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Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

MessagePosté: 16 Jan 2009, 17:21
de Nico37
Intro au débat sur le sionisme (UJFP - P. Stambul)

Pourquoi y a-t-il la guerre à Gaza ? À cause du sionisme.
Introduction au débat sur cette idéologie

À Marseille le 15 janvier 2009
Pierre Stambul (Bureau National de l’Ujfp).

La guerre sanglante que l’armée israélienne mène à Gaza n’est pas venue de nulle part. Tzipi Livni a prévenu tous les partis politiques sionistes 48 heures avant l’agression et tous l’ont approuvée, y compris le Meretz (la gauche sioniste). Le mouvement « La Paix Maintenant » et les écrivains dits « de gauche » (mais farouchement sionistes) Amos Oz, Avraham Yehoshua et David Grossman ont aussi approuvé l’invasion en prônant peu après une trêve. Tous partagent le point de vue officiel en Israël : pour eux, le Hamas est un monstre infréquentable contre lequel le droit de tuer va de soi, même s’il y a des « dommages collatéraux ».
Des Israéliens juifs anticolonialistes s’opposent à la guerre. Ils témoignent et manifestent quotidiennement avec un grand courage. Ils ne représentent qu’une petite minorité (il paraît que 95% des Israéliens juifs étaient d’accord avec la perspective d’attaquer le Hamas) mais leur importance et leur influence dépassent leur nombre. Tous sont non sionistes ou antisionistes. Ils sont les seuls à comprendre la nature du crime commis à Gaza : crime de guerre et crime contre l’humanité. Il faudra bien qu’on en finisse avec l’impunité de cet Etat-voyou. Cela passera par le boycott d’Israël tant que durera l’occupation et par le jugement des criminels de guerre.

Une idéologie totalitaire
En Israël, tout est sioniste. L’identité, la mentalité, l’histoire enseignée, les médias, les lois, l’air que l’on respire. Personne ne peut échapper à cette idéologie qui s’insinue partout. Au nom de cette idéologie, 60 ans après la création de l’Etat d’Israël, la moitié des Bédouins du Néguev vivent dans des bidonvilles sans route, ni eau, ni électricité, ni maison en dur, parce que l’Etat Juif ne reconnaît pas leurs villages et leurs actes de propriété. Entre Méditerranée et Jourdain, il y a environ 5 millions de Palestiniens et 5 millions et demi de Juifs. À cause du sionisme, les premiers n’ont aucun droit. Ils sont soit bombardés et massacrés, soit occupés, soit des sous citoyens dans leur propre pays. L’apartheid s’est installé.
Dans l’histoire multiple et diverse du judaïsme, le sionisme a fait irruption, il y a un peu plus d’un siècle et il a la prétention aujourd’hui de s’imposer à tous les Juifs. Si on le critique et qu’on n’est pas juif, on est forcément antisémite. Si on est juif, alors on est un « traître qui a la haine de soi ». Et si on est palestinien, le sionisme délivre un droit de tuer, pour la bonne cause bien sûr, la sacro-sainte « sécurité d’Israël ».
Il n’en a pas toujours été ainsi. En 1948, tous les grands noms du judaïsme américain avec en tête Albert Einstein et Hannah Arendt signent une adresse au président Truman lui enjoignant d’arrêter ou d’expulser le terroriste Menahem Begin qui vient de massacrer 200 villageois à Deir Yassine. Aux yeux du monde, le judaïsme à l’époque, c’est Rosa Luxembourg, Freud, Kafka, Einstein, Arendt. Tou-te-s étaient non croyant-e-s et non sionistes comme la majorité des 6 millions de morts du génocide nazi. Comment est-on arrivé à cette inversion qui fait que les valeurs de fascistes (je ne trouve pas d’autre mot) comme Begin, Shamir, Liberman , Sharon se sont imposées et sont devenues celles des criminels Olmert, Perès, Barak, Livni …ou celles d’un grand nombre de dirigeants communautaires en France.
Cette mutation est incompréhensible si on n’examine pas ce qu’est le sionisme : à la fois un nationalisme, une forme de colonialisme, un messianisme qui a fabriqué un « homme juif nouveau ». Et une idéologie devenue ultra militariste, ayant fabriqué un pays devenu la tête de pont de l’impérialisme au Proche-Orient. Une idéologie affirmant offrir un « havre de paix » aux Juifs. Avec à la clé une instrumentalisation du génocide nazi et de l’antisémitisme.

Une histoire falsifiée
Les sionistes ont fabriqué une histoire fantastique du judaïsme. Alors que la grande majorité des premiers sionistes étaient non-croyants et souvent très hostiles aux religieux, ils sont allés chercher dans la Bible toutes les « justifications » au projet colonial qu’ils étaient en train d’inventer.
Depuis des dizaines d’années, il y a consensus chez les archéologues et les spécialistes de l’histoire antique (lire « La Bible Dévoilée » de Finkelstein et Silberman chez Bayard). Les épisodes d’Abraham et de Moïse sont totalement légendaires. Mais, ce qui est plus important, la conquête de Canaan par Josué est totalement légendaire. Ce texte qui est une véritable apologie du nettoyage ethnique et du massacre de « l’autre » n’a aucune réalité historique. C’est pourtant lui qui sert de base « historique » à l’installation des colons en Cisjordanie et aux partisans de l’expulsion des Palestiniens (la moitié de la société israélienne y est favorable). Il n’y a aucune trace archéologique de l’existence du royaume unifié de David et Salomon. À l’époque, Jérusalem était un village. Il est très probable que le royaume d’Israël (détruit par les Assyriens) et celui de Juda (détruit par les Babyloniens) aient toujours été des entités distinctes. Et il est surtout avéré que, pendant toute l’antiquité des peuples différents, des langues différentes et des religions différentes ont cohabité sur cette terre qui était un véritable carrefour. Les sionistes qui affirment que c’est la terre du peuple juif et que l’Etat d’Israël est une reconstitution du « royaume unifié » ont entériné une légende religieuse à laquelle ils ne croyaient pas eux-mêmes.
Dans la théorie sioniste, le peuple juif a été expulsé de sa terre au moment de la guerre menée par Titus et de la destruction du temple. Il aurait vécu 2000 ans en exil dans des conditions épouvantables jusqu’à ce que le sionisme lui permette de retourner dans son pays.
Or cette théorie est une affabulation. Dans « Comment le peuple juif fut inventé » (chez Fayard), Shlomo Sand montre, documents à l’appui, qu’il n’y a eu ni exil ni retour. Au moment de la destruction du temple, il y avait déjà des Juifs à Babylone, Alexandrie, Rome, en Espagne …Après la défaite face aux Romains, c’est la religion qui s’est dispersée, pas le peuple. Donc les descendants des Hébreux sont essentiellement les Palestiniens. Ben Gourion en était d’ailleurs persuadé et il a d’abord songé à les intégrer au projet sioniste.
Pendant plusieurs siècles dans l’empire Romain puis dans d’autres régions, la religion juive a été prosélyte. Les Juifs ont formé un pourcentage notable des habitants de l’empire romain. De nombreuses conversions ont eu lieu plus tard chez les Berbères d’Afrique du Nord puis chez les Khazars (une tribu turque ayant établi un empire entre Caspienne et Mer Noire). Bref les Juifs d’aujourd’hui seraient majoritairement descendants de convertis. Quant au retour, à plusieurs reprises, les Juifs auront l’occasion de s’installer à Jérusalem et ils préfèreront aller à Bagdad, Alexandrie ou Salonique. Il n’y a pas de « race » juive et (d’après Sand) même pas de « peuple » juif. La théorie sioniste de l’exil et du retour est complètement une construction idéologique.
Les sionistes ont instrumentalisé l’épisode de Massada. Après la prise de Jérusalem par Titus, des Juifs révoltés sont assiégés par les Romains dans la citadelle de Massada au-dessus de la Mer Morte et ils préfèrent le suicide à la reddition. D’où le complexe de Massada : « personne n’aime les Juifs, ils ne peuvent compter que sur eux-mêmes et ils sont menacés en permanence de destruction ». En réalité, les révoltés de Massada étaient des fanatiques religieux (les zélotes) qui ont commencé par massacrer les Juifs qui acceptaient le mélange avec les autres peuples de la région et la souveraineté romaine.

Diaspora et antisémitisme.
Pour les sionistes, la diaspora (=dispersion) est une parenthèse qui se serait terminée avec la fondation de l’Etat d’Israël. C’est faux : la diaspora est le centre de l’histoire des différents judaïsmes. C’est le lieu où la religion s’est structurée. C’est là que les différentes langues juives (judéo-arabe, ladino, yiddish) se sont développées. Le sionisme s’est acharné à faire disparaître les langues, les traditions et les cultures des différentes communautés juives de la diaspora. La plupart des Israéliens ont des noms et des prénoms qui n’ont rien à voir avec ceux de leurs ancêtres. L’Hébreu s’est imposé, la culture israélienne a fonctionné comme un effaceur du passé. Pour fabriquer l’Israélien nouveau, il a fallu « tuer » le Juif (le cosmopolite, le minoritaire, le dispersé). La plupart des Israéliens ignorent tout de leur histoire. Cette absence de mémoire, remplacée par une mémoire falsifiée est une des explications de leur indifférence à « l’autre ».
Le sionisme décrit la vie en diaspora comme une suite ininterrompue de persécutions et de malheurs qui auraient pris fin avec la création d’Israël. Avec l’idée que le mélange ou l’égalité des droits entre Juifs et Non Juifs est impossible et que les Juifs ne peuvent vivre qu’entre eux dans un Etat juif.
Il y a là une vision réductrice. La persécution des Juifs commence sous l’empereur Constantin (IVe siècle ap JC) quand le christianisme devient religion officielle. Cet antijudaïsme chrétien a des origines multiples : le christianisme est issu du judaïsme, les 2 religions ont longtemps été en concurrence, l’accusation de « déicide » est centrale chez les Chrétiens. Les Juifs subiront de très nombreuses expulsions (la plus importante étant l’Espagne en 1492), de grands massacres (croisades, Ukraine), un enfermement et une discrimination systématiques. Mais il y a eu aussi des périodes plus fastes marquées par une vie culturelle intense. Les sionistes essaient de montrer que les Musulmans ont toujours été les ennemis des Juifs. C’est faux : le statut de « dhimmi » n’est certes pas la citoyenneté, mais il a assuré aux Juifs une paix relative qui n’a rien à voir avec les persécutions chrétiennes.
C’est paradoxalement l’Emancipation des Juifs européens (qui commence au XVIIIe siècle en Allemagne et en France) qui provoque la transformation de l’antijudaïsme chrétien en antisémitisme racial. Le Juif personnifie l’obstacle à la construction d’Etats-nations ethniquement purs. Il devient le bouc émissaire de tous les nationalismes. C’est le consensus antisémite en Europe qui permettra le génocide nazi.

Le sionisme contre l’Emancipation.
Vers 1900, une dizaine de millions de Juifs vivent en Europe de l’Est. Ils parlent le Yiddish. Les transformations sociales les ont massivement prolétarisés. Une grande partie d’entre eux abandonne la religion et se tourne vers les idées socialistes. Pour beaucoup, la révolution, en émancipant les prolétaires, résoudra la question de l’antisémitisme. Si les principaux partis révolutionnaires mettent entre parenthèse la « question juive », le Bund, parti révolutionnaire juif, propose dans le cadre de la Révolution, une « autonomie culturelle » des Juifs là où ils vivent.
C’est à cette époque qu’apparaît le sionisme. Il se présente au départ comme une version juive des différents nationalismes (qui mèneront à la boucherie de 1914 et au nazisme) avec l’équation simple : un peuple = un état. Problème : s’il y a à l’évidence un peuple Yiddish entre Baltique et Mer Noire, ce peuple a peu à voir avec les Juifs marocains, irakiens ou yéménites. Les sionistes inventent donc le peuple et l’exil. Alors que le Bund crée des milices d’autodéfense contre les pogromistes, les sionistes considèrent que l’antisémitisme est inévitable, qu’il est inutile de le combattre et que la seule solution est la fuite vers le futur Etat Juif. Ils tournent délibérément le dos à toute idée d’égalité, d’émancipation, de citoyenneté, de mélange. Peu avant sa mort, Herzl rencontre un des pires ministres antisémites du tsar en lui expliquant que sionistes et tsaristes ont des intérêts communs : faire partir un maximum de Juifs. Le pogrom de Kichinev ou l’Affaire Dreyfus sont utilisés pour convaincre que tout combat en Europe est inutile. L’Affaire Dreyfus a pourtant montré que l’antisémitisme concernait toute la société et que la victoire des forces de progrès était possible.
Les sionistes, très souvent laïques voire athées, s’emparent du texte biblique et décident de s’installer en Palestine. C’est le fameux mensonge fondateur de Zangwill (« une terre sans peuple pour un peuple sans terre »). Leur installation commence donc par la négation de l’existence du peuple palestinien. Du coup, ils fabriquent une histoire de la Palestine, où paraît-il les Juifs auraient vécu sans interruption depuis 4000 ans. C’est bien sûr faux. Après la dernière révolte juive contre les Romains (Bar Kochba), il y a très peu de Juifs en Palestine, la population étant devenue chrétienne puis musulmane. Vers 1900, les Juifs forment 4% de la population en Palestine, ce qui est la même proportion que dans les pays voisins. Ils sont majoritairement arrivés au XVIIIe siècle, sont très bien intégrés et sont contre toute idée d’Etat Juif.
Jusqu’à la deuxième guerre mondiale, les sionistes seront très minoritaires parmi les Juifs. Ceux qui émigrent pour fuir la misère ou l’antisémitisme partent très majoritairement vers les Etats-Unis ou l’Europe occidentale. Toutes les élections qui ont lieu en Pologne ou en Lituanie dans les ghettos montrent que les partis sionistes sont minoritaires. En 1939, il n’y a que 3% de la population juive mondiale qui est partie en Palestine.
Le sionisme n’est pas au départ religieux. Le courant religieux sioniste (celui du rabbin Kook) sera au départ très faible, les religieux étant majoritairement sceptiques, voire très hostiles au sionisme. Ils considèrent que l’Etat Juif se substituent au Messie. Il faudra attendre 1967 avec l’émergence du courant national-religieux pour voir l’horrible synthèse entre colonialisme et intégrisme.

Du colonialisme au nettoyage ethnique.
Les sionistes sont arrivés en Palestine avec le même complexe de supériorité vis-à-vis des autochtones et le même comportement que les colonialistes de l’époque. Il s’agissait d’accaparer le maximum de terre et de repousser, confiner, domestiquer le peuple qui vivait là. Au musée de la ville israélienne de Hadera, il y a une grande photo avec la légende : « Moshé X, fondateur de Hadera ». Autour de l’individu en question, il y a une quinzaine de Palestiniens, mais les fondateurs du musée n’ont même pas vu qu’ils existaient. Tout sera bon pour acquérir des terres. L’argent qui sert à « arroser » quelques féodaux et à valoriser les terres mais aussi la force. La déclaration Balfour marque la complicité entre le sionisme et l’impérialisme. Pour Balfour qui partage les préjugés antisémites de l’époque, c’est un coup double : faire partir les Juifs d’Europe et assurer une présence européenne au Moyen-Orient où l’empire ottoman s’est effondré.
Quand les Palestiniens réalisent que l’immigration juive a pour projet d’établir un Etat juif et de les déposséder de leur propre pays, ils se révoltent (1929, 1936) et c’est l’armée britannique qui les écrase. Pendant toute cette période, les sionistes construisent un véritable appareil d’état et ils sont totalement absents de la lutte contre la montée du nazisme. Pire, l’aile droite du sionisme dont le chef de file est Jabotinski, s’inspire directement des idées fascistes (il a vécu en Italie et admirait Mussolini) pour proposer dès 1930 l’expulsion des Palestiniens au-delà du Jourdain. Le groupe Stern d’Itzhak Shamir (futur premier ministre d’Israël) avait une telle conscience du génocide nazi qu’il assassinera des soldats britanniques jusqu’en 1942 et tentera de négocier avec les Nazis.
Les sionistes ont joué un rôle confidentiel dans la résistance juive au nazisme qui a été principalement communiste ou bundiste. Et pourtant, c’est le génocide (qui a tué la moitié des Juifs européens et a fait définitivement disparaître le Yiddishland) qui va permettre la fondation d’Israël.
Les Européens, les Américains et les Soviétiques se rallient dès 1945 à l’idée d’un Etat Juif. Ils vont faire payer au peuple palestinien pour un crime européen (l’antisémitisme et le génocide) dans lequel il n’a pas le début d’une responsabilité.
On sait de façon sûre, les nouveaux historiens israéliens (surtout Ilan Pappé) ayant confirmé ce que les Palestiniens ont toujours dit, que l’expulsion de 800000 Palestiniens en 1948 était préméditée. Ce nettoyage ethnique (la Naqba) est un crime et aucune paix ne pourra être signée sans la reconnaissance de ce crime qu’il faudra, d’une façon ou d’une autre, « réparer ». Or, pour le sionisme, cette reconnaissance est une négation du projet fondateur et de la prétendue légitimité de ce projet. Dans le film sioniste « Décryptage », Ehud Barak interviewé le dit : « j’aurais voulu qu’Arafat reconnaisse la légitimité du sionisme ». Bref il aurait voulu sa capitulation. On est au cœur du problème. Le sionisme est bien un obstacle à la paix.
Ajoutons puisque aujourd’hui le Hamas est accusé de terrorisme que le terrorisme sioniste pendant la guerre de 48 a été bien réel avec l’Irgoun et le groupe Stern (mais la Haganah, armée officielle occupait les zones « nettoyées » par les terroristes). De Deir Yassine à l’attentat contre l’hôtel King David ou à l’assassinat du comte Bernadotte, on voit que les auteurs de ces crimes sont devenus plus tard Premiers ministres. Et aujourd’hui, on découvre que Tzipi Livni qui a travaillé dans les services secrets est la responsable d’un attentat anti-palestinien à Rome.

La politique du fait accompli et l’instrumentalisation du génocide.
Après 1948, les sionistes ont accéléré la stratégie qui leur avait si bien réussi en se faisant reconnaître par l’ONU sur des frontières qui n’avaient plus rien à voir avec celles du plan de partage : la stratégie du fait accompli. Dès 1949, les terres et les propriétés des Palestiniens chassés sont confisquées. Alors qu’Israël a dû reconnaître dans les conventions d’armistice de 1949 le droit au retour des Palestiniens, ce droit va immédiatement être nié et même présenté comme une revendication inacceptable mettant en question l’existence d’Israël.
En 1948, il y a moins d’un million de Juif dans le nouvel état. Tout va être mis en route pour provoquer partout l’émigration. Sionisme et antisémitisme vont devenir complémentaires, le second alimentant le premier et le premier cherchant à provoquer le second quand l’émigration se tarit. L’arrivée d’un million de Juifs du monde arabe est le résultat conjoint d’une propagande très intense pour les arracher de pays où ils vivaient depuis des siècles et de l’attitude de la plupart des gouvernements arabes ravis de ces départs. Pour les Juifs venus des pays de l’Est, la persistance d’un antisémitisme d’état a provoqué une rupture avec le communisme (qui avait la sympathie d’un très grand nombre de Juifs) et l’émigration vers Israël.
Le fait accompli va prendre un tour nouveau en 1967. On sait maintenant que les menaces de Nasser ont été un prétexte. La guerre, l’annexion et la colonisation étaient programmées. L’annexion (par vote de la Knesset) de Jérusalem Est a lieu dès 1967. Elle sera suivie de celle du Golan. Ne disposant pas du « personnel » pour créer des colonies, les travaillistes au pouvoir vont littéralement créer le courant national-religieux (qui représente aujourd’hui 1/4 de la population) en leur offrant des colonies. C’est Ygal Allon (réputé être « de gauche ») qui est à l’origine de cette colonisation. 500000 Israéliens vivent aujourd’hui dans les territoires conquis en 1967 et tout a été fait pour faire disparaître la « ligne verte » et rendre l’annexion définitive.
Le sionisme a eu au départ une attitude ambiguë vis-à-vis du génocide. Les rescapés ont été très mal reçus en Israël (aujourd’hui, beaucoup vivent sous le seuil de pauvreté). On opposait leur prétendue résignation à l’Israélien fier de lui qui défrichait, se battait et « transformait le désert en jardin ». Mais très rapidement, le gouvernement a vu le parti à tirer du génocide. D’où la création du musée Yad Vashem, l’arrestation et l’exécution d’Eichmann. Plus tard le « devoir de mémoire » est devenu obligatoire.
Aujourd’hui, ce devoir est devenu une horreur. Il y a d’abord l’idée que les Juifs ont été, sont et seront toujours des victimes. Les Israéliens ont « peur de ne plus avoir peur », ça les obligerait à examiner l’impasse meurtrière dans laquelle ils se trouvent. Quand les dirigeants israéliens ont négocié avec les Palestiniens, le seul sujet qu’ils voulaient traiter, c’était la sécurité de l’occupant. Pour eux, le « peuple élu », c’est celui qui a tous les droits. Les sionistes célèbrent les quatre Israéliens tués par les Qassams du Hamas et se moquent totalement des 1000 morts de Gaza. Israël est le pays (après la Turquie) où il y a le plus de négationnistes du génocide arménien, le seul génocide valable étant celui des Juifs. Couramment on présente les Palestiniens comme les héritiers du Nazisme. Arafat a été qualifié de « nouvel Hitler » et Begin a dit en 1982 en lançant ses troupes sur Beyrouth « qu’il avait l’impression d’attaquer le bunker d’Hitler ». Sharon a déclaré lors du 60e anniversaire de la libération d’Auschwitz que cela prouvait que « les Juifs ne pouvaient se défendre que par eux-mêmes », bref que tout était permis. Pour les rescapés et leurs descendants (dont je suis), cette instrumentalisation est obscène.
Le sionisme prétendait apporter un « havre de paix » aux Juifs persécutés. Il a fabriqué un projet criminel pour les Palestiniens mais suicidaire pour les Israéliens et même pour les Juifs. S’il y a bien un pays où les Juifs sont en insécurité, c’est Israël et il en sera ainsi tant que la destruction de la Palestine se poursuivra.
Israël est devenu un pays odieusement militariste. On dit d’ailleurs que ce n’est pas un pays doté d’une armée mais « une armée dotée d’un état ». D’ailleurs la plupart des dirigeants politiques viennent de l’armée ou des services secrets. Et Israël est devenu une tête de pont de l’Occident au Moyen-Orient dans le cadre du « choc des civilisations ». Ce pays incarne l’Occident face aux « barbares ». D’où le « permis de tuer » à Gaza qui a été octroyé.

Le sionisme a gommé les différences idéologiques
Les différents gouvernements d’Union Nationale en Israël ou le fait qu’en France, le CRIF soutienne inconditionnellement toute politique israélienne montrent qu’il n’y a aucune différence entre sionistes de droite et sionistes « de gauche ». Les premiers ont toujours été « sincères ». Ils sont depuis 70 ans pour le nettoyage ethnique et l’expulsion des Palestiniens. Les seconds ont fait la même chose mais sans oser l’avouer. La « gauche » sioniste était au pouvoir au moment de tous les crimes commis par la Palestine : la Naqba, la colonisation, la construction du mur de l’Apartheid. Jamais les sionistes n’ont accepté les Palestiniens comme des égaux. Le processus d’Oslo a échoué parce que tous les courants sionistes exigeaient une capitulation des Palestiniens, une renonciation à tous leurs droits, l’acceptation de bantoustans éclatés qu’on aurait baptisé Etat palestinien.
Il n’y a pas de sionisme à visage humain. Le crime commis à Gaza et l’indifférence en Israël face à ce crime en sont une preuve supplémentaire. La paix fondée sur l’égalité des droits et la justice passera par une « désionisation » d’Israël, une rupture avec cette fuite en avant criminelle. Le sionisme a rendu plus que malade la société israélienne devenue autiste et complice de crimes.
Alors, nous dira-t-on, vous autres antisionistes, vous êtes pour la destruction de l’Etat d’Israël ? Ne mélangeons pas les choses. Les Israéliens juifs (5 millions et demi de personnes) forment aujourd’hui un peuple et ils resteront. Mais aucune paix n’est envisageable sans une égalité totale, politique et économique entre les peuples de la région. Quelle que soit la solution envisagée (un ou deux états), cela devra être les sociétés de tous leurs citoyens. Donc oui l’existence d’un « Etat Juif » (Etat Français, ça sonne mal et ça rappelle de mauvais souvenirs, n’est-ce pas ?) où les Non Juifs sont des sous citoyens est un cauchemar. Un Etat ne peut pas être à la fois juif et démocratique, c’est une contradiction. La paix passe par le respect de la citoyenneté de tous et par celui des droits humains fondamentaux.
Le sionisme est une idéologie criminelle. Et c’est une catastrophe pour le judaïsme quel que soit le sens qu’on donne à ce terme. En mélangeant sciemment juif et sioniste et en assimilant toute critique d’Israël à l’antisémitisme, les sionistes transforment « l’antiisraélisme » (selon la formule d’Edgar Morin) en antijudaïsme. Ils se comportent en véritables pyromanes. Il est temps que la parenthèse sioniste se referme.

Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

MessagePosté: 17 Mar 2011, 14:45
de bipbip
Intervention à Vannes (29 janvier 2011) Par Pierre Stambul du Bureau National de l’Ujfp (Union juive française pour la paix), http://www.ujfp.org/modules/news/articl ... toryid=872 :


Peut-on critiquer Israël ?
Le sionisme est-il un obstacle à la paix ?
Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?


Dans une guerre qui dure en fait depuis près d’un siècle, une issue ou un compromis auraient dû intervenir depuis longtemps. Pourquoi n’est-ce pas le cas ?


Le sionisme et la théorie du «transfert».

La colonisation sioniste et la création de l’Etat d’Israël se sont accompagnées d’un négationnisme total (j’emploie intentionnellement ce mot qui est très chargé symboliquement dans l’Histoire juive) vis-à-vis des Palestiniens. Dès le départ, pour les futurs Israéliens, la Palestine n’existe pas. Dans les livres scolaires israéliens, on nie l’existence d’un peuple palestinien. On explique que les Ottomans ont installé dans la région des populations venues de diverses régions de l’empire et peu importantes numériquement. Il s’agit de justifier a posteriori un des mensonges fondateurs, l’idée (proférée par Zangwill) de la «une terre sans peuple pour un peuple sans terre». On y ajoute contre toute vraisemblance quelques énormités comme l’idée que les Juifs auraient toujours vécu en «Eretz Israël» ou qu’ils sont majoritaires à Jérusalem depuis les années 1800.

Bien sûr, les dirigeants sionistes avaient bien conscience à leur arrivée que les Palestiniens représenteraient un obstacle à leur projet. Les futurs dirigeants Ben Gourion et Ben Zvi pensaient (ils l’ont écrit en 1918) que ces «fellahs» qui vivaient en Palestine étaient probablement descendants des Hébreux (ils n’avaient pas tort) et que donc, ils accepteraient le projet sioniste (là bien sûr, ils se trompaient). À l’époque, même dans la gauche européenne, le colonialisme est considéré comme un phénomène positif, le monde européen apportant la civilisation à des peuples moins développés. Mais dès l’arrivée des premiers colons sionistes, ce qui est mis en place, c’est une dépossession progressive des Palestiniens de leur propre pays. Le KKL (Fonds National Juif) s’approprie par tous les moyens des terres pour les Juifs. L’Agence Juive crée les embryons d’un futur Etat Juif dans lequel les Non-juifs n’ont aucun droit. Le syndicat Histadrout défend dans ses statuts le «travail juif». Quand les Palestiniens réalisent ce qui est à l’œuvre, c’est la première grande révolte (Hébron 1929). Dès cette époque, le courant «révisionniste» du sionisme dont le dirigeant est Vladimir Jabotinsky élabore la théorie du transfert. Puisque les Palestiniens sont décidés à résister, il faut élever entre les Juifs et eux une muraille infranchissable. Le concept de ce qui deviendra 70 ans plus tard le Mur (de l’apartheid) est né. Il propose de déporter les «Arabes» au-delà du Jourdain.

Le sionisme a gommé les différences idéologiques. Dire «gauche sioniste», c’est un oxymore. La droite sioniste a toujours dit et fait. La prétendue gauche sioniste a utilisé la novlangue. Elle a fait et elle continue de faire ce que la droite dit.

Dans l’idée de transférer les Palestiniens, les dirigeants sionistes ont reçu une aide précieuse de la part du colonisateur britannique quand celui-ci a réprimé la révolte palestinienne de 1936 (plus de 12000 morts et toute «l’élite» palestinienne exilée). En 1948, le transfert (l’expulsion des Palestiniens) était programmé avec le plan Dalet. La préméditation de cette entreprise, constamment proclamée par les Palestiniens a été confirmée par les historiens israéliens (entre autres Ilan Pappé) au moment de l’ouverture des archives. Une petite minorité de Palestiniens a échappé à la Naqba (la catastrophe) et a pu rester. 50 ans plus tard, l’historien sioniste Benny Lévy qui a pourtant reconnu les crimes de guerre de la guerre de 48 estime qu’il aurait fallu tous les expulser. Pour gagner les élections de 2001, Ariel Sharon a fait campagne sur le mot d’ordre «achever la guerre de 48» et donc expulser tous les Palestiniens, y compris ceux qui ont la nationalité israélienne. En 1967, la conquête et la colonisation étaient programmées. En 1993, signer les accords d’Oslo sans une remise en cause prévue des centaines de milliers de colons établis à Jérusalem et en Cisjordanie n’avait aucun sens.

Aujourd’hui en Israël et c’est tragique, une majorité de l’opinion pense que, tout comme les Amérindiens des Etats-Unis ou les Aborigènes d’Australie, les Palestiniens deviendront à terme totalement marginalisés et incapables de réclamer leurs droits. Les seules nuances portent sur la façon d’en finir (déportation, encerclement dans des bantoustans, Etat palestinien croupion, institutionnalisation de l’Apartheid …). Pour cette opinion, la «légitimité» d’un Etat juif allant de la Méditerranée au Jourdain est indiscutable et les Palestiniens sont des intrus et des terroristes. Les mots d’ordre mille fois répétés («Arafat est un nouvel Hitler», «les Palestiniens veulent continuer l’œuvre des Nazis») deviennent des évidences à force d’être martelés.


Une manipulation de l’Histoire et de la Mémoire juives

Il faut lire les sites sionistes pour mesurer l’étendue de la névrose collective actuelle. Des résistants juifs comme Stéphane Hessel ou Edgar Morin sont accusés d’antisémitisme. D’authentiques néonazis regroupés dans une délégation de 35 parlementaires européens d’extrême droite visitent Israël et sont reçus à la Knesset sans aucune protestation. Jean-Marie Le Pen arrive en troisième position aux élections présidentielles dans le vote des Français vivant en Israël. Des crimes évidents et avérés sont niés : le jeune Mohamed tué dans les bras de son père devant la colonie de Netzarim à Gaza, les Turcs du Mavi Marmara accusés d’avoir agressé les soldats israéliens, la mort — après avoir reçu une grenade— d’une Palestinienne de Bil’in présentée comme une manipulation ... Comment en est-on arrivé là? Sans le sionisme, c’est incompréhensible.

Le sionisme est une réponse, fausse, à l’antisémitisme. Il repose dès le départ sur une «théorie de la séparation», l’idée que l’antisémitisme est inéluctable, que Juifs et Non-juifs ne peuvent pas vivre ensemble. Les sionistes n’ont joué qu’un rôle négligeable dans la lutte contre l’antisémitisme et dans la lutte contre les pogromistes. Au contraire dès le début, ils ont utilisé l’antisémitisme pour inciter les Juifs à partir.

Pour un tel projet, il a fallu récrire l’histoire. D’abord à qui s’adresser? Il existait de nombreuses communautés juives ayant une communauté de destin liée à la religion. Ces communautés avaient des langues différentes (ladino, judéo-arabe, yiddish …), des coutumes et des rites différents. Les sionistes ont présenté la diaspora comme une parenthèse inintéressante faite de souffrances à laquelle le «retour» mettrait fin. Alors que la majorité des fondateurs du sionisme n’étaient pas croyants, ils ont utilisé la Bible comme un livre de conquête justifiant un projet colonial.

Les plus grands archéologues israéliens (Finkelstein et Silberman) ont écrit dans «La Bible dévoilée» que le discours biblique est légendaire. La thèse de ce livre fait, sauf sur des détails, très largement consensus parmi les historiens et les archéologues. La conquête sanglante de Canaan par Josué n’a pas existé. Et pourtant, quand on traverse la Cisjordanie, on rencontre plein de colonies aux jolis noms bibliques (Efrat, Shilo, Eli, Kiryat Arba …) dont les habitants sont persuadés qu’ils reviennent sur la terre de leurs ancêtres et reproduisent l’acte de Josué. À l’époque du prétendu royaume unifié de David et Salomon, Jérusalem était un petit village de l’Age de Fer. Et pourtant dans le quartier de Silwan à Jérusalem-Est, on exproprie des Palestiniens pour faire visiter la «maison de David», le «Parc de David» …La migration des Hébreux depuis la Mésopotamie n’a pas eu lieu. Mais à Hébron, pour que les Israéliens aient seuls la possession du prétendu tombeau d’Abraham (le caveau des Patriarches), un colon extrémiste a tué 29 Palestiniens.

Dans son livre «Comment le peuple juif fut inventé», Shlomo Sand met à bas les mythes fondateurs du sionisme : il n’y a eu ni exil, ni retour. La religion juive, qui a été longtemps prosélyte, s’est dispersée mais pas le peuple. Autrement dit les Juifs d’aujourd’hui sont majoritairement descendants de convertis et les Palestiniens sont majoritairement descendants … des Hébreux. Les sionistes qui entreprennent de réfuter ces deux livres utilisent des arguments invraisemblables, comme l’idée que la «Terre Sainte» aurait eu trois millions d’habitants au moment de la destruction du Temple.

Aujourd’hui en Israël, le «mal absolu», c’est l’Arabe, c’est l’Islam. Le pays partage avec les dirigeants américains la même conception du monde. On trouve en Israël de plus en plus de textes décrivant la vie qu’ont menée les Juifs du monde arabe comme un enfer. Là encore, l’histoire est manipulée. Le statut de «dhimmi» accordé à toutes les religions du livre dans les pays musulmans n’a certes rien à voir avec la citoyenneté, mais c’était une forme de protection et cela n’a rien à voir avec le traitement des minorités dans le monde chrétien. Avant le sionisme, il n’y a eu en pays musulman rien de comparable aux pogroms qui se sont multipliés en Europe.

Il existe plusieurs périodes dans ce qu’on appelle l’antisémitisme. Pendant 15 siècles en Europe, il y a eu l’antijudaïsme chrétien. Judaïsme et Christianisme ont été longtemps en concurrence. Quand le christianisme a triomphé, il a imposé toute une série d’interdits dont la possession de la terre, il a enfermé les Juifs dans des quartiers confinés, il a propagé des stéréotypes racistes et a été à l’origine de nombreux pogroms ou expulsions collectives. C’est paradoxalement la sortie du ghetto et l’émancipation des Juifs en Europe qui a provoqué le passage le passage de l’antijudaïsme chrétien à l’antisémitisme racial, le juif personnifiant l’obstacle à tous les nationalismes européens qui rêvaient d’Etats ethniquement purs.

Là aussi, les sionistes réécrivent l’histoire. Ils essaient de faire croire que pendant ces longs siècles d’oppression, les Juifs rêvaient d’un «retour à Jérusalem». C’est bien sûr faux. Quand l’empire ottoman a offert asile aux Juifs chassés d’Espagne, ceux-ci sont allés à Salonique ou Smyrne et pas en Palestine. Les sionistes passent sous silence le fait que toutes les personnalités juives ou d’origine juive devenues célèbres, de Spinoza à Freud en passant par Marx ou Einstein n’ont rien à voir avec le sionisme. Ils oublient le rôle fondamental des femmes et des hommes d’origine juive dans les mouvements progressistes. Un parti comme le Bund, parti révolutionnaire juif dans l’empire tsariste était profondément antisioniste. Jusqu’à la deuxième guerre mondiale, le projet sioniste était très minoritaire chez les Juifs et moins de 5% des Juifs du monde entier avaient immigré.

Les sionistes ont inventé l’idée que les communautés juives du monde entier, des Polonais aux Falachas, des Marocains aux Baltes formaient un même peuple. Ils se sont acharnés à effacer les langues, les cultures et les traditions pour imposer une identité unique, une langue unique, un «homme nouveau» avec les clichés colonialistes du pionnier se battant et défrichant son pays. Ils ont utilisé la religion et une idée de race pour définir qui était juif et avait donc tous les droits dans le futur Etat juif et qui ne l’était pas. Ils ont cultivé le «complexe de Massada» selon lequel les Juifs ont été, sont et seront toujours des victimes. Au nom de ce complexe, la souffrance et l’identité de «l’autre» n’existent plus. D’ailleurs, le deuxième pays après la Turquie à nier le génocide arménien est Israël, comme si le seul génocide existant était celui des Juifs.


D’où vient l’impunité d’Israël ?

Face à l’opinion publique mondiale, la légitimité d’Israël vient de deux idées. Le sionisme serait un mouvement de libération national et l’idée d’un Etat Juif en Palestine serait indiscutable après le génocide nazi.

Examinons cela. Le sionisme a curieusement puisé dans un terreau idéologique commun à tous les nationalismes européens de la fin du XIXème siècle. À l’époque de la chute des empires multinationaux, l’équation un peuple = un Etat s’est imposée avec le rêve fou d’Etats ethniquement purs. Cette idée meurtrière a été la cause de nombreuses guerres et elle a contribué à la montée du nazisme. Le sionisme a été un nationalisme très particulier puisqu’il a dû inventer le peuple et choisir artificiellement un territoire. Cette affinité idéologique avec les pires nationalismes explique l’admiration que Jabotinsky avait pour Mussolini.

La déclaration Balfour (1917) éclaire les rapports des sionistes avec les dirigeants européens. Les antisémites qui deviennent idéologiquement hégémoniques à cette époque considèrent les Juifs comme des étrangers «asiatiques» inassimilables. Balfour était, comme la plupart des politiciens de l’époque, un antisémite. Faire de la Palestine un foyer juif avait un double but. D’un côté se débarrasser des Juifs européens et de l’autre coloniser le Proche-Orient. Bref les Juifs qui étaient des parias en Europe devenaient des Européens s’ils partaient en Palestine.

Les sionistes ont-ils joué un rôle dans la résistance juive au nazisme? Un faible rôle, cette résistance a été essentiellement communiste et bundiste. Pire, certains sionistes ont été aveugles ou complices. Ainsi Ben Gourion en 1933 a brisé le boycott de l’Allemagne nazi décrété par les Juifs américains. Et le futur Premier Ministre Itzhak Shamir, un des dirigeants du groupe Stern, a fait assassiner des soldats britanniques jusqu’en 1943 alors que le génocide avait déjà provoqué des millions de morts en Europe.

Après la guerre, il y a un consensus mondial pour la création de l’Etat d’Israël. Pour les Soviétiques, c’est l’espoir d’affaiblir l’empire britannique. Les armes tchèques livrées à la Haganah joueront un rôle important dans la guerre de 48. Pour l’Europe, il y a l’idée de la «fin du problème juif», puisqu’ils auront désormais un pays. Après 1945, il y a dans des camps en Europe des centaines de milliers de survivants du génocide. Le Yiddishland a disparu, ils demandent des visas pour différents pays. Contraints ou forcés, ils finissent par partir en Palestine. L’Europe s’est débarrassée de son crime sur le dos du peuple palestinien qui n’avait pas la moindre responsabilité dans le génocide. La propagande sioniste affirme l’inverse en pointant du doigt le seul dirigeant palestinien pronazi, le mufti Amine El Husseini. Dans son livre «Les Arabes et la Shoah», Gilbert Achkar montre que le mufti était totalement isolé.

Il n’y a donc pas sentiment de culpabilité des Européens sur l’antisémitisme mais soulagement. Réparer la persécution aurait été dire «vous avez été des parias, vous connaîtrez désormais égalité et fin des discriminations». On leur a dit : «maintenant vous avez un pays, vous partez quand vous voulez». Bref les Européens qui soutiennent inconditionnellement Israël ne sont pas franchement philosémites.

Le jeune Etat israélien a très mal accueilli les rescapés du génocide accusés par les religieux de s’être mal conduits et par les sionistes d’avoir été déportés et exterminés passivement au lieu de se battre pour «leur» pays. Ces rescapés sont toujours maltraités puisque la moitié des survivants vivant en Israël sont sous le seuil de pauvreté, faute de retraites décentes. Dès la fin des années 50, l’Etat d’Israël voit le profit à tirer d’une récupération complète de la question du génocide. C’est l’époque de la création du musée Yad Vashem (sur le territoire du village martyr Deir Yassine) et du procès Eichmann. Israël se présente comme un havre de paix pour les Juifs du monde entier. Il est vrai que beaucoup de Juifs ne savaient pas où aller ou que la résurgence d’un puissant antisémitisme en Europe de l’Est détachait les Juifs de ces pays du communisme et les poussait à vouloir émigrer. Mais en même temps, le sionisme a mis en danger les Juifs du monde arabe où ils vivaient depuis très longtemps et a provoqué leur exode. Aujourd’hui, s’il y a bien un pays où les Juifs sont en insécurité, c’est Israël et il en sera ainsi tant que durera la destruction de la Palestine. L’assimilation systématique de toute critique d’Israël à l’antisémitisme est grotesque. Israël n’a aucun droit de propriété sur l’antisémitisme ou le génocide. Au contraire, les ressemblances idéologiques entre ce qui a mené au fascisme et ce que font les dirigeants israéliens (la négation de «l’autre») mériteraient d’être davantage examinées. À l’antisémitisme traditionnel s’ajoute aujourd’hui un «antiisraélisme» que les sionistes veulent assimiler à l’antisémitisme.

Israël est devenu, ce qui n’était pas inéluctable, une tête de pont occidentale au Proche-Orient. C’est aujourd’hui la raison principale du fait que, quelques soient les crimes commis, il n’y a jamais de sanctions. L’Etat d’Israël surarmé, dépensant l’essentiel de son budget dans l’armement et les technologies de pointe, c’est l’Etat rêvé par les dirigeants occidentaux. Penser qu’ils souhaitent un Etat d’Israël vivant en paix et sur un pied d’égalité avec les Palestiniens est une illusion. Dans leurs rapports avec les Etats-Unis, les dirigeants israéliens savent que tout leur est permis vis-à-vis des Palestiniens et que jamais les Etats-Unis ne les en empêcheront. Obama vient d’en faire la preuve.


La destruction de la Palestine

Il n’y a pas de génocide en Palestine. Pendant le massacre de Gaza (l’opération «plomb durci»), il y a eu 1400 morts et de nombreux crimes de guerre. Cela représente 0,1% de la population de Gaza. Il est plus exact de parler de «sociocide», de destruction du lien social, de l’économie, de l’unité territoriale.

L’occupation a fait éclater la Palestine en 5 entités distinctes.

. Il y a avant tout les réfugiés. Les Palestiniens sont un peuple de réfugiés. La première violation flagrante et impunie de l’Etat d’Israël a été de ne pas appliquer la résolution 194 de l’ONU (décembre 1948) qui reconnaît le droit au retour des réfugiés. Non seulement ce retour des 800000 expulsés a été immédiatement interdit, mais la quasi-totalité de la terre palestinienne a été confisquée par l’Etat ou le KKL. Des centaines de villages palestiniens ont été rayés de la carte et dynamités. Parmi les associations anticolonialistes israéliennes, il y en a une, Zochrot, qui recherche tous les anciens villages palestiniens et les fait visiter aux descendants des expulsés. Il y a aujourd’hui plus de 4 millions de Palestiniens qui dépendent de l’UNRWA, sans compter ceux qui ont émigré hors du Proche-Orient. Pour les Israéliens, ce sont des «Arabes» et les pays arabes n’ont qu’à les intégrer. C’est du négationnisme. Nier le droit au retour des réfugiés, c’est nier le crime fondateur, le nettoyage ethnique de 1948-49.

. Il y a les «Palestiniens de 48» qui ont théoriquement la nationalité israélienne. Dans un Etat qui se dit Juif, ils sont desétrangers dans leur propre pays. Ils subissent de très nombreuses discriminations à la possession de la terre, au logement, à l’éducation et au travail. De très nombreux métiers leur sont interdits. Les taux de chômage ou de pauvreté chez eux sont très supérieurs à ceux des Israéliens juifs. Il existe de nombreux villages palestiniens non reconnus sans eau, sans électricité, sans route, sans école. La situation des Bédouins du Néguev est particulièrement scandaleuse. Plus de 100000 d’entre eux vivent dans des bidonvilles en plein désert. Dès qu’ils construisent un village, celui-ci est détruit à l’image du village d’Al-Araqib déjà détruit 9 fois. Les Palestiniens de 48 votent pour 3 partis : le parti communiste (Hadash), le Balad et le Ta’al. La répression contre eux est féroce. Le fondateur du Balad, Azmi Bishara, s’est exilé pour éviter la prison. Autre députée du Balad présente sur le Mavi Marmara, Haneen Zoabi a été agressée en pleine Knesset. Et Ameer Makhoul, le principal animateur d’Ittidjah, l’ONG qui défend les droits civiques des Palestiniens de 48, est en prison pour de nombreuses années, accusé «d’espionnage».

. Il y a Gaza, devenu un laboratoire à ciel ouvert. Une région surpeuplée (4000 habitants au kilomètre carré) dans laquelle 8000 colons ont longtemps occupé 40% de l’espace. Les Palestiniens ont eu des élections législatives parfaitement démocratiques et ils ont été cruellement punis d’avoir «mal» voté. Le blocus qui prive les Gazaouis de nourriture, d’électricité, d’eau, de ciment, de matériel scolaire en quantité suffisante et qui leur interdit de sortir ou de pêcher est un crime de guerre. Briser ce blocus est urgent et la prochaine flottille qui partira en mai a une grande importance. La division des Palestiniens qui n’ont pas d’Etat mais qui ont deux gouvernements rivaux est une grande victoire de l’occupant. Pour les Israéliens, l’essentiel est de «ne pas avoir de partenaires pour la paix». Quand les Palestiniens étaient majoritairement laïques, les Israéliens ont pourchassé et assassiné leurs militants en favorisant la montée des religieux. Quand le Hamas est devenu puissant, ses dirigeants (le Cheikh Yassine, Ahmed Rantissi) ont été assassinés sans jugement. En Israël, la population de Gaza a été «déshumanisée» dans l’opinion, assimilée à une bande de terroristes, ce qui explique l’absence quasi totale de réaction d’indignation lors de «Plomb durci». L’évacuation de Gaza par Sharon a été un trait de génie. Les Palestiniens sont en train de devenir majoritaires entre Méditerranée et Jourdain. Sans Gaza, les Juifs israéliens seront encore majoritaires pendant longtemps.

. Jérusalem est devenu un point central de la guerre. Quand les Israéliens ont conquis Jérusalem-Est en 1967, il y avait la vieille ville et quelques quartiers autour. Jérusalem-Est s’étend aujourd’hui de Ramallah à Bethléem sur 4% de la Cisjordanie. Dans cette ville, il y a 300000 Juifs Israéliens à l’Ouest, 270000 Palestiniens à l’Est et 250000 colons. La judaïsation de Jérusalem-Est se fait à marche forcée. Les colonies périphériques comme Pisgat Zeev sont progressivement intégrées à l’espace urbain grâce notamment au tramway construit par Alstom et Véolia. Tout est prétexte pour construire de nouvelles colonies. Ainsi la forêt qui existait entre Jérusalem et Bethléem a brûlé le premier jour des négociations Barak-Arafat. C’est aujourd’hui la colonie de Har Homa qui arrive aux fenêtres de la mairie de Bethléem. La judaïsation frappe à présent les quartiers palestiniens. Déjà un quart de la vieille ville a été confisqué et ses habitants expropriés. Ce sont aujourd’hui les quartiers de Sheikh Jarrah et Silwan qui sont attaqués. On est clairement à Jérusalem dans une guerre de conquête où tout est permis.

. Enfin la Cisjordanie. Les Palestiniens y sont beaucoup plus nombreux que les colons, mais ces derniers les encerclent et les asphyxient. On assiste à une colonisation spatiale. Les Israéliens installent partout des stations- service, des zones industrielles, des décharges et la terre palestinienne est inexorablement réduite. Les colonies existantes disposent d’énormes espaces pour s’agrandir. Certaines sont devenues de véritables villes. Les Chrétiens sionistes américains, qui sont accessoirement des antisémites, ont largement financé la colonisation. La frontière internationalement reconnue n’existe plus et il faut une carte française pour s’apercevoir que l’autoroute Tel-Aviv/Jérusalem traverse les territoires occupés ou que l’usine de cosmétiques Ahava est en Cisjordanie. Toutes les grandes villes palestiniennes sont encerclées par les colonies et le mur. Celui-ci prive la Cisjordanie d’une large partie de son territoire. La vallée du Jourdain est quasiment totalement annexée. La Cisjordanie est morcelée avec trois statuts différents (zones A,B et C) et des centaines de check-points. L’annexion n’est plus rampante, elle est omniprésente. Quand on traverse la Cisjordanie par les routes de contournement, on ne voit plus la Palestine. Pour aller de Ramallah à Bethléem, les Palestiniens doivent faire un large détour et utiliser des routes chaotiques. L’économie réelle est réduite à peu de choses faute de possibilité d’investir et de commercer. Les Palestiniens en sont réduits à devoir acheter leur eau aux Israéliens. Bref, comme l’a écrit Zyad Clot, «il n’y aura pas d’Etat palestinien» car l’occupant a détruit la possibilité d’en faire un.


Quelle paix ?

Les Palestiniens ont fait une concession majeure en 1988 à Alger en acceptant de limiter le futur Etat palestinien à 22% de la Palestine historique. C’est sur cette base qu’ont été signés les accords d’Oslo et cela a été un gigantesque fiasco et un marché de dupes. Les Palestiniens ont reconnu Israël et Israël n’a fait que reconnaître l’OLP. Il n’a jamais été question pour les dirigeants sionistes d’accepter de rendre les territoires occupés et, soit d’évacuer les colons, soit de les pousser à accepter la nationalité palestinienne. Il n’a jamais été question de reconnaître le droit au retour des réfugiés. Entre la signature des accords d’Oslo et son assassinat, en un an et demi, Rabin a installé 60000 nouveaux colons. Pourquoi?

À aucun moment, les négociations ne sont parties du droit international ou de l’égalité des droits entre deux peuples numériquement de même importance. La négociation a porté sur la «sécurité de l’occupant» et les accords ont attribué à l’Autorité Palestinienneun rôle de collabo avec l’occupant qui est aujourd’hui très critiqué par les Palestiniens. Même à Gaza, le Hamas subit le même phénomène. Gouverner sans souveraineté ne mène nulle part.

Une vraie négociation devrait partir de la reconnaissance du crime fondateur (le nettoyage ethnique de 1948) et des moyens de «réparer». Commencer par là, c’est dire que le projet sioniste est illégitime. Les Blancs sud-africains ont pu dire que l’Apartheid était un crime pour faire la paix, les sionistes ne peuvent pas reconnaître la Naqba. Avec le sionisme, les Palestiniens seront toujours des intrus, les plus modérés cherchant à atténuer leur malheur.

La paix passe donc par un dépassement du sionisme ou une rupture avec le sionisme. L’existence d’un Etat Juif est illégitime. Rappelons que le seul «Etat Français» a été le régime de Vichy. Le droit international ne reconnaît que des sociétés où toutes les personnes, quelles que soient leurs origines ou leur religion, ont les mêmes droits. L’Etat Juif tel qu’il existe ne laissera jamais de place aux Palestiniens et ne peut pas accepter l’égalité des droits. La paix supposerait la fin de l’occupation, de la colonisation, le partage du territoire et des richesses, l’égalité des droits. Avec le sionisme, c’est impossible.

Le peuple israélien existe même s’il y a beaucoup à dire sur la façon dont il s’est formé. Shlomo Sand dit à ce propos qu’un enfant né d’un viol a droit aussi à l’existence. Même lui qui est partisan de deux Etats dit qu’un Etat Juif ne peut pas être démocratique. Si la paix passe par deux Etats, il n’y a aucune raison que ce soit sur la base 78%-22%.

La politique sioniste est aujourd’hui à la fois criminelle contre les Palestiniens et suicidaire pour les Israéliens. En détruisant la possibilité de deux Etats, les Israéliens vont se retrouver avec une lutte citoyenne pour les droits civiques dans ce qui ressemble de plus en plus à un Etat unique. Ils sont prêts à écraser les Palestiniens jusqu’au bout.

Nous n’avons pas le choix. Pour arrêter cette fuite en avant criminelle, vue l’absence durable de sanctions de la part des Etats, les citoyens doivent répondre à l’appel de 172 associations palestiniennesqui date de 2005 : BDS (boycott, désinvestissement, sanctions). Boycott total : commercial, économique, politique, scientifique, culturel, sportif … de l’Etat d’Israël tant que durera l’occupation. Il faut atteindre l’image d’Israël. Face à Michèle Alliot-Marie qui prétend que boycotter est un acte antisémite, il faut opposer ce que dit un anticolonialiste israélien, l’universitaire Neve Gordon : «je suis pour le boycott, c’est la seule façon de sauver mon pays».

Pierre Stambul

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

MessagePosté: 01 Juil 2011, 23:32
de bipbip
Texte sur le site de l' UJFP (Union Juive Pour la Paix) à propos de l’Etat juif, par Uri Avnery :

A propos de l’Etat juif

J’en ai assez de cette absurdité de reconnaissance d’Israël comme « l’ état Juif ».

Ça repose sur un ramassis de phrases creuses et de définitions vagues, vides de tout contenu réel. Ça sert des buts divers, néfastes en général.

Pour Benjamin Netanyahou, c’est un truc pour empêcher l’établissement de l’état palestinien. Il a dit cette semaine qu’il n’y a pas de solution à ce conflit. Pourquoi ? Parce que les palestiniens n’ont pas accepté de ..et c. . Quatre parlementaires de droite ont déposé un projet de loi donnant pouvoir au gouvernement de refuser de reconnaître les nouvelles ONG, et de dissoudre les anciennes si elles dénient le « caractère Juif de l’état ».

Ce nouveau projet est le dernier d’une série destinée à réduire les droits civils des citoyens arabes et des progressistes. Si feu le Dr. Samuel Johnson vivait aujourd’hui en Israël, il reformulerait sa fameuse sentence sur le patriotisme en ces termes : « la reconnaissance du caractère Juif de l’état est le dernier refuge des canailles ». Dans la langue de bois israélienne, dénier le « caractère Juif » de l’état revient à la pire des félonies politiques : celle de déclarer qu’Israël est « l’état de tous ses citoyens » .

Pour un étranger cela doit paraître quelque peu bizarre . En démocratie l’état appartient clairement à tous ses citoyens. Cela paraîtrait un truisme aux USA. Cela sera considéré comme une dangereuse menace, pour ne pas dire une trahison en Israël. ( Autant pour nos valeurs communes tant vantées).

Dans les faits Israël est bien un état de tous ses citoyens. Tous les adultes israéliens - et eux seuls - ont le droit de choisir les membres de la Knesset. La Knesset adopte le gouvernement et fait les lois. Elle a mis en application de nombreuses lois qui déclarent qu’Israël est un état juif et démocratique. Dans 10 ans ou dans 100 ans, la Knesset pourrait brandir le drapeau du catholicisme, du bouddhisme ou de l’islam. En démocratie, ce sont les citoyens qui sont souverains, pas les mots .

QUELS MOTS ? Demandera -t-on

L’expression « état Juif et démocratique » a la faveur des tribunaux. Mais ce n’est pas assez pour Natanyahou et consorts qui parlent de « l’état-nation du peuple Juif », ce qui rend un son très dix-neuvième siècle. On entend aussi beaucoup « l’état du peuple Juif ».

Il y a un trait commun à tous ces noms de marque, c’est leur parfaite imprécision. Que veut dire « Juif » ? Une nationalité, une religion, une tribu ? Qu’est-ce que le « peuple Juif » ? Et, plus vague encore, « la nation Juive » ? Doit-on y inclure les membres du Congrès qui font les lois des Etats-Unis ? Ou la cohorte de Juifs qui s’occupe de la politique des USA au Moyen Orient ? Quel pays représente l’ambassadeur Juif du Royaume Uni en Israël ?

Les tribunaux ont du se colleter avec la question de savoir où est la frontière entre « Juif » et « démocratique » ? Que veut dire « démocratique » dans ce contexte ? Un état « Juif » peut-il être vraiment « démocratique » et un état « démocratique » peut-il vraiment être un « état Juif » ? Toutes les réponses qu’ont données les juges et les plus éminents professeurs sont tirées par les cheveux et se tiennent, comme on dit en hébreu, comme sur des pattes de poulets.

REVENONS-EN au début : le livre écrit en allemand par Theodor Herzl, le père fondateur du sionisme ; il l’a appelé « Der Judenstaat » .

Malheureusement c’est un mot typiquement allemand, intraduisible. On le traduira en français par « l’état Juif » ou « l’état des Juifs ». Mais les deux sont inexacts. Ce qu’il y aurait de plus proche serait « l’état enjuivé ».

Si cela a une résonance gentiment antisémite, ce n’est pas par accident. Ça va en choquer certains, mais le mot ne fut pas inventé par Herzl. Le premier a s’en servir fut un hobereau prussien qui portait un nom impressionnant, Friedrich August Ludwig Von Der Marwitz, qui mourut 23 ans avant la naissance de Herzl . C’était un antisémite convaincu bien avant qu’un autre allemand n’inventât le mot « antisémite » , comme un synonyme "d’esprit allemand sain".

Marwitz, qui était un ultra-conservateur, s’opposait aux réformes libérales de son époque. En 1811 il prévenait que ces réformes transformeraient la Prusse en un « Judenstaat », un état enjuivé. Il ne voulait pas dire que les Juifs allaient devenir la majorité en Prusse, à Dieu ne plaise, mais que les argentiers et autres trafiquants Juifs de l’ombre allaient corrompre le caractère du pays et balayeraient les bonnes vieilles vertus prussiennes.

Herzl lui-même ne rêvait pas d’un état qui serait à tous les Juifs du monde. Bien au contraire - sa vision était que tous les vrais Juifs voudraient aller dans le « Judenstaat » ( que ce soit en Argentine ou en Palestine, il n’avait pas encore décidé ). Eux, et eux seuls, demeureraient « Juifs ». Tous les autres s’assimileraient aux nations qui les accueillent et cesseraient du coup d’être Juifs. Loin, très loin, de « l’état nation du peuple Juif » comme l’envisagent les sionistes d’aujourd’hui, en y faisant entrer les millions de ceux qui ne rêvent pas d’immigrer en Israël.

Quand j’étais un jeune garçon, j’ai participé à des dizaines de manifestations contre le gouvernement britannique de Palestine. Lors de chacune d’elles, nous chantions à l’unisson « liberté d’immigration ! Un état hébreu ! ». Je ne me rappelle pas que nous ayons jamais eu pour slogan « un état Juif ».

C’était naturel. Nous nous distinguions clairement, nous les gens de Palestine qui parlions hébreu, des Juifs de la diaspora, et personne n’y faisait objection. Pour certains, c’était une idéologie, mais pour la majorité, c’était l’expression naturelle de la réalité : l’agriculture hébreu et la tradition Juive, le socle hébreu et la religion juive, le kibboutz hébreu et le shtetl Juif . Le yishouv hébreu ( la nouvelle communauté dans le pays) et la diaspora Juive. « Juif de la diaspora » était l’injure suprême.

Pour nous, cela n’avait rien d’anti-sioniste. Bien au contraire, le sionisme voulait créer une nation ancienne-nouvelle en Eretz Israël, ( le nom de la Palestine en Hébreu ), et cette nation était, bien sûr, tout à fait distincte des Juifs. Ce fut seulement l’holocauste, et son impact émotionnel intense, qui amena le changement des règles verbales.

De quand date la formule « état Juif » ? C’est en 1917 , en pleine première guerre mondiale, que le Gouvernement Britannique promulgua la dite « Déclaration Balfour » qui proclamait que « le Gouvernement de sa Majesté envisage favorablement l’établissement en Palestine d’un foyer national pour le peuple Juif… ». Chaque mot était soigneusement choisi après des mois de discussion avec les leaders sionistes. Un des objectifs principaux des britanniques étaient de gagner les Juifs américains et russes à la cause des alliés. La Russie révolutionnaire allait sortir d’une guerre dans laquelle l’entrée de l’Amérique isolationniste devenait cruciale. ( Par ailleurs, les Britanniques rejetèrent les mots " la transformation de la Palestine en un foyer national pour le peuple Juif", insistant sur l’expression "en Palestine" - projetant l’ombre de la partition du pays ).

Et en 1947, l’ONU décida bien la partition de la Palestine entre ses populations arabe et Juive. Cela ne disait rien du caractère des deux futurs états - elle usait de la définition courante des deux parties en guerre. Près de 40% de la population du territoire dévolu à l’état "Juif " était arabe. Les avocats de "l’état Juif" ont monté en épingle la phrase de la "Déclaration d’Etablissement de l’Etat d’Israël" ( qu’on appelle en général la " Déclaration d’Indépendance" ) qui comporte bien les mots " Etat Juif". Après avoir fait mention de la résolution de l’ONU qui appelle à un état Juif et un état arabe, la déclaration poursuit par : " CONFORMÉMENT A LA RÉSOLUTION DE L’ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DES NATIONS-UNIES, NOUS PROCLAMONS LA CRÉATION D’UN ÉTAT JUIF EN TERRE D’ISRAËL QUI PORTERA LE NOM D’ÉTAT D’ISRAËL".

Cette phrase ne dit rien du caractère du nouvel état, et, dans le contexte, est purement formelle. Un des paragraphes de la déclaration ( dans la version originale en hébreu ) parle du " peuple hébreu" : "Nous tendons la main à tous les états voisins et à leurs peuples et leur offrons la paix et un bon voisinage, et nous les appelons à la collaboration et le soutien mutuel avec le peuple hébreu indépendant sur sa terre". Cette phrase est grossièrement falsifiée dans sa traduction anglaise officielle qui change les derniers mots en " le peuple Juif souverain sur sa propre terre".

Concrètement, il a du être quasiment impossible de trouver un accord sur une formule fondée idéologiquement, dans la mesure où le déclaration fut signée par les leaders de toutes les factions, depuis les anti-sionistes ultra orthodoxes jusqu’au Parti Communiste aligné sur Moscou.

TOUTE DISCUSSION sur l’état Juif amène inévitablement à la question de que sont les Juifs, une nation ou une religion. La doctrine israélienne officielle est que Juif a une définition à la fois nationale et religieuse. La collectivité Juive, exception en son genre, est à la fois religieuse et nationale. Pour nous, nation et religion sont une seule et même chose. On ne peut rentrer dans cette collectivité que par la porte religieuse. On n’entre pas par la nation.

Des centaines de milliers de russes non-Juifs ont immigrés en Israël avec leurs proches Juifs en fonction de la loi du retour. La loi est très large. Pour attirer les Juifs, elle permet à des parents non-Juifs éloignés de venir avec eux, y compris l’épouse non-juive du petit-fils d’un Juif. Beaucoup de ces non-Juifs veulent devenir Juifs pour être considérés comme des Israéliens à part entière, mais en vain. Selon la loi israélienne est Juif une personne née "d’une mère juive ou convertie au judaïsme, et qui n’a pas adopté une autre religion". C’est une définition purement religieuse. La loi religieuse juive stipule qu’en l’occurrence, seule la mère, et non le père, compte.

Il est extrêmement difficile d’obtenir une conversion en Israël, les rabbins demandent à l’aspirant à la conversion de respecter les 613 commandements de la religion juive- ce que très peu d’israéliens reconnus font. Mais l’on ne peut devenir un membre officiel de la dite "nation Juive" par aucune autre entrée. On peut devenir membre de la nation américaine en acceptant la citoyenneté US. Rien de tel ici. Nous menons une bataille sur cette question en Israël. Certains d’entre nous veulent qu’Israël soit un état israélien, l’état du peuple israélien, soit " un état de tous ses citoyens". D’autres veulent nous imposer la loi religieuse supposée fixée par Dieu à jamais sur le mont Sinaï il y a quelque 3200 ans, et abolir toutes les lois votées par la Knesset élue démocratiquement qui lui seraient contraire. Beaucoup veulent qu’on ne touche à rien.

Mais en quoi, nom de Dieu ( excusez-moi), cela concerne-t-il les palestiniens ? ou les Islandais ?

LA DEMANDE que les palestiniens reconnaissent Israël comme " l’état Juif" ou comme "l’état nation du peuple Juif" est insensée. Comme disent les Britanniques, ce n’est pas leur foutue affaire. Cela revient à intervenir dans les affaires intérieures d’un autre pays. Mais un ami a suggéré une voie de dégagement simple : la Knesset n’a qu’à changer le nom de l’état en quelque chose comme " la république Juive d’Israël", si bien que tout accord de paix entre Israël et l’état arabe de Palestine inclura automatiquement la demande de reconnaissance. Cela mettrait aussi Israël dans le droit fil de l’état auquel il ressemble le plus, "la République islamique du Pakistan", qui a vu le jour à peu près en même temps que lui, par la partition des Indes, après un massacre mutuel horrible, après l’émergence d’un problème de réfugiés énorme, et une guerre de frontière perpétuelle au Kashmir. Et bien sûr la bombe atomique.

Cette comparaison va choquer bien des israéliens. Quoi, nous ? Pareils à un état théocratique ? Nous nous rapprochons du modèle pakistanais et nous nous éloignons de l’américain ?

Bon Dieu, prouvons le contraire !

Uri Avnery

UJFP

http://www.ujfp.org/modules/news/articl ... toryid=941

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

MessagePosté: 10 Juil 2014, 12:45
de bipbip
Israël contre le judaïsme

Yakov Rabkin a choisi un titre plus « soft » pour son dernier livre : Comprendre l’État d’Israël. Idéologie, religion, société.
Mais le fond du propos est bien celui-ci. Beaucoup de juifs qui ont émigré vers l’Israël pensent que c’est le seul moyen de vivre leur judaïsme. Yakov est un juif religieux auteur d’un précédent ouvrage : Au nom de la Torah, une histoire de l’opposition juive au sionisme (2004). Lors de ma première conférence publique en 2002 sur la guerre israélo-palestinienne, j’avais eu cette intuition : « pour construire l’Israélien nouveau, il a fallu tuer le juif ». Un juif athée et un juif religieux arrivent à peu près à la même conclusion : la société israélienne a éradiqué l’histoire, la mémoire, les identités, les langues, les traditions et les valeurs du judaïsme. Quelque part cette société qui a dérivé vers le colonialisme et l’apartheid est tout sauf fidèle à la continuité juive. L’universitaire israélien Amnon Raz-Krakotzkin a bien saisi le paradoxe du sionisme fondé par des juifs athées ou agnostiques : « Dieu n’existe pas et il nous a promis cette terre ».
C’est pourquoi son compatriote Shlomo Sand dans son commentaire sur ce livre dit : « Celui qui voit dans le sionisme une continuation du judaïsme ferait bien de lire ce livre. Mais celui qui croit que l’État d’Israël est un État juif est obligé de le lire ».


La tradition juive contre le nationalisme ethnique et le racisme

On a souvent une idée fausse avec l’image du colon religieux maltraitant les Palestiniens et proclamant que « Dieu a donné cette terre au peuple juif ». Or l’abdication du pouvoir politique en cette terre promise par Dieu fait partie intégrante de la tradition juive qui a des liens organiques avec l’exil. C’est lui qui non seulement a assuré la survie des Juifs à travers les siècles mais constitue un concept judaïque fondamental. Pour les juifs que l’on surnomme souvent « ultra-orthodoxes », « l’exil sert d’hôpital à notre peuple. Il n’est pas concevable que nous prenions le contrôle de notre terre avant d’être guéris ». Dans le Talmud, Dieu enjoint les exilés de ne pas y rentrer en force et en masse. L’État d’Israël ne serait alors qu’une entrave sur le chemin de la rédemption messianique.

La question incontournable du sionisme

« L’Israélien ne perpétue pas le Juif, il le métamorphose ». La phrase est de Malraux. En effet, Yakov rappelle que le sionisme a des origines protestantes, d’où le fait que le sionisme chrétien constitue actuellement une force politique considérable. Pour les chrétiens sionistes, qui font une lecture littérale de la Bible, la concentration des juifs en terre promise accélèrerait le deuxième avènement du Christ. Certains de ces fondamentalistes prônent un isolement des populations arabes dans des réserves de type nord-américain.
Les fondateurs juifs du sionisme n’étaient pas croyants, mais ils ont récupéré un discours religieux.
Dès ses débuts, le mouvement sioniste vise à réaliser une colonisation européenne en Asie occidentale et son modèle, c’est ce qui s’est fait en Amérique du Nord ou en Australie. Là-bas, les colonies de peuplement ont réussi à déloger, déposséder ou massacrer les autochtones.

La « nationalité juive » n’est qu’une invention du 19e siècle. Yakov cite le grand philosophe Yeshayahou Leibowitz : « il y a une sorte de prostitution des valeurs du judaïsme qui consiste à se servir d’elles comme couverture pour satisfaire des pulsions et des intérêts nationalistes ».
Le sionisme a également inventé une nouvelle langue, l’hébreu, au détriment des langues juives, surtout le yiddish, jugées trop liées à l’exil. Cette utilisation/transformation de la langue religieuse en une langue vernaculaire est une offense pour de nombreux juifs orthodoxes et constitue une autre rupture avec la tradition juive. Cet attribut du nationalisme ethnique va de pair avec la fabrication du « nouvel homme hébreu » musclé et intrépide, ce qui est à l’antithèse de l’image du juif pieux.

Israël et le génocide

La mémoire du génocide est devenue le paravent derrière lequel les dirigeants israéliens se cachent en toute occasion pour justifier leur politique à l’égard des Palestiniens. Yakov rappelle que si ces dirigeants se servent de l’antisémitisme et du génocide, ils les ont bien peu combattus. Ils ont torpillé les tentatives d’offrir aux juifs fuyant le nazisme et plus tard aux survivants, tout abri ailleurs qu’en Palestine. Dès 1938, à la conférence d’Évian où la plupart des pays rechignent à accueillir les Juifs allemands et autrichiens, les sionistes demandent que la seule destination possible pour eux soit la Palestine mandataire. Pour les sionistes, l’important c’est la construction de l’État et pas la survie des individus. Yakov cite un de leurs dirigeants : « c’est par le sang que nous aurons un État ». C’est à cet objectif politique que sert l’accord avec les Nazis (signé en 1933) permettant, à l’encontre du boycottage économique alors en vigueur, l’exportation des biens allemands vers la Palestine, achetés avec les capitaux appartenant aux dizaines de milliers de Juifs allemands autorisés à partir. Après la guerre, les survivants du génocide ont été diffamés en Israël, accusés « d’aller comme des brebis à l’abattoir ». Marek Edelman (commandant en second de l’insurrection du ghetto de Varsovie) et le Bund, parti révolutionnaire juif auquel il appartenait, ont été sciemment occultés parce qu’opposés au sionisme. Le livre d’Hannah Arendt « Eichmann à Jérusalem » a mis 37 ans pour être traduit en hébreu.

Juifs athées et juifs harédis

Si sur beaucoup de terrains, les critiques radicales du sionisme et de la politique israélienne formulées par les juifs athées et les juifs pieux se retrouvent, des différences importantes subsistent.
Yakov, né et éduqué à Leningrad, met en relief les contributions des juifs russes au sionisme sans dire que la déception qui a suivi l’espoir et l’adhésion à la révolution (avec le stalinisme et le retour de l’antisémitisme) a considérablement renforcé le sionisme. En esquissant l’engagement massif des Juifs russes contre le régime du tsar à partir de 1880, il signale que la tradition juive décourage le recours à la force contre les voisins non-juifs sauf des les cas d’autodéfense. Mais il ne parle pas de la lutte des classes. Or c’est la prolétarisation des juifs de l’empire tsariste et les pogroms organisés par le régime qui ont provoqué perte de religion et engagement révolutionnaire.
Yakov rappelle que la plupart des juifs, religieux ou athées, ont été étrangers ou hostiles au sionisme avant la Deuxième guerre mondiale. Le rabbin Kook (mort en 1935) était une exception en liant religion et terre, ce qui a permis à son fils de former des disciples devenus les fers de lance de la colonisation. L’auteur indique que les Loubavitchs, eux aussi, étaient hostiles au sionisme mais il manque des explications sur la transformation des Loubavitchs en avocats de la colonisation. Idem pour le parti religieux (séfarade) Shass, au départ non sioniste. De façon générale, le passage d’une majorité des religieux d’une position non sioniste ou antisioniste vers l’adhésion aux thèses nationalistes aurait mérité d’être longuement expliqué.
L’hostilité des harédis au recours à la force ne vise pas seulement l’armée israélienne actuelle. Yakov les a rencontrés et les a fait parler (en particulier le groupe Netourei Karta). Pour les harédis, la résistance armée au nazisme ou l’insurrection du ghetto de Varsovie n’ont pas de sens car ils voient le génocide comme une punition divine. Là bien sûr, le misérable athée que je suis ne peut pas accepter d’autant qu’une telle conception désarme complètement le nécessaire combat contre le fascisme et la barbarie.
Difficile aussi d’accepter la participation de rabbins antisionistes à la conférence de Téhéran organisée par Ahmadinedjad. Même s’ils ont parlé à Téhéran des membres de leur famille victimes du génocide, leur participation à une « conférence » au côté de Faurisson est un cadeau formidable fait aux propagandistes sionistes.

Comment on en est arrivé là

Yakov rappelle la religion de l’Etat qui s’est instaurée : « il n’y aura plus de Shoah parce que notre État saura nous protéger ». Il montre comment dès le départ, les sionistes prônaient la ségrégation sociale et politique ; Herzl lui-même déclarait : « les Juifs constituent un élément étranger et destructeur pour les pays où ils habitent ». Un antisémite n’aurait pas dit mieux.
Yakov analyse les étapes de la création d’Israël, le départ prémédité de 800000 Palestiniens et leurs villages détruits. Il montre l’apparition d’un solide racisme contre les juifs arabes, accusés d’avoir la culture de l’ennemi. Il fait l’historique du courant religieux antisioniste qui persiste et refuse de reconnaître l’État d’Israël. Un rabbin de ce courant a été ministre dans le premier gouvernement palestinien après les accords d’Oslo.
À l’intérieur du sionisme, il n’y a pas vraiment de différence entre « gauche » et « droite ». Au niveau mondial, la droite soutient le sionisme parce qu’il incarne un modèle de colonialisme triomphant. Israël est devenu un État oppressif, un État d’apartheid, un pays à l’avant-garde de la « communauté internationale » telle que l’ont constituée les élites occidentales.
Tout ceci, les Palestinien-ne-s et les militant-e-s qui soutiennent les droits du peuple palestinien le savaient. Ce qu’ajoute avec brio Yakov Rabkin, c’est que l’entreprise sioniste et l’État d’Israël qui l’incarne constituent une rupture radicale avec ce que l’on a toujours entendu comme juif.

Pierre Stambul

Comprendre l’Etat d’Israël. Idéologie, religion, société.
Yakov Rabkin, Montréal,
Écosociété, 2014, 270 pages

http://www.ujfp.org/spip.php?article3300

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

MessagePosté: 21 Fév 2015, 03:11
de Pïérô
Israël contre les Juifs

C’est un refrain bien établi. Vous critiquez Israël et le sionisme ? Vous êtes antisémite ! Un Juif français veut pouvoir « vivre son judaïsme » ? On l’invite à faire son « alyah » et à apporter sa pierre à la colonisation de la Palestine.
On essaie de nous marteler que l’histoire des Juifs s’est achevée et qu’Israël en est l’aboutissement. Israël fonctionne comme un effaceur de l’histoire, de la mémoire, des langues, des traditions et des identités juives. La politique israélienne n’est pas seulement criminelle contre le peuple palestinien. Elle se prétend l’héritière de l’histoire juive alors qu’elle la travestit et la trahit. Elle met sciemment en danger les Juifs, où qu’ils se trouvent. Et elle les transforme en robots sommés de justifier l’injustifiable


Retour sur un passé récent

L’histoire des Juifs français n’a strictement rien à voir avec Israël. Régulièrement spoliés, massacrés ou expulsés par différents rois très chrétiens, les Juifs ont acquis la citoyenneté française avec l’Abbé Grégoire pendant la Révolution. Ces deux derniers siècles ont été marqués par une quête de la citoyenneté et de l’égalité des droits. L’affaire Dreyfus a révélé que, si une partie de la société française était antisémite, une autre partie, finalement majoritaire, considérait que l’acquittement et la réhabilitation de Dreyfus étaient l’objectif de tous ceux qui étaient épris de liberté et refusaient le racisme. L’histoire des Juifs français a été marquée par leur participation importante à la résistance contre le nazisme et le régime de Vichy, puis par l’engagement de nombre d’entre eux dans des luttes progressistes et/ou anticoloniales. Les intellectuels juifs de cette époque s’appelaient Raymond Aubrac, Marc Bloch, Laurent Schwartz, Pierre Vidal-Naquet, Stéphane Hessel. C’était une époque où beaucoup de Juifs pensaient que leur propre émancipation passait par celle de tou-te-s. C’était une époque où le racisme, le fascisme et la haine de l’autre étaient considérés comme des abjections à combattre. Les enfants juifs allaient à l’école publique, jamais il ne leur serait venu à l’idée de se séparer des autres dans des écoles confessionnelles.

On s’efforce aujourd’hui en Israël d’effacer l’histoire des Juifs dans les différents pays où ils ont vécu. Si les Juifs ont longtemps été considérés par les antisémites en Europe comme des parias inassimilables et s’ils ont été persécutés parce qu’ils constituaient un obstacle aux nationalismes fous qui rêvaient de sociétés ethniquement pures, ils n’ont jamais recherché la séparation mais au contraire l’insertion à l’intérieur des sociétés dans lesquels ils vivaient.

Une assignation à la désertion

On fait un saut de quelques années. En tête d’une gigantesque manifestation parisienne censée dénoncer le terrorisme, on trouve trois criminels de guerre, Nétanyahou, Lieberman et Bennet qui viennent de s’illustrer dans le massacre de plus de 2000 Palestinien-ne-s (essentiellement des civil-e-s) à Gaza pendant l’été 2014. Profitant de l’émotion causée par l’attentat antisémite de la Porte de Vincennes, Nétanyahou est autorisé (par le gouvernement français) à déclarer aux Juifs français qu’ils sont en insécurité en France et qu’ils doivent partir dans leur « vrai » pays, Israël.

En fait, le sionisme n’a jamais combattu l’antisémitisme. Il s’en est toujours nourri avec en permanence un seul et unique but : faire immigrer le maximum de Juifs en Israël. Du coup, Nétanyahou n’hésite pas à mettre en danger les Juifs français. Il en fait des étrangers dans leur propre pays, des « touristes » qui n’ont pas compris que leur « patrie » est là-bas. Les Juifs sont sommés d’être des « traîtres » (à la seule et unique cause, celle du Grand Israël de la mer au Jourdain) ou des complices. La France a toujours été un échec pour Israël : à peine 80000 Juifs sont partis depuis 1948 et une moitié est revenue. Alors la propagande se fait assourdissante. Pourtant, s’il y a bien un pays où les Juifs sont en insécurité, c’est Israël et il sera ainsi tant que la destruction de la Palestine se poursuivra.

À « l’alyah » (la montée) des vivants vers Israël, s’ajoute à présent celle des morts. Les autorités israéliennes incitent vivement les Juifs français à faire enterrer leurs proches en Israël. Ainsi les victimes de la tuerie de la porte de Vincennes ont été inhumées au cimetière de Givat Shaul. Ce « quartier » de Jérusalem, c’est l’ancien Deir Yassine, le village martyr de la guerre de 1948 où les milices de l’Irgoun dirigées par Menachem Begin ont massacré toute la population avant que le village ne soit, comme tant d’autres, rayé de la carte. Quel symbole !

Israël à l’avant-garde de l’islamophobie

Les Juifs ont vécu pendant des centaines d’années dans le monde musulman. Ils ont même été accueillis par l’empire ottoman après leur expulsion d’Espagne en 1492. Aujourd’hui, Israël participe à la diabolisation des Arabes et des musulmans en se comportant en élève modèle du « choc des civilisations ». Le racisme anti-arabe et l’islamophobie s’expriment ouvertement, des politiciens en ont fait leur fond de commerce et les passages à l’acte sont fréquents. Les crimes de masse comme à Gaza ou la multiplication des propos racistes (Pour le rabbin Rosen, les Palestiniens sont des Amalécites et la Torah autorise qu’on les tue ainsi que leurs femmes, leurs enfants, leurs troupeaux) laisseront des traces. Comment imaginer que ce qui est infligé aux Palestiniens sera sans conséquences ?
En Israël, des propagandistes rivalisent pour expliquer que les Juifs ont vécu l’enfer dans le monde musulman, masquant le fait que l’antisémitisme a été avant tout une invention européenne et chrétienne. Les Juifs orientaux subissent en Israël des discriminations sociales et un mépris raciste. Ils ont souvent été humiliés et discriminés à leur arrivée. Ils sont coupés de leurs racines et poussés à renier leur identité. L’expulsion des Palestiniens de 1948 est présentée comme un « échange de population » alors que le sionisme est le principal responsable, et de la Nakba, et du départ des Juifs orientaux de leurs pays.

Qu’y a-t-il de juif en Israël ?

Les sionistes ont théorisé l’idée que les Juifs et les non-Juifs ne peuvent pas vivre ensemble. C’est totalement contraire à tout ce qui s’est passé pendant des centaines d’années. Cela va à l’encontre de l’aspiration des Juifs à sortir des ghettos, des mellahs et des juderias pour devenir des citoyens normaux.
Les Juifs religieux qui émigrent en Israël y rencontreront rarement la religion telle qu’elle a été pratiquée pendant des siècles. Le courant national-religieux s’est imposé. Ce courant intégriste a totalement révisé la religion. Le « peuple élu », ça n’a jamais voulu dire qu’il a plus de droit que les autres mais au contraire qu’il a plus de devoirs. Parmi les préceptes, il y a « ne fais pas à autrui ce que tu ne veux pas qu’on te fasse » et « tu aimeras ton prochain comme toi-même ». « L’an prochain à Jérusalem », ça n’a jamais voulu dire qu’il faut réaliser le nettoyage ethnique en cours, mais « vivement que le Messie vienne ». L’hébreu a toujours été une langue religieuse interdite à l’usage profane. La religion juive est une religion de « l’exil ». L’installation sur cette terre (d’Israël/Palestine) avant l’arrivée du Messie et a fortiori l’établissement d’un Etat juif étaient interdits. D’ailleurs les Juifs expulsés d’Espagne en 1492 ne sont pas allés à Jérusalem. Herzl a rencontré une hostilité quasi unanime des rabbins contre le projet sioniste dès qu’il a été question d’établir un État juif en Palestine.

Pour les Juifs laïques, les valeurs dominantes d’Israël sont à l’antithèse de ce que sont pour eux les valeurs du judaïsme. Où trouve-t-on dans la tradition juive le racisme, le chauvinisme, le militarisme, le négationnisme de l’existence et de la dignité de l’autre ? Qu’y a-t-il de commun entre ce qu’ont représenté les grands intellectuels juifs (Einstein, Freud, Arendt, Kafka, Benjamin …) et les criminels de guerre qui dirigent Israël ? Qu’est devenue en Israël la mémoire de celles et ceux qui ont lutté contre le fascisme et le colonialisme (Marek Edelman, Abraham Serfaty, Henri Curiel …) ? De quel héritage juif peuvent se prévaloir les colons et les militaires qui justifient à l’avance les violences et les crimes commis contre les Palestiniens ?

Comme l’écrit l’historien israélien Shlomo Sand à propos du livre de Yakov Rabkin Comprendre l’État d’Israël, « celui qui voit dans le sionisme une continuation du judaïsme ferait bien de lire ce livre. Mais celui qui croit que l’État d’Israël est un État juif est obligé de le lire ».

Certains Juifs pensent qu’après le génocide nazi, Israël est l’ultime refuge. Au nom de quoi les dirigeants israéliens peuvent-ils brandir partout l’antisémitisme et le souvenir du génocide ? Les sionistes n’ont joué qu’un rôle marginal dans la lutte contre l’antisémitisme et la résistance au nazisme. Certains dirigeants sionistes ont même eu un comportement honteux pendant la montée du fascisme (Ben Gourion avec les accords de Haavara, 1933) et à l’époque de l’extermination (le groupe Stern assassinant des soldats et des dignitaires britanniques). Comment ne pas comprendre que la mémoire du génocide signifie « que cela n’arrive plus jamais » et pas « que cela ne NOUS arrive plus jamais », ce qui correspond à une vision tribale de l’humanité totalement contraire à toutes les formes d’héritage juif.

Refuser l’assignation et la peur, refuser toutes les formes de racisme et de discrimination.

Il y a des confrontations qui ont du sens : les luttes contre l’oppression, la domination, le colonialisme, pour l’égalité des droits. On nous vend aujourd’hui une guerre qui n’est pas la nôtre : celle d’un monde dit « civilisé » contre le « terrorisme islamique ». Dans cette « guerre », les musulmans sont considérés comme des terroristes en puissance et sont sommés de « prouver » qu’ils ne sont pas des complices de Daesh.

Et les Juifs sont assignés à soutenir sans réserve une politique israélienne criminelle contre les Palestiniens et suicidaire pour les Juifs.

Cette fuite en avant criminelle tient par la peur. Ce syndrome assure le consensus à un point tel qu’un négociateur palestinien (le professeur Albert Aghazarian) a pu dire que les Israéliens ont peur de ne plus avoir peur. Cette peur irrationnelle a gagné beaucoup de Juifs français.

Dans le contexte du « choc des civilisations », prétexte des dominants pour ensanglanter le monde, il y a en France une montée générale de toutes les formes de racisme. Contrairement à l’image fabriquée par les principaux médias, le racisme frappe essentiellement tous les « dominés », toutes les victimes de l’apartheid social : Arabes, Noirs, Roms. Il prend une nouvelle tournure en se masquant derrière l’islamophobie. Comme il n’est plus politiquement correct de dire « sale arabe », on diabolise l’islam.

Il y a aussi une incontestable et détestable montée de l’antisémitisme. Mais les différentes formes de racisme ne sont pas traitées de la même façon.
Les dirigeants israéliens et en France le CRIF, participent activement à la stigmatisation des musulmans. Ils affirment contre toute évidence qu’il n’y a qu’un seul racisme à dénoncer (l’antisémitisme) et qu’on est à la veille d’une nouvelle « nuit de cristal ». Ils font apparaître les Juifs comme ceux que le pouvoir protège alors que l’idéologie sécuritaire, les déclarations des principaux dirigeants et le travail nauséabond de pseudo intellectuels, visent une seule population déclarée dangereuse.

Les stéréotypes antisémites se nourrissent aussi de la complicité du CRIF avec la politique israélienne et de la partialité évidente du pouvoir. À l’heure des confusions, l’indignation légitime contre les crimes israéliens fait monter l’antisémitisme et les quelques paumés attirés par la violence effroyable de Daesh commettent des attentats criminels contre les Juifs parce que Juifs.

La lutte contre le racisme ne peut pas être découpée. Choisir certaines « bonnes » victimes contre d’autres est à l’antithèse du combat antiraciste. La politique israélienne et la négation totale des droits du peuple palestinien ne protègent absolument pas les Juifs. Au contraire. Pour créer l’Israélien nouveau, il a fallu « tuer le Juif », celui qui pensait que son émancipation passait par celle de l’humanité. Comme le dit le militant israélien anticolonialiste Eitan Bronstein : « nous ne serons jamais libres tant que les Palestiniens ne le seront pas ». En refusant le tribalisme, les Juifs français réaffirmeront une histoire dont ils peuvent être fiers.

C’est tou-te-s ensemble qu’il faut combattre tous les racismes, toutes les stigmatisations, toutes les discriminations. C’est tou-te-s ensemble qu’il faut défendre le droit, en Palestine comme ici.

Pierre Stambul

http://www.ujfp.org/spip.php?article3885

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

MessagePosté: 19 Avr 2015, 17:20
de Béatrice

Jérusalem : du mythe au nettoyage ethnique


Le 7 juin 1967, l’armée israélienne s’emparait de Jérusalem Est. Cette conquête fut sanglante. Les lieux où, par centaines, les soldats jordaniens sont tombés, ont été nettoyés et leur mémoire a été oubliée.

Les sionistes fêtent le 7 juin, niant plus que jamais l’histoire, la dignité et la mémoire du peuple palestinien. C’est ainsi qu’aura lieu le 7 juin 2015 à Montpellier la 39e journée de Jérusalem. Ces festivités négationnistes sont indignes.

Dans son livre « Comment la terre d’Israël fut inventée », l’historien israélien Shlomo Sand, qui faisait son service militaire, décrit le messianisme dévoyé qui s’empare de l’armée et de la population israéliennes au moment de la conquête.

L’annexion


Par milliers, croyants ou pas, les Israéliens affluent au Mur des Lamentations, qui est le vestige du mur de soutènement (dit mur occidental) du deuxième temple détruit par Titus en 70 après Jésus-Christ. Pourtant, il semble bien que ce mur ait été construit très peu de temps auparavant, alors que la Judée avait déjà été totalement soumise par les Romains, ce qui rend peu compréhensible sa valeur symbolique.
Dès la prise de Jérusalem Est, la chanson « Yéroushalayim shel zahav » (= Jérusalem d’or) de Naomi Shemer, devient un « tube » mondial. Le dernier couplet célèbre « la réunification » de Jérusalem.
Très vite, la ville est annexée par un vote de la Knesset (le Parlement israélien) et Jérusalem devient par ce texte la « capitale indivisible » de l’Etat d’Israël (statut qui ne sera pas reconnu par la grande majorité des pays). La propagande présentera désormais Jérusalem comme le symbole exclusif du judaïsme. La partie annexée est 10 fois plus grande que la Jérusalem jordanienne : elle va de Ramallah à Bethléem et coupe en deux la Cisjordanie rendant impossible tout « Etat palestinien » sur le reste des territoires occupés. Ce « grand Jérusalem » annonce déjà la colonisation.

Du mythe à la réalité


Les fondateurs du sionisme, dans leur majorité, n’étaient pas croyants. Mais ils ont utilisé la Bible comme un livre de conquête coloniale. Ils ont considéré que les faits décrits dans la Bible étaient des événements historiques qui justifiaient leur « retour » après un long exil. On sait aujourd’hui que cette théorie de l’exil et du retour est une fiction.
En ce qui concerne Jérusalem, les faits décrits dans la Bible concernant le « royaume unifié » de David et Salomon sont tout à fait légendaires. L’archéologie est têtue : à l’époque présumée de ce royaume, Jérusalem était un village de l’âge de fer d’au plus quelques centaines d’habitants. Le grand temple, la reine de Saba, c’est une belle histoire, mais c’est une légende. S’il y a eu un roi David, c’était tout au plus un conducteur de troupeaux. Pourtant aujourd’hui, dans le quartier palestinien de Silwan, on détruit des maisons, on expulse par milliers les habitants, on arrête les résistants au nom du roi David. L’occupant a déclaré que ce grand roi avait vécu là. Alors on construit la maison du roi David, le parc du roi David, le musée du roi David et on « judaïse » ce quartier à coup de bulldozers et d’expéditions policières punitives.
Pour essayer de « prouver » que les archéologues et les historiens ont tort de nier l’historicité du récit biblique, le gouvernement israélien multiplie les provocations en creusant des tunnels sous l’esplanade des mosquées. Tout ce qui est découvert est très antérieur ou très postérieur à la période mythique.

Jérusalem et les Juifs


Après l’écrasement de la dernière grande révolte juive (Bar-Kokhba, 135 après Jésus-Christ), la ville a été rasée et interdite aux Juifs. La population de la région s’est en majorité convertie au christianisme, puis, après la conquête arabe du VIIe siècle en majorité à l’islam. Après la prise de la ville par les Arabes en 637 après Jésus-Christ, le calife Omar a autorisé les Juifs, jusque là bannis par les Byzantins, à revenir à Jérusalem.
Deux mosquées (al-Aqsa et le Dôme du Rocher) ont été construites sur la colline où se trouvait le temple détruit et la ville est devenue un lieu saint de l’islam.
Le christianisme a fait de Jérusalem un symbole. Les pèlerinages chrétiens se sont multipliés et la « délivrance du Saint-Sépulcre » a servi de prétexte aux Croisades.
Pour les Juifs, rien de semblable. Quasiment aucun pèlerinage. La religion juive est une religion messianique de l’exil. Pour les Juifs orthodoxes (harédis), le retour à Jérusalem avant l’arrivée du Messie est interdit. « L’an prochain à Jérusalem », ça ne veut pas dire « ôte-toi de là que je m’y mette, je vais construire un Etat à Jérusalem », ça exprime simplement le souhait de l’arrivée prochaine du Messie.
Après 1492, quand les Juifs chassés d’Espagne sont accueillis par l’empire ottoman, leurs principales destinations seront Salonique, Smyrne, Sarajevo. Certains s’installeront en Galilée (à Safed) mais pas à Jérusalem qui est une conquête récente ottomane.
C’est vers 1800 que quelques Juifs venus principalement de Pologne ou du Maroc s’installent à Jérusalem. Ils sont très religieux et se regroupent dans le quartier de Méa Sharim.
La propagande sioniste essaie aujourd’hui de dire à coup de pseudo recensements, que les Juifs sont majoritaires à Jérusalem depuis 200 ans. Double invention. La mère de Leila Shahid, Sirine Husseini (décédée en 2008) décrit la municipalité de Jérusalem que dirigeait son père où musulmans, chrétiens et juifs cohabitaient en bonne intelligence au conseil municipal. Les Juifs palestiniens n’étaient pas sionistes, ils craignaient que cette idéologie n’affecte les bons rapports qu’ils avaient avec les musulmans et les chrétiens.

D’un nettoyage ethnique à l’autre


Le plan de partage de 1947 avait prévu que Jérusalem serait internationalisé (au milieu de l’Etat palestinien) et serait la ville sainte des 3 grandes religions monothéistes. Depuis les années 30, il y avait un accord secret de partage de la Palestine entre les sionistes et la dynastie hachémite (le roi de Jordanie, lire à ce sujet La guerre de 1948 en Palestine d’Ilan Pappé). C’est parce que la future armée israélienne violait cet accord en attaquant un à un tous les villages palestiniens entre Tel-aviv et Jérusalem que la légion arabe jordanienne est entrée en guerre. Le 9 avril 1948, les milices fascistes de l’Irgoun (dirigée par Menachem Begin) et du groupe Stern (dirigé par Yitzhak Shamir) ont massacré la population civile du village de Deir Yassin situé à 5 Km du centre de Jérusalem. Le but était de provoquer l’exode de la population palestinienne. Quand la guerre a éclaté officiellement le 15 mai 1948, la quasi-totalité des Palestiniens habitant l’Etat donné par l’ONU aux Juifs avaient déjà été contraints à l’exil.
Deir Yassin fait partie des centaines de villages palestiniens rayés de la carte. C’est en face de là que les Israéliens ont construit le musée du génocide nazi Yad Vashem. Sur le territoire de Deir Yassin, il y a aujourd’hui le « nouveau quartier » de Givat Shaul. Le tunnel routier qui passe en dessous s’appelle Menachem Begin (du nom de l’assassin). Et les victimes de l’attentat antisémite de la Porte de Vincennes ont été enterrées au cimetière de Givat Shaul. Quel symbole !
Pour avoir les mains libres à Jérusalem, les terroristes du groupe Stern assassinent le 17 septembre 1948 le représentant de l’ONU Bernadotte et son adjoint, le colonel Sérot. Les assassins parfaitement identifiés seront intégrés dans le premier gouvernement israélien d’union nationale.
Jérusalem Ouest, agrandi avec les « nouveaux quartiers », est vidée de toute présence palestinienne. Des nouveaux immigrants s’y installent.
Au moment de l’armistice de 1949, la partie Est de Jérusalem échappe aux Israéliens. Elle contient la vieille ville et quelques quartiers autour. Jérusalem-Est est annexée par la Jordanie. Il n’y a qu’un seul point de passage (surtout pour les pèlerins) entre les deux parties de la ville, c’est la porte Mandelbaum. Et pour accéder à Jérusalem Ouest, malgré les nombreux villages rasés, les Israéliens doivent contourner l’enclave de Latrun restée jordanienne.
En 1949, Ben Gourion avait été accusé par la « droite sioniste » de ne pas avoir conquis toute la Palestine mandataire. Il s’était justifié en expliquant que ce n’était que partie remise. En juin 1967, les sionistes sont maîtres de toute la Palestine. Environ 250000 Palestinien-ne-s sont expulsé-e-s, s’ajoutant aux millions de réfugié-e-s. Et à Jérusalem Est, le nettoyage commence.

Effacer la présence et la mémoire palestiniennes


Dès la conquête, la vieille ville est séparée en quatre « quartiers » : chrétien, arménien, musulman et juif. Dans le quartier juif, toute la population palestinienne est expulsée. Elle est remplacée par des riches venus d’Israël ou des Etats-Unis. On trouve dans ce quartier juif qui jouxte le Mur des Lamentations un musée sur les gens expulsés en 1948 et leur martyr. Il ne s’agit pas des 800000 Palestinien-ne-s chassé-e-s au moment de la Nakba, mais des quelques centaines de Juifs qui vivaient dans la partie de la Palestine qui a été jordanienne entre 1948 et 1967. La manipulation de la mémoire est en marche.
Très vite, les Israéliens vont réquisitionner des terres qu’ils affirment « vacantes » pour construire des « nouveaux quartiers ». Ils ont pour nom Ramot, Atarot, Gilo, Pisgat Zeev et, plus loin du centre, Gush Etzion et Maale Adoumim.
Har Homa était une splendide forêt entre Bethléem et Jérusalem. Elle a mystérieusement brûlé le premier jour des discussions entre Yasser Arafat et Ehud Barak. C’est aujourd’hui une colonie en pleine extension, prévue pour 30000 habitants et qui sépare totalement Bethléem de Jérusalem.
La judaïsation de Jérusalem Est recevra une aide extérieure : ce sont des capitalistes français (Alstom et Véolia) qui construiront le tramway reliant Pisgat Zeev au centre ville. Ce sont les Chrétiens sionistes américains (d’authentiques antisémites) qui financeront la construction de Maale Adoumim. Cette luxueuse colonie de 40000 habitants domine le désert de Judée, coupe en deux la Cisjordanie en rendant impossible tout Etat palestinien viable et pille l’eau de la région. Elle servira aussi de prétexte à l’expulsion des Bédouins qui ont toujours vécu le long de la route qui descend à Jéricho et à la confiscation de leurs terres.
Avec les accords d’Oslo, la « Maison d’orient » dirigée par Fayçal Husseini (décédé en 2001) était censée défendre les droits des Palestiniens de Jérusalem. Ceux-ci ont « bénéficié » d’un statut à part après 1967 : ni citoyens, ni étrangers mais « résidents ». Ils bénéficient de la plaque orange sur les voitures qui leur permet de se déplacer plus facilement. Ils disposent du droit de vote aux élections municipales (ils ne s’en servent pas car ils ne reconnaissent pas l’annexion) mais pas aux élections nationales. Tout est fait (notamment le prix des loyers et l’impossibilité pour eux de construire des logements) pour les pousser à quitter Jérusalem et donc à perdre leur statut de résident.
Ariel Sharon avait compris l’enjeu que représente Jérusalem. Il avait acquis une maison en plein « quartier musulman » de la vieille ville avec plein de drapeaux israéliens et la présence pesante de nombreux soldats. C’est à Jérusalem, sur l’esplanade des mosquées le 28 septembre 2000, qu’il a fait la provocation qui a déclenché la deuxième Intifada et l’a mené au pouvoir.
En 2001, la maison d’Orient a été fermée.
Dans toutes les négociations (qui étaient en fait des demandes de capitulation) entre Israéliens et Palestiniens, les premiers sont restés « inflexibles ». Même les travaillistes ont signifié que tous les « nouveaux quartiers » resteraient israéliens et ils ont proposé qu’Abu Dis (petite ville palestinienne incluse dans le grand Jérusalem et séparée de la ville par le tracé du mur) devienne la capitale de l’Etat palestinien.

Jérusalem, ville de résistance

Aujourd’hui il y a un peu moins de 300000 habitants à Jérusalem-Ouest et un peu plus de 500000 à l’Est. Les Palestinien-ne-s sont à peine majoritaires dans ce qui aurait dû être en théorie la capitale de leur Etat.
Les attaques sont incessantes dans les quartiers palestiniens et on parle d’une troisième Intifada qui commencerait à Jérusalem. La tension est extrême dans tous les quartiers :
- Silwan où, depuis 1991, des centaines de colons intégristes sont installés, provoquant la bunkerisation du quartier et une répression permanente contre la population. À plusieurs reprises des enfants ont été arrêtés.
- Cheikh Jarrah, quartier envahi par des colons depuis 2000 et bien sûr la cour suprême leur a donné raison. Dans ces deux quartiers, des comités de citadins organisent la résistance
- La vieille ville. Depuis longtemps, une secte intégriste menace de dynamiter l’esplanade des mosquées pour reconstruire le Temple. Jusque-là, ils ne pouvaient pas accéder à l’esplanade. En les laissant parader et revendiquer le droit pour les Juifs de venir prier au mont du Temple, Nétanyahou les utilise pour provoquer des violences quand il le décide.
- C’est dans le quartier palestinien de Chouafat qu’un jeune Palestinien de 16 ans, Mohamed Abou Khdeir a été brûlé vif par des colons quelques jours avant le début de l’attaque contre Gaza en juillet 2014.
- C’est à Jérusalem qu’une école mixte pour Juifs et Arabes a été incendiée et couverte de slogans racistes : « mort aux Arabes, stop à l’assimilation ».

Alors non. Jérusalem n’est pas la « capitale indivisible » d’un Etat juif qui opprime les non-Juifs. Cette ville appartient à tout le monde, croyants de toutes les religions ou non-croyants. C’est à Jérusalem que doit être imposée la seule solution raisonnable à cette guerre séculaire : l’égalité totale des droits et le vivre ensemble.

Pierre Stambul

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

MessagePosté: 07 Oct 2015, 07:45
de Pïérô
Emission l’Egregore du 14 septembre 2015

Antisionisme Antisémitisme

Au cours d’un des débats des rencontres libertaires d’Eychenat, Pierre Stambul revient sur le sur l’antisémitisme, le sionisme (de sa naissance à l’Etat d’Israël), et sur l’antisionisme.

La guerre qu’Israël mène contre le peuple palestinien avec son cortège de nettoyages ethniques et de crimes de guerre n’a commencé ni en 1967, ni même en 1948. Elle remonte au début du XXe siècle quand les sionistes ont commencé leur conquête coloniale.

La question du sionisme est centrale comme l’était celle de l’apartheid quand il a fallu imaginer un autre avenir pour l’Afrique du Sud.

Le sionisme est à la fois une fausse réponse à l’antisémitisme, un nationalisme, un colonialisme et une manipulation de l’histoire, de la mémoire et des identités juives. Il est aussi une idéologie prétendant transformer les anciens parias de l’Europe jugés inassimilables en colons européens en Asie.

« Le sionisme en question », Pierre Stambul
ed. Acratie - 6 euros – 68 pages – 2014

à écouter : http://oclibertaire.free.fr/spip.php?article1729

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

MessagePosté: 18 Oct 2015, 14:25
de Pïérô
L’instrumentalisation de l’antisémitisme

par Pierre Stambul

"Un antisémite, c’est quelqu’un qui déteste les Juifs plus que de raison". Phrase attribuée à... vous complétez comme vous voulez.


"L’indicible"

L’antisémitisme, ça renvoie bien sûr au judéocide nazi. 6 millions de mortEs (la moitié des Juifs européens) disparuEs dans les camps d’extermination ou victimes des Einsatzgruppen (la "Shoah par balles").

Il y a toujours quelques négationnistes ou révisionnistes qui voudraient nier ou minimiser cette barbarie. Les recherches récentes posent au contraire de nouvelles questions. Par exemple, comment expliquer qu’alors que la défaite nazie était certaine, les trains de déportéEs pour Auschwitz étaient toujours prioritaires sur ceux qui ravitaillaient le front de l’Est ? Cette réalité, incompréhensible pour celles et ceux qui s’en tiennent à une conception économiste de l’antisémitisme ("on n’extermine pas une force de travail gratuite") montre la force de l’idéologie.

Les antisémitismes

L’antisémitisme, c’est le vocabulaire de l’ennemi. Il n’y a pas plus de race sémite que de race aryenne. Les Juifs ne sont pas les descendants des Judéens de l’Antiquité (ce serait plutôt les Palestiniens qui sont toujours restés sur cette terre). Ils sont essentiellement descendants de convertis qui n’ont rien à voir avec les "Sémites". Et quand ceux qu’on appelle les Arabes disent qu’ils sont aussi "sémites", là encore, il y a parmi eux des Berbères ou des Égyptiens qui n’ont pas ces origines. Le terme est impropre mais il s’est imposé, c’est même un des premiers antisémites célèbres (Willem Marr) qui a banalisé son usage.

L’antisémitisme moderne a prolongé l’antijudaïsme chrétien. C’est le christianisme qui a inventé contre le judaïsme les interdits, l’enfermement et les stéréotypes racistes. Les sionistes voudraient aujourd’hui nier cette origine chrétienne de l’antisémitisme puisqu’Israël se veut l’élève modèle de l’Occident dans le cadre de la "guerre du bien contre le mal" mais l’histoire est têtue : les ghettos, le peuple déicide, l’expulsion d’Espagne, l’inquisition, les pogroms... ça s’est bien passé dans l’Europe chrétienne. Les sionistes voudraient aussi expliquer que les Juifs ont vécu l’enfer dans le monde musulman. Là aussi, l’histoire est têtue : s’il y a eu des moments durs, ils n’ont rien à voir avec les siècles de persécution en Europe. Et quand les Juifs sont chassés d’Espagne, c’est essentiellement dans le monde musulman qu’ils sont accueillis.

L’antisémitisme racial qui se développe à partir de la deuxième moitié du XIXe est en partie une conséquence de l’émancipation des Juifs. Sortis du ghetto, ils deviennent une minorité invisible, obstacle au rêve fou de construire des États ethniquement purs. Dans les stéréotypes qui se répandent, on les accuse "d’être partout", de dominer le monde de façon occulte. Qu’ils appartiennent à la bourgeoisie intellectuelle ou commerciale (comme c’est souvent le cas en Allemagne) ou qu’ils appartiennent au prolétariat comme c’est massivement le cas en Europe orientale, les Juifs sont alors des "parias" pour reprendre les termes d’Hannah Arendt. Des parias qu’on qualifie d’Asiatiques "inassimilables". Pour Hitler, juif et communiste, c’était pareil et il parlait souvent de "judéo-bolchéviks".

L’antisémitisme est-il un racisme à part ?

Il l’a été incontestablement à l’époque du judéocide nazi, mais ce n’est plus le cas. En France par exemple, le racisme est beaucoup plus virulent contre les Noirs, les Arabes, les Rroms, les Musulmans. Le MRAP a transformé ses initiales de "Mouvement contre le Racisme, l’Antisémitisme et pour la Paix" en "Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples" (1977). Il n’y a plus de raison de faire de l’antisémitisme un racisme à part.

Aujourd’hui, un "État juif" prétend parler au nom de tous les Juifs. L’idéologie de cet État, le sionisme, est une théorie de la séparation qui partage avec l’antisémitisme l’idée que Juifs et non Juifs ne peuvent pas vivre ensemble, que ce soit dans le pays d’origine ou en Israël/Palestine. Les Juifs ne sont plus les parias de l’Europe. Le sionisme essaie de les transformer en colons européens au Proche-Orient.

C’est là qu’on entre dans la confusion.

Aujourd’hui, dès qu’on critique Israël, on est accusé d’antisémitisme, voire de négationnisme et d’apologie des crimes nazis.

L’antisémitisme qui frappait les "parias de l’Europe" n’a strictement rien à voir avec la critique d’un État (Israël) dont les dirigeants sont des racistes qui pratiquent l’apartheid et commettent des crimes. Rien à voir non plus avec la dénonciation d’une idéologie néo-coloniale (le sionisme) qui a théorisé et cherche à réaliser l’expulsion du peuple palestinien de son propre pays ou son enfermement dans des "réserves".

On pourrait se demander pourquoi l’Occident protège ce mode de défense des dirigeants sionistes. Il serait faux de croire qu’il s’agit d’un sentiment de culpabilité des dirigeants occidentaux à cause de leur responsabilité historique dans l’antisémitisme et le judéocide. En 1945, des centaines de milliers de Juifs survivants demandaient des visas pour les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France. On leur a fermé la porte et on leur a répondu qu’à présent ils avaient un pays (la Palestine mandataire qui allait devenir Israël) et qu’ils pouvaient partir quand ils voulaient.

L’Occident s’est débarrassé de son crime sur le dos du peuple palestinien qui n’y était pour rien.

Captation de la mémoire et escroquerie

Les sionistes martèlent en permanence que juif = sioniste. Des officines sionistes d’extrême droite comme le "Bureau National de Vigilance Contre l’Antisémitisme" (BNVCA) s’arrogent le droit de parler d’antisémitisme et bien sûr de considérer que toute critique d’Israël est antisémite.

Répétons inlassablement ce qui s’est passé.

Quand le sionisme se crée, il appelle les Juifs à déserter le combat contre l’antisémitisme (qu’il considère inéluctable) et à partir vers le futur État juif. Le sionisme n’a jamais été contre le racisme car dès l’arrivée des premiers colons en Palestine, il a entrepris de mettre en place une société séparée, ignorant ou niant l’existence du peuple autochtone.

Dès l’arrivée au pouvoir d’Hitler, alors que les Juifs américains décrétaient le boycott de l’Allemagne nazie, les dirigeants sionistes ont signé en 1933 avec les Nazis les accords de Haavara (transfert) permettant l’émigration des Juifs allemands (uniquement vers la Palestine mandataire). La "droite sioniste" aujourd’hui au pouvoir a eu en son sein des admirateurs de Mussolini (Jabotinsky) ou de véritables collabos (le futur Premier ministre Shamir qui a fait assassiner des dignitaires britanniques jusqu’en 1944). Les sionistes n’ont joué qu’un rôle confidentiel dans la résistance juive au nazisme. Dans les années 1950, Israël a signé avec l’Allemagne des accords d’indemnisation des victimes juives du nazisme et le négociateur allemand était un criminel de guerre (Globke, l’auteur des lois raciales de Nuremberg).

Ceux qui confondent sciemment antisémitisme et "antiisraélisme" n’ont aucun droit de se revendiquer de l’antiracisme. Rappelons que M. Cukierman, président du CRIF s’est permis de menacer les musulmans : "le score de Le Pen est un message aux musulmans leur indiquant de se tenir tranquille" (2002).

Les antisémites d’hier sont souvent devenus des amis d’Israël. Les principaux partis d’extrême droite européens, y compris les partis néo-nazis, ont des dirigeants qui font la visite à la Knesset (où leur ami Lieberman les invite) et au mémorial Yad Vashem. Leur ennemi aujourd’hui, c’est l’Islam. En France, un ancien rédacteur du torchon antisémite "Minute" (Patrick Buisson) devenu conseiller de Sarkozy, prend comme avocat le n°2 du CRIF (Goldnadel). On est au-delà de la confusion, on est dans l’inversion des valeurs.

Antisémitisme et sionisme se nourrissent l’un l’autre

Il serait absurde de nier la persistance et même le nouveau développement de l’antisémitisme en France. À Toulouse ou à la Porte de Vincennes, on a tué des Juifs parce que juifs. Quand je fais des conférences dans les "quartiers", j’entends souvent la réflexion : "on ne savait pas qu’il y avait des Juifs comme vous". Le Juif est souvent perçu comme celui qui soutient ou approuve les crimes commis contre les Palestiniens et les humiliations subies ici. La mémoire des Juifs "universalistes", des grandes personnalités intellectuelles ou scientifiques, de celles et ceux qui ont combattu les discriminations et les injustices, tend à disparaître.

Les théories du complot sont en vogue et bien sûr pour elles, ceux qui de façon invisible contrôlent les médias, les armées, les gouvernements, les banques ... ce sont les Juifs. Les niaiseries racistes de Dieudonné ou Soral fonctionnent sur fond de dépolitisation et de confusion organisée.

Les sionistes n’ont jamais combattu l’antisémitisme, ils s’en sont toujours servi pour leur unique projet : renforcer l’État juif. Ainsi les victimes de l’attentat antisémite de la Porte de Vincennes ont été enterrées à Givat Shaul, là où se trouvait avant 1948 le village palestinien martyr de Deir Yassine. Le symbole est clair.

Chaque fois qu’on dérape, qu’on mélange juif et sioniste, qu’on accorde, même inconsciemment à Israël la "propriété" de la mémoire du judéocide, on fait le jeu de ce qu’on prétend combattre. Comparer les crimes israéliens au nazisme est historiquement faux. Mais ce n’est pas antisémite en soi, le philosophe israélien Leibowitz, après la conquête de 1967, a même parlé de "judéo-nazisme". Il y a derrière ce rapprochement l’idée que les victimes ne devraient pas reproduire ce qu’on leur a infligé. Mais les sionistes ne sont pas les héritiers des victimes du nazisme. Cette idéologie a programmé la conquête de la Palestine et l’expulsion du peuple autochtone des décennies avant le nazisme. Et aujourd’hui, une bonne partie de la population israélienne est, dans sa biographie, étrangère à cette tragédie.

Il y a une difficulté à comprendre quelque chose qui est pourtant évident : le sionisme est une idéologie qui n’est pas seulement criminelle contre les Palestiniens, elle est aussi suicidaire pour les Juifs. Si on considère qu’est antisémite tout ce qui met les Juifs en danger, alors le sionisme est antisémite. Quand Nétanyahou, après la tuerie de "Charlie Hebdo", vient dire aux Français juifs que leur pays c’est Israël et qu’ils doivent partir, jamais depuis Vichy, aucun antisémite ne s’était permis de dire aux Juifs qu’ils n’étaient pas chez eux en France.

La crise du mouvement antiraciste

Depuis bien longtemps la LICRA n’a plus rien à voir avec son glorieux ancêtre la LICA qui a réellement joué un rôle historique majeur dans la lutte contre l’antisémitisme. C’est devenu une officine sioniste qui porte plainte systématiquement contre tous les groupes BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions) pour "antisémitisme". On ne l’a jamais entendue protester contre toutes les lois racistes de ces dernières années.

SOS Racisme qui a eu ses heures de gloire à l’époque de la petite main "touche pas à mon pote" ne peut plus cacher son caractère de courroie de transmission du PS. Le fait que son fondateur soit devenu ministre d’un gouvernement qui démantèle tous les deux jours un camp de Rroms est révélateur.

Le MRAP est en crise. La mise sur la touche (peu avant son décès) de Mouloud Aounit s’est traduite par un virage inquiétant : on a même eu droit à une motion de congrès sur le "racisme anti-blanc".

La LDH affirme qu’elle défend les droits du peuple palestinien. Elle consacre pourtant une grande énergie à combattre toute idée de boycott ou de "délégitimation" d’Israël. À Montpellier, elle porte plainte contre deux militants de BDS 34 qui, s’ils ont (une unique fois !) manqué de vigilance dans la gestion de leur page Facebook, ne sont clairement pas antisémites, comme la LDH elle-même le reconnaît. Elle maintient une plainte à laquelle les requins sionistes (LICRA, BNVCA, Goldnadel) se sont associés. Cette confusion est totalement destructrice pour le mouvement de solidarité.

Il est temps de réinsérer l’antisémitisme dans une lutte contre toutes les formes de racisme et de discrimination, contre le colonialisme et l’apartheid et pour l’égalité des droits, en France comme au Proche-Orient.

http://www.ujfp.org/spip.php?article4446

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

MessagePosté: 09 Déc 2015, 13:28
de René
LE SIONISME EXPLIQUÉ EN DEUX PAGES

Cité dans Mondialisation et micro-nationalismes
René Berthier
Éditions Acratie, 1998




Les grands projets politiques n'ont parfois pas besoin d'être longuement analysés, parce que leurs auteurs exposent sans détour leurs intentions réelles. C'est particulièrement vrai dans un texte datant de 1923 « Le Mur d'acier », dont l'auteur est Wladimir Jabotinsky,
fondateur du sionisme dit « révisionniste », c'est-à-dire un sionisme d'extrême droite qui rejetait la façade libérale et sociale du sionisme originel.

Voici ce qu'il dit :


« LE MUR D'ACIER »

« Il ne peut être question d'une réconciliation volontaire entre nous et les Arabes, ni maintenant ni dans un futur prévisible. Toute personne de bonne foi, mis à part les aveugles de naissance, a compris depuis longtemps l'impossibilité complète d'aboutir à un accord volontaire avec les Arabes de Palestine pour la transformation de la Palestine d'un pays arabe en un pays à majorité juive. Chacun d'entre vous a une compréhension globale de l'histoire de la colonisation. Essayez de trouver un seul exemple où la colonisation d'un pays s'est faite avec l'accord de la population autochtone. Ça ne s'est produit nulle part.
« Les autochtones combattront toujours obstinément les colonisateurs – et c'est du pareil au même qu'ils soient civilisés ou non. Les compagnons d'armes de Hernan Cortez ou de Francisco Pizarre se sont conduits comme des brigands. Les Peaux-Rouges ont combattu avec ferveur et sans compromis les colonisateurs au bon cœur comme les méchants. Les indigènes ont combattu parce que toute forme de colonisation n'importe où à n'importe quelle époque est inacceptable pour le peuple indigène.
« Tout peuple indigène considère son pays comme sa patrie, dont il veut être totalement maître. Il ne permettra pas de bon gré que s'installe un nouveau maître. Il en est ainsi pour les Arabes. Les partisans du compromis parmi nous essaient de nous convaincre que les Arabes sont des espèces d'imbéciles que l'on peut tromper avec des formulations falsifiées de nos buts fondamentaux. Je refuse purement et simplement d'accepter cette vision des Arabes palestiniens.
« Ils ont exactement la même psychologie que nous. Ils considèrent la Palestine avec le même amour instinctif et la ferveur véritable avec laquelle tout Aztèque considérait Mexico ou tout Sioux sa prairie. Tout peuple combattra les colonisateurs jusqu'à ce que la dernière étincelle d'espoir d'éviter les dangers de la conquête et la colonisation soit éteinte. Les Palestiniens combattront de cette façon jusqu'à ce qu'il n'y ait pour ainsi dire plus une parcelle d'espoir.
« Peu importe les mots que nous utilisons pour expliquer notre colonisation. La colonisation a sa propre signification intégrale et inévitable qui est comprise par tous les Juifs et tous les Arabes. La colonisation n'a qu'un but. C'est dans la nature des choses. Changer cette nature est impossible. Il était nécessaire de mener la colonisation contre la volonté des Arabes palestiniens et cette nécessité existe aujourd'hui de la même manière. Même un accord avec les non-Palestiniens est une lubie du même type. Pour que les nationalistes arabes de Bagdad, de La Mecque et de Damas acceptent de payer un tel prix, il faudrait qu'ils refusent de maintenir le caractère arabe de la Palestine.
« Nous ne pouvons offrir aucune compensation contre la Palestine, ni aux Palestiniens ni aux Arabes. Par conséquent, un accord volontaire est inconcevable. Toute colonisation, même la plus réduite, doit se poursuivre au mépris de la volonté de la population indigène. Et donc, elle ne peut se poursuivre et se développer qu'à l'abri du bouclier de la force, ce qui veut dire un Mur d'acier que la population locale ne pourra jamais briser. Telle est notre politique arabe. La formuler de toute autre façon serait de l'hypocrisie.
« Que ce soit au travers de la déclaration Balfour ou au travers du mandat, l'exercice d'une force étrangère est une nécessité pour établir dans le pays les conditions d'un pouvoir et d'une défense par lesquels la population locale, quels que soient ses désirs, soit privée de la possibilité d'empêcher la colonisation, par des moyens administratifs ou physiques. La force doit jouer son rôle – brutalement et sans indulgence. De ce point de vue, il n'y a pas de différence significative entre nos militaristes et vos végétariens. Les uns préfèrent un Mur d'acier fait de baïonnettes juives, les autres un Mur d'acier constitué de baïonnettes anglaises.
« Au reproche habituel selon lequel ce point de vue est immoral, je réponds “absolument pas”. C'est notre morale. Il n'y a pas d'autre morale. Aussi longtemps qu'il y aura la moindre étincelle d'espoir pour les Arabes de nous résister, ils n'abandonneront pas cet espoir, ni pour des mots doux ni pour des récompenses alléchantes, parce qu'il ne s'agit pas d'une tourbe mais d'un peuple, d'un peuple vivant. Et aucun peuple ne fait de telles concessions sur de telles questions concernant son sort, sauf lorsqu'il ne reste aucun espoir, jusqu'à ce que nous ayons supprimé toute ouverture visible dans le Mur d'acier. »


Ce texte a le mérite d'être extrêmement explicite, et il est frappant de constater qu'il n'y transparaît aucun mépris pour les Palestiniens. Ce sont des adversaires qu'il faut battre et Jabotinsky le dit sans hypocrisie, ce qui ne sera pas le cas des dirigeants israéliens après la fondation de l'Etat, qui nieront l'existence même d'un peuple palestinien, ce que ne fait pas du tout Jabotinsky.
La lecture de ce texte ne laisse par ailleurs aucune ambiguïté sur le caractère colonial du projet sioniste.

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

MessagePosté: 11 Fév 2017, 19:02
de Pïérô
Intervention de Pierre Stambul à Gentilly (26 novembre 2016) "Peut-on critiquer Israël aujourd’hui en France ?"

Peut-on critiquer Israël aujourd’hui en France ?

La réalité de ce qui est à l’œuvre en Israël/Palestine

Le terme le plus correct serait sans doute "sociocide", c’est-à-dire destruction programmée de l’économie, du lien social, de tout ce qui permettrait à la société palestinienne de vivre normalement. Le rêve sioniste a été dès le début de la colonisation, soit de nier l’existence même du peuple palestinien (souvenons du slogan meurtrier assimilant la Palestine à une "terre sans peuple pour un peuple sans terre") soit de transformer les Palestiniens en des Indiens du Proche-Orient, parqués dans leurs réserves, assistés et incapables de revendiquer leurs droits.


Le Tribunal Russell sur la Palestine, tribunal symbolique constitué d’éminentes personnalités, a considéré que l’État d’Israël était coupable de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité, d’incitation au génocide et du crime d’apartheid tel qu’il est internationalement reconnu.

Une autre évidence de la réalité à l’œuvre, c’est que des décennies d’occupation et de colonisation ont fragmenté la Palestine en autant de statuts différents d’oppression.

En Cisjordanie, la colonisation a pris une telle ampleur que le territoire palestinien est encerclé et mité. 750 000 colons vivent au-delà de la "ligne verte", frontière internationalement reconnue qui a disparu dans les faits. Les colons forment plus de 10% de la population israélienne mais aussi la moitié du gouvernement et presque la moitié de l’armée.

Dans la ville de Jérusalem, la "judaïsation" aboutit à des destructions ou des confiscations de maisons incessantes.

La bande de Gaza (où j’étais en mai-juin) est une cage hermétique où 2 millions de personnes sont confinées et où l’occupant expérimente tous les deux ans les armes de destruction les plus sophistiquées.

Les Palestiniens d’Israël qui forment plus de 20% de la population vivent toute une série de graves discriminations au logement, au travail, à la possession de la terre. Parmi eux, les Bédouins du Néguev vivent un véritable nettoyage ethnique.
Il faudrait aussi parler des réfugiés dont les droits sont niés depuis 68 ans alors que la résolution 194 de l’ONU (11 décembre 1948) a explicitement exigé leur retour, ou des prisonniers : 45% des hommes palestiniens entre 18 et 50 ans ont connu la prison.

Telle est la réalité incontestable de ce qui se passe là-bas : une conquête coloniale et un terrain où l’occupant expérimente diverses méthodes pour dominer et enfermer une population. Pourquoi est-ce si difficile de le dire publiquement ?

À l’origine de la destruction de la Palestine, le sionisme

Celles et ceux qui ont cru que la question du sionisme n’était qu’une question historique ont été rattrapés par les faits. Cette idéologie est plus que jamais à l’œuvre. C’est au nom du sionisme que la Palestine est méthodiquement étranglée et dépecée.

Dès l’origine il y a 120 ans, le sionisme a été une théorie de la séparation, proclamant que Juifs et non Juifs ne pouvaient pas vivre ensemble, ni dans le pays d’origine, ni dans l’État juif à construire. Le sionisme est un colonialisme qui ne vise pas à exploiter le peuple autochtone mais à l’expulser et à le remplacer. C’est un nationalisme qui a inventé la notion de peuple juif descendant des Judéens de l’Antiquité. Il est ridicule de prétendre que les Juifs polonais et les Juifs yéménites appartiennent au même peuple. Les descendants des Judéens de l’Antiquité sont essentiellement … les Palestiniens. Ce nationalisme a inventé l’idée d’un attachement des Juifs à la terre devenue Israël, attachement qui n’a jamais existé, ni chez les Juifs laïques, ni chez les religieux. Il a aussi inventé une langue nouvelle (l’Hébreu jusque-là exclusivement réservé à l’usage religieux). Il a puisé dans les nationalismes meurtriers européens le concept d’État ethniquement pur. Il a produit une gigantesque manipulation de l’histoire, de la mémoire et des identités juives, en fabriquant le mythe de l’exil des Juifs et de leur retour chez eux, idée qui ne résiste à aucun examen historique sérieux.

Le dernier paravent pour masquer la réalité de ce qui se passe au Proche-Orient est de dire ce que nos dirigeants nous ressassent : "vous critiquez Israël ? Vous êtes antisémite ! Vous êtes antisioniste ? Vous êtes antisémite !"

Juifs parias et antisémitisme

L’histoire des Juifs en France et plus généralement en Europe depuis la sortie du ghetto (sortie qui commence au XVIIIème siècle) est celle d’une lutte pour l’émancipation et l’égalité des droits. Dans l’UJFP, nous nous considérons comme les héritiers d’une époque où la majorité des Juifs pensaient que leur émancipation, comme minorité opprimée, était indissociable de l’émancipation de toute l’humanité. D’où l’engagement de nombreux Juifs dans les luttes sociales, anticoloniales ou révolutionnaires. Cette image universaliste du Juif n’a bien sûr rien à voir avec celle aujourd’hui du tankiste de Tsahal indifférent à la souffrance qu’il provoque. Le sionisme a été minoritaire, voire très minoritaire chez les Juifs jusqu’à la deuxième guerre mondiale.

L’antisémitisme racial a succédé, au cours du XIXe siècle à l’antijudaïsme chrétien. Pour reprendre Hannah Arendt, les Juifs ont été considérés comme des parias asiatiques inassimilables. On les a accusés de cosmopolitisme et d’être des obstacles au rêve de bâtir des États ethniquement purs.

Le sionisme n’a jamais combattu l’antisémitisme, il l’a toujours jugé inéluctable. Il l’a utilisé pour pousser les Juifs à partir. Dès la fin du XIXe siècle, Herzl s’est adressé à tous les dirigeants antisémites européens en leur expliquant que, eux comme lui, avaient le même intérêt : que les Juifs quittent l’Europe et qu’ils deviennent des colonisateurs européens en Asie. Le sionisme a copié sur les nationalismes antisémites la notion d’État ethniquement pur.

Les dirigeants sionistes ou israéliens n’ont aucun droit de récupérer ou d’instrumentaliser le génocide nazi comme ils le font. La résistance juive au nazisme a été essentiellement communiste ou bundiste, les sionistes n’y ont joué qu’un rôle marginal.

Les dirigeants israéliens ou les dirigeants sionistes en France n’ont aucun droit de revendiquer à leur profit le souvenir du génocide nazi et il ne faut jamais leur faire ce cadeau. Nombre d’entre eux qui vivaient à l’époque ont eu un comportement plus que coupable. Jabotinsky, fondateur du courant "révisionniste" du sionisme était un admirateur de Mussolini. Ben Gourion a signé avec les autorités nazies en 1933 l’accord du transfert des Juifs allemands en Palestine en échange de l’abandon du boycott de l’Allemagne décrété par les Juifs américains. 20 ans plus tard, il signera avec le conseiller d’Adenauer, le Nazi Hans Globke, auteur des lois raciales de Nuremberg, l’indemnisation des Juifs victimes du nazisme et une aide financière importante pour Israël. Yitzhak Shamir, futur Premier ministre fera assassiner des soldats et des dignitaires britanniques jusqu’en 1944, ce qui est un acte de collaboration.

Aujourd’hui même, un dirigeant israélien (Nétanyahou) se permet de dire que les Juifs Français doivent partir et que la France n’est pas leur pays. Aucun antisémite depuis Vichy n’avait osé nous dire que nous n’étions pas chez nous en France. Le même Nétanyahou affirme sans rire qu’Hitler ne voulait pas tuer les Juifs et que c’est le grand mufti de Jérusalem qui lui a soufflé l’idée. Pourquoi ces propos ouvertement révisionnistes sont-ils tolérés ?

Les Juifs européens d’aujourd’hui ne sont plus des parias. Certes l’antisémitisme subsiste, mais il n’a rien à voir avec ce qui se passait dans les années 30. Les discriminations et les stéréotypes racistes frappent beaucoup plus les Arabes, les Noirs, les musulmans, les Rroms. Lutter contre le racisme, y compris sous la forme antisémite est essentiel. Mais faire de l’antisémitisme un racisme à part a surtout pour but d’interdire la critique d’Israël et la solidarité avec le peuple palestinien.

La criminalisation du mouvement de solidarité

Qui sont les défenseurs inconditionnels de la politique israélienne qui agitent systématiquement l’antisémitisme à la moindre critique ? Ils n’ont rien à voir avec l’antiracisme. On y trouve des islamophobes comme Roger Cukierman (dirigeant du CRIF) qui, face à la présence de Le Pen au second tour des présidentielles, conseillait aux musulmans de se tenir tranquilles. On y trouve des gens proches de l’extrême droite comme l’ex-commissaire de police Sammy Ghozlan président du BNVCA ("bureau national de vigilance contre l’antisémitisme") ou comme la ligue de défense juive (LDJ, groupuscule ultra-violent toléré en France). Le numéro 2 du CRIF (William Goldnadel « d’Avocats Sans Frontières ») porte plainte systématiquement contre ceux qui critiquent Israël et considère que toute l’extrême gauche est antisémite. En même temps, il est l’avocat de Patrick Buisson qui a longtemps dirigé le torchon antisémite "Minute". Cherchez l’erreur.

Le gouvernement et les dirigeants israéliens qui multiplient les déclarations et les actes racistes contre les Palestiniens ou les musulmans traitent tous leurs opposants d’antisémites.

Avec la dérive du gouvernement israélien vers l’extrême droite, la même dérive a lieu en France. Tout le monde devient antisémite aux yeux du CRIF, y compris Jean Ferrat (dont le père est mort à Auschwitz), accusé en 2005 dans le journal communautaire "L’Arche" pour sa chanson "Nuits et Brouillard" de nier "l’unicité du génocide juif". Bref, un gouvernement israélien raciste et ses soutiens s’autorisent à traquer l’antisémitisme.

C’est sur ce terrain d’intimidation généralisée qu’a été lancée l’offensive contre le BDS. Cette campagne a été organisée en Israël et des millions de shekels ont été investis pour l’organiser. L’appel palestinien au BDS lancé en 2005 est clairement antiraciste. Il porte sur des principes universels demandant liberté, égalité et justice pour les Palestiniens. Il y a beaucoup de Juifs qui militent pour le BDS, y compris en Israël avec le mouvement « boycott de l’intérieur ». Cela n’empêche pas BHL de déclarer très sérieusement que « le mouvement BDS est organisé par d’anciens Nazis ».

La France et Israël

Il y a des complicités anciennes : souvenons-nous de l’intervention militaire impérialiste conjointe en 1956 de la France, la Grande-Bretagne et Israël ou de la coopération nucléaire qui a permis à Israël d’acquérir la bombe atomique.
Ce n’est pas parce qu’ils sont mal informés que la plupart des dirigeants français, qu’ils soient de droite ou « socialistes » soutiennent inconditionnellement Israël.

C’est parce que ce pays surarmé et aux technologies de pointe, morceau d’Occident installé au Proche-Orient, est celui dont ils ont besoin. Un Israël vivant en paix et dans l’égalité des droits avec les Palestiniens ne les intéresse pas. Pour tenir le Proche-Orient, les pays occidentaux ont besoin d’Israël et des monarchies du Golfe.
Il ne faut pas croire que cette politique pro israélienne soit la conséquence d’un sentiment de culpabilité vis-à-vis des Juifs. En 1945, des centaines de milliers de rescapés du génocide demandaient de pouvoir venir en Occident. Cela leur a été refusé. On leur a dit : « maintenant vous avez un pays, vous partez quand vous voulez ». L’Occident s’est débarrassé de sa responsabilité dans l’antisémitisme et le génocide sur le dos du peuple palestinien.

Israël est devenu un modèle en termes de « sécurité » et « maintien de l’ordre ». Julien Dray expliquait récemment qu’il n’y avait pas besoin d’état d’urgence, il suffisait d’imiter Israël qui depuis 50 ans « lutte efficacement contre le terrorisme », c’est-à-dire écrase impunément toute tentative de révolte palestinienne. La France envisage d’acheter à la compagnie israélienne Elbit les drones utilisés contre les Palestiniens pour les utiliser dans nos quartiers.

La France s’est ralliée à une politique atlantiste qui suppose un soutien à Israël. C’est ce qu’a compris Manuel Valls. Pro palestinien au début de sa carrière politique, il explique aujourd’hui que, sa femme étant juive, il est indissolublement lié à la sécurité d’Israël.

La politique de la France vis-à-vis du BDS a un côté ahurissant. D’un côté on affirme que les territoires occupés ne font pas partie d’Israël et que l’occupation est illégale. De l’autre, avec la circulaire Alliot-Marie ou le jugement de la Cour de cassation de Colmar, on veut interdire tout boycott, y compris celui de produits illégaux. Carrefour a le droit de dire qu’il est moins cher que Leclerc (et réciproquement) mais on n’a pas le droit de dire que les dattes sur le marché viennent des colonies israéliennes de la Vallée du Jourdain, terres volées à des Palestiniens dont les villages sont détruits.
Cela rappelle la guerre d’Algérie quand il était interdit de dire ce qui était à l’œuvre : massacres, tortures et que la presse qui transgressait la vérité officielle était systématiquement censurée.

Ne pas se laisser intimider

Beaucoup de Palestiniens rencontrés nous répètent à l’envi : « cette guerre est née de l’extérieur (avec le vote par l’ONU de la partition de la Palestine en 1947). Elle trouvera sa solution avec la conjonction de la résistance/résilience du peuple palestinien et de la solidarité internationale ». Comme il n’y a pas grand-chose à attendre (de leur plein gré) des gouvernements occidentaux, nous avons, nous, sociétés civiles du monde entier, un rôle capital à jouer : obliger nos gouvernements à sanctionner l’occupant.

Sans sanctions, il ne se passera rien de bon. Le rouleau compresseur colonial continuera impunément à détruire la Palestine.

Nous devons inlassablement aller en Palestine, témoigner, casser le silence des médias et la désinformation.

- Nous devons refuser le chantage à l’antisémitisme. Bien sûr quelques antisémites, souvent venus de l’extrême droite, ont tenté de s’infiltrer dans le mouvement de solidarité. Mais ils ont été démasqués et isolés.

- Nous devons lutter contre le racisme sous toutes ses formes : contre les Arabes, les Noirs, les Rroms, les musulmans, les juifs … Nous ne pouvons que conseiller à tout le monde la lecture et la diffusion du livre de l’UJFP « Une parole juive contre le racisme ».

- Et nous devons rappeler que toutes les tentatives visant à bâillonner la critique d’Israël ne sont pas seulement une forme de complicité avec l’extrême droite au pouvoir là-bas. Elles mettent en danger les Juifs en les sommant d’être traîtres ou complices. À l’UJFP, nous ne sommes ni l’un ni l’autre.


http://www.ujfp.org/spip.php?article5258

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

MessagePosté: 06 Juil 2017, 16:43
de bipbip
Non à l’instrumentalisation de la lutte contre l’antisémitisme

Plusieurs personnalités, dont Michel Tubiana, Rony Brauman et Elisabeth Roudinesco s’insurgent d’une résolution prise le 1er juin du Parlement européen qui assimile toute critique d’Israël à de l’antisémitisme. « Cette résolution (...) s’appuie sur la définition de l’antisémitisme proposée par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste, l’International Holocaust Remembrance Alliance (IHRA), dont le grave défaut est de s’écarter de son objet en multipliant les références à l’Etat d’Israël. »

Le 1er juin 2017, le Parlement européen a adopté une résolution sur une cause essentielle et qui mérite un traitement sérieux : la lutte contre l’antisémitisme. Or, cette résolution, qui reprend l’une des deux propositions déposées, celle des groupes conservateurs (PPE), libéraux (ALDE) et socialistes (S&D), pose de sérieux problèmes. Elle s’appuie, en effet, sur la définition de l’antisémitisme proposée par l’Alliance internationale pour la mémoire de l’Holocauste, l’International Holocaust Remembrance Alliance (IHRA), dont le grave défaut est de s’écarter de son objet en multipliant les références à l’Etat d’Israël.

Ce n’est pas à un parlement de définir des notions qui font l’objet d’un vaste débat historiographique et de centaines de travaux critiques. Et le texte de l’IHRA est loin d’être une référence indiscutable. Il affirme d’emblée que « Les manifestations de l’antisémitisme peuvent inclure le ciblage de l’Etat d’Israël » et mentionne à neuf reprises cet Etat ; même si ses auteurs se voient contraint d’ajouter : « Cependant, une critique d’Israël similaire à celle menée contre n’importe quel autre pays ne peut être vue comme antisémite ». Quand il donne ensuite des « exemples contemporains d’antisémitisme dans la vie publique, les médias, l’école, le monde du travail ou la sphère religieuse », il met sur le même plan quatre exemples de propos haineux, stéréotypés, fantasmés ou négationnistes relevant incontestablement de l’antisémitisme, et sept autres portant sur l’Etat d’Israël, sa « politique actuelle » et ses « actions ».

C’est cette définition de l’antisémitisme par l’IHRA que la résolution votée par le Parlement européen invite les États membres, les institutions et agences de l’Union à adopter et à appliquer. Or, si l’on peut considérer qu’il existe dans certaines attaques formulées contre Israël des dérives antisémites, les critiques de la politique des gouvernements israéliens ne peuvent en aucun cas être assimilées à de l’antisémitisme sans nuire tout à la fois au combat contre l’antisémitisme et contre le racisme, et à la liberté d’opinion nécessaire au fonctionnement de nos démocraties.

C’est ce qu’ont exprimé au Parlement européen les députés de gauche et écologistes (GUE/NGL et Verts/ALE) qui refusent cette instrumentalisation de la lutte contre l’antisémitisme et souhaitent inscrire celle-ci dans le combat, essentiel et universel, contre toutes les formes de racisme et de discriminations.

Oui, on peut lutter contre l’antisémitisme et défendre les droits des Palestiniens. Oui, on peut lutter contre l’antisémitisme tout en condamnant la politique de colonisation du gouvernement israélien.

La lutte contre le racisme, l’antisémitisme et les discriminations ne se divise pas.

Signataires :
Bertrand Badie, Etienne Balibar, Fethi Benslama, Sophie Bessis, Rony Brauman, Alice Cherki, Suzanne Citron, Sonia Dayan-Herzbrun, Michel Dreyfus, Ivar Ekeland, Jeanne Favret-Saada, Marcel-Francis Kahn, Catherine Lévy, Gilles Manceron, Gustave Massiah, Elise Marienstras, Fabienne Messica, Edgar Morin, Véronique Nahoum-Grappe, Emmanuel Naquet, Jacques Rancière, Bernard Ravenel, Carole Reynaud Paligot, Michel Rotfus, Elisabeth Roudinesco, Shlomo Sand, Enzo Traverso, Michel Tubiana, Dominique Vidal.


http://bxl.indymedia.org/spip.php?article14765

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

MessagePosté: 20 Juil 2017, 13:08
de bipbip
Non, l’antisionisme n’est pas un antisémitisme réinventé

« Nous ne céderons rien aux messages de haine, à l’antisionisme parce qu’il est la forme réinventée de l’antisémitisme ». On ne sait si, par ces mots, le président Emmanuel Macron a simplement espéré gagner opportunément les faveurs de Benyamin Nétanyahou, qu’il accueillait aux cérémonies de commémoration de la déportation des juifs parisiens en juillet 1942, ou s’il a énoncé une conviction plus profonde. Mais dans les deux cas, il a eu tort. Espérer séduire Nétanyahou en cédant à son verbe n’est qu’un leurre — demandez à Barack Obama http://orientxxi.info/magazine/la-diplo ... baton,0668 ce qu’il en pense. Quant au fond, l’assimilation de l’antisionisme à une nouvelle mouture de l’antisémitisme est une erreur funeste. Cette assertion est l’une des clefs de voûte depuis des décennies de la hasbara http://orientxxi.info/lu-vu-entendu/der ... ation,1863, la communication israélienne. Et plus Israël s’enfonce dans la domination coloniale d’un autre peuple, les Palestiniens, plus l’assertion « antisionisme égal antisémitisme » est répétée pour stigmatiser quiconque critique cette domination.

En soi, la méthode consistant à délégitimer la critique en démonisant son auteur http://orientxxi.info/lu-vu-entendu/bri ... lence,0393 est vieille comme la politique. Ainsi Joseph Staline et ses émules assimilaient-ils toute critique du communisme soviétique à du « fascisme ». Si les fascistes étaient viscéralement anticommunistes, cela ne faisait pas de tous les contempteurs du régime soviétique des fascistes. Mais les staliniens continuaient à vilipender leurs adversaires, sans distinction, sous ce vocable infamant. Aujourd’hui, un Robert Mugabe, au Zimbabwe, qualifie régulièrement ses adversaires de « défenseurs de l’apartheid ». Que des racistes patentés figurent parmi les dénonciateurs de l’autocrate zimbabwéen est évident. Mais que tous soient des nostalgiques de la ségrégation raciale est une accusation délirante et dérisoire. On pourrait multiplier les exemples.

Il en va de même de l’idée selon laquelle l’antisionisme serait la version moderne de l’antisémitisme. D’abord parce que l’antisionisme n’est pas une idéologie très définie. Historiquement, il a consisté à récuser l’idée d’une solution nationaliste à la question juive. Aujourd’hui, il y a en Israël des gens qui se disent antisionistes par simple hostilité à une occupation des Palestiniens menée au nom même du sionisme. D’autres se disent « post-sionistes » parce qu’à leurs yeux, l’ambition du sionisme étant la constitution d’un État juif, son existence annule d’autorité la nécessité du sionisme. Je connais enfin des Israéliens tout à fait sionistes qui sont si révulsés par la politique de Nétanyahou qu’ils se disent honorés d’être traités d’« antisionistes » par un gouvernement d’extrême droite http://orientxxi.info/magazine/avigdor- ... ,1348,1348 raciste et colonialiste. Ces derniers remplissent par exemple les rangs d’une ONG comme Breaking the Silence, qui regroupe des soldats dénonçant les crimes commis par leur armée contre des Palestiniens http://orientxxi.info/lu-vu-entendu/bri ... lence,0393 et dont plusieurs des dirigeants sont des officiers et aussi des juifs pieux. Ils ne sont pas antisémites. Ils sont même l’honneur d’Israël. Quant à moi, je considère le sionisme comme une question philosophiquement désuète. En revanche, si le sionisme, comme le prône Nétanyahou, consiste à exiger la reconnaissance d’Israël pour mieux empêcher le droit des Palestiniens à l’autodétermination, alors je suis antisioniste. Serais-je donc antisémite ?

Bref, que l’on trouve parmi les antisionistes d’aujourd’hui des gens projetant sur Israël leur antisémitisme atavique ou récent ne fait aucun doute. Mais que l’antisionisme soit en tant que tel une idéologie antisémite est une idée infamante et erronée. Et puis, il y a plus grave. Il y a chez Nétanyahou non seulement cette utilisation abusive de l’accusation d’antisémitisme, mais aussi cette sidérante propension à s’entendre avec de vrais antisémites lorsque ça l’arrange. Au moment où vous-même, M. le Président, cautionniez sa thèse, le New York Times publiait un article d’opinion https://www.nytimes.com/2017/07/17/opin ... ml?mcubz=2 d’une journaliste et traductrice israélienne, Mairav Zonszein, accusant ouvertement son premier ministre de collusion avec celui de la Hongrie, Viktor Orban, un homme qui laisse proliférer l’antisémitisme parmi ses partisans.

Et de fait, de Paris, Nétanyahou a rejoint Budapest. Depuis des années, le gouvernement israélien raffermit ses relations avec les gouvernements les plus réactionnaires d’Europe centrale. Il a soutenu avec une grande compréhension l’attitude du régime hongrois dans la récente crise des réfugiés syriens. Nétanyahou soutient aussi la campagne lancée par Orban contre le financier américain George Soros, dont la fondation favorise les initiatives démocratiques. Cette campagne est menée à l’aide d’arguments fleurant l’antisémitisme : Orban accuse Soros d’user de « l’argent étranger » pour nuire à son pays. Quant aux graffitis hostiles qui prolifèrent en Hongrie contre le magnat américain, beaucoup sont sans équivoque antisémites.

Ce lien entre la droite coloniale israélienne que Nétanyahou incarne — même si désormais on trouve plus radical que lui en Israël — et des organisations exsudant un antisémitisme plus ou moins manifeste n’est pas neuf. Aux États-Unis, un polémiste d’extrême droite comme Glenn Beck, qui avait lui aussi insulté George Soros avec des relents antisémites, était venu se refaire une virginité en 2011 en visitant des colonies religieuses israéliennes extrémistes. Il y fut accueilli en héros (Beck est avant tout islamophobe). Quant à l’invité d’honneur du dernier diner de la Zionist Organisation of America (ZOA), une formation américaine qui regroupe les soutiens à la droite israélienne radicale, il se nommait Steve Bannon, proche conseiller de Donald Trump accusé entre autres par son ex-femme de propos antisémites. Le tollé fut tel dans la communauté juive américaine qu’il renonça à venir. Mais la ZOA afficha sa solidarité avec lui.

On assiste aujourd’hui à un phénomène ahurissant dans cette dérive israélienne. À double détente, l’accusation d’antisémitisme y est désormais soumise aux intérêts contingents. Un : les antisionistes sont tous des antisémites. Deux : les prosionistes sont tous bienvenus, y compris quand ils sont antisémites. Si vous défendez les droits humains en Palestine http://orientxxi.info/magazine/museler- ... de-la,1053, vous êtes antisémite. Si vous êtes islamophobe, que vous soyez aussi antisémite revêt peu d’importance. Le prix à payer à l’avenir pour cette folie risque d’être très élevé. Et l’avaliser aura été, selon l’adage, plus qu’une erreur : une faute.

Sylvain Cypel


http://orientxxi.info/magazine/non-m-le ... vente,1954

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

MessagePosté: 10 Fév 2018, 23:41
de bipbip
Les organisations juives antiracistes et antisionistes,
une force politique en construction ?

Paris mardi 13 février 2018
à 20h, Salle Jean Dame, Centre sportif Jean Dame, 17-25 rue Léopold Bellan

Le 13 février 2018 à Paris, à l'invitation de l'AFPS et de l'UJFP, Rebecca Vilkormerson, dans le contexte répressif actuel, tant en Israël, qu'en Europe et aux États-Unis, présentera le point de vue de "Jewish Voice for Peace" sur la question de l'émergence d'une force juive antisioniste.

En effet, JVP, premier groupe juif des États-Unis à défier l'AIPAC et à menacer la politique israélienne - au point que l'entrée en Israël est refusée à des rabbins américains membres de JVP - est aux premières loges pour amorcer une discussion sur cette thématique. "

Sur la base des principes établis par le droit international, « Jewish Voice for Peace » (JVP) cherche à mettre fin à l'occupation israélienne de la Cisjordanie, de la bande de Gaza et de Jérusalem-Est, tout en assurant la sécurité et le droit à l'autodétermination des Israélien-ne-s et des Palestinien-ne-s ainsi qu'une solution juste pour les réfugié-e-s palestinien- ne-s. Ils/elles sont engagé-e-s contre les discriminations visant les juifs- juives, les musulman-e-s, les arabes et les noir-e-s.

[1] Jewish Voice for Peace comptent 13500 membres, 250000 abonné-e-s aux mailing lists, 75 chapitres locaux et 500 000 followers sur les réseaux sociaux.

http://www.ujfp.org/spip.php?article6181

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

MessagePosté: 11 Fév 2018, 16:56
de bipbip
Rencontre & débat avec Dominique Vidal

« Antisionisme = antisémitisme ? »

Paris mercredi 14 février 2018
à 19h30, Librairie « Le Merle moqueur », 51 rue de Bagnolet

À l'occasion de la parution aux Éditions Libertalia de "Antisionisme = antisémitisme ?" de Dominique Vidal , nous aurons le plaisir de recevoir l'auteur ! Rendez-vous le mercredi 14 février à 19h30 pour une discussion qui sera suivie d'un débat ouvert au public. Un petit apéritif dînatoire vous sera proposé à la fin de la soirée.

Réponse à Emmanuel Macron.

« Mal nommer un objet, c'est ajouter au malheur de ce monde. » Albert Camus.

Le 16 juillet 2017, Emmanuel Macron s'apprête à terminer son discours lors de la commémoration du 75e anniversaire de la rafle du Vél' d'hiv'. Et soudain, se tournant vers Benyamin Netanyahou, qu'il a appelé « cher Bibi », il lance : « Nous ne céderons rien à l'antisionisme, car il est la forme réinventée de l'antisémitisme. »

Jamais un chef de l'État n'avait commis une telle erreur historique doublée d'une telle faute politique. Voilà ce que ce livre entend démontrer, sur un mode non polémique et pédagogique en traitant successivement de l'histoire du sionisme, de la diversité de l'antisionisme, de l'antisémitisme hier et aujourd'hui, enfin de la politique proche-orientale de la France.
L'auteur

Journaliste et historien, auteur de nombreux livres dont Le Ventre est encore fécond (Libertalia, 2012), Dominique Vidal exprime ici son opinion, mais s'efforce surtout de donner les éléments d'information permettant à tout un chacun de se faire la sienne.

Image

https://www.lemerlemoqueur.fr/rencontres/14332/

Re: Peut-il y avoir une paix juste avec le sionisme ?

MessagePosté: 17 Fév 2018, 20:06
de bipbip
Intervention de Pierre Stambul, en ouverture de la soirée du 13 février 2018 avec Rebecca Vilkomerson, directrice exécutive de Jewish Voice for Peace (JVP).

Certains voudraient nous faire croire que la guerre au Proche-Orient est religieuse, communautaire ou raciale.

Nos amis de JVP nous démontrent tous les jours le contraire. C’est au nom de leur identité juive qu’ils se battent tous les jours pour une paix fondée sur l’égalité des droits et la justice.

La Palestine vit les pires heures de son histoire. En Cisjordanie et à Jérusalem Est, la population subit tous les jours la confrontation violente avec les colons et l’armée. Tous les jours, de nouvelles colonies sont construites. L’armée israélienne tue impunément, arrête des enfants et torture. La « détention administrative » est devenue la règle avec des prisonniers emblématiques : Ahed Tamimi, Salah Hamouri, Khalida Jarrar.

Gaza est une prison où l’occupant expérimente comment on peut retirer du monde deux millions de personnes dans la pénurie généralisée d’eau potable et d’électricité. L’apartheid frappe aussi les Palestiniens d’Israël qui vivent des discriminations au travail, à la possession de la terre et au logement. Un nouveau nettoyage ethnique est à l’œuvre dans le nord du Néguev.

Ceux qui commettent ces crimes profanent l’histoire, la mémoire et les identités juives. Ils les justifient au nom du judaïsme en se réclamant de la mémoire de l’antisémitisme et du génocide nazi. Cette justification est pour vous comme pour nous une obscénité.

Je vais citer ce qu’a écrit Janina Herscheles, rescapée du camp d’extermination du ghetto de Lvov et aujourd’hui « Femme en Noir » à Haïfa : « L’histoire a connu plusieurs déplacements de population, mais notre passé tragique ne nous donne pas le droit, en Israël, de confisquer des terres, de détruire des maisons, d’arracher des champs d’oliviers entretenus pendant des générations. C’est faire peu de cas de la Shoah que d’agir ainsi. Au contraire, notre avenir au Proche-Orient dépend de notre capacité à mettre en place des conditions qui nous permettent de vivre ensemble, sans le retour cyclique des violences et des guerres. »

Israël est devenu un pays profondément raciste : contre les Palestiniens injuriés tous les jours par tous les dirigeants : Qui a dit des mères palestiniennes : « elles doivent mourir et leurs maisons doivent être détruites de telle sorte qu’elles ne puissent plus abriter de terroriste » ? C’est Ayelet Shaked, ministre de la « justice ».

Racisme profond aussi contre les Noirs. Qui a dit à leur propos au moment de l’inondation de New Orleans : « Là-bas, ce sont des Nègres. Les Nègres ont-ils apporté la Torah ? Yallah, un ouragan s’est abattu sur eux et les a noyés parce qu’ils n’ont pas de Dieu. » ? C’est feu le rabbin Ovadia Yossef, fondateur du parti Shas.

Racisme interne à la société juive israélienne. Nous nous félicitons que JVP, comme l’UJFP consacre un importante partie de son activité à la lutte contre le racisme, au côté de toutes les forces antiracistes des États-Unis. L’UJFP a produit un livre « Une parole juive contre le racisme » et 10 clips sur le même sujet. Elle a publié le « manifeste des enfants cachés » et est intervenue à la frontière italienne pour venir en aide aux migrants.

Nous savons que ce qui se passe au Proche-Orient est le résultat de l’impunité accordée à Israël, quoi que fassent ses dirigeants. Ce n’est pas parce qu’ils sont mal informés que les dirigeants occidentaux soutiennent inconditionnellement Israël. C’est parce que ce pays surarmé et aux technologies de pointe, est leur État, morceau d’Occident installé au Proche-Orient. La politique israélienne est pour eux un exemple de la façon dont on peut contrôler et enfermer les populations jugées dangereuses. Parmi ces dirigeants, il y a Trump qui vient de mettre le feu à la région en décrétant que Jérusalem était la capitale d’Israël. Mais il y a aussi Macron et les autres dirigeants de l’Union Européenne qui maintiennent des clauses de commerce privilégié avec Israël et qui s’opposent vigoureusement à toute sanction contre cet État voyou.

À l’UJFP, nous sommes résolument pour le BDS. Un boycott complet : politique, militaire, économique, commercial, universitaire, culturel, syndical, sportif. Les trois grandes revendications de l’appel palestinien au boycott sont les nôtres : liberté, égalité, justice. Et les anticolonialistes israéliens nous invitent à boycotter leur pays.

Les autorités françaises essaient de criminaliser le BDS et l’antisionisme en les assimilant à de la « discrimination ». Nous ne les laisserons pas faire.

Rebecca, nous espérons que ta venue contribuera à renforcer une structuration internationale de Juifs/ves opposés à la politique israélienne.

Les projets de faire d’Israël « l’État-Nation du peuple juif » et les annexions de territoire qui sont en cours sont des menaces terribles. Une défaite des Palestiniens serait une défaite de toute l’humanité.

Le sionisme n’est pas seulement un crime contre les Palestiniens, c’est une catastrophe suicidaire pour les Juifs/ves.


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