Fonction socio-politique de l'islamophobie

Fonction socio-politique de l'islamophobie

Messagede altersocial » 29 Sep 2012, 14:14

C'est un texte que j'ai envoyé seulement par mail à des copains syndiqués puis à des militants de quelques horizons politiques ... Je l'ai posté dans le forum sur le racisme car c'est l'esprit de fond de mon intervention : contribuer à créer un débat sur la nature raciste de l'islamophobie. Bien sûr les modérateurs décideront si ce sujet à selon eux sa place dans cette partie-là. :wink:

Fonction socio-politique de l'islamophobie

De la confusion en milieu militant

Qu'est-ce que l'islamophobie ? Comment intervient-elle dans les politiques concrètes de ceux qui la produisent ? Comment se construit-elle dans l'imaginaire idéologique des militants ?

Répondre à ces questions c'est déjà déterminer ce que n'est pas l'islamophobie.
L'islamophobie comme critique d'une religion spécifique et non pas de l'ensemble des religions part du principe idéaliste :
1- que cette religion est un fait idéologique à combattre par d'autres formes idéologiques,
2- que la religion est un ensemble de phénomènes déterminés, quantifiables par une comptabilité cynique qui met en concurrence les religions entre elles (certaines sont "moins pires que d'autres"),
3- que les phénomènes par lesquels s'exprime cette religion dans sa dimension politique ne sont pas le produit d'antagonismes nationaux et internationaux complexes.
L'islamophobie prend alors une dimension idéologique et émotionnelle. Et quand la peste émotionnelle se mêle à la politique, toutes les dérives sont possibles.

L'islamophobie s'attaque donc à la conscience, à une fausse conscience, pour la relier à l'être qui produit cette conscience : la masse informe et diversifiée des "populations musulmanes". Dans quel contexte ? Et c'est là qu'intervient la propagande officielle.

On sait en quoi au siècle dernier l'antisémitisme à créer le sémitisme de toute pièce dans le but de créer une "unité ethnique" en partant d'une religion (le judaïsme) afin de créer les conditions d'une propagande politique prêtant à un groupe pseudo-ethnique une culture construite par des préjugés millénaires.

L'islamophobie a été construite dans un contexte produit par des phénomènes multiples :

- Emergence de l'islam politique (l'islamisme) par des catégories de la bourgeoisie moyen-orientale : l'islam est alors instrumentalisé comme outil d' (une pseudo-) "émancipation" nationale, faisant suite à l'échec du panarabisme (baasisme, nasserisme, etc.) à affronter le néocolonialisme occidental.

- Renforcement d'une xénophobie politique amalgamant dans un même discours différentes caractéristiques supposées à une immigration multiforme (insécurité, Islam, chômage, etc.). La fonction politique de cette idéologie xénophobe étant de détourner la classe ouvrière de la lutte sociale on assiste à une adaptation, un enrichissement de sa thématique : de "trois millions d'immigrés, 3 millions de chômeurs" cette idéologie se nourrit alors de la radicalisation de certaines franges ultra-marginales supposées issues de l'immigration vers l'islam radical pour accéder au second stade de sa propagande paranoïaque. Cette propagande affirme alors que ces "envahisseurs" supposés vivre matériellement des subsides des ex-puissances coloniales fomentent désormais un complot visant à la conversion brutale à l'islam (les occidentales seront voilées de force, plus de porc dans les supermarchés, etc.). A cela s'est ajoutée à l'échelon international la naissance d'un islam politique dont nous avons déjà parlé. A la motivation économique est ajoutée alors idéellement une motivation idéologique. La barbarie est à son comble.

Les médias capitalistes ont joué un rôle déterminant dans cette construction idéologique. Sur la scène internationale, tandis que l'affrontement entre les puissances occidentales (pour le contrôle des ressources énergétique du Moyen-Orient) et certaines fractions des bourgeoisie nationales orientales prenaient la forme de terrorismes ou de guérillas, les aspects anti-occidentaux spectaculaires de ces résistances étaient mises en avant afin de discréditer ces groupes politiques en insistant sur le caractère religieux afin de masquer l'enjeu des intérêts coloniaux. D'un affrontement entre le capitalisme occidental conquérant et les groupes politiques fondamentalistes issus des bourgeoisie locales on construit alors idéologiquement un "affrontement des civilisations". La lutte des classes est abolie médiatiquement par la mise en place du spectacle de la guerre entre les bonnes sociétés chrétiennes/laïques et, par un savant raccourci, les sociétés "tribales" musulmanes.
Une contradiction forte se posait toutefois : le besoin d'une pacification sociale totale (de l'Arabie saoudite au Pakistan) dans les quelques Etats "pro-occidentaux" rendait plus nécessaire les pratiques radicales de l'islam tandis que l'aboutissement de ces mêmes pratiques amenait à une remise en cause de cette collaboration géopolitique.

N'allez pas croire qu'il s'agit là d'un complot "médiatico-capitaliste" : les mécanismes de production de masse de l'information consommable se passent de telles considérations lorsque la peur est une marchandise sur laquelle se jette le consommateur, des faits-divers glauques au terrorisme international. Le besoin de consommation d'un environnement anxiogène n'est pas le but du débat ici.

Le but ici est de relier les mécanismes de cet propagande à une justification géopolitique du néocolonialisme occidental.

Comme toute entreprise coloniale, l'objectif est de déshumaniser les populations ciblées par le néocolonialisme en leur attribuant des qualités négatives. Ces qualités négatives ont pu être dans l'histoire l'anthropophagie systématique prêtée à certaines populations, jugées inférieures par ces pratiques, et dont l'animalité attribuée les rendait inaptes à disposer de leur territoire. D'autres fois l'infériorité des peuples soumis ne peut être démontrées par des aspects terrifiants supposés dans leur culture, il est alors fait appel à des théories pseudo-scientifiques sur la taille du cerveau, etc afin de démontrer l'infériorité de la population à dominer. Ces techniques ne recoupaient pas forcément les couleurs de peau, les prétendues "races". Des scientifiques anglais se prêtaient joyeusement à ces simulacres de procédés scientifiques sur l'aspect de la boîte crânienne des Irlandais afin de justifier la colonisation de leur île. Le relais dans la presse populaire était alors considérable.

Cependant de nos jours les ficelles seraient trop grosses, les populations à conquérir ne sont plus barbares génétiquement mais idéologiquement. Il y a les peuples supérieurs, ceux qui produisent la démocratie formelle et/ou la laïcité (à deux niveaux) et les peuples inférieurs antidémocratiques, noyés dans l'obscurantisme religieux. Cette amnésie récurrente de la propagande officielle justifie en permanence les interventions militaires pour "le bien" des populations et pour prévenir leurs débordements (le terrorisme religieux qui cache les intérêts des bourgeoisies locales). En "Occident", des droites populistes à la gauche libérale c'est ensuite le même schéma qui est utilisé pour créer la diversion permanente face aux problèmes sociaux : l'intégration en tant que négation culturelle de l'immigrant est alors instituée comme élément fondamental d'une idéologie républicaine répressive, se nourrissant de critères caricaturaux qui confinerait au grand comique s'il n'était pas l'instrument d'une répression étatiste quotidienne. Trois génération après, un français issu de l'immigration restera donc un migrant s'il ne répond pas aux critères totalitaires de l'intégration culturelle.

Peut-il alors existé dans le milieu libertaire, et à sa périphérie, un position islamophobe ?

La réponse se trouve dans le développement ci-dessus : les militants doivent-ils "coller" leur réaction à la propagande bourgeoise et suivre sa paranoïa aux visées pro-coloniales ? L'islamophobie libertaire ou d'extrême gauche ne se range évidement pas dans les visées géopolitiques ou politiques des bourgeoisies occidentales. Devenu un véritable sujet de société, l'islam (voir "l'islamisation") se pose alors à l'extrême gauche comme un thème incontournable, la force matérielle de la propagande journalistique alimente les sujets de comptoir et entraîne les gauches radicales ou libertaires, sommés de prendre position sous peine d'être jugées lâches ou laxistes, sur un terrain construit de toute pièce par les médias capitalistes.
Sur un modèle idéologique on ravive alors le souvenir de postures passées, empreintes de pratiques outrancières, de l'anti-religiosité des anciens, dont le contexte était évidement différent, afin de justifier une islamophobie qui s'inscrirait dans cette continuité -anti-religieuse- d'un mouvement social libre-penseur. Pourquoi pas. Mais c'est alors oublier plusieurs considérations : d'une part la fonction socio-politique du mouvement anticlérical des origines, qui s'inscrivait dans certaines circonstances dans la lutte des classes. D'autre part une analyse de la religion non pas comme un ensemble de phénomènes seulement répressifs mais comme le produit d'un ensemble socio-économique, de rapports de production du capitalisme.
On en vient donc au dernier écueil d'une islamophobie militante progressiste qui croyant bien faire en singeant (en déformant) l'anticléricalisme pratique des anciens en vient à alimenter la confusion générale. De le condamnation du cléricalisme on glisse alors vers la condamnation de la religion (comme si on pouvait condamner la pluie ou la neige) vers la condamnation des "croyants" constitués en corps étrangers dans le mouvement ouvrier. C'est d'une part ignorer ce qu'est la "croyance" pour un individu (quelles sont les motivations -complexes- de cette croyance et sa dimension superficielle) et c'est également ignorer, d'autre part, en quoi un prolétaire croyant, inscrit dans une dynamique collective, peut remettre en cause cette croyance, cette pensée artificielle, confronté à la réalité matérielle de son exploitation. C'est à dire ne plus s'en remettre à des "dieux" mais à la seule force collective.
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Re: Réponse aux critiques

Messagede altersocial » 30 Sep 2012, 15:26

Plusieurs retours, l'un d'entre eux est très intéressant car il cristallise un ensemble d'autres points de vues qui m'ont été adressés sur ce texte. La critique qui m'a été adressée est multiforme car elle repose :

- sur ce que je n'ai pas écrit car n'entrant pas dans le sujet,
- les intentions cachées qu'on me porte
- des incompréhensions naturelles lorsqu'un échange s'établit entre individus.


Je réponds donc ici à un e-mail (très long) mais comme il s'agit de la publication publique d'une correspondance privée je ne dévoilerais pas l'identité (sauf s'il le souhaite car je lui envoie le lien direct du forum) de son auteur.

Commençons donc la liste des reproches qui ont été établis car ils permettront de dissiper tout malentendu :

Il suffit de lire les textes des partis communistes ouvriers d’Iran et d’Irak, textes bien antérieurs au 11 septembre et même à l’intérêt pour l’islamisme, pour comprendre que la critique de l’islam n’a rien à voir avec l’islamophobie imaginaire que toi et d’autres construisez patiemment avec l’aide de la Commission des droits de l’homme de l’ONU, de l’Organisation de la Conférence islamique, des gouvernements américains et d’une bonne partie des intellectuels de gauche.


Je n'ai jamais fait l'amalgame entre la "critique de l'Islam" et l'islamophobie, c'est une production de ton imagination. Si je passe le fait que je n'ai jamais utilisé la date -superficielle, fétichiste et politicienne- du 11 septembre (et le reste de la phrase où l'on m'accuse de travailler pour l'Organisation de la conférence islamique), l'intérêt ici est : il existe une critique de l'islam et celle-ci est communiste. Aveu suprême, elle émane des communistes irakiens et iraniens. Soit. Voyons donc de plus près avec le cas iranien :
-les communistes iraniens ont une critique de l'islam non pas comme choix idéologique mais comme réalité pratique face à la mollahcratie. L'alliance du clergé chi'ite et de la bourgeoisie bazari se constitue en 1979 (cette alliance réactionnaire existait déjà depuis 1890!) comme une force opposée à la classe ouvrière, les liens étroits entre la mollahcratie et le profit de la rente pétrolière, l'utilisation répressive de l'idéologie religieuse par ce clergé dans le but d'une pacification sociale, font de la mollahcratie une partie -centrale, avec les bazaris- de la classe dominante en Iran, l'anti-cléricalisme et la critique de la religion est alors une nécessité pratique pour la lutte des classes et ses formes politiques d'oppression sont à combattre. A cela on peut ajouter l'athéisme iranien qui n'a rien de négligeable et qui permet aux communistes et hekmatistes de développer une critique virulente du clergé et de la religion, notamment à travers les écrits de Mansoor Hekmat que tu dois bien connaître,
- Mansoor Hekmat lui même faisait la différence entre un prolétariat athée (comme la classe ouvrière émigrée iranienne) et de faire la différence entre l'Iran et
L'ORGANISATION A L'ETRANGER DU PARTI COMMUNISTE OUVRIER D'IRAN LE COMITE DE SUEDE 13 JUIN 1997 a écrit:un pays où l'islam est influent parmi ses émigrés, mais pour une organisation qui à affaire aux immigrés venus d'Iran, citadins et profondément anti-religieux, (...) Une organisation, qui veut, encore, diviser l'islam et le mouvement islamique en bon et mauvais, modéré et fondamentaliste, mangeable et empoisonné, populaire et anti-populaire,

La critique de l'islam par un communiste iranien menacé par la réalité de l'existence du clergé iranien n'est pas l'islamophobie d'un péril fantasmé de l'islam en Europe, ce qui est une réalité là bas et une intoxication médiatique ici n'est pas du même ressort.
Du clergé comme force socio-politique :
http://www.marxists.org/francais/hekmat ... 10000b.htm
Mansoor Hekmat a écrit:Par religion, bien entendu, j’entends la machinerie religieuse et certaines religions et non la pensée religieuse ni même la croyance en des religions anciennes ou existantes. Je suis anti-religieux et je souhaite que la société impose plus de limitations, au-delà de la simple laïcité, à la religion organisée et à l’"industrie religieuse".

Comme je l'ai écrit dans mon texte Hekmat fait lui aussi la différence entre croyance individuelle et "machinerie religieuse".

L’islamophobie est un épouvantail construit de toutes pièces qui a plusieurs fonctions

- introduire une concurrence avec la judéophobie (autre tentative idéologique pour remplacer l’antisémitisme par un concept tellement large qu’il empêche toute critique d’Israel), et rester dans une analyse psychologique (“phobique”) du racisme. Double voire triple intérêt, minimiser l’antisémitisme actuel religieux et politique, comparer le judéocide au nettoyage ethnique entrepris par Israel, créer une concurrence absurde des mémoires. Rester dans l’affectif et justement pas sur le terrain rationnel que tu invoques comme plus efficace mais que tu te gardes bien d’illustrer par des exemples concrets....


L'islamophobie n'est pas un épouvantail imaginaire mais une idéologie revendiquée comme telle et s'inscrivant dans l'ensemble très réactionnaire de "guerres de civilisations". Politiser une phobie est effectivement psychologique mais ce fondement psychologique n'exclut pas son existence revendiquée, sa matérialisation en idéologie. Que cette surface cache des motifs "rationnels" est alors une évidence.
L'islamophobie arrange aussi bien la réaction islamique que ses détracteurs, l'un et l'autre se nourrissent réciproquement, et je les ai renvoyé dos à dos dans le texte que je t'ai envoyé.

isoler les athées dans les pays dits musulmans, permettre leur condamnation, leur persécution, leur condamnation à mort ou leur mutilation; permettre aux régime des pays dits musulmans de régenter la vie privée et sociale au nom d’interprétations les plus réactionnaires possibles de leur tradition religieuse.


Aucun rapport avec la position développée dans mon texte, qui renvoie dos à dos les forces réactionnaires de tous les côtés. Encore une fois il s'agit là d'un procès d'intention : on ne juge pas ce qui est écrit mais ce qui n'est pas écrit.
Il semble qu'en plus de nier l'existence d'une étiquette (l'islamophobie) qui s'articule avec une idéologie (raciste) construite, tu ne sembles pas pouvoir admettre qu'il existe une critique communiste de cette étiquette (et des forces réactionnaires qui la composent) qui soit également hostile aux dérives liées à la critique d'Israël.
Pour ne pas laisser de t'étonner je t'affirme donc qu'en plus de ne pas être islamophobe (mais contre les oppressions religieuses dans leur ensemble) je ne suis pas antisioniste (mais contre les 'oppression coloniales dans leur ensemble).
C'est toute la différence entre une critique spécifique d'un phénomène (forcément orienté) et la critique de l'ensemble qui inclut ce phénomène. Toute la différence entre un prolétaire israëlien qui doit s'affirmer antisioniste (sionisme comme réalité politique réactionnaire opposée à sa condition de classe) et un complotiste parisien dont l'antisionisme n'est qu'une étiquette articulée avec une idéologie raciste (antisémite) réelle. Toute la différence entre la critique en actes d'un prolétaire iranien face à la religion comme réalité dans le contexte d'un affrontement de classe avec le clergé et un pseudo-libertaire islamophobe "victime" de l'intoxication paranoïaque ambiante sur l'islamisation prétendue de la société.

justifier les alliances politiques et/ou le soutien politique de forces type Hamas, Hezbollah, Frères musulmans, etc.


Là c'est un glissement subjectif qui demanderait des exemples concrets.

Tes allusions à l’anticléricalisme sont à la fois justes et beaucoup trop générales pour être convaincantes. Quant à l’anticléricalisme dit libertaire ou anarchiste il est resté congelé dans le formol, donc il ne m’intéresse pas et ne permet pas de penser le religieux


Que cet anticléricalisme libertaire ou anarchiste soit "resté congelé dans le formol" ne change rien au fait qu'il soit recyclé de nos jours par toute une frange de l'anarchisme.

Quant à tes réflexions géopolitiques, elles ne sortent pas du cadre intellectuel de la guerre froide, ou de la vision qu’avaient les partisans de l’URSS avant la Seconde Guerre mondiale. Il n’existe plus depuis belle lurette de bourgeoisie ou d’Etat progressiste (n’étant pas marxiste, je dirai même qu’il n’y en avait pas non plus au 19e siècle contrairement à ce que pensait Marx). Il existe des puissances, petites, moyennes et grandes, qui toutes essaient de s’imposer sur le marché mondial, par les armes économiques, par la propagande, par la guerre quand c’est nécessaire. Il n’existe pas de fractions de bourgeoisie progressistes, non plus, ni de bourgeoisies progressistes.


Encore faut-il savoir ce que Marx entendait par "progressisme" : de ne pas être "marxiste" (Marx ne l'était pas non plus) n'empêche pas de comprendre que la bourgeoisie "progressiste" face au conservatisme ou aux restes de féodalité de l'époque de Marx prenait un sens tout différent de ce qu'on entend aujourd'hui. Cependant, connaissant l'ambigüité de ce terme (et le peu d'intérêt à l'articuler avec le sujet présent) je n'ai à aucun moment employé ce terme. Encore moins d'Etat progressiste. Mes conceptions "géopolitiques" ne sont donc en rien rattachées aux schémas de pensée de la guerre froide.

Nous avons le devoir en tant que personnes vivant en France de dénoncer l’Etat français d’abord, mais sans pour autant présenter comme progressistes, ou moins dangereux les autres Etats qu’il s’agisse d’Israel, de la Turquie, de la Somalie, de la Chine, de la Russie, du Pakistan, de l’Indonésie, du Venezuela, de la Bolivie, du Brésil... Ou du Vatican ! Ni tous les mouvements soi-disant anti impérialistes dont la seule idée est de construire un autre Etat bourgeois, de créer une autre petite puissance qui s’alliera à d’autres.


Nous sommes complètement d'accord.

Il est évident que l’idéologie de l’anti-islamophobie sert les intérêts des 57 Etats de l’OCI, mais aussi d’ailleurs, bien d’autres Etats, à commencer par les Etats-Unis qui eux aussi raisonnent en termes de prétendue liberté des religions comme de nombreux gauchistes anglosacons, alors qu’ils ont toujours persécuté leurs oppositions intérieures radicales des anarchistes jusqu’aux staliniens en passant par les trotskystes, les Black Panthers, etc.


Encore une fois, nous sommes complètement d'accord.

Voir à ce sujet le pire produit de l'islamophobie : l'islamophilie du SWP.

L’anti-”islamophobie” n’a de sens que si on fait la différence entre

le racisme pur et simple contre les Arabes, les Iraniens, les Turcs, les Indonésiens, même s’il se réclame des Lumières ou du rationalisme
et la critique des religions, ce que tu ne fais pas, en tout cas pas de façon concrète.


C'est vrai.

Développer une critique de la religion n'était pas le but de mon intervention.

Je ne vois aucune raison d’inventer un nouveau mot pour désigner un vieux phénomène : le racisme qui n’a rien à voir avec la critique des religions ou l’anticléricalisme.


C'est un fait, ce mot a été inventé, et a été inventé pour masquer le racisme institutionnel tel que je le décris à propos de l'idéologie de l'intégration.

Il faut séparer le racisme anti-Arabes,, de la xénophobie contre tous les étrangers non-Européens, de l’intolérance vis-à-vis des pratiques religieuses musulmanes, etc. Toutes attitudes condamnables mais qu’il ne faut pas confondre dans un concept fourre-tout et confusionniste comme celui d’islamophobie. Car sinon on va et c’est déjà fait parler de christophobie, de judéophobie, de bouddhistophobie, etc.


Ca demanderait à être approfondi.

Plutôt que de néocolonialisme, je parlerai de racisme institutionnel, autre forme de racisme beaucoup plus vicieuse et peu dénoncée en France. Ce racisme institutionnel est profondément xénophobe, et peut se parer de l’idéologie républicaine ou démocratique. La référence au néocolonialisme est pour moi souvent un moyen d’éviter de discuter du racisme instituionnel.


J'ai parlé des deux et je l'affirme encore.

Ton texte présente des généralités sur les religions et fait semblant de croire qu’un athée militant est FORCEMENT hostile à toute action commune avec des croyants. Pour ce qui me concerne, en tant que catholique converti quand j’étais ado puis devenu athée quelques années plus tard, puis aujourd’hui en tant que militant aux côtés des sans papiers, je ne me suis jamais posé D’ABORD la question de la religion avant d’entamer une lutte aux côtés de quelqu’un ou d’un groupe donné.

C’est aux croyants de se positionner dans les luttes comme je l’ai fait moi-même quand j’étais catho, et à eux de voir s’ils peuvent oui ou non participer à des luttes. Ce n’est pas aux athées et aux agnostiques de se demander qu’est-ce qui pourrait faciliter ou pas l’unité d’action avec les croyants. Car ceux-ci ne se posent absolument pas la question et n’ont aucun respect particulier pour les athées ou les agnostiques... En tout cas toutes les religions condamnent violemment l’athéisme, l’apostasie, etc. Et chaque fois qu’elles en ont eu le pouvoir elles n’ont pas hésité à utiliser la censure, l’enfermement, la torture et la peine de mort contre les incroyants.

Mais c’est justement la mode de l’anti-islamophobie qui impose aux athées et aux agnostiques non seulement de fermer leur gueule à tout moment, mais en plus d’accepter des meetings avec les femmes à un étage les hommes à un autre (cas de la GB), l’apparition de prières publiques pendant les manifestations publiques contre la guerre (GB encore une fois), etc.


Là je comprends que cela ne soit pas clair : cette partie du texte répondait à la position exprimée par certains libertaires sur des forums au sujet de l'incapacité supposée des croyants à participer à un projet d'émancipation. Elle répondait également aux interrogations par e-mails de certains militants qu'il ne m'était pas possible de publier afin de ne pas alourdir le texte.

Bref les anti islamophobes de gauche sont les meilleurs agents non seulement de l’obscurantisme religieux chez les croyants mais aussi du contrôle de l’espace public que veulent imposer les tendances religieuses les plus militantes.


Je ne pense pas qu'il y ait un syndrome SWP en France.
Il faut établir des nuances entre les différentes formes militantes du refus de l'islamophobie. Celles ci excluent l'islamophilie de la même façon.

Je n’ai aucune sympathie politique pour Fourest, mais la qualifier de raciste c’est ne pas avoir lu un seul de ses livres à commencer par son dialogue avec Taslima Nasreen.... Une autre “islamophobe” selon tes critères....


Je ne connais pas bien cette Fourest en dehors du fait qu'elle participe à des petites fêtes de la gauche étatiste, ce qui m'indiffère d'une certaine façon. Je n'ai donc jamais manifesté d'hostilité à son égard (en attendant d'être plus informé).
Pour ce qui est de Taslima Nasreem elle n'est pas islamophobe, elle n'est même jamais tombée dans le piège de la critique exclusive d'une religion (pourtant cela aurait paru logique) mais son expérience de l'oppression religieuse l'a très justement conduit à critiqué l'ensemble de la machinerie religieuse.
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Re: Fonction socio-politique de l'islamophobie

Messagede Flo » 30 Sep 2012, 17:09

Salut Altersocial,

J'ai parcouru ton texte et j'ai passé (en diagonal) les critiques qui t'ont été adressées. Je ne l'ai trouve pas très pertinentes et il me semble qu'elles passent parfois à côté de la plaque donc je n'y ferai pas référence. Les miennes ne seront peut-être pas forcément mieux mais je vais quand même en essayer, espérant que ça t'apporte 2 - 3 éléments.

D'abord je voulais juste te dire que je m'accordais totalement avec toi sur ce paragraphe :

N'allez pas croire qu'il s'agit là d'un complot "médiatico-capitaliste" : les mécanismes de production de masse de l'information consommable se passent de telles considérations lorsque la peur est une marchandise sur laquelle se jette le consommateur, des faits-divers glauques au terrorisme international. Le besoin de consommation d'un environnement anxiogène n'est pas le but du débat ici.


Et celui là :

Cependant de nos jours les ficelles seraient trop grosses, les populations à conquérir ne sont plus barbares génétiquement mais idéologiquement. Il y a les peuples supérieurs, ceux qui produisent la démocratie formelle et/ou la laïcité (à deux niveaux) et les peuples inférieurs antidémocratiques, noyés dans l'obscurantisme religieux. Cette amnésie récurrente de la propagande officielle justifie en permanence les interventions militaires pour "le bien" des populations et pour prévenir leurs débordements (le terrorisme religieux qui cache les intérêts des bourgeoisies locales). En "Occident", des droites populistes à la gauche libérale c'est ensuite le même schéma qui est utilisé pour créer la diversion permanente face aux problèmes sociaux : l'intégration en tant que négation culturelle de l'immigrant est alors instituée comme élément fondamental d'une idéologie républicaine répressive, se nourrissant de critères caricaturaux qui confinerait au grand comique s'il n'était pas l'instrument d'une répression étatiste quotidienne. Trois génération après, un français issu de l'immigration restera donc un migrant s'il ne répond pas aux critères totalitaires de l'intégration culturelle.


Qu'est-ce-qui me gène dans le texte alors ?

La manière dont tu poses ta thèse centrale. Pourquoi l'islamophobie, fait idéologique, aurait pour irréductible fonction de masquer la lutte des classes ? Déjà on est tenté de se demander si c'est véritablement son rôle puisqu'il existe bien, aussi, une classe bourgeoise musulmane en France - et évidement ailleurs - ce qui signifie que cela rentrerait aussi en contradiction avec ses intérêts puisqu'elle serait aussi, de son côté, stigmatisé au point d'en subir les conséquences socio-économique. Exemple : un cadre d'entreprise musulman qui touche bien sa vie se fait licencier pour avoir pété les plombs à force de subir la stigmatisation de ses collègues non-musulman. Histoire vraie, si j'en croit, du moins, le syndicaliste qui me l'avait contée. Mais admettons qu'il s'agisse là de ce genre d'exception à la règle que la réalité contient toujours. Je pense que ne pas voir que le racisme et l'anti-islamisme conduise à ignorer le caractère d'une population croyante majoritairement plus exploitée et précaire (et qui trouve, d'ailleurs, parfois refuge dans la religion pour ces raisons) serait tomber dans un anti-marxisme primaire. Il suffit de bosser dans n'importe quelle grande entreprise pour se rendre compte qu'ils sont majoritaires à en occuper les postes les plus subalternes et dégradant ou, simplement de se balader en Île de France pour voir qui sont aujourd'hui les plus pauvres et les plus exclus économiquement. Bref, la thèse ne me dérange donc pas tant que ça, en fait, à ta place, j'aurai essayé de l'étayer d'avantage au regard des autres formes de dominations existantes.

Effectivement : on pourrait aussi concevoir que l'islamophobie peut être un avatar de la domination masculiniste. Je m'explique. La logique étant qu'en conduisant à stigmatiser les femmes comme étant non-libres, (soit-disant) incapables d'autonomie idéelle puisque aliénées par leurs principes religieux dont le foulard ou la bourqua qu'elle porte n'en serait que l'éternel signe, on en vient assez rapidement à oublier que, d'un autre côté, le capitalisme, en imposant les codes sociaux de sa domination marchande sur le corps des femmes par le biais de la publicité, du "savoir-être" au travail, des magasines féminins, etc. engendre des obstacles à l'auto-détermination de la femme dite "occidentale". Et que dire alors du discours anti-islam qui ne voit que les mulsulmanes comme victimes aujourd'hui quand l'institution patriarcale avec ses éternels plafonds de verre dans les milieux bourgeois, dans ceux de l’entreprise et dans le milieux militant (hélas) mais aussi par la remontée évidente du machisme aujourd'hui oppriment finalement toutes les femmes. Pour résumer donc : l'islamophobie en conduisant à laisser pensé que seules les musulmanes subiraient le patriarcat (pour aller vite) ne conduit pas-t-elle à oublier que nous sommes encore très loin d'avoir obtenu l'égalité homme-femme dans l'ensemble de la société ? Peut-être aurais-tu pu compléter la fonction de l'islamophobie en ce sens.

Pour aller au bout de mon trip théorico-militant, je pense même que ta thèse aurait gagner en puissance si t'avais pensé l'islamophobie comme le résultat d'une fonction de masque d'une superposition de dominations (plutôt que de conclure simplement à un voile empêchant de voir la lutte des classes) Tu as parlé de lutte de classe, j'ai précisé la domination masculine. Tu as aussi évoqué dans le paragraphe que j'aimais celle du néo-colonialisme. Peut-être trouvé un moyen de les articuler toute 3 aurait dans une formulation lapidaire aurait apporté le dernier coup de grâce à tous les tenants de cette saleté de racisme contre les croyants. Ce n'est qu'un détail évidement. A toi de voir ce que tu en fait.

et c'est également ignorer, d'autre part, en quoi un prolétaire croyant, inscrit dans une dynamique collective, peut remettre en cause cette croyance, cette pensée artificielle, confronté à la réalité matérielle de son exploitation

Dernier remarque sur ce passage : pourquoi pas, mais ayant étudié un peu les grèves d'ouvrier d'algériens et africains des années 70 et 80 dans l'automobile, je n'ai rien vu de tel se produire. La religion pour eux demeurée quelque chose cantonnée à la vie privée à laquelle il ne voyait aucun lien avec leur condition matériel d'exploité. Je suis donc pas sûr que l'un entraîne l'autre de manière mécanique...disons qu'en fait je ne le pense pas du tout, car être religieux n'empêche aucunement d'être socialiste radicale, voire anarchiste. En plus c'est quand même pas évident de prouver aujourd'hui que la religion est un piller de soutien du capitalisme, ce bon vieux Max Weber a quand même un peu fait son temps : le capitalisme est devenu une religion en lui même par l'éthos égoïste, individualiste négatif et compétitif qu'il diffuse de l'institution scolaire jusqu'à n'importe quel jeu télévisé à la noix.

J'espère t'avoir apporté quelques éléments intéressants. Bonne chance en tout cas si tu en écris d'autre.
Au fait tu fais des études ? L'emploi des termes "socio-politique" et ta perspective fonctionnaliste assez typique de la sociologie critique que tu mets en œuvre ici me le laisse supposé :)
"La société à venir n'a pas d'autre choix que de reprendre et de développer les projets d'autogestion qui ont fondé sur l'autonomie des individus une quête d'harmonie où le bonheur de tous serait solidaire du bonheur de chacun". R. Vaneigem
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Re: Fonction socio-politique de l'islamophobie

Messagede altersocial » 30 Sep 2012, 20:13

Merci pour tes critiques Flo, 8-)
je répondrai en plusieurs fois car tes critiques portent sur des éléments à approfondir qui sont essentiels pour comprendre les mécanismes (idéologie/domination) et dont certaines données m'échappent un peu.

Flo a écrit:J'ai parcouru ton texte et j'ai passé (en diagonal) les critiques qui t'ont été adressées. Je ne l'ai trouve pas très pertinentes et il me semble qu'elles passent parfois à côté de la plaque donc je n'y ferai pas référence.


J'ai envoyé ce texte à Yves Coleman parce que j'étais complètement en accord avec son dernier texte :
Charlie Hebdo, les « musulmans » (1) et la liberté d’expression : faux débats et vraies questions
J'avais écrit le miens la même semaine et il rejoignait sa position par certains aspects. Depuis sa première critique Y.C a lu mes réponses et m'a envoyé une deuxième réponse très constructive que je publierai bientôt ici. Dont voici un extrait :

Mon affirmation était bêtement polémique mais je voulais faire ressortir que ta réutilisation d’un concept (l’islamophobie) massivement utilisé par des Etats qui sont nos adversaires, comme tous les Etats, ne peut se faire, si cela te semble vraiment indispensable, qu’en élaborant une nouvelle définition. Or tu ne te démarques pas de leur définition, tu n’en fais pas la critique.


C'est vrai que le texte que j'ai publié l'a été en conséquence d'un échange de mails sur le sujet avec des copains militants, échange pendant lequel la définition d' "islamophobie" avait déjà été abordée et semblait acquise. J'y reviendrai.

Flo a écrit:Dernier remarque sur ce passage : pourquoi pas, mais ayant étudié un peu les grèves d'ouvrier d'algériens et africains des années 70 et 80 dans l'automobile, je n'ai rien vu de tel se produire. La religion pour eux demeurée quelque chose cantonnée à la vie privée à laquelle il ne voyait aucun lien avec leur condition matériel d'exploité. Je suis donc pas sûr que l'un entraîne l'autre de manière mécanique..


- En admettant que je sois d'accord pour inclure les grèves revendicatives dans l'émancipation, je ne dirais pas que celle-ci est une dissolution de la croyance, je pensais plutôt dire que c'est l'abolition de la médiation divine pour remédier aux problèmes terrestres. Qu'importe ce que je dis penser en tant que croyant, mes actes contredisent mes pensées : ne plus s'en remettre à la fatalité divine et agir collectivement c'est à dire démontrer que le mouvement des hommes fait l'histoire, et non plus un Dieu quelconque, c'est déjà un athéisme en acte, un athéisme en soi.

Flo a écrit:.disons qu'en fait je ne le pense pas du tout, car être religieux n'empêche aucunement d'être socialiste radicale, voire anarchiste


Je suis complètement d'accord, et c'est ce que je pensais avoir sous-entendu car je voulais répondre, justement, à la polémique que j'avais lue dans un autre topic. Les chrétiens du MLP des années 60 par exemple, pour l'abolition de la société de classes et du capitalisme, étaient des révolutionnaires tandis que les athées du Parti radical de gauche n'étaient que des keynésiens.

Flo a écrit:En plus c'est quand même pas évident de prouver aujourd'hui que la religion est un piller de soutien du capitalisme, ce bon vieux Max Weber a quand même un peu fait son temps : le capitalisme est devenu une religion en lui même par l'éthos égoïste, individualiste négatif et compétitif qu'il diffuse de l'institution scolaire jusqu'à n'importe quel jeu télévisé à la noix.


C'est vrai qu'il faut introduire une nuance forte:
1 entre la religion et son instrumentalisation politique par les clergés,
2 entre le soutien au capitalisme -je n'y crois pas- et le soutien à l'ordre social,
3 entre les sociétés à structure traditionnelle et les sociétés industriels/post-industriels,

(Il faut également appuyer, dans les sociétés actuelles, sur les contradictions très fortes qui oppose la marchandise religieuse au développement global de l'économie capitaliste.)

Si on estime donc que l'instrumentalisation de la religion dans une société traditionnelle pacifie les velléités de révolte contre l'ordre social existant et qu'en plus les phénomènes d'acculturation sont lents, on voit donc que les parties de la classe ouvrière issue des sociétés traditionnelles ne peuvent s'affranchir magiquement de représentations et de pratiques sociales ("religieuses") d'une façon aussi rapide.
La dissolution des sociétés traditionnelles (développement/modification des rapports sociaux) permet alors de s'affranchir de la coercition religieuse pour se soumettre comme tu le montres justement à la "religion" capitaliste.

Au fait tu fais des études ?


Non je ne suis pas étudiant! Je t'ai répondu en mp. :wink:


La suite de mes réponses à tes remarques prochainement, merci de ta patience par avance 8-)
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Re: Fonction socio-politique de l'islamophobie

Messagede altersocial » 02 Oct 2012, 17:57

Deuxième réponse (en attendant les autres :wink: )

Flo a écrit:La manière dont tu poses ta thèse centrale. Pourquoi l'islamophobie, fait idéologique, aurait pour irréductible fonction de masquer la lutte des classes ? Déjà on est tenté de se demander si c'est véritablement son rôle puisqu'il existe bien, aussi, une classe bourgeoise musulmane en France - et évidement ailleurs - ce qui signifie que cela rentrerait aussi en contradiction avec ses intérêts puisqu'elle serait aussi, de son côté, stigmatisé au point d'en subir les conséquences socio-économique. Exemple : un cadre d'entreprise musulman qui touche bien sa vie se fait licencier pour avoir pété les plombs à force de subir la stigmatisation de ses collègues non-musulman. Histoire vraie, si j'en croit, du moins, le syndicaliste qui me l'avait contée. Mais admettons qu'il s'agisse là de ce genre d'exception à la règle que la réalité contient toujours. Je pense que ne pas voir que le racisme et l'anti-islamisme conduise à ignorer le caractère d'une population croyante majoritairement plus exploitée et précaire (et qui trouve, d'ailleurs, parfois refuge dans la religion pour ces raisons) serait tomber dans un anti-marxisme primaire. Il suffit de bosser dans n'importe quelle grande entreprise pour se rendre compte qu'ils sont majoritaires à en occuper les postes les plus subalternes et dégradant ou, simplement de se balader en Île de France pour voir qui sont aujourd'hui les plus pauvres et les plus exclus économiquement. Bref, la thèse ne me dérange donc pas tant que ça, en fait, à ta place, j'aurai essayé de l'étayer d'avantage au regard des autres formes de dominations existantes.


Fonction "irréductible" je ne pense pas, les objectifs sont également sur la scène de l'impérialisme. Ceci dit la "classe bourgeoise musulmane" cela a peu de signification dans l'inconscient collectif, ce même inconscient qui joue ici le rôle d'une force matérielle construite dialectiquement entre les préjugés populaires et la propagande éditorialiste. Si l'on fait référence aux classes moyennes issues de l'immigration qui ont trouvé refuge dans les professions libérales (avocats, médecins,...) on est alors frappé par la "laïcisation" de ces couches sociales et donc de l'opportunité à les ranger derrière une étiquette religieuse. Qu'en penses tu ?
Cependant même si une bourgeoisie "musulmane" émergeait (c'est à dire se revendiquant sociologiquement et religieusement comme telle comme le font certaines assoces qu'on retrouve à l'UOIF etc) il n'empêche : le leurre posé à la classe ouvrière française est celui du danger de "l'ennemi de l'intérieur" : le casseur des cités, le musulman pratiquant, le travailleur immigré "concurrentiel", ... ("l'ennemi de l'extérieur" y participe aussi : ouvriers chinois = délocalisations, le "routier polonais", etc). Cette construction paranoïaque de "l'ennemi de l'intérieur" j'aurai pu le développer d'ailleurs mais comme je l'esquissais alors: c'est rentrer dans le domaine de la production d'information anxiogène = construire des antagonismes artificiels (à partir de faits divers réels) afin de convaincre les "citoyens" de se réfugier derrière l' "Etat fort" et ses valeurs. La façon dont les préjugés et la propagande éditorialistes se sont nourris l'un et l'autre entraînant une dérive inédite d'un nouveau discours médiatique est, il me semble, à l'origine -parmi d'autres facteurs- de l'explosion de l'électorat FN (islamophobie+xénophobie+protectionnisme).

A plus tard! :wink:
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Re: Fonction socio-politique de l'islamophobie

Messagede atheus » 02 Oct 2012, 19:09

Je réagirai juste sur le titre : "Fonction socio-politique de l'islamophobie"

ce genre de formulation laissant penser que l’islamophobie aurait un but précis, défini par quelques éminences grises, moi ça me fait un peu penser du conspirationnisme. Je ne sais pas exactement ce que tu voulais dire par là, altersocial, mais moi je trouve ça ambigu. L'islamophobie a surement une, voire des causes, mais certainement pas un but, c'est un phénomène social, et tout ce qui se passe dans notre société n'est pas dicté à la lettre par quelques personnes, ni même par un groupe plus large. Cela ne veut pas dire que l'islamophobie n'est pas instrumentalisée, évidemment qu'elle l'est, mais de là à dire qu'elle a une fonction, un rôle, ça va un peu loin je trouve.
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Re: Fonction socio-politique de l'islamophobie

Messagede altersocial » 03 Oct 2012, 10:59

Je t'invite donc à lire au-delà du titre :wink: Notamment ce passage -parmi d'autres qui en font allusion également :

N'allez pas croire qu'il s'agit là d'un complot "médiatico-capitaliste" : les mécanismes de production de masse de l'information consommable se passent de telles considérations lorsque la peur est une marchandise sur laquelle se jette le consommateur, des faits-divers glauques au terrorisme international. Le besoin de consommation d'un environnement anxiogène n'est pas le but du débat ici.


Car justement là où il y a convergence complexe de mécanismes multiples on exclut tout complot. La fonction exclut alors toute intention -subjective- ainsi que tout mono-déterminisme réducteur.
Je pense que l'on soit donc totalement d'accord à ce sujet (sauf peut être ... sur le titre du sujet :wink: )
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Re: Fonction socio-politique de l'islamophobie

Messagede Flo » 03 Oct 2012, 11:35

atheus a écrit:Je réagirai juste sur le titre : "Fonction socio-politique de l'islamophobie"

ce genre de formulation laissant penser que l’islamophobie aurait un but précis, défini par quelques éminences grises, moi ça me fait un peu penser du conspirationnisme. Je ne sais pas exactement ce que tu voulais dire par là, altersocial, mais moi je trouve ça ambigu. L'islamophobie a surement une, voire des causes, mais certainement pas un but, c'est un phénomène social, et tout ce qui se passe dans notre société n'est pas dicté à la lettre par quelques personnes, ni même par un groupe plus large. Cela ne veut pas dire que l'islamophobie n'est pas instrumentalisée, évidemment qu'elle l'est, mais de là à dire qu'elle a une fonction, un rôle, ça va un peu loin je trouve.


Ben faut lire l'article d'altersocial pour comprendre qu'il ne s'agit aucunement ici de faire de l'islamophobie un vecteur du complotisme...On peut tout à fait considéré qu'une idéologie ou une tendance de pensée (appelle là comme tu veux) puisse servir les buts électoraux de certains partis politiques à posteriori de son existence sans que ceux-ci n'aient cherché à en faire une arme de prédilection un beau matin où ils se sont dis que la moitié de la population allait sûrement adhérer à leurs vues - et votaient pour leur gueule - s'ils se mettaient à taper à bâton rompu sur une religion en particulier. L'islamophobie est né d'un imbroglio d'acteurs aux intérêts divergents. Des médias d'abord, susceptibles de générer de l'audimat en faisant, par exemple, du port d'un foulard dans une école un événement en soi, événement susceptible d'être ensuite récupéré par la classe politique pour se donner du crédit en dénonçant la perte des valeurs républicaines, ce qui conduit, enfin, à une stigmatisation contre contre tous les musulmans. Je simplifie hein mais c'est pour aller plus vite. Dans ce cadre donc, l'islamophobie qui naît de l'action de tous ces acteurs, comme tout processus communicationnel, a forcément des résultats imprévus, inattendus, et ceci, se donnant à voir dans quelque chose qui parce qu'il est particulièrement mécanique, à savoir islamophobie = brouillard autour des conflits de classes, de territoire et de genre, ne peut être autrement qualifié que par le terme "fonction". Je sais pas si j'suis clair...mais quoi qu'il en soit refusé de voir cette fonction à posteriori serait comme refusé de voir que le 11 septembre a servi les intérêts du gouvernement américain dans la guerre en Irak sous prétexte que cela voudrait dire nécessairement que le gouvernement américain aurait organisé cet attentat (je me doute que tu le penses pas mais c'est juste un exemple pour dire que ce serait à mon avis dangereux politiquement d'omettre certain lien de cause à effets car cela ne permettrait plus d'expliquer certaines manipulations auxquelles pourraient être soumis les masses).
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Re: Fonction socio-politique de l'islamophobie

Messagede Flo » 03 Oct 2012, 12:44

altersocial a écrit:Merci pour tes critiques Flo

De rien :)

altersocial a écrit:- En admettant que je sois d'accord pour inclure les grèves revendicatives dans l'émancipation, je ne dirais pas que celle-ci est une dissolution de la croyance, je pensais plutôt dire que c'est l'abolition de la médiation divine pour remédier aux problèmes terrestres. Qu'importe ce que je dis penser en tant que croyant, mes actes contredisent mes pensées : ne plus s'en remettre à la fatalité divine et agir collectivement c'est à dire démontrer que le mouvement des hommes fait l'histoire, et non plus un Dieu quelconque, c'est déjà un athéisme en acte, un athéisme en soi.

Ok, je comprends mieux ce que tu veux dire. c'est même très bien dit. Je crois cependant que ce n'est pas forcément contradictoire de croire en Dieu et, tout en même temps de faire le mouvement de l'histoire en tant qu'homme consciencieux de renverser l'ordre établi. Tous les travailleurs croyants adhèrent parfois qu'en partie (voir pas du tout ?) à l'idée que Dieu va résoudre leur problème (pour le dire vite). Exemple : si la prière est pratiquée n'est-ce-pas plutôt un moyen de demander les forces nécessairement et personnels à Dieu pour parvenir à s'extirper d'une situation sociale désespérée plutôt que demander, en fait, que le ciel arrange les choses par miracle ? Et ce suivant l'adage : aide-toi-et-le-ciel-t'aideras. Comment expliquer sinon que l'agir collectif des révolutions arabes qui regroupaient majoritairement des gens croyants aient pu si bien duré ? C'est une hypothèse, mais compte-tenu des slogans et des messages divulgués par un grand nombre de manifestants, la religion a du d'avantage joué pour beaucoup un rôle d'accompagnateur en arrière plan - à laquelle on se remet spirituellement dans les moments difficiles - d'une révolte dirigée contre les classes dominantes, plutôt qu'un régime de principes provenant de la religion servant à motiver la lutte contre le système en place, au nom de cette religion et éventuellement avec comme fin en soi de le faire pour elle. Évidement, je ne parle pas ici des partis islamistes qui est encore autre chose. Tout ça pour dire quoi ? Je ne sais plus :mrgreen:

Edit : ah oui ça me revient, donc tout ça pour dire que l'aliénation religieuse était variable suivant les individus et qu'à trop se focaliser sur elle, le risque était peut-être de se faire percevoir, en tant que militants libertaires, comme refusant de voir les capacités d'autonomie, de contournement et de réappropriation du message divin dont savent faire preuve les croyants. Ce qui est, faut-il le dire, revient à se faire passer, soit pour des "victimisateurs", soit des intolérants. Je ne sais pas ce que tu en penses...

altersocial a écrit:Fonction "irréductible" je ne pense pas, les objectifs sont également sur la scène de l'impérialisme. Ceci dit la "classe bourgeoise musulmane" cela a peu de signification dans l'inconscient collectif, ce même inconscient qui joue ici le rôle d'une force matérielle construite dialectiquement entre les préjugés populaires et la propagande éditorialiste. Si l'on fait référence aux classes moyennes issues de l'immigration qui ont trouvé refuge dans les professions libérales (avocats, médecins,...) on est alors frappé par la "laïcisation" de ces couches sociales et donc de l'opportunité à les ranger derrière une étiquette religieuse. Qu'en penses tu ?

J'en pense que ce que tu dis est vrai...d'un point de vue plus globale, en France, la revendication d'une frange de la classe bourgeoise culturellement musulmane comme religieusement musulmane me paraît éteinte.

altersocial a écrit:Cependant même si une bourgeoisie "musulmane" émergeait (c'est à dire se revendiquant sociologiquement et religieusement comme telle comme le font certaines assoces qu'on retrouve à l'UOIF etc) il n'empêche : le leurre posé à la classe ouvrière française est celui du danger de "l'ennemi de l'intérieur" : le casseur des cités, le musulman pratiquant, le travailleur immigré "concurrentiel", ... ("l'ennemi de l'extérieur" y participe aussi : ouvriers chinois = délocalisations, le "routier polonais", etc). Cette construction paranoïaque de "l'ennemi de l'intérieur" j'aurai pu le développer d'ailleurs mais comme je l'esquissais alors: c'est rentrer dans le domaine de la production d'information anxiogène = construire des antagonismes artificiels (à partir de faits divers réels) afin de convaincre les "citoyens" de se réfugier derrière l' "Etat fort" et ses valeurs. La façon dont les préjugés et la propagande éditorialistes se sont nourris l'un et l'autre entraînant une dérive inédite d'un nouveau discours médiatique est, il me semble, à l'origine -parmi d'autres facteurs- de l'explosion de l'électorat FN (islamophobie+xénophobie+protectionnisme).


Oui, là je partage également tout à fait ton point de vue.
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Re: Fonction socio-politique de l'islamophobie

Messagede atheus » 03 Oct 2012, 14:24

j'ai lu l'article bien avant de poster, je parlais juste du titre qui prête à confusion.
atheus
 

Re: Fonction socio-politique de l'islamophobie

Messagede Flo » 05 Oct 2012, 10:47

atheus a écrit:j'ai lu l'article bien avant de poster, je parlais juste du titre qui prête à confusion.

Bah on avait bien compris :)
C'était juste pour être exhaustif au niveau de l'explication car il semblait que tout n'était pas clair pour toi :wink:
"La société à venir n'a pas d'autre choix que de reprendre et de développer les projets d'autogestion qui ont fondé sur l'autonomie des individus une quête d'harmonie où le bonheur de tous serait solidaire du bonheur de chacun". R. Vaneigem
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Re: Fonction socio-politique de l'islamophobie

Messagede altersocial » 06 Oct 2012, 12:08

:arrow: Dans le prolongement pour approfondir avec athéus le point de désaccord qu'il soulevait sur le titre, voilà ce qu'on pourrait nommer "Fonction éco-politique de la xénophobie" :

Xénophobie business de Claire RODIER
À quoi servent les contrôles migratoires ?

Image

La surveillance des frontières s'est muée ces dernières années en un business hautement profitable. Les sociétés privées de sécurité autant que celles de l'industrie de l'armement en savent quelque chose : depuis le milieu des années 1990, elles ont trouvé dans ce nouveau « créneau » des opportunités inespérées. La plus grosse entreprise de sécurité, G4S (dont une partie de l'activité est consacrée à la « gestion » de l'immigration), emploie aujourd'hui près de 650 000 salariés, ce qui en fait le deuxième plus grand employeur privé du monde. Jamais, en effet, les politiques sécuritaires n'ont aussi fructueusement dopé le marché. FRONTEX, l'agence européenne des frontières mise en place par l'UE, est emblématique de ce boom - politiquement rentable et financièrement profitable, bien au-delà des pays du Nord.

La Libye, avec comme sans Kadhafi, a su habilement tirer profit de la manne des migrants, ces derniers faisant l'objet d'infinis marchandages avec les capitales européennes. En Israël comme aux États-Unis, la construction de centres de détention pour étrangers et de murs, censés rendre étanches les frontières, se révèle un pactole pour l'économie locale. C'est aussi une façon efficace de conforter les angoisses et de nourrir les fantasmes xénophobes qui font le miel de certains politiciens.
Du Sénégal à la frontière mexicaine, de Kiev à Paris ou Tel-Aviv, les rouages invisibles de cette nouvelle ruée vers l'or sont, pour la première fois, mis en lumière et analysés dans ce livre.


Editions de la Découverte 200p. 16€

TABLE

Introduction Plus les frontières s'estompent, plus elles sont surveillées
Plus il y a de contrôles, plus il faut contrôler
Des histoires de gros sous et de pouvoir

1. Le grand marché de la sécurité G4S, les mercenaires de la sécurité migratoire
Mort par asphyxie - Mercenarisation des missions de sécurité - Pas de petits profits - Dilution des responsabilités Le marché européen de la sécurité frontalière
La sécurité, un « bien commun » de l'Europe - La surveillance des frontières, un gâteau à partager - SIVE, le précurseur - L'aubaine de l'élargissement - Technologie : toujours plus, toujours mieux, toujours plus cher
Le bon filon de la détention des étrangers
Rhétorique de la peur - L'industrie carcérale, des prisons aux centres de détention pour migrants - Enfermer le plus longtemps possible - Alliances fructueuses - Un modèle à géométrie variable

2. L'exploitation de la peur
Derrière les murs
À la frontière gréco-turque - Autour de Ceuta et Melilla - Entre l'Inde et le Bangladesh - Le long du désert du Néguev - Parler du mur - « Wall of shame » : le mur Mexique/États-Unis - La menace de mur
Désigner l'ennemi
Le « discours de Grenoble » : amalgames et approximations - L'impossible bilan d'un démantèlement très médiatique - Fausses expulsions et probables retours - Hypocrisie sans frontières - Après les Roms, les Tunisiens - Querelle d'opérette franco-italienne Le terroriste étranger est derrière la porte
Le tournant du 11 Septembre - Les experts sont formels - Immigration et terrorisme : une association non démontrée, mais utile - Un amalgame potentiellement explosif

3. Petits arrangement entre voisin Marchandages au sud et à l'est de l'Europe
Le Maroc, « bon élève de l'Europe » - Maghreb-Europe : des intérêts bien partagés - La carotte des accords de réadmission - À l'est, une diplomatie sur mesure Le « plan africain » de l'Espagne
Sénégalais à tout prix - Du - Plan Africa... - ... au Plan REVA - Bilan fantôme - Les migrants, floués des deux côtés - Éléphant blanc Libye : l'instrumentalisation des contrôles, avant comme après Kadhafi
Les migrants, une ressource nationale - Pétrole, gaz et uranium contre migrants et infirmières bulgares 91
Échanges de bons procédés - Nouveau régime, mêmes marchandages

4. Des instruments emblématiques de la marchandisation des contrôles
Frontex, une agence multifonctions
Un « bras armé» visible, sinon efficace - Une diplomatie peu regardante - Une courroie de transmission bien utile - Drones : les contrôles migratoires au service de l'industrie guerrière
Le business des camps
Enfermer longtemps, enfermer beaucoup : une tendance générale - Les camps d'étrangers, ça rapporte - Des camps pour rassurer - Des camps pour avertir - Des camps comme outil de négociation - Enfermer ailleurs : dans la logique de l'externalisation des contrôles
Conclusion : l'autre coût des contrôles.




"En quoi le discours alarmiste sur les migrations est-il utile pour les Etats ?

On est ici dans la logique bien connue du bouc émissaire : dans le contexte de crise économique et sociétale, la manipulation de l’incertitude et de la peur permet aux gouvernants, incapables d’apporter des solutions aux problèmes rencontrés par leurs électeurs, d’asseoir leur autorité en désignant des coupables." «Des frontières qui servent à générer des profits financiers et idéologiques »


Réponse de Claire RODIER dans liberation le 1/12/2012


Mécanisme idéologiques et économiques complexes, rien d'un complot :wink:
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Re: Fonction socio-politique de l'islamophobie

Messagede atheus » 06 Oct 2012, 12:11

Bah c'est sur dès qu'il y a des histoires d'argent derrière tout ça, ça devient tout à coup plus crédible.

Mécanisme idéologiques et économiques complexes, rien d'un complot :wink:


économique oui, idéologiques je ne pense pas, moi je constate tous les jours que notre société tourne uniquement autour de l'argent, donc ceux qui profitent de cela se foutent de l'idéologie ou de la religion.

il faut clairement voir la limite entre le profit économique et l'utilité politique de l'immigration. Ici il s'agit d'islamophobie, or on sait aujourd'hui qui l'immigration venant des pays musulmans (c'est à dire "l'islamisation") est très proche de zéro. Donc là encore il y a un amalgame flagrant mais assez courant vu tout ce qui se dit sur les médias classiques.
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Re: Fonction socio-politique de l'islamophobie

Messagede altersocial » 06 Oct 2012, 12:27

atheus a écrit:il faut clairement voir la limite entre le profit économique et l'utilité politique de l'immigration. Ici il s'agit d'islamophobie, or on sait aujourd'hui qui l'immigration venant des pays musulmans (c'est à dire "l'islamisation") est très proche de zéro. Donc là encore il y a un amalgame flagrant mais assez courant vu tout ce qui se dit sur les médias classiques.


Exactement, une des "fonctions" de l'islamophobie est l'amalgame permanent. On pourrait comparer cette paranoïa sur l'islamisation fantasmée avec le silence sur la vigueur des sectes évangélistes dont le dynamisme est important. Mais ce ne sont pas les mêmes catégories sociales qui sont touchées par ces conversions. Les mécanismes de stigmatisation n'interviennent pas. Ceci dit je ne dis pas qu'il faut remplacer l'islamophobie par l'évangélistophobie :mrgreen:

L'islamophobie est une poupée russe qui contient la xénophobie, le racisme. L'islamophobie existe comme terme, mais pas en soi.
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Re: Fonction socio-politique de l'islamophobie

Messagede atheus » 06 Oct 2012, 13:01

En fait rien que le mot islamophobie est un piège très bien pensé, car il est composé du mot "phobie" (=peur), et c'est la même chose avec "christiannophobie" : dès que le clergé est attaqué, il se cache derrière la xxxxxphobie. Or moi personnellement les religions ne me font pas peur, bien au contraire, je ne me qualifierais donc pas de christiannophobe, ni d'islamophobe.
Le deuxième piège intervient alors : car en effet on ne dit jamais des gens qu'ils critiquent la religion qu'ils sont "religiophobes" : quand ils attaquent les chrétiens, ils sont "christiannophobes" et bien évidemment au service des intégristes musulmans et quand ils attaquent l'islam ils sont "islamophobes" et bien évidemment au service des intégristes cathos juste en face. Et c'est ce sont les mots eux-mêmes qui sont un piège ici car critiquer la religion qu'est l'islam en tant que religion, ça n'est pas de l'islamophobie. Par contre critiquer l'islam en tant que religion concurrente, là, oui, il y a islamophobie, mais parce que dans ce cas précis l'islam est considéré comme la seule religion à combattre. Et toute personne qui critique la religion dans son ensemble ne peut être mise dans ce sac. De même qu'on ne peut pas qualifier de christiannophobe quelqu'un qui combat toutes les religions.

Du coup, et ça me ramène à ce que je disais dans l'autre topic, toutes ces discussions sont un bel écran de fumée, puisque de toute façon en première et en dernière instance, ces religions sont de toute façon alliées, d'autant qu'il n'y a aucun choc des civilisations quand on sait que ces religions ont à peu près les mêmes dogmes culturels et les mêmes procédés. La vraie division n'est donc pas là, c'est une fracture sociale qu'il faut regarder et il faut arrêter tout regarder dans le prisme de la culture et de la religion, puisque comme je l'ai dit plus haut, les clergés et bourgeoisies de ces religions appartiennent à la même classe sociale et sont dans le même camp.
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