de Communard » 16 Nov 2009, 18:18
Coucou,
un 'tit roman... ^^
La question des "drogues" (notez les guillemets) regroupe pleins de questions, et l'habitude est de faire des raccourcis. Je suis en pleins dedans (non, pas le nez ^^), travaillant avec des usagers de drogues et en consommant ("naturelles", "synthétiques",...) régulièrement (je consomme pas mal de Marie-jeanne, de temps à autres des champis, quelques drogues de synthèses comme les ecsta/MDAM). Ma consommation d'alcool est par contre tassez mineure, je considère cette drogue comme la plus "dure". Ma consommation de psychotropes ne m'a jamais ralenti sur mon militantisme, et m'a même obligé à porter un regard libertaire et révolutionnaire autre sur ce sujet.
Déjà, il n'y a pas de drogue dures ni de drogues douces : il y a des usages durs et des usages doux. Cela rejoint la question de la dépendance et du contexte dans lequel l'individu se trouve lors de ses usages. Par exemple, la dépendance à l'alcool est équivalent à la dépendance à l'héroïne, si on prend en compte différents critères, comme la rechute après un sevrage, le taux de réussite des sevrages, etc. Tous acteurs de "santé publique" (concept qui est une vaste connerie d'ailleurs) le sait. Voir même un alcoolique sévère aura plus de mal à se sevrer qu'un héroïnomane.
La question du marché de la drogue, et de sa relation avec le système capitaliste, est du même ordre. Suivant les produits, les buts des usages, etc il y aura plus ou moins un système hiérarchique et d'accumulation des capitaux. Les drogues dites dures, comme la cocaïne, l'héro et tous les dérivés d'opiacée, favorisent l'émergence d'un marché capitaliste : produire en grosse quantité, pouvoir passer les frontières, avoir un maillage géographique important pour fournir, etc. Le cloisonnement des différents étages de la production favorisent aussi le système autoritaire de production. En parallèle, avec la monté de plus en plus forte de la répression des usagers de cannabis, l'autoproduction s'est accrue, s'est développée, avec un marché bien moins porté sur le fric que sur la qualité, la diversité, le lien social... Du coup, la plus grosse part de la production de cannabis en france vient de l'autoproduction, avec les pratiques qui en découlent (partage d'expérience et de connaissance sur la culture et les différents types de consommation, solidarité fasse à la répression, mutualisation de la distribution,...). C'est de plus en plus vrai.
Ensuite, chaque produit est connecté à une culture. Et une grande constante de l'histoire de l'humanité a été la "répression" par les différent systèmes sociaux de domination envers les "drogues". Une des mieux documentée est la répression du système chrétien envers les usages Païens des drogues, comme le champignon, qui été énormément utilisé en Europe. L'alcool, lui, a été valorisé ("ceci est mon sang"), car n'ouvre pas l'esprit, reste d'un usage purement récréatif (quoi qu'il existe des usages mystique de l'alcool, mais ça s'est énormément perdu). La raison de l'interdiction des psychoactifs par l'église tenait en cette réflexion : la prise de ces substances pouvait rapprocher n'importe qui du Divin, et ça, interdit ! Seul l'élite Chrétienne pouvait avoir se privilège, celui de parler à Dieu. Cela s'est passé à peu près pareil aux USA avec les hippies, et le Mac Cartisme. Le LSD permettait de "s'ouvrir" et de "contester" les normes sociales. La propagande faisait passer les consommateurs de marijuana pour des démons (j'ai pu voir quelques spots TV, c'était assez ouf !), des violeurs,...
Il est par contre vrai que c'est au moment de la révolution industrielle que la consommation des psychoactif a explosé, créant les premières lois anti-drogues et la conscientisation par les états d'une urgence à gérer le problème (stabilité sociale). En fait, la consommation de substances modifiant la conscience et/ou le corps a toujours existé, l'explosion des consommations de produits tel l'héro, l'opium, la cocaïne,... s'est encré dans un contexte sociale où les personnes trouvaient une évasion qu'ils ne trouvaient nul part (les loisirs, vacances,... étaient bien évidement inexistant). En même temps, les drogues ont toujours étaient une source de revenu considérable pour les état. Au 19e, l'opium représentait 50 % du PNB de la Grande-bretagne ! L'alcool, le tabac,... c'est la même chose aujourd'hui.
La question devient complexe quand on pose deux choses :
- la criminalisation (et le rejet total) de la consommation d'un côté
- la légalisation des drogues synthétiques : les médicaments psychotropes, qui sont, si on les considère comme les autres "drogues" (ce que je pense) la plus grosse part de la consommation des français. plus de 30 % des prescription de médicaments psychotropes se fait hors parcours médical. C'est à dire, à la légère. On compte plus les addictions aux valium et autres joyeuseté de ce genre.
Il faut donc avoir une lecture non-partisane dans le champs des produits psychoactifs. D'une part, cela arrange les états et la bourgeoisie. Car la population sous Tranxen est bien plus importante que la population qui tape de l'héroïne par exemple. Garder le peuple endormi permet d'éviter le débordement social. Les gens évitent de se poser des questions du style "pourquoi je vais pas bien ? est-ce que le système social joue sur ma santé mentale ?", et se soulage en prenant des tranquillisant ou autre neuroleptiques chez leur médecin.
Dans la même logique, les états devraient aussi légaliser les autres substances : cela ferait encore plus de monde sous camisole. Sauf que c'est pas le cas. Pourquoi ? Des études portant sur des populations d'amérique (nord et sud) et d'afrique ont montré le fort pouvoir sociabilisant de la consommation de substance psychoactives. Iboga, Ayahusca, Peyolt, etc participaient/participent à un fort mouvement de cohésion sociale. Les dépendances modernes (tabac, alcool,...) sont bien moins grande dans ces structures sociales. Dans un univers capitaliste, casser le lien et la notion d'appartenance culturelle est très important. La pénalisation et la criminalisation du LSD est aussi parti de ce constat, puisque de grandes fêtes, hors du système consumérisme (le LSD était mis à disposition dans des baignoires lors de grosses teufs, gratuitement), ont commencé à ce répandre dans l'amérique puritaine. C'est à ce moment, lorsque le produit ne pouvait plus être vecteur d'autres pratiques sociales (gratuité, mutualisation des connaissance,... - début du deal de LSD, rapprochement de ce produit aux autres secteur de la drogue, et donc des réseaux économiques mafieux et capitaliste), que toute la dynamique hippies s'est cassé la gueule.
Bon, voilà quelques réflexions. Je pourrais en dire plus, mais je vais me calmer.
D'un point de vue matérialiste : les "drogues" ne sont pas plus révolutionnaire qu'une bonne salade de fruits. Sauf que c'est la façon de produire, de distribuer, d'envisager le rapport consommation/produit, tout cela qui fait une démarche révolutionnaire. Si la salade vient de chez Mac Do, bon... Si elle vient par contre d'un jardin solidaire, c'est + intéressant niveau pratiques.
D'un autre point de vue, disons athée pratiquant, ou athée mystique : les "drogues" peuvent ouvrir les yeux sur d'autres réalitées, celle que nous connaissons étant construits par nos sens, notre cerveaux,... Prendre des "drogues" peut ouvrir sur d'autres horizons.
D'un point de vue psychologique, les "drogues" peuvent être des outils pour se comprendre soi-même, comprendre son fonctionnement conscient et inconscient (elles peuvent ouvrir les portes de l'inconscient mieux qu'un psychologue).