De la guerre

Re: De la guerre

Messagede digger » 23 Jan 2013, 15:54

Je ne pense pas qu'on a traité ton opinion de confuse. Ce que je remets en question, ce sont les raisons officielles de l'intervention et l'idée que des interventions militaires pourraient résoudre en quoi que ce soit la situation des peuples en général et des femmes en particulier. En Afghanistan, les troupes de "libération" sont ressenties comme des troupes d'occupation. Et elles laisseront la situation dans l'état où elles l'ont trouvé, quelques milliers de victimes en plus. Je ne sais pas si on peut qualifier la dénonciation d'un état de fait comme "immobilisme". A moins que tu ne puisses démontrer, exemples en mains, que des interventions militaires ont apporté une solution politique à un problème et un mieux être pour les populations, durant ces dernières années.
Moi je n'y vois que l'instauration d'un état de guerre permanent au bénéfice du capitalisme international et des complexes militaro-industriels.
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Re: De la guerre

Messagede ivo » 21 Fév 2013, 11:13

Incroyable ! On meurt à la guerre…
http://www.marianne.net/Incroyable--On- ... 26784.html
Le discours des médias sur les opérations militaires au Mali témoigne d’une méconnaissance stupéfiante de ce qu’est le fait guerrier. A la fois mortel et ennuyeux.

Image

« La guerre se durcit. Un soldat français tué au Mali ». Ces mots font peur à lire. Peur parce qu’ils sont le titre d’un journal sérieux, en l’occurrence Le Monde (1). Peur parce qu’ils témoignent d’un manque de recul sur ce qu’est la guerre. Toute notre époque médiatique est là : dans le perte de la mesure et, disons-le, du sens commun. Un mort à la guerre et la voilà qui se durcit ! On se pince…

Il se trouve qu’en effet, on meurt à la guerre. C’est même une vieille histoire, qui remonte plus haut que le néolithique. Les soldats ne s’en étonnent pas. S’ils pleurent leurs camarades tombés au champ d’honneur, l’évocation d’un « durcissement » de la guerre, après qu’un sergent-chef des commandos ait été mortellement touché, ne provoquerait que soupirs ou éclats de rires dans les popotes. Plus que jamais, les médias ressemblent à ces fidèles que Bossuet moquaient dans ses sermons : « On n’entend dans les funérailles que des paroles d’étonnement de ce mortel est mort ».

La nouveauté radicale des guerres contemporaines est bien que les militaires y meurent peu. Mais de là à s’étonner qu’il y ait encore des morts… Pour s’en tenir aux Français, depuis le 11 janvier, deux militaires ont été tués dans les combats du Mali. En Libye, aucun mort ni blessé. En Afghanistan, 88 morts mais en dix ans… Comparons simplement ce chiffre aux 24.000 militaires décédés durant la guerre d’Algérie, sur une période plus courte. Sans parler des 900 morts par jour de la Première guerre mondiale.

Certes, tout ce qui est rare est cher. La perte d’un seul militaire est ainsi devenu un événement national – qui justifie un tweet de l’Elysée et une cérémonie officielle. Il est légitime que la nation honore ceux qui tombent en son nom, mais l’émotion ne doit pas systématiquement prendre le pas sur la raison. Si l’on s’engage dans un conflit armé – et l’on doit s’interroger sur la nécessité de le faire – il faut quand même en accepter les conséquences. Et la première d’entre elles, c’est qu’il y aura des morts et que la guerre ne se durcira pas au deuxième d’entre eux.

Cette attitude infantile, qui consiste à s’étonner de la conséquence de ces actes, on la retrouve malheureusement dans les piaillements de la presse sur la couverture des événements du Mali. Lundi, un autre journal sérieux, Libération, titrait : « Où est passé la guerre ? » Sous-entendu : on nous cache tout, on nous dit rien. Le gouvernement et l’armée ne communiquent pas et les journalistes ne peuvent pas travailler correctement. Le reportage en zone de guerre est un exercice compliqué, dangereux. Et le dialogue entre militaires et journalistes est par nature l’objet de tensions. Les uns ont besoin des autres et réciproquement, car une guerre moderne se gagne aussi sur le terrain médiatique.

Mais la guerre - tous les militaires de tous les temps l’ont toujours su – est essentiellement faite de longs moments d’ennuis au cours desquels ils ne se passent rien et de très brefs moments d’action, de violence et de peur. Ce sont eux, et eux seulement, qui intéressent les médias. Or, la réalité des opérations au Mali – sur lesquelles on dispose d’informations très complètes – est qu’il y a peu d’opérations... et, qui plus est, qu’elles se déroulent sur un territoire immense. Quelques patrouilles des forces spéciales dans le nord-est. Parfois un accrochage. Des frappes aériennes ciblées. Au fond, pas grand chose à montrer.

Prenons une frappe aérienne : qu’est ce que c’est ? L’imagination du public, nourrie de films de guerre, nous fait volontiers imaginer un avion arrivant dans un grand vacarme et larguant ses bombes sur une colonne de pick-up en fuite. Vous n’y êtes pas ! Si vous êtes en l’air, c’est un échange de coordonnées sur ordinateur, le « clang » que fait la munition quand elle se détache pour se diriger vers sa « target » à plus de dix de kilomètres. Si vous êtes au sol, vous ne voyez pas la bombe arriver et soudain c’est une grosse explosion. Personne ne s’est même rendu compte qu’un avion était là… Efficace, mais moins spectaculaire qu’un Stuka en piqué toute sirène hurlante.

On nous dit rien, on nous cache tout ? Faisons simplement l’effort de comprendre que les guerres réelles ne sont pas celles que nous fantasmons. On y meurt toujours, mais ce n’est pas non plus le grand barnum auquel les médias aspirent.

(1) Le titre complet de la Une du journal daté du jeudi 21 février est « Otages, combats rapprochés : la guerre se durcit. Une famille française enlevée dans la nord du Cameroun, un soldat français tué au Mali. »

commentaires:
A titre de simple pékin, Je regrette que ce ne soit jamais ceux qui décident de la guerre qui en meurent en premier, cela les appellerait à plus de circonspection.
"S'il faut verser le sang, allez verser le vôtre,
"Vous êtes bon apôtre, Monsieur le Président."

"La nouveauté radicale des guerres contemporaines est bien que les militaires y meurent peu."
Et les civils, en masse... je crois depuis la seconde guerre mondiale.

Ce qui est stupéfiant c'est le silence quasi-total sur les pertes ennemies dans cette guerre du Mali. Aucun chiffre, à part un vague "plusieurs centaines" du ministre de la défense. A part cela on parle d'un millier de raids aériens, mais combien de victimes ennemies par raid, on n'en sait rien. Pourtant pour se faire une idée des enjeux il faudrait avoir des réponses à quelques questions, comme celle-ci : quelle est la probabilité pour qu'un djihadiste en fuite puisse rejoindre indemne les refuges du nord, compte tenu de la surveillance et des frappes aériennes ?

Il est au contraire salutaire que le gouvernement ne communique pas ou peu sur les pertes ennemies. S'il le faisait, il y aurait immanquablement une pression politique et médiatique sur l'armée: "comment ça? Seulement 10 méchants tués cette semaine? Faut vous secouer un peu les gars!" Faut-il rappeler les effets catastrophiques induits par la sinistre politique du "body count" au Vietnam, en Tchétchénie ou encore en Colombie, lorsque des militaires auxquels on ordonne ainsi de "faire du chiffre" finissent toujours par massacrer des villageois qu'ils déguisent ensuite en "terroristes", dans de macabres mises en scène? L'armée française, au Mali, semble agir de manière très professionnelle. Ne perturbons pas ce fonctionnement, nous qui regardons cela tels les spectateurs des jeux du cirque. Une fois la guerre terminée et les troupes rentrées, il sera toujours temps de nous livrer à de ridicules calculs d'épiciers.

où l'on note que compter les morts est un ridicule calcul d'epicier ........
objection votre honneur !
les politiques et les militaires aidés de leurs bras droit , les médias, nous ont servi depuis 20 ans au moins le mythe de la guerre propre , chirurgicale , voir bio
on nous a donné à voir quantité d'experts militaire commenter des images tirés de playstation ou de nintendo (je sais plus ), forcément nous on y a cru !
maintenant que la guerre est enfin propre grâce à la technologie , on peut l'exporter partout ou les gens ont des tenues un peu folkloriques , c'est même un devoir purificateur
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Re: De la guerre

Messagede ivo » 27 Fév 2013, 09:59

Le retour de la «guerre contre le terrorisme»
http://www.fr.rian.ru/tribune/20130121/197285673.html
Dans les discours politiques occidentaux, on la croyait disparue depuis l’élection d’Obama en 2008. Et la voilà aujourd’hui qui revient en fanfare dans la bouche des socialistes français, pourtant rarement absent quand il s’agit d’exprimer la bien-pensance contemporaine. Quelle ironie!
A Paris, les cercles du pouvoir s’interdisent absolument de désigner les ennemis que la France affronte militairement au Mali depuis le 11 janvier. Ce sont des «terroristes» dit le président François Hollande. Des «terroristes criminels», ajoute le ministre des affaires étrangères Laurent Fabius. A quand les «méchants terroristes criminels»?

Dans les conflits contemporains, la manière de nommer son ennemi en dit plus long sur ce que l’on est que sur l’ennemi en question. On se souvient de la «guerre contre le terrorisme», la Global War On Terror de George W. Bush, au lendemain du 11 septembre. Barack Obama abandonna ses mots, sans pour autant se monter faible. A-t-il eu tort ? On se souvient aussi des mots de Vladimir Poutine parlant, en 1999, des terroristes tchétchènes : «on les buttera dans les chiottes».

Désigner notre ennemi comme «terroriste» présente un avantage: il évite de le définir plus précisément ! Or, qui sont les hommes que nous combattons au Sahel? Des islamistes radicaux, des djihadistes, majoritairement d’origine arabe et touareg. Mais les «éléments de langage» des dirigeants français évitent avec le plus grand soin de le dire : les mots «islamistes» ou «djihadistes» ne sont pas employés. Comme si, par souci de ne pas «stigmatiser» les musulmans, il ne fallait surtout pas utiliser de mots trop «connotés», comme on dit… Le conseil français du culte musulman n’a d’ailleurs pas manqué de «saluer» la «précaution utile et nécessaire» du chef de l’Etat français.

C’est assez ridicule et potentiellement dangereux. Assez ridicule, car c’est laisser entendre que l’on pourrait croire que tous les musulmans sont potentiellement des terroristes. C’est en quelque sorte l’inconscient qui parle et que l’on refoule en évitant certains mots… Merci docteur Freud!
Ridicule aussi parce que nos ennemis ne se battent pas au nom du «terrorisme», mais bien d’une vision de l’Islam – une vision contestée par la majorité des musulmans. Les djihadistes sont une minorité très dangereuse mais numériquement faible. Faisons l’effort de les écouter, de les comprendre, ne serait-ce que pour mieux les combattre ! Faisons l’effort intellectuel de saisir ce qui distingue les islamistes, les salafistes et les djihadistes. Ce qui distingue les combattants internationalistes des mouvements enracinés dans une histoire nationale, comme les talibans afghans ou les touaregs maliens.

Le terrorisme n’est pas une idéologie, c’est une méthode, une technique d’usage de la violence. Qui n’a pas été terroriste ? Yasser Arafat ne fut-il pas un terroriste, comme le furent les chefs de l’Irgoun en Israël… avant de devenir Premier ministre ? Et les indépendantistes irlandais ? Et les «Partisans» soviétiques pour les nazis ? Et les résistants français, aux yeux de Vichy et de l’occupant allemand ? La connaissance de l’histoire devrait nous inciter à une certaine prudence de langage.

Certes, ce qu’il s’est passé en Algérie, sur le site gazier d’In Amenas relève sans l’ombre d’un doute du terrorisme – et même d’une forme particulièrement agressive de ce type de violence. De part et d’autre, d’ailleurs : le bilan de plusieurs dizaines de morts en témoigne. De même que les otages français kidnappés au Sahel relève du terrorisme… mâtiné de grand banditisme.

Ce qui se déroule au Mali est différent. L’armée française – et ce qui reste d’armée malienne – n’ont pas à faire à des terroristes, mais à des combattants réguliers. Des «maquisards», des «guérilleros», comme on disait en d’autre temps et d’autres lieux. Au Mali, ils ne commettent pas d’attentats à la bombe et ne conduisent pas des opérations clandestines. Ils se battent à découvert, à la loyale, avec leurs colonnes de 4X4 très bien armés et, semble-t-il, bien commandés. Nous avons à faire à des soldats – qui, certes, propagent une vision du monde que nous rejetons, mais à des soldats quand même.

Certes, les combattants djihadistes que nos forces affrontent ne sont pas des enfants de chœur. Ils sont, pour une part, liés à Al-Qaïda et n’hésitent pas à tuer, à prendre des otages, voire à commettre des attentats – ils l’ont fait en Algérie et le feraient volontiers en France, s’ils en avaient les moyens. Sont-ce les mêmes, ceux qui se battent au Mali et ceux qui attaquent l’usine algérienne ? Ils proviennent en tout cas d’un même bouillon de culture.

Mais n’oublions pas la dimension locale de la crise. Par plus d’un trait, notre ennemi ressemble aux Talibans afghans : ce sont des fanatiques, mais ils ne sont pas étrangers dans leur pays. Ainsi, leur chef, Iyad ad Ghali, est chez lui là où il combat : c’est un touareg malien, pas un combattant internationaliste venu du Moyen-Orient ou d’une banlieue française.

Les qualifier de «terroristes criminels», c’est, au fond, emprunter à la rhétorique du discours néoconservateur. Les guerres d’aujourd’hui sont toutes marquées par le «criminalisation» de l’ennemi. Les opérations militaires finissent par devenir des opérations policières contre des «hors la loi», contre des gens qui violent la morale commune. La guerre n’est plus la continuation de la politique par d’autres moyens, elle est devenue la poursuite de la Justice par d’autres moyens. Il faut parfois combattre et l’emploi de la force n’est pas illégitime. La guerre – ou plutôt la victoire militaire – permet de résoudre des situations inextricables. Mais, comme on le voit en Irak, en Afghanistan et désormais au Mali, il ne peut y avoir de solutions durables que politiques. Elles passent, à un moment, par la discussion avec l’ennemi- ou, au moins avec certains d’entre eux. Peut-on discuter avec des «terroristes criminels» ?

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction.

* Jean-Dominique Merchet, journaliste spécialisé dans les affaires de Défense. Auteur du blog français le plus lu sur ces questions, créé en 2007. Ancien de l’Institut des hautes études de défense nationale. Auteur de nombreux ouvrages dont : « Mourir pour l’Afghanistan » (2008), « Défense européenne : la grande illusion » (2009), « Une histoire des forces spéciales » (2010), « La mort de Ben Laden » (2012).
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Re: De la guerre

Messagede ivo » 05 Mar 2013, 10:22

Image
Doit-on montrer les images de guerre ?
http://www.lesinrocks.com/2013/03/04/ac ... -11366685/
Que peut-on montrer de la guerre? Doit-on privilégier la dignité ou l’information?

De même que la notion de guerre juste oppose les philosophes entre eux, la juste image de guerre reste une énigme esthétique, sur laquelle personne ne s’entend, faute de pouvoir en définir les contours évidents. La récente condamnation par le CSA de France 2, dont le magazine Envoyé spécial avait osé révéler le 7 février des images de corps meurtris au Mali, a réactivé cette vieille querelle à l’occasion de la guerre du Golfe.

Quels sont les critères – du beau, de l’information, du spectacle, du tragique… – qui permettent de légitimer la production d’une image de guerre ? Quel ajustement le reporter est-il tenu de trouver entre un nécessaire souci d’information et une prudente réserve à l’égard de l’exposition de la violence, de ce que le CSA appelle “le respect du principe de dignité humaine” ? Comme si la guerre et la dignité humaine allaient de pair, comme s’il était possible de décrire une guerre en se voilant la face, comme s’il était normal de filmer des combats sans en entrevoir les fruits pourris !

L’hypocrisie du CSA rappelle en tout cas que les images de guerre et la guerre des images forment toujours un couple infernal. Alors que les démocraties occidentales semblent soucieuses d’effacer les stigmates de leurs guerres sur les corps, à l’heure de la censure des images des soulèvements opérée par des dictatures comme la Syrie, la règle reste la même sous tous les cieux : la guerre sévit dans un hors-champ contrôlé par ceux qui s’en veulent les maîtres, dictatures comme démocraties. C’est aussi pour cela qu’une image juste de guerre s’arrime forcément à l’injuste violence qu’elle saisit.

vous avez vu la belle casquette ?
aucune info sur cette photo ....
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