Bonjour, je vous faire part de quelques réflexions :
L'anarchie pour moi est "l'absence de pouvoir illégitime".
L'anarchie pour moi n'est pas qu'un idéal : je considère que plus les pouvoirs se maintiennent à un bas niveau, proche du peuple, moins ils sont illégitimes, et plus la société est anarchique. C'est à dire organisée de manière rationnelle.
Je ne considère pas l'anarchie comme une utopie mais comme une forme de paix sociale à laquelle les hommes sont parvenus parfois dans leur histoire.
En Europe de l'Ouest, où on a connu depuis des siècles des guerres et des mouvements de population, les conditions n'ont pas souvent été favorables à l'établissement de l'anarchie. Mais par exemple, si les Romains ont attaqué la Gaule, c'est parce qu'elle était riche. Les "Gaulois" étaient à bien des égards plus civilisés que les Romains, ils étaient prospères et beaucoup plus anarchiques (au sens noble du terme bien sûr). A la chute de l'Empire Romain, on a assisté à une "ré-anarchisation" dans beaucoup de territoires, les fameuses Bagaudes dont on a parlé.
Globalement dans les montagnes on trouve plus d'anarchie car le pouvoir a plus de mal à y parvenir.
Je juge donc sévèrement l'Etat : pour moi, l'Etat français moderne se fonde sur les acquis militaires des Rois de France, il est discrédité à la base. Beaucoup plus illégitime que les seigneurs féodaux (plus proches du peuple). Et tous les historiens modernes s'accordent à dire que le Moyen-Age a été victime d'une imposture idéologique lors de la Révolution, où les bourgeois on accusé la noblesse de tous les maux. La société médiévale était beaucoup plus libre et même plus agréable que ce que l'on croit. Plus le pouvoir est proche du peuple, moins il est injuste. Quand on fout la paix aux gens, ils ne pensent pas forcément à s'entre-tuer. Ils inventent des choses. La culture, c'est ce que les gens créent quand on leur fout la paix. Langage, musique, danse, philosophie (y compris mystique, ce n'est pas un gros mot !)
L'intégration mentale des frontières et surtout des "nations" au XVIII et au XIXème a été catastrophique pour les anarchistes. L'école obligatoire l'a été encore plus. Elle a accentuée l'idée de nation qui n'est qu'une manœuvre grossière de légitimation de l'Etat. Il n'y a jamais eu de nation française.
A présent en Occident on arrive jusqu'au bout de la concentration du pouvoir, avec les tentatives d'organiser un gouvernement mondial dont Bilderberg ou le FMI sont les manifestations. Cette concentration du pouvoir s'accompagne inévitablement de la destruction de sa propre espèce et de son propre environnement par l'homme. Car si toute l'espèce devient esclave d'un seul, la Terre finira peut-être par être taillée en pyramide mais elle ne tournera plus.
On en est loin heureusement.
Néanmoins, le mondialisme et la technologie nous ont permis de pouvoir, grande première dans notre histoire, Tous communiquer. Et organiser des manifestations mondiales, comme le 15-O. Voilà quelque chose d'inspirant.
Les idéologues qui se réclament de l'anarchisme du XIXème passent actuellement complètement à côté du truc.
- Les individualistes tout d'abord, car ils ne voient pas que cet "individualisme" est une expression de la volonté de pouvoir exacerbée par le capitalisme. Plus une société est anarchique, moins elle est individualiste. Une société anarchique est basée sur la coopération, la solidarité, et inévitablement l'égo de ceux ayant été éduqué de manière anarchique est moins capricieux que celui des enfants du capitalisme. Il n'y a pas de punk dans les sociétés anarchiques. On y respecte les anciens, on partage tout. On respecte l'expression de la parole, aussi, en général.
Il est important de profiter de l'Histoire pour réapprendre certaines évidences et prendre du recul par rapport à nos mentalités occidentales. Nous sommes les enfants d'un système malade, et nous en portons le virus. Nous avons été éduqués en partie par la télévision et l'école républicaine, il est nécessaire d'examiner très attentivement ce qu'on y a appris. L’Occidental moderne est un grand enfant, affolé par la moindre violence, incapable de se servir de ses dix doigts pour fabriquer des choses puisque pour chaque besoin il n'a qu'à acheter un produit. Si on le prive de ses joujoux, il est comme un con.
- Enfin tous ceux qui refusent de sortir du cadre européen des théories anarchistes du XIXème. Chers anarchistes, le monde a bien changé depuis cette époque. Rien qu'en France. Sur votre territoire se trouvent des millions de personnes beaucoup plus anarchistes que vous, et en général vous les ignorez complètement.
Des millions de personnes qui sont issues de cultures authentiquement anarchiques ! Et vous les ignorez.
Proudhon ou Bakounine n'ont pas eu cette chance, de pouvoir rencontrer dans votre quartier des gens qui ont connu la culture anarchique.
Il y a donc tout à apprendre des Nègres
Je vous renvoie vers ce lien : [url]http://afriquepluriel.ruwenzori.net/politique3.htm
[/url]
Dans l'Afrique précoloniale, il y a donc des sociétés authentiquement anarchiques et beaucoup d'entre elles qui le sont presque.
J'ai déjà eu droit à de longs soupirs de militants pseudo-anarchistes français qui ne voient là que tribalisme et archaïsme. Le racisme est une chose sérieuse en Occident et on voit par là à quel point Césaire avait raison quand il disait que l'antiracisme est une regard révolutionnaire porté sur le monde.
Si on considère la culture mandingue (du Mandé, du Sénégal au Burkina an passant par Guinée, Côte d'Ivoire), on a une véritable civilisation de la paix. Une civilisation avec des règles mais pas de loi (au sujet de la loi anarchique, cet excellent article :http://www.reds.msh-paris.fr/publications/revue/pdf/ds23-24/ds023024-14.pdf)
Une civilisation qui fut prospère et industrieuse.Un "empire" qui fut surtout une fédération de personnes se reconnaissant par leur langue et leur mode de vie commun, où les problème se règlent au niveau le plus bas possible, mais si un problème concerne tout le monde alors tout le monde est mobilisé. La société est découpée verticalement en corporations et horizontalement en associations par tranche d'âge, de telle sorte que tout le monde est amené à rencontrer tout le monde. La parole est sacrée et la senenkounya est un système dans lequel seules des senenkouns ont le droit de tout se dire, avec en contrepartie un devoir d'assistance mutuelle. Sont senenkouns enfants et vieux, beaux frères et belles sœurs, certaines familles entre elles, certains peuples entre eux. C'est un système complexe et ingénieux. Pour cela il faut découvrir l'Histoire de l'Afrique, qui nous est cachée. Lorsque l'Histoire ne parle que des rois, elle passe à côté des anarchistes comme le disait Alcibiade.
Alors il n'est pas question de dire que ce sont des sociétés parfaites, non je ne suis pas favorable à l'excision. Mais la culture mandingue existe encore, n'oublions pas que dans beaucoup de "pays" d'Afrique, l'Etat n'a que peu de pouvoir et souvent les gens continuent à vivre de manière anarchique. C'est à dire très organisée. Et pour moi, les valeurs de solidarité et même de gentillesse, la démerde, la capacité à prendre des décisions en groupe, le respect des anciens et de l'expression de la parole sont des symptômes d'une culture anarchique persistante.
Je pense donc qu'il est grand temps pour les anarchistes occidentaux de s'intéresser à l'anarchisme africain, en le comprenant on se comprendra mieux nous-même, on vivra plus harmonieusement avec ces gens qui sont nos voisins de palier, et on trouvera plus facilement le chemin vers notre liberté. Le monde entier est secoué par des luttes populaires anarchistes en ce moment même. Avoir une vision globale de l'humanité, sortir des carcans de pensée occidentaux sont un premier pas vers le dialogue anarchiste mondial.
Je lance donc le débat