Qu'est ce qui cloche dans l'anarchisme aujoud'hui ?

Re: Qu'est ce qui cloche dans l'anarchisme aujoud'hui ?

Messagede altersocial » 27 Oct 2012, 10:48

Et j'estime qu'en ce sens les Maos et les ML sont de bons exemples sur ce point (même si je ne cautionne pas ce qui a été fait derrière)


Ce qu'ils ont fait "derrière" ils l'ont justement fait parce qu'ils étaient minoritaires, en se substituant au prolétariat ils l'ont dirigé, et sont devenus leur nouvelle classe dirigeante.
Minorité militante :arrow: substitution :arrow: dictature sur le prolétariat :arrow: classe dirigeante

Ce n'est pas que les ML ou autres avaient de bonnes ou mauvaises idées le problème était :
1- ils pensaient que la révolution c'était l'application d'une théorie militante préfabriquée à la place d'un bouillonnement démocratique révolutionnaire,
2 - pensant détenir la vérité ils se sont constitués en une nouvelle classe exploiteuse du prolétariat, vivant sur son dos car spécialisés à "mener vers la révolution"...

Est-ce l'objectif de l'anarchisme de faire pareil ?
Non je ne crois pas que c'est ce qui cloche dans l'anarchisme.
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Re: Qu'est ce qui cloche dans l'anarchisme aujoud'hui ?

Messagede Nyark nyark » 27 Oct 2012, 11:28

À vrai dire, et pour avoir lu toutes vos interventions, plusieurs réflexions me viennent à l'esprit.

Tout d'abord, et plusieurs d'entre vous l'ont pointé, nous devons lutter contre une certaine étroitesse d'esprit de la part de beaucoup de militant(e)s. Notre milieu est tout petit (ça j'y reviendrai), on se connaît plus ou moins tous (j'ai la flemme de tout féminiser, vous corrigerez de vous-mêmes), on se tient chaud d'une certaine manière, en tout cas au sein d'une même région. Et encore je parle de ce que je connais, la région parisienne. Les "militants" sont toujours les mêmes : certes, les mandats sont censés tourner mais ça n'est pas assez souvent le cas. Non pas à cause d'un hypothétique goût du pouvoir de ces mandatés, mais pour des questions pratiques : il est plus facile d'être présent à toutes les réunions, à toutes les actions, quand on habite en plein Paris ou à 10 minutes des Vignoles (je parle toujours pour ce que je connais), ou bien si l'on a une voiture. Du coup, on est plus près du centre décisionnaire, du débat, on est plus à même de prendre sa place et d'être capable de postuler à ces mandats. De même, quand on est enseignant (je n'ai rien contre les enseignants), étudiant, chômeur, les disponibilités ne sont pas les mêmes : du coup, celui ou celle qui habite loin, qui a du mal à se déplacer pour xxx raisons, va vite se sentir culpabilisé parce qu'il n'en fait pas assez par rapport à d'autres. Dans des cas comme ça, impossible de s'engager fermement, de prendre des responsabilités, de prendre un mandat, de pouvoir assister et se faire entendre dans toutes les réunions. Une fois encore, je ne jette en rien la pierre aux "mandatés", je sais quel est leur dévouement, je sais que c'est peut-être au détriment de leur vie privée, n'empêche, pour des raisons matérielles, moi ça m'est impossible. Et quand je parle de "moi", il ne s'agit pas que de ma petite personne, au demeurant négligeable, mais de beaucoup de camarades qui n'ont pas la possibilité matérielle de s'investir plus qu'ils ne le font. C'est là qu'on se retrouve extrêmement culpabilisé parce que ce sont les autres qui vont au charbon : on se fatigue vite de ce genre de situation, que l'on soit du côté qui peut militer ("c'est toujours nous, les mandats ne tournent pas faute de bonnes volontés") ou de l'autre ("ben non, j'étais pas à la réu où vous avez décidé de faire ça, et peut-être que je n'aurais pas été d'accord, mais les absents ont toujours tort c'est bien connu"). Et on en arrive vite à se faire traiter de militant du net car on continue néanmoins à s'exprimer, mais devant un écran.
Ça c'était la 1ère chose : le problème des militants ou aspirants frustrés au militantisme.

Autre chose importante à mes yeux, et liée à la première : l'absence pratiquement totale de base populaire. Qui sont les militants anars dans leur grande majorité ? Des jeunes "des quartiers" comme on dit ? Des mères de familles qui se battent pour que leurs enfants fassent des études ? Encore une fois, je vais parler de ce que je connais : en grande majorité des étudiants, des enseignants, et, toujours en région parisienne, pour la plupart des parisiens intra-muros. Je n'ai pas de chiffres précis, mais je pense que 90 % de nos militants (CNT en tout cas, et sans doute aussi FA, pour AL je n'en connais pas beaucoup sur la région) habitent Paris ou Montreuil (le XXIè arrondissement) ce qui est déjà parlant. Depuis que je milite à la CNT on se dit régulièrement qu'il va falloir aller parler aux habitants, en particulier aux "jeunes des quartiers" : on ne l'a jamais fait, non pas par manque de volonté, mais de temps (toujours le cercle vicieux). Quand on va parler aux salariés de notre boîte, on va commencer par parler de leurs problèmes au quotidien, et qui sont énormes : quand tu gagnes 1000 € par mois, tu as plus tendance à chercher à obtenir une prime ou à passer à l'échelon supérieur qu'à envisager une future société débarrassée de l'argent.

Et j'en arrive à un autre problème : nous sommes dans tout ce qui est "contre". Et c'est très bien : je pense que les anars ne sont pas pour rien dans la diffusion des idées anti-homophobes, anti-sexistes, anti-racistes, etc. Mais, si c'est, plus que jamais, nécessaire, ce n'est pas suffisant : qui d'entre nous est capable d'aller expliquer quelle société nous souhaitons pour demain ? Qui est capable d'expliquer comment l'autogestion permettra de gérer la macro-économie, la recherche, la médecine (voir d'ailleurs sur l'autogestion : viewtopic.php?f=69&t=6302) ? Il ne s'agit pas d'établir un "programme", mais de donner des pistes concrètes de ce que nous ferons : car le tout n'est pas "que" de faire la révolution que nous appelons de nos voeux mais de savoir ce que nous sommes capables de proposer pour "après". Car, sinon, cette hypothétique révolution, si jamais elle se faisait, nous échappera, nous sera confisquée comme l'ont été toutes les révolutions.

Voilà, ce ne sont que quelques pistes, mais ça "cloche" déjà pas mal tout ça...
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Messagede digger » 27 Oct 2012, 13:05

La question de la proximité existe partout et en milieu péri-urbain également (encore plus en milieu rural, sans doute) . Je ne vais pas prendre la voiture après le boulot le soir pour faire 50 bornes (25 A.R) pour une réunion. D'où sans doute l'importance de travailler sur des outils de communication, qui ne remplaceront pas les face à face, mais qui permettraient de les limiter tout en facilitant la participation de touTEs. Sachant que la participation ne sera jamais la même pour touTEs (Etant un mec, je me sens obligé de féminiser, ce qui est très chiant en effet)
J'ai toujours été perplexe face à l'esprit sacrificiel de certainEs militantEs, des sortes de moines laïcs, consacrant chaque minute de libre à La Cause. Celles et ceux qui ont le malheur de trouver quelque chose de plus intéressant à faire, comme aller à la plage parce qu'il fait beau (c'est un exemple. je me fais aussi chier sur une plage que dans certaines réunions), sont considéréEs aussitôt comme des "révolutionnaires de salon". Ce n'est d'ailleurs pas propre à l'anarchisme, ni même au militantisme politique ou syndicale, mais aussi au bénévolat associatif, sportif, culturel ou autre.
C'est effectivement un cercle vicieux, parce que celles et ceux qui jugent que c'est trop prenant s'en vont, laissant plus de travail à celles et ceux qui restent, en augmentant encore le phénomène de cercles restreints.
Ensuite, l'absence de base populaire est à examiner sous deux angles différents. Celui lié au premier point (il peut y avoir une adhésion, ou une sympathie pour les idées qui ne se manifestent pas sous forme d'adhésion à une organisation.) Et on ne fera pas l'économie du "réformisme", c'est à dire de soutenir (être à côté de) les revendications de la "masse", aussi peu "révolutionnaires" soient-elles. Je pense à la présence de Nine et Denis chez les Fralib. La pureté révolutionnaire qui consiste à les ignorer , voire à les critiquer, reviens à dire que le mouvement anarchiste ne se reconnait pas dans le mouvement ouvrier, mouvement ouvrier idéalisé, comme l'idée de révolution...et d'anarchisme même.
Et le 3ème point est tout aussi juste : l'aspect spécifique de l'anarchisme au sein de tout cela. Dire je suis contre tout n'est pas une position anarchiste. Il faut travailler avec celles et ceux qui, dans leurs domaines, peuvent apporter les réponses spécifiques. Je n'ai aucune notion de la gestion d'une université. (On peut bien sûr dire qu'il n'y aura pas d'université "après", ou de recherches scientifiques,etc...)
Il faut des rencontres et des débats avec des économistes, des chercheurs,etc... même si des réalités peuvent être dérangeantes et remettre en cause quelques idée simplistes.
Ou la peur de perdre sa virginité révolutionnaire...
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Re: Qu'est ce qui cloche dans l'anarchisme aujoud'hui ?

Messagede Spike » 27 Oct 2012, 13:56

L'important, c'est déjà de ne pas y entrer dans cette spirale. Elle ne mène à rien, ni comme forme de pensée, ni comme forme d'action, en tout cas pour l'anarchisme.


Le problème c'est que l'anarchisme est à mon avis déjà dans cette spirale.

Dans l'histoire, des exemples ont permis la prise du pouvoir, ce qui est, selon moi - et je pense de nombreux(ses) anars/libertaires - le début d'un processus autoritaire et contre-révolutionnaire, dans le sens où s'établit une nouvelle classe dirigeante.
Mais je rejoins Nine et sa question


On est bien d'accord.

Ce qu'ils ont fait "derrière" ils l'ont justement fait parce qu'ils étaient minoritaires, en se substituant au prolétariat ils l'ont dirigé, et sont devenus leur nouvelle classe dirigeante.
Minorité militante substitution dictature sur le prolétariat classe dirigeante


Pas tout à fait d'accord.
C'est pas parce qu'ils étaient minoritaires qu'ils ont agit comme il l'ont fait, mais parce que leur pensée incluait de construire un parti prolétarien fort. Ne pourrait-on pas faire la révolution et dire maintenant vivons sur des bases libertaires?

Tout d'abord, et plusieurs d'entre vous l'ont pointé, nous devons lutter contre une certaine étroitesse d'esprit de la part de beaucoup de militant(e)s. Notre milieu est tout petit (ça j'y reviendrai), on se connaît plus ou moins tous (j'ai la flemme de tout féminiser, vous corrigerez de vous-mêmes), on se tient chaud d'une certaine manière, en tout cas au sein d'une même région. Et encore je parle de ce que je connais, la région parisienne. Les "militants" sont toujours les mêmes : certes, les mandats sont censés tourner mais ça n'est pas assez souvent le cas. Non pas à cause d'un hypothétique goût du pouvoir de ces mandatés, mais pour des questions pratiques : il est plus facile d'être présent à toutes les réunions, à toutes les actions, quand on habite en plein Paris ou à 10 minutes des Vignoles (je parle toujours pour ce que je connais), ou bien si l'on a une voiture. Du coup, on est plus près du centre décisionnaire, du débat, on est plus à même de prendre sa place et d'être capable de postuler à ces mandats. De même, quand on est enseignant (je n'ai rien contre les enseignants), étudiant, chômeur, les disponibilités ne sont pas les mêmes : du coup, celui ou celle qui habite loin, qui a du mal à se déplacer pour xxx raisons, va vite se sentir culpabilisé parce qu'il n'en fait pas assez par rapport à d'autres. Dans des cas comme ça, impossible de s'engager fermement, de prendre des responsabilités, de prendre un mandat, de pouvoir assister et se faire entendre dans toutes les réunions. Une fois encore, je ne jette en rien la pierre aux "mandatés", je sais quel est leur dévouement, je sais que c'est peut-être au détriment de leur vie privée, n'empêche, pour des raisons matérielles, moi ça m'est impossible. Et quand je parle de "moi", il ne s'agit pas que de ma petite personne, au demeurant négligeable, mais de beaucoup de camarades qui n'ont pas la possibilité matérielle de s'investir plus qu'ils ne le font. C'est là qu'on se retrouve extrêmement culpabilisé parce que ce sont les autres qui vont au charbon : on se fatigue vite de ce genre de situation, que l'on soit du côté qui peut militer ("c'est toujours nous, les mandats ne tournent pas faute de bonnes volontés") ou de l'autre ("ben non, j'étais pas à la réu où vous avez décidé de faire ça, et peut-être que je n'aurais pas été d'accord, mais les absents ont toujours tort c'est bien connu"). Et on en arrive vite à se faire traiter de militant du net car on continue néanmoins à s'exprimer, mais devant un écran.
Ça c'était la 1ère chose : le problème des militants ou aspirants frustrés au militantisme.


Ca ça m'est arrivé. Mais pour moi ça s'est réglé en en parlant avec les camarades qui ont très bien compris. Donc il me semble que cette question est plutôt simple à résoudre en interne.

Et j'en arrive à un autre problème : nous sommes dans tout ce qui est "contre". Et c'est très bien : je pense que les anars ne sont pas pour rien dans la diffusion des idées anti-homophobes, anti-sexistes, anti-racistes, etc. Mais, si c'est, plus que jamais, nécessaire, ce n'est pas suffisant : qui d'entre nous est capable d'aller expliquer quelle société nous souhaitons pour demain ? Qui est capable d'expliquer comment l'autogestion permettra de gérer la macro-économie, la recherche, la médecine (voir d'ailleurs sur l'autogestion : viewtopic.php?f=69&t=6302) ? Il ne s'agit pas d'établir un "programme", mais de donner des pistes concrètes de ce que nous ferons : car le tout n'est pas "que" de faire la révolution que nous appelons de nos voeux mais de savoir ce que nous sommes capables de proposer pour "après". Car, sinon, cette hypothétique révolution, si jamais elle se faisait, nous échappera, nous sera confisquée comme l'ont été toutes les révolutions.


Oui!! Et on en revient donc à ce que je disais: notre littérature n'est pas assez tournée vers la pratique, ce qui fait que nous n'avons pas de bases solides pour expliquer notre projet de sociét, ce qui fait qu'au yeux des gens nous ne sommes pas crédibles... Bon ok l'autogestion et la révolution ne s'apprennent pas dans des livres mais ça peut fournir une bonne base déjà.
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Re: Qu'est ce qui cloche dans l'anarchisme aujoud'hui ?

Messagede digger » 27 Oct 2012, 14:17

Le problème c'est que l'anarchisme est à mon avis déjà dans cette spirale.

La spirale dont je parlais est la "tentation minoritaire", représentée par la tendance insurrectionnaliste au sein de la mouvance anar, et les théories léninistes dans l'extrême gauche.
Perso, l'avant-gardisme est une ligne rouge pour moi.
Faire la révolution ne se décrète pas (et le voudrions-nous, nous ne le pourrions pas. les martyrs, c'est pas mon truc). Vivre, militer sur des bases libertaires, oui. Appliquer partout les principes, dès aujourd'hui, organiser des formes d'entraide et de soutiens mutuels. Mais ca ne tombe pas du ciel non plus et c'est un énorme investissement. Et ca aiderait certainement à diffuser nos idées mieux que de longs discours.
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Re: Qu'est ce qui cloche dans l'anarchisme aujoud'hui ?

Messagede Spike » 27 Oct 2012, 14:49

digger a écrit:
Le problème c'est que l'anarchisme est à mon avis déjà dans cette spirale.

La spirale dont je parlais est la "tentation minoritaire", représentée par la tendance insurrectionnaliste au sein de la mouvance anar, et les théories léninistes dans l'extrême gauche.
Perso, l'avant-gardisme est une ligne rouge pour moi.
Faire la révolution ne se décrète pas (et le voudrions-nous, nous ne le pourrions pas. les martyrs, c'est pas mon truc). Vivre, militer sur des bases libertaires, oui. Appliquer partout les principes, dès aujourd'hui, organiser des formes d'entraide et de soutiens mutuels. Mais ca ne tombe pas du ciel non plus et c'est un énorme investissement. Et ca aiderait certainement à diffuser nos idées mieux que de longs discours.
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Tu prêches un convaincu là...
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Re: Qu'est ce qui cloche dans l'anarchisme aujoud'hui ?

Messagede digger » 28 Oct 2012, 09:52

Voici quelques éléments grapillés par ci par là. Il faudrait mettre tout cela en forme, le développer, le compléter....

La convergence concrète avec les anarchistes
Ce texte issu de la réflexion de plusieurs militant.e.s a servi de base d'introduction au débat en séance plénière sur la stratégie et les axes d'intervention de la Fédération anarchiste lors de son 68e Congrès à Corbigny.
http://i-f-a.org/index.php/fr/documents-de-congres/82-la-convergence-concrete-avec-les-anarchistes

Les alternatives décousues
Toutes ces aspirations nécessitent une stratégie qui structure la convergence des individus et des organisations sociales, syndicales, politiques, associatives ou informelles, désespérés de l'impuissance à grouper les diversités œuvrant pour une société post-capitaliste et autogestionnaire.

Les anarchistes doivent avoir pour ambition, et stratégie, de participer encore à ces efforts mais en proposant une autre direction : la convergence des groupements autogestionnaires à l'échelle des territoires, celui de la commune sans oublier le lien fédéral. Ce qui implique l'usage du décloisonnement sectoriel ou géographique, l'acceptation de la diversité organisationnelle, et la conscience qu'il s'agit d'une construction à partir des capacités et volontés réelles des acteurs tels qu'ils sont et non tels que nous aimerions qu'ils soient.

Dépasser le clivage léniniste réforme ou révolution
C'est sur ces questions concrètes que doivent s'engager les anarchistes, sans avoir peur de se faire taxer de réformistes. L'opposition binaire entre réforme et révolution relève d'ailleurs d'une culture léniniste qui n'est pas la nôtre, mais qui, après mai 68, vu notre faiblesse, nos insuffisances et nos inclinaisons pour le romantisme révolutionnaire chez certains, nous ont trop éloigné du terrain concret. [...]
Toutes choses égales par ailleurs, la construction de la convergence de collectifs autogestionnaires au début du XXIe siècle représente un enjeu similaire à la construction du syndicalisme au début du XXe siècle. Le contexte n'est pas identique, mais les mêmes erreurs (purisme, dogmatisme, velléitarisme, insouciance) ne doivent pas être renouvelées vis-à-vis des dérives politiciennes et autoritaires qui se profilent.


Dans un autre document,
L'autogestion et les alternatives
Contribution de la Fédération Anarchiste Francophone, 4ème congrès de l'IFA, Août 2012.
http://i-f-a.org/index.php/fr/documents-de-congres/88-l-autogestion-et-les-alternatives

Trois démarches s'imposent à nous : poser les conditions d'un large débat contemporain sur l'autogestion anarchiste et faire oeuvre de pédagogie en exploitant notre patrimoine propre ; redéfinir les valeurs et les objectifs de la société autogérée anarchiste et des pratiques associées ; et encourager concrètement le passage à l'acte en insistant sur la convergence des pratiques et des objectifs de l'autogestion anarchiste.


On ne peut que souscrire à tout cela et cela recoupe une partie de ce qui a été dit ici.
L’aspect positif c’est cette conscience du besoin de convergences, la reconnaissance de la diversité, etc...
J’aurais pu citer des exemples dans des documents de AL, mais j’étais sur la FA et l’IFA.

Bien. Maintenant appliquons ces principes au sein de l’anarchisme même avant que de vouloir les élargir à d’autres organisations groupes et initiatives.

Organisez toujours davantage la solidarité internationale, pratique, militante, des travailleurs de tous les métiers et de tous les pays, et rappelez-vous qu’infiniment faibles comme individus, comme localités ou comme pays isolés, vous trouverez une force immense, irrésistible, dans cette universelle collectivité"

Bakounine Lettre aux compagnons de la fédération jurassienne, octobre 1873.

Où est-elle la "stratégie qui structure la convergence" des organisations anarchistes/libertaires dont dépendent "toutes ces aspirations ? "
Qu’y a t’il d’insurmontable à l’instauration d’une Internationale Anarchiste unique ?
Est-ce "l'acceptation de la diversité organisationnelle, et la conscience qu'il s'agit d'une construction à partir des capacités et volontés réelles des acteurs tels qu'ils sont et non tels que nous aimerions qu'ils soient. " ?
En quoi cela serait-il préjudiciable à l’IFA ou à Anarkismo ? Au mouvement anarchiste dans son ensemble ?

Nous devons à nos anciens au moins deux choses :
• Comprendre pourquoi le mouvement libertaire après Saint-Imier a régressé dans certains pays et pas dans d’autres, et en particulier définir les causes internes de cette régression ;
• Engager un processus, dont je me doute qu’il prendra du temps, permettant d’unifier le mouvement libertaire à l’échelle internationale dans la lutte contre le capitalisme et l’Etat, pour
l’émancipation des exploités et des opprimés.


Intervention aux Rencontres internationales sur l’anarchisme,
Saint-Imier 8 août 2012 René Berthier
http://monde-nouveau.net/IMG/pdf/Intervention_Saint-Imier_-_Monde-nouveau.pdf

Et çà valait bien de lui offrir à boire. :)
Modifié en dernier par digger le 28 Oct 2012, 12:35, modifié 1 fois.
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Re: Qu'est ce qui cloche dans l'anarchisme aujoud'hui ?

Messagede Spike » 28 Oct 2012, 12:11

Ok, mais tout ça me semble un peu de la langue de bois.
En gros ça dit "anarchistes de tous les pays unissez-vous" mais ça ne donne aucunes solutions sur comment construire cette unité.
Par exemple je crois savoir que la scission entre la FA et la CGA repose essentiellement sur la participation ou non à certaines élections. Est trop difficile de passer au dessus de cette divergence et d'avoir une organisation avec différentes tendances qui se côtoient?

Enfin, il me semble que tu inverses le processus quand tu dis:
Bien. Maintenant appliquons ces principes au sein de l’anarchisme même avant que de vouloir les élargir à d’autres organisations groupes et initiatives.


C'est devant le refus d'unification des anars (souvent par pureté idéologique) que certains tels que moi cherche à construire une unité plus large.
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Re: Qu'est ce qui cloche dans l'anarchisme aujoud'hui ?

Messagede digger » 28 Oct 2012, 14:40

Est-il trop difficile de passer au dessus de cette divergence et d'avoir une organisation avec différentes tendances qui se côtoient?

C’est bien toute la question. Surtout lorsque tout le monde (ou presque) reconnaît que l’anarchisme est pluriel.

C'est devant le refus d'unification des anars (souvent par pureté idéologique) que certains tels que moi cherche à construire une unité plus large.


Et ils sont de plus en nombreux. Mais cette démarche est insatisfaisante des deux côtés. Du côté de l’anarchisme "institutionnel" (IFA, Anarkismo, CGA, etc) parce qu’il perd des forces vives alors qu’il n’y en a pas trop déjà. Et parce qu’il va se trouver à un moment donné marginalisé par rapport à des mouvements plus larges dans lesquels il n’aura pas le poids qu’il mériterait.
Et du point de vue de celles et ceux qui recherchent à construire une convergence (je préfère cela à unité qui laisse entendre une certaine uniformité), il faut ré-inventer l’eau chaude, recréer des structures, des contacts, etc...
La solution dépend avant tout d’une volonté politique et repose uniquement sur les organisations en question. Apparemment, ce n’est pas à l’ordre du jour. Je n’ai pas la vérité infuse, mais je pense que c’est une erreur dramatique pour l’avenir de l’anarchisme social. Son message sera de plus en plus brouillé et illisible, noyé dans une myriade de groupuscules indépendants les uns des autres ou dans l’individualisme forcené, ou encore dans des dérives extrémistes de type insurrectionnalistes et probablement tout à la fois.
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Re: Qu'est ce qui cloche dans l'anarchisme aujoud'hui ?

Messagede Spike » 28 Oct 2012, 15:21

Ton analyse me semble assez juste.
Cependant pour moi les deux options ne se valent pas. Personnellement j'estime faire partie d'une classe qui à différentes sensibilités (anarchiste, communiste etc.) et je préfère essayer de construire un projet de société en dépassant nos divergences et reposant sur une plus grande diversité d'idées plutôt que de m'enfermer dans une lutte anar stricto-sensu qui souvent rejette tout ce qui n'est pas assez "pur" et qui finalement contribue à créer des divisions au sein de notre classe. Et puis ça nous fait gagner un temps précieux car ça nous évite une "évangélisation" pour faire changer les camarades qui ne sont pas anarchistes.
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Re: Qu'est ce qui cloche dans l'anarchisme aujoud'hui ?

Messagede Nyark nyark » 29 Oct 2012, 09:45

Qui est capable d'expliquer comment l'autogestion permettra de gérer la macro-économie, la recherche, la médecine

viewtopic.php?f=77&t=6630
Une des réponses possibles à cette question essentielle, en tout cas une piste. Merci K.O.A.L.A.
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Re: Qu'est ce qui cloche dans l'anarchisme aujoud'hui ?

Messagede Spike » 29 Oct 2012, 18:04

Nyark nyark a écrit:
Qui est capable d'expliquer comment l'autogestion permettra de gérer la macro-économie, la recherche, la médecine

viewtopic.php?f=77&t=6630
Une des réponses possibles à cette question essentielle, en tout cas une piste. Merci K.O.A.L.A.


Merci N.n et K.O.A.L.A.
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Re: Qu'est ce qui cloche dans l'anarchisme aujoud'hui ?

Messagede digger » 29 Oct 2012, 18:44

Nous sommes d'accord sur l'essentiel, mais je suis anarchiste, même si certainEs contesteraient ce terme par orthodoxie. Ce dont je me fous totalement.
Etant anarchiste, (et donc pensant, à tort ou à raison, que cette pensée politique est la plus apte à résoudre les problèmes de l'humanité et à lui assurer le meilleur avenir, je me préoccupe de sa diffusion auprès du plus grand nombre.
Cette démarche aujourd'hui (comme il y a quelques dizaines d'années) n'est pas possible au sein des principales organisations anarchistes. Je suis donc un électron libre en sachant les limites de cette démarche.
Mais ma famille reste l'anarchisme et quand je participe à une organisation plus large, je m'y présente comme tel. Généralement, la première réflexion est "Y'a pas moyen de travailler avec les anars" (en tout cas venant de militantEs d'autres orgas)
Pour les non-militantEs (politiques ou syndicaux), c'est l'incompréhension totale. Je suis parmi ceux qui insistent le plus sur l'organisation , la méthode. Ce n'est pas vraiment l'idée qu'ils se font de l'anarchisme. Et je fais en sorte de prendre la plus grosse charge de travail, ce qui n'a pas pour but de me faire mousser, mais me permet d'ouvrir ma grande gueule quand un engagement n'a pas été tenu par unE autre.
Si je compare ce que pourrais faire au sein d'une orga anarchiste et ce que je peux faire en dehors, le choix est vite fait.
Mais mon souhait reste une Internationale Anarchiste, parce que dans les mouvements qui se dessinent, il y a besoin de plus que de personnes isolées comme moi. D'une part l'anarchisme en sera exclu et d'autre part, ces mouvements tomberont tôt ou tard aux mains de manipulateurs gauchistes ou de récupérateurs libéraux.
Après, dans la vie de tous les jours, que l'on soit catho, marxiste ou je ne sais quoi, je m'en contrefous. Il y a un objectif, on est d'accord dessus et basta.
L'objectif minimum est la destruction du capitalisme avec un accord sur les moyens pour y parvenir. Et cela inclut l'organisation horizontale dans les prises de décisions.
Je ne parle pas de luttes locales, comme ND des Landes, par exemple, où les objectifs sont plus limités. Là le but est plus préçis dans le temps et les alliances beaucoup plus larges. Mais c'est aussi dans ce genre de lutte que l'on voit la crédibilité des orgas, comme la trahison des écolos politiques, plus préoccupés à garder leur place dans la municipalité de Ayrault que de crapahuter dans la boue en face des CRS.
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Re: Qu'est ce qui cloche dans l'anarchisme aujoud'hui ?

Messagede Nyark nyark » 30 Oct 2012, 17:30

La religion est la forme la plus achevée du mépris (Raoul Vaneigem)
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Re: Qu'est ce qui cloche dans l'anarchisme aujoud'hui ?

Messagede Roro » 03 Nov 2012, 01:54

Salut,

Je (re)débarque ici (salut aux ancien.ne.s !), j'ai pas tout tout lu (5 pages, c'est long), donc désolé si des gens ont déjà dit des trucs que je vais dire.

Le gros problème de l'anarchisme aujourd'hui est, et cela a déjà été dit mais je crois qu'il est pas mauvais de le répéter, c'est qu'il y en a qui sont dans des situations de pouvoirs. Et ce indépendamment du fait qu'ils prennent ou non des mandats. C'est parfois très criant. C'est l'image du (ou des) "gardien du temple". On en a tous connu et on connait tous (pour les gens qui, comme moi, ont milité dans les cercles libertaires ou le font encore). Et le gros problème, c'est que ces gardiens du temple font quasi partie des meubles. C'est-à-dire qu'ils sont très peu remis en cause. Le fait que des liens d'affinités se créent entre camarades n'y ait sans doute pas étranger. Et je crois que la sclérose des milieux militants est liée en partie à cela.

Les petites cliques de gens qui se connaissent entre eux sont une véritable plaie. Je parle des ces petits groupes affinitaires qui font des discussions de couloir sur des décisions collectives. S'accaparant ainsi de fait le pouvoir au sein des lieux autogérés et des orgas/groupes anars.

La question de la temporalité donnée au militantisme aussi est problématique. Ça ressemble parfois à une sorte de catéchisme du révolutionnaire dans sa version littérale. Et ça donne des situations des fois totalement ubuesques où des anars, parce que ne donnant pas (selon les doctrinaires) assez de leur temps au mouvement, sont plus ou moins disqualifiés de façon implicite ou non. Ce sont les retours que l'on peut avoir lors d'actions, ou de manifs, ou de réunions unitaires. "Untel a pas fait-ci, unetelle est pas venue à telle action" etc, etc. Je pense que les personnes militantes voient très bien de quoi je parle. Nos milieux sont petits, tout finit par se savoir. Y compris les railleries dont on peut être l'objet.

Je suis aussi absolument d'accord avec ce qu'a dit berneri, à savoir qu'il n'y a plus d'allers-retours entre le théorique et le pratique. C'est-à-dire que les concepts anarchistes sont peu remis en cause au regard de la pratique, de la réalité sociale. Attention, je ne parle pas nécessairement ici des fondamentaux de l'anarchisme (les réflexions sur l'état, le capitalisme), et encore que... Je parle notamment de la propagande. Il y a une formidable défiance et une décrédibilisation totale à l'égard des réseaux sociaux par exemple. Les journaux mainstream qui ont des formats en ligne sont littéralement envahis par les commentaires des frontistes et des identitaires. C'est devenu leur terrain de jeu, parce qu'ils sont sut, eux, opérer le tournant d'internet et des réseaux sociaux. Et j'ai bien peur qu'il soit trop tard pour espérer inverser la tendance. Ce n'est qu'un exemple, mais il faut quand même reconnaitre que le mouvement anar fait souvent plus penser à un mouvement d'historien qu'à un mouvement ancré dans le présent.

L'absence de stratégie de court, moyen et long terme a aussi été posé. Mais cela à mon avis revient avant tout aux orgas, et aux militant.e.s (encartés ou non) locaux. Au sens où les groupes affinitaires et où les individus pouvant se greffer ponctuellement avec des orgas n'ont que peu de possibilités d'avoir des stratégies tournées vers l'avenir du fait de leur hétérogénéité et du fait qu'un groupe affinitaire a potentiellement plus de chances de se casser la gueule au bout d'un an qu'une orga (en tout cas en théorie).

J'en reviens du coup à la question des chapelles. Très rares sont les groupes/orgas qui daignent s'ouvrir, pour des actions ponctuelles ou de plus long terme à des individus/groupes d'individus. Je pense que c'est se priver d'une force potentielle qui peut, du coup, ouvrir davantage de possibilités en terme de possibilités d'actions (on fait pas les même actions à 7 qu'à 30) et de propagande (on peut couvrir plus de terrain(s) quand il y a du monde). Et on en revient par là à la question de l'investissement personnel que j'ai évoqué plus haut.

La boucle est bouclée j'ai envie de dire !
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