire, ou bien possédait-elle une nature cachée qui penchait forcément, tôt ou tard, dans une direction déterminée (et, dans ce cas, laquelle) ? On peut sans doute produire des arguments favorables aux deux conceptions. Mais il paraît indéniable que dans sa tentative de réhabiliter des notions qui se situent à la base du système de justification de l’aliénation (comme le travail, l’effort, la productivité tangible, les « racines »), et que Hitler, un connaisseur en matière d’idéologie contraignante, avait très bien résumée sous la notion du « caractère éthique (sittlich) du travail », elle ne pouvait finalement se retrouver du côté de l’émancipation.

Le caractère historiquement récurrent de l’apologie du travail à travers une forme particulière de travail (p. ex. agraire) se présente donc sous la même forme cyclique que l’évolution économique elle-même : ce retour fait partie du cycle, et, quoi que ses défenseurs en disent, il ne tend nullement à en sortir. Quel est l’élément déclenchant pour provoquer ce retour ? Tout porte à penser qu’il s’agit de la dévalorisation du travail contenue dans le processus de transformation du travail en général, et de la tentation de le « réhumaniser ». En effet, il est bon de rappeler que la critique des conditions dominantes, avant de se présenter comme une conscience subjective des individus, se présente comme une condition objective, comme un simple fait involontaire, mais incontournable. La critique du travail, par exemple, n’est pas la marotte plus ou moins surprenante ou critiquable de quelques originaux, comme voudraient les plus ineptes parmi nos contemporains, mais bien plutôt, tout d’abord, la destruction matérielle du travail au profit du capital. Les catégories précapitalistes, comme le travail et la famille, sont le combustible dont le capital se sert pour exister, c.a.d. aussi ce qu’il détruit. On peut déjà lire cela dans le Manifeste Communiste de Marx et d’Engels. L’attirance pour le repli autarcique dans le travail marginal exprime à sa façon, étroitement déterminée par les contradictions économiques, la perception de l’impasse, et la tentation d’une régression ; et ce besoin s’y exprime avec une telle force qu’il parvient à faire oublier, aux sujets atteints par cette pathologie, les évidences qui, dans d’autres circonstances, leur crèveraient immédiatement les yeux.

Pour beaucoup d’entre les anciens drop-out, le séjour aux champs fut de courte durée, et la déception, jusque là, eut du bon. Pour d’autres, la réaction fut plus lente, ou même ne vint jamais, au point qu’on en trouve encore aujourd’hui sur place, éleveurs, fromagers, ou cultivateurs blanchis sous le harnais, plus ou moins piteusement accrochés au rêve d’antan, oscillant entre l’image de l’explorateur autonome et la recherche de subventions bienvenues. Depuis longtemps maintenant, on ne parlait plus d’eux, puisqu’il n’y avait rien à en dire. Le silence régnait dans leur impasse. Ce n’est qu’au milieu des récents rebondissements à propos des OGM que leur cas refait surface, et que croyant pouvoir sortir d’un oubli si amplement mérité, ils pensent pouvoir à nouveau se poser en donneurs de leçon, face à la décadence urbaine de ce qu’ils appellent le « système industriel » [14]. L’occasion est certes inespérée : c’est la décadence de leur propre milieu d’adoption qui les place tout d’un coup sous le feu des projecteurs. Mais cette soudaine arrogance repose sur l’oubli simultané de leur désertion ancienne, et de la misère de leur survie depuis lors : circonstances dont on peut à la rigueur ne pas se moquer, mais qui rendent à tout le moins ubuesque la pose du donneur de leçons. De même que jadis, animés d’un enthousiasme de rédempteur, ils étaient arrivés à contre-courant dans des villages que les jeunes natifs fuyaient au contraire à tire d’ailes, et en connaissance de cause, les voici vingt cinq ans après de retour en ville, voire devant les caméras, prêchant une fois encore à contre-courant de toute perspective historique. Le drame de leur vie aura été cette méprise permanente sur l’époque, et le refus forcené de l’admettre. Invoquer les horreurs de la manipulation génétique marchande sert déjà à cacher cela : leur abandon du terrain social moderne pour un micromilieu qui se trouvait certes sous perfusion, mais qui se présentait à eux comme support d’un certain nombre de fantasmes. C’est ainsi que l’on assiste à une sorte de nuit des morts vivants, où le portail des fermes s’ouvre sur ceux qui avaient disparu de l’histoire, et que revoici venir hanter l’esprit du néo-prolétariat urbain. Une illusion révolue vient toquer à la porte des circonstances qui l’avaient condamnée. Que ces circonstances ne soient plus qu’une immense misère n’a pourtant rien d’un plaidoyer en leur faveur, mais c’est là leur dernière possibilité d’émerger du néant, et le syllogisme susceptible d’épater la galerie. La restauration du monde paysan est désormais inscrite sur leur bannière comme si c’était l’avenir des villes. En matière d’émancipation, celui qui les a fréquentés jadis sait pourtant ce qu’on peut attendre d’eux aujourd’hui, ou même demain. « Il dépend de ces efforts que ce que Henri Mendras appelle une reruralisation de la société française aboutisse ou s’enlise. […] C’est, je crois, la société tout entière qui peut trouver dans cette émergence d’une nouvelle culture rurale les éléments d’un ressourcement » : mais, cette fois, ce n’est pas Fried qui s’exprime, ni Hitler, seulement, dans les mêmes termes, un agro-économiste écologiste d’aujourd’hui[15]...

NOTES

[11] On retrouve les mêmes propos, de nos jours, dans les écrits d’écologistes puritains ou d’ennemis du « système industriel ».
[12] Reagrarisierung dans le texte original.
[13] De nos jours, cette proportion est passée, en France, à 14,5 % en 1965, puis à 3,0 % en 1999, illustrant le degré de mécanisation des travaux agricoles, le niveau d’industrialisation atteint, mais aussi à quel point le travail pénible de siècles d’enracinement peut être supprimé dans une population : le travail agricole représente en France, désormais, 3,5 % de la population active totale.
[14] « Il est tout à fait intéressant de voir, par exemple en France, se développer aujourd’hui tout un secteur de petites exploitations, souvent créées par des personnes d’origine non paysanne, cherchant à vivre d’autoproduction et de mise de leurs produits en marchés locaux avec un maximum de transformation sur place et d’exigence de qualité. Une importante migration des urbains vers le monde rural, qui se manifeste de façon constante depuis les années soixante-dix, se traduit par quelques implantations agricoles supplémentaires, mais surtout par la possibilité pour les paysans de vendre dans des circuits courts qui ont tendance à se développer » (François de Ravignan, La faim… comment s’en sortir ?, in : L’Ecologiste, n°7, Vol. 3, Juin 2002, p. 29).
[15] François de Ravignan, op. cit., p. 29.

Source http://redmoosegirl.fxfhosting.co.cc/ne ... l.html.htm
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Re: Anarchie et Ecologie

Messagede fabou » 05 Jan 2012, 21:08

fabou a écrit:Une critique acerbe mais nécessaire ...

Décidemment, l’empreinte écologique et le carbone nous font mal à la tête …

Décidément, le propre de l’écologisme est d’avancer caché. Et ce n’est pas les habits neufs du vice-président Bové(1) qui nous montrent le contraire. Le réchauffement climatique vend déjà ses tonnes équivalent-carbone. Et voilà que, le commerce de la fin du monde nous propose encore l’une de ses jolies prestations, l’empreinte écologique(2). Or, nous prétendons que, sous des atours dissimulés, l’empreinte écologique proclame fondamentalement une même soumission au mécanisme de l’appropriation capitaliste. Il ne s’agit que de rendre la soumission plus durable.

Dans la cacophonie exercée par nos jardiniers de la planète, l’empreinte écologique correspond à un calcul savant de la surface utile pour produire la même chose. La conclusion «heureuse» est que cette surface fictive n’existe pas et que «nous» devrions réduire notre empreinte écologique simplement pour survivre. L’empreinte révèle par conséquent le gaspillage consumériste propre à «nos» sociétés et l’absurdité de «notre mode de vie» de riches. En doutions-nous ? Voyons donc par où le bât blesse.

Sensée se référer à un contre emploi du PIB, l’empreinte écologique prétendait intégrer les données environnementales aux contraintes de l’industrie afin de mesurer la pression exercée sur les écosystèmes par le mode actuel de production capitaliste(3). Présentée sous la forme d’un calcul scientifique des énergies consommées rapportées à la biomasse disponible, l’empreinte écologique met l’accent sur la productivité des surfaces(4). Ainsi, dans le travail universitaire original, la bio capacité moyenne de la planète est évaluée à 1,3 ha par personne, c’est à dire que chacun consommerait la production de 1.3 ha. L’idée économico-écologique de la mesure de l’empreinte devrait ainsi permettre d’adapter l’économie marchande aux limites de la planète et de poursuivre un « développement » continuel.

Néanmoins, de multiples critiques ont été portées sur le système de mesures(5) de l’empreinte écologique. En se référant à des surfaces supposées être bio-équivalentes, le calcul amoncelle des unités bien hétérogènes (agrosystèmes et océans par exemple) et simplifie la valeur marchande des écosystèmes. Bref, le soi-disant algèbre savant n’est en fait qu’un piètre exercice de mathématiques appliquées. Les agents de la force verte en retiennent pourtant l’idée que, faute de mieux, l’empreinte écologique rendrait visible la surexploitation industrielle de nos campagnes, ici rebaptisés écosystèmes pour faire plus joli. De toutes façons, le calcul rabâche toujours que la planète ne constitue finalement qu’une ressource, et une ressource, évidemment, on l’exploite. Simplement, «nous» ne le ferions pas de manière raisonnable.

En protestant contre une exploitation incontrôlée, une surexploitation de la terre, les tenants de l’empreinte écologique réussissent ainsi un premier petit tour de passe-passe en cachant que le capitalisme est essentiellement un mode d’appropriation insupportable. Les commerçants du WWF insistent d’ailleurs sur la finitude du monde pour en contrôler une meilleure vente puisque nous ne «possédons» pas les 3,2 planètes nécessaires pour continuer une telle surexploitation(6). Qu’on ne s’y trompe pas! Ni écolo-simplets, ni pathologiquement sceptiques, nombre de ceux qui luttent en écologisme veulent aussi combattre le capitalisme et pas seulement les débordements effarants du système marchand. Mais la lutte écologiste n’a jamais été fondamentalement anti capitaliste. L’écologisme constitue d’abord un couvert qui dissimule les errances de la marchandisation du vieux monde. Ceci n’empêche rien de l’intérêt de la résistance.

Le second non-dit de la mesure de l’empreinte est le postulat de la socio-équivalence de l’exploitation. En tant que consommateur, le prolétaire exercerait une empreinte équivalente à un patron. Le conflit social est évacué au profit d’un simple souci d’économiser le monde(7). Il n’est alors pas étonnant que l’économie devienne la loi la plus sacrée de l’écologie et même du vieux monde qui poursuit ainsi son pseudo-développement. Ce n’est plus les exploiteurs qui ont engagé une guerre tyrannique en nous exploitant mais l’«humanité entière» qui exerce une pression consumériste contre son propre monde. Comme dans un système religieux, l’économie de la fin du monde organise une individualisation de la faute. Ici, les humains du nord plus «riches» (d’objets pauvres) sont plus vilains que les humains du sud (plus pauvres d’une agriculture vivrière). Si chacun trie bien sa petite poubelle, la planète serait sauvée.

Il est, bien sûr, vrai que le capitalisme fait déborder ses déchets, ce qui est bien dommage pour les bourgeois puisque l’écrémage des détritus permettrait de relancer une économie nouvelle, la marchandisation des ordures. Mais les déchets inondent décidemment beaucoup trop dans notre vie quotidienne. Aussi, les tenants de l’empreinte entament-ils une troisième oraison secrète, la culpabilisation individuelle. L’objectif est ici d’organiser une soumission intériorisée limitant l’usage de la police aux plus rétifs à la pauvreté monastique. Chacun devrait réduire son empreinte écologique en consommant «mieux», c’est à dire en usant de produits estampillés écologiquement «marchandables». Notons que, en sollicitant un certain dénuement volontaire, l’empreinte écologique relève tout de même l’inutilité pratique de nombre d’objets manufacturés. Mais là n’est pas son objectif primitif. Il s’agit bien davantage d’obtenir l’adhésion des exploités à ce mode d’exploitation. Car en définitive, les écolo-marchands prônent bien un système de régulation par le marché lui-même, les consommateurs «pratiquant» la rationalisation des échanges économiques selon les pseudo lois d’offre et demande. Ou bien, pour le dire plus clairement, l’empreinte sollicite un capitalisme plus consensuel. C’est pourquoi il ne faudrait ni que les pauvres soient trop visibles, ni que les réticences au processus de régulation ne parlent trop fort.

Voilà donc que s’organise aussi la grande confiscation de la parole. Seuls les mots écolo-sacrés ont le droit de cité. On distribue même gratuitement des films bibliques comme «une vérité qui dérange» ou encore «home». L’écologiquement correct est devenu la règle du capitalisme. Et puis, même la misère devient moins forte : en proposant le rationnement volontaire, chacun peut expliquer aux pauvres combien cette « richesse » (pourtant tant vantée pendant des décennies) est une mauvaise fortune. La pauvreté résolue des pauvres devient une norme bien-pensante. De toutes façons, la police va veiller à parfaire ce nouveau paradigme. L’état devient le grand Ubu qui serait capable de faire plier l’organisation marchande vers un monde écologiquement vendable. Le «citoyen» de base est réclamé pour participer à cette œuvre peu banale de délation de son prochain, chacun étant sollicité pour devenir auxiliaire de la police écologique.

Car oyez, oyez, bonne gens ! Vous devez vénérer la religion verte puisque vous êtes aussi coupables de la gabegie planétaire. Et pour éveiller «vos consciences», on peut craindre qu’on envoie la nouvelle police verte. Munie d’un dépliant pédagogique, elle expliquerait aux prolétaires que le volume de leurs déchets les condamne à payer davantage encore de leur personne. «C'est l'Etat, c'est l'autel de la religion politique sur lequel la société naturelle est toujours immolée»(8). Si l’écologisme demande encore de l’état, toujours plus de police et d’état, ce n’est que pour protéger les cabrioles de la marchandise. Plus que jamais, le capitalisme reste un vulgaire mode d’exploitation des êtres humains. C’est cela la réalité de son empreinte.

Les prolétaires ne se laisseront pas aller sans résistances ni révoltes à cette misère écolo-marchande. Rien n’est devenu aussi visible que l’exploitation quotidienne. Les pseudo alternatives économiques dévoilent de plus en plus l’indigence de leurs principes. « Quel que soit le nom que prend le gouvernement, quelles que soient son origine et son organisation, son rôle essentiel est partout et toujours d'opprimer et d'exploiter, et de défendre les oppresseurs et les exploiteurs » rappelait Malatesta. Si l’espoir reste une catégorie électorale malveillante, la validité marchande de l’écologisme ne possède aussi qu’une durée commerciale limitée. Et voilà, la date de péremption des exploiteurs s’approche.

Fabien Bon (faucheur volontaire) & Thierry Lodé (professeur d’écologie évolutive)


1. Elu en 2009 vice-Président de la commission agricole au parlement Européen.

2. ou « Ecological footprints »

3. Rees W.E. 1992. Ecological footprints and appropriated carrying capacity: what urban economics leaves out. Environment and Urbanisation 4 (2): 121–130.

4. Wackernagel, M. & W. Rees. 1996. Our Ecological Footprint: Reducing Human Impact on the Earth. New Society Publishers.

5. Grazi, JC, JM van den Bergh and P. Rietveld 2007. Welfare economics versus ecological footprint: modeling agglomeration, externalities and trade. Environmental and Resource Economics 38(1): 135-153 ou encore Fiala, N. 2008. "Measuring sustainability: Why the ecological footprint is bad economics and bad environmental science". Ecological Economics 67 (4): 519–525

6. Ces marchands de la nature, le WWF, proposent d’ailleurs une individualisation du calcul de votre empreinte avant de vous inviter à racheter votre bonne conduite en consommant chez eux.

7. « Pour produire nos conditions d'existence, nous devons de toute urgence nous comporter en copropriétaires responsables. Nous redonnerons alors à l'économie son premier sens, celui du verbe " économiser " » ose énoncer Bernard Perret dans Le capitalisme est-il durable.

8. Bakounine M 1867. Fédéralisme, socialisme et antithéologisme.
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