Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation

Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation

Messagede berneri » 03 Aoû 2009, 23:40

Je souhaiterais échanger de manière constructive vis à vis de l'actualité sociale concernant les licenciements massifs et les délocalisations et les propositions libertaires que nous avons à défendre dans ces circonstances.

Il me semble que nous vivons un moment particulier : la colère et la lutte contre les patrons licencieurs et les delocalisations s'accompagne la défiance vis à vis du syndicalisme d'accompagnement. Ce sont les travailleurs et les syndicalistes à la base qui mènent des actions radicales, franchissant parfois le seuil de la légalité étatique. Peut-être plus marquant des appels de militants à se coordonner pour la grève générale, il se pourrait que les différentes tentatives de coordinations actuelles des boites en luttes créent à un moment le terreau fertile d'une lutte massive et frontale face au patronat et à l'état.

Les interventions policières et la défense du droit de propriété par l'état, diminue sa légitimité et peuvent aussi créer une défiance vis à vis de l'appareil étatique.

La course à la croissance et les solutions de type réformistes sociales - libérales apparaissent de plus en plus clairement comme des attrapes-nigauds


Cependant il convient aussi de ne pas faire d'angelisme, nous vivons aussi un contexte d'individualisme forcené, les travailleurs cherchent avant tout à partir avec le plus possible et pas forcement à conserver leur emploi.
Cette option peut apparaitre très individualiste mais elle est réaliste face à l'absence d'alternative sociale crédible et non incantatoire. Évidemment une fois les indemnités consumées le travailleur peut se retrouver à rester au chômage, sans compter l'impact local en terme de vie sociale, etc...

Aujourd'hui se préparent des marches pour l'interdiction des licenciements, certes cette revendication ne me semble pas porter de projet alternatif face au capitalisme et portée seule elle peut mener à l'échec. Cependant elle répond peut-être en miroir à une colère : " puisque de toute façon on perdra les emplois, autant partir avec le maximum" est rétorqué " il faut interdire les licenciements"

Peut-être cette revendication d'interdiction des licenciements emportera t elle une mobilisation importante, tout du moins elle pourrait fédérer celles et ceux qui se mobilisent à la base contre les licenciements et les delocalisations.
Il me semnble que les libertaires ne doivent pas faire la fine bouche et regarder d'un oeil distancié ce qui se passe, au contraire il me semble qu'il faudra être avec celles et ceux qui bougent et luttent pour partager la reflexion et la revendication autour de l'alternative sociale, à savoir la revndicationde la socialisation des moyens de productions.
on peut très bien revendiquer :
"Puisqu'ils veulent fermer, qu'ils paient , et nous gardons les machines et les locaux pour faire tourner la machine pour nous", quitte à reconvertir la production et à faire participer la collectivité au soutien de l'emploi.

Des questions economiques de coût, de debouchés, etc... se poseront également et il faut réfléchir pour y répondre sans s'enfermer dans l'ornière de l'alternative isolée. on porte à travers cette revendication la question de la remise en cause de la propriété privée comme un droit inaliénable. Les libertaires soulèvent cette question depuis le debut de leur reflexion, rien de nouveau donc, si ce n'est de ne pas oublier comment faire concorder dans le monde actuelle les propositions anarchistes avec les problèmes d'aujourd'hui.

L'originalité des libertaires dans les réponses que nous proposons à cette question peut soulever un certain engouement et ... peut-être être reprises plus largement pour donner enfin une dynamique de victoires dans les luttes sociales voir d'espoir en terme d'alternative sociale.

Qu'en pensez vous? quelles pistes pour mieux porter ce débat? quelles déclinaisons concrètes pour les problèmes d'aujourd'hui, etc...
berneri
 

Re: Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation

Messagede L'autre facteur » 04 Aoû 2009, 00:42

Je partage pas mal la façon dont tu poses les questions. Au cas ou tu ne l'ai pas lu,je te renvois à un article du groupe CGA de Montpellier paru dans IAL d'été qui aborde les choses dans cet état d'esprit : http://www.c-g-a.org/public/modules/new ... orytopic=8

Etat d'esprit que j'aimerais voir un peu plus souvent sur le forum :)
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Re: Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation

Messagede Alayn » 04 Aoû 2009, 00:50

Bonsoir ! Oui, et au risque de surprendre, je suis d'accord avec ton texte Berneri.
Faisons néanmoins attention à ne pas tomber et n'être que de la valetaille pour les syndicats réformistes, le NPA et d'autres soc-dems dans ce genre de manifs. J'insiste sur ce point.

Portons haut les idées anarchistes dans ces luttes.

Salutations Anarchistes !
Alayn
 

Re: Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation

Messagede berneri » 05 Aoû 2009, 15:29

Salut merci de vos réponses,

J'ai bien lu le texte de la CGA dont je continue à recevoir la revue.
Je suis tout à fait d'accord avec les propositions de ce texte.
Pour populariser le projet communiste libertaire, il faudra peut-être une campagne commune des organisations qui s'en revendiquent ce qui pourrait donner plus de poids.
Cependant je pense qu'il nous faut envisager plus concrètement encore les questions d'autogestion et de reprises des moyens de production à partir des situations d'aujourd'hui. Non pas donner precisemment par avance la manière detaillée de pratiquer et enfermer la réalité et le possible dans un livre ou un texte. Mais s'atteler tout de même à des problèmes concrets par rapport aux expériences en cours.

L'expérience syndicale, les mutuelles ( et leurs derives), les scoop, etc... il y a des pistes déjà explorées.

Ensuite je voudrais souligner que le terme de propriété fait echo pour les travailleurs avec les biens d'usages qu'ils possèdent ( frigo, vêtements, télé, voiture, maison) et la bourgeoisie sait comment agiter l'épouvantail pour faire peur au prolo lorsqu'on parle d'abolition de la propriété ( propriétés de logements à but de rentes locatives, propriété des moyens de productions, possession du capital). Ensuite pour être crédible il faut un minimum de propositions autour de la monnaie et de la valeur d'échange. Enfin, mais c'est peut-être insuffisant, il faut des propositions en terme de production, distribution, coordination des deux ( et la plannification a montré son echec) , espaces de libre initiative , etc...
En fin il faut bien définir pour être clairs les différences entre la collectivisation, la socialisation, le collectivisme, le communisme, le communisme libertaire.

j'y reviendrai. faute de temps je n'irai pas plus loin ce jour.
à bientôt
berneri
 

Re: Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation

Messagede Pïérô » 09 Aoû 2009, 11:55

C'est une démarche qui me parait en effet très intéressante, et même importante dans le contexte. Nous avons un point de vue à porter concernant ces questions de socialisation des moyens de productions et des services publics aussi. Et en effet je partage le fait qu'en dehors d'une forme un peu incantatoire, les contenus nous font défaut. Entre ce questionnement de Berneri et le texte de la CGA, que je trouve aussi intéressant, il y a matière à développer ensemble sur le sujet. Ici sur le forum, comme ailleurs je dirais car je pense qu'il y a matière à étendre la reflexion, et s'en saisir pour localement réunir les libertaires autour de ce type de démarche à partager. Je pense que par exemple à Tours se serait l'occasion de réunir les différentes composantes de notre mouvement...
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Re: Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation

Messagede leo » 09 Aoû 2009, 15:18

.
Je crois que ce thème (Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation) est primordial car il se situe à l’intersection entre deux choses qui ne se rencontrent que trop rarement :
(1) d’un côté les revendications réelles et les besoins sociaux qu’elles expriment et
(2) de l’autre des propositions politiques qui peuvent surgir de la part d’un courant qui se veut révolutionnaire.

Le point d’articulation est donc très précis : en quoi des contenus de type anarchiste peuvent s’insérer dans une problématique de rapport de forces concret et devenir des armes y compris et d’abord au sein de ce rapport de force (et pas de vagues idées générales pour un futur incertain) comme propositions pratiques. Comme le dit Berneri
« faire concorder dans le monde actuel les propositions anarchistes avec les problèmes d'aujourd'hui. »



Luttes et revendications

Les luttes contre les licenciements sont d’abord des luttes pour la préservation des postes de travail. Dans un deuxième temps, le plus souvent à cause d’un rapport de force dégradé, lorsque les travailleurs pensent qu’ils ne peuvent plus faire revenir les patrons sur la décision de licencier, les revendications se portent sur le montant de l’indemnité de licenciement (les 50 000 euros obtenus par ceux de Conti, les 30 000 demandés et 12 000 obtenus par les New Fabris…)

Dans le contexte général que l’on connaît, et qui est en défaveur des travailleurs, le premier critère est celui favorisant une (re)mobilisation collective et solidaire des salariés directement concernés par les licenciements.

Devant l’absence/refus/impossibilité du syndicalisme d’assumer ce rôle de construire des rapports de force favorables aux salariés, c’est à des formes de coordinations directes entre travailleurs qu’il revient de le faire. Les premiers pas, gestes, paroles dans le sens de coordonner les entreprises en lutte vont dans le bon sens : celui de l’auto-organisation, de l’auto-mobilisation des travailleurs par et pour eux-mêmes.

Ces formes de coordination, si elles se mettent en place, le feront sans doute autour de la revendication commune (dite centrale) du refus des licenciements et la défense des postes de travail, revendication pouvant non seulement fédérer des travailleurs en lutte mais au-delà : au niveau de chaque territoire, de chaque bassin d’emploi, localement, tous ceux et celles qui se sentent concernés et solidaires. Les tentatives inter-luttes et interpro par exemple peuvent trouver ici moyen de se développer et de s’articuler.

Les partis ou organisations de gauche mettront évidemment en avant le mot d’ordre de « Loi pour l’interdiction des licenciements », assortis pour les uns et les autres de certaines conditions (s’ils sont « boursiers », ou si des dividendes ont été versés…). Revendication illusoire sur la nature de l’Etat, elle est aussi une impasse en ce qu’elle visera une fois de plus à placer une dynamique de lutte sociale à la remorque de partis politiques et de mouvements qui ne peuvent exister que dans la sphère étatique et parlementaire et de ses débouchés électoraux.

Les anarchistes et les révolutionnaires ont d’autres propositions. Celles qui disent que le « débouché des luttes » se situe en elles-mêmes et dans leur victoire et non dans les élections et la reproduction des structures de la domination. Et aussi que les véritables victoires ne peuvent éviter les affrontements décisifs, la rupture avec le capitalisme, la mise en déroute de la bourgeoisie et la mise en place d’un autre monde possible par la réorganisation totale de l’ancien.

C’est là que la proposition de « prise » des entreprises en faillite ou qui ferment par les travailleurs (telles qu’elles sont pratiquées en Argentine par exemple) est une réponse très concrète à une situation donnée : elle vise d’abord à défendre des postes de travail et elle est aussi une critique en acte (certes partielle !) de la domination et de l’exploitation.


Les propositions

Il s’agit, dans un rapport de force donné, et à transformer, d’avancer des propositions qui ne semblent pas trop tomber de la lune autant dans leur contenu que dans les manières de les avancer.

La réappropriation des entreprises par les travailleurs (et corrélativement l’expropriation des capitalistes) me semble être l’axe autour duquel peut déployer à la fois des aspects revendicatifs, partiels, réalistes, à court terme et les éléments de contenus révolutionnaires :
- propriété sociale des moyens de production,
- autogestion,
- horizontalité…
et sur tout ce que cela peut ouvrir comme questionnements :
- utilité sociale de ce qui est produit,
- articulation “producteurs” / “consommateurs” (ni marché, ni planification bureaucratique),
- les “biens communs” et le libre choix de produire des biens propres,
- le productivisme,
- de l’autogestion d’entreprise à l’autogestion généralisée et la question du pouvoir (qui décide de quoi et comment, "pouvoir de" contre "pouvoir sur"…),
- etc.


Une campagne pour l’expropriation des capitalistes et le communisme libertaire ?


Sur l’idée avancée par Berneri de
« populariser le projet communiste libertaire »
et pour cela d’envisager
« une campagne commune des organisations qui s'en revendiquent ce qui pourrait donner plus de poids »
, je ne peux qu’y souscrire a priori. Et peut-être aussi en l'élargissant et en envisageant un “cadre” permettant à des individus et des collectifs locaux de s’y inscrire.

OK pour ne pas proposer un projet tout ficelé (qui de toute façon n’existe pas) mais d’avancer des contenus et des problématiques.
Important également de montrer que cela est possible, que ces pratiques collectives menées par les travailleurs sont à la portée de tous à condition de le décider et de se battre pour, avec des exemples palpables. Là encore les expériences argentines peuvent être un exemple et nous disposons de documents sur le sujet.

Et peut-être que de ce forum pourrait naître une ou des propositions dans ce sens. Sans doute pas mettre d’accord tout le monde (mission impossible !) mais déjà ceux et celles qui voient l’intérêt de ce type de campagne.

Une remarque sur ce que dit Berneri :
« En fin il faut bien définir pour être clairs les différences entre la collectivisation, la socialisation, le collectivisme, le communisme, le communisme libertaire. »

Pourquoi pas ? Mais cela peut nous entraîner dans des débats très théorique (je ne suis pas contre) qui peuvent bloquer l’action et la prise de parole sur l’essentiel (l'expérience montre que c'est quand on veut être très "clairs" que les choses se font les plus confuses).

.
leo
 
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Re: Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation

Messagede berneri » 10 Aoû 2009, 16:18

merci pour ton apport Léo, je prends en note et partage ta critique sur le risque d'enlisement théorique qui pourrait empecher d'agir.

J'espère avoir le temps de faire partager des reflexion approfondies sur le sujet dans les jours qui viennent... Pour l'heure je sors du taf ( et le travail a souvent cette propriété d'abrutir un peu ou bcp) et j'ai le plaisir de lire ta contribution. Continuons ensemble discuter de cette manière réaliste me semble vertueux pour notre mouvement et pour la recherche d'un résultat concret à notre engagement libertaire.
Je pense être plus disponible la semaine prochaine pour partager mon point de vue, j'espère que d'ici là d'autres contributions constructives et réalistes viendront s'ajouter à ce que nous avons écrits.
fraternellement
à bientôt
berneri
 

Re: Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation

Messagede RickRoll » 10 Aoû 2009, 17:33

Pour l'interdiction des licenciements, je suis pas vraiment pour (je vois ça comme un pis aller). J'ai l'impression que ça n'aide pas les travailleurs-euses à se réapproprier l'outil de production (c'est l'Etat qui décide que l'entreprise ne ferme pas).

Je serais plutôt pour la proposition de la CGA, ou bien une réglementation qui laisse les travailleurs-euses décider pour leur outil de travail (reprise en main en SCOP ? retrouver un nouveau patron ? etc.)
Cependant, et je rejoins les camarades de la CGA sur ce point, il peut y avoir un boycott de l'entreprise autogérée par les autres, afin de la faire couler pour éviter que l'autogestion apparaisse comme une alternative réelle.
Ensuite, comment récupérer l'usine ? Mise en autogestion sans rachat ? Rachat à l'entreprise ?
Et enfin, nous serons quand même obligé-es d'avoir une législation sur le sujet...
RickRoll
 

Re: Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation

Messagede leo » 11 Aoû 2009, 10:31

Un tract un peu argumenté sur l'autogestion que je verse au débat sur le thème : réappropriation / autogestion
.
L’AUTOGESTION VITE !


Il n’y a plus à se faire d’illusions :

La course aux profits, à la rentabilité, à la concurrence, à la compétitivité détruit partout sur la terre la vie des gens, les emplois, les liens sociaux, les solidarités, la Nature. Les riches, par l’exploitation de l’immense majorité, tirent de monstrueux revenus des logiques économiques qu’ils imposent à toutes les sociétés et détruisent la planète de manière totalement irresponsable, en toute bonne conscience.

Les gouvernements et les représentants incontrôlés de tous les partis que nous élisons de loin en loin ne se mettent pas au service des peuples contrairement à leurs beaux discours (électoraux) d’arracheurs de dents. Ils sont au service des maîtres de l’économie qui leurs dictent leurs politiques antisociales. Il n’y a plus à prêter notre confiance à ces professionnels très intéressés de la politique qui ont choisi leur camp. Nous allons pouvoir encore une fois constater toute leur duplicité lors de la réunion du G20 début avril : les dirigeants des grandes puissances industrielles se réunissent pour apporter de l’oxygène au capitalisme moribond à l’aide de quelques réformettes keynésiennes provisoires afin que tout continue comme avant, pas pour venir en aide aux centaines de millions de pauvres des cinq continents ou pour nous préserver des moyens de vie décents.

Les syndicats ne méritent pas plus notre confiance. Depuis une trentaine d’années, ils ont reculé pas à pas devant l’offensive ultralibérale contre les salaires et les conquêtes sociales afin de préserver leur rôle de « partenaires sociaux » et les petits privilèges financiers qui y sont attachés. Comment faire confiance à des dirigeants syndicaux qui mangent avec ceux qui nous exploitent et qui se couchent devant leurs exigences ? Pourquoi ces prétendus partisans du rapport de force social n’appellent-ils pas à une grève générale illimitée, comme en Mai 68 ou aux Antilles récemment, seule à même de commencer à faire reculer les privilégiés et les patrons sur un partage un peu plus équitable des richesses ?

Nous aimerions bien nous laisser charmer par les belles paroles anticapitalistes du NPA, mais les leçons de l’histoire et notre propre expérience nous ont appris à nous méfier viscéralement des structures politiques très hiérarchisées au fonctionnement opaque. D’autre part, nous nous méfions instinctivement des « révolutionnaires » qui apparaissent régulièrement dans les médias, propriétés des plus grosses fortunes et des Etats (nous ne jugeons pas les personnes sur leurs discours, mais sur la cohérence entre ceux-ci et leurs actes). Il n’existe pas de sauveur suprême de toute façon…

Que faire donc ?

Nous sommes les partisans d’une douce utopie, mais nous pensons que seule la réalisation de celle-ci pourrait nous permettre de ralentir la catastrophe économique et écologique mondiale dans laquelle nous ont plongées toutes les oligarchies ultralibérales foncièrement immorales et indécrottablement irresponsables.

Nous pensons qu’il est grand temps que tous les peuples se débarrassent des classes dominantes et des privilégiés qui les écrasent par leur délire de puissance, de domination, de richesse, de privilèges.

Nous pensons que nous devrions changer de mode de vie, sortir de la société de consommation qui, tout le monde le sait maintenant, détruisent de plus en plus vite les bases même de la vie sur terre.

Nous pensons que nous devrions retrouver des modes d’organisations sociales égalitaires, justes, démocratiques au vrai sens du terme : le pouvoir du peuple par le peuple et pour le peuple. Nous ne vivons pas dans des démocraties, mais dans des régimes d’oligarchies libérales. Il ne peut y avoir de liberté sans égalité (allez demander à un SDF ou à une victime des « subprimes » s’ils se sentent libres dans nos sociétés), et il ne peut y avoir d’égalité sans liberté (ont-ils le même pouvoir que Mme Parisot ?).

Nous sommes partisans de la démocratie directe qui par la destruction de toutes les hiérarchies permet l’expression de chacun, la confrontation argumentée et fertile des idées, des opinions, et exige la responsabilité de tous, l’amour du bien commun.

Nous pensons que nous devrions, sans chefs et sans hiérarchies, travailler autrement, donner du sens à notre activité, partager le travail, répartir équitablement les salaires, les revenus, coopérer au bien de tous, détruire les productions et les échanges commerciaux inutiles, nuisibles, polluants, produire des aliments sains non cancérigènes, privilégier les activités d’épanouissement des individus, l’éducation (« quand on ferme une école, on ouvre une prison… »), la santé, la culture, les arts, la musique, la transmission des valeurs d’émancipation, l’enseignement de l’histoire de la liberté, la préservation de la Nature, etc…

Nous sommes partisans de beaucoup d’autres choses encore, mais nous sommes bien conscients qu’un tel programme ne peut se réaliser que s’il est partagé par la grande majorité des hommes et des femmes, en toute liberté et en toute conscience, et s’ils se donnent les moyens, en dehors de tous les partis politiques, de se réapproprier les pouvoirs que concentrent entre leurs mains les gens qui nous empêchent de vivre normalement et qui ne se laisseront pas exproprier si facilement…

Henri (magasinier), Mohamed (manutentionnaire), Sylvie (standardiste), Dominique (caissière), Malika (secrétaire), Guillaume (informaticien), Georges (électricien), Marc (plombier)


Le 19 mars 2009

« LES PATRONS NE VEULENT PLUS PAYER, MAIS ILS PEUVENT DISPARAÎTRE… »


Tract distribué à l’occasion de la manifestation nationale du 19 mars 2009

Publié sur le site Bathyscaphe http://92.243.4.248/spip/
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Re: Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation

Messagede Antigone » 11 Aoû 2009, 18:41

Je suis évidemment en désaccord avec tout ce qui a été écrit.

1 - L'interdiction des licenciements qu'il faudrait imposer aux gouvernenants est actuellement le cheval de bataille du NPA et des formations qui se situent à la gauche de la gauche. A écouter les discours de Besancenot et de Melanchon, ça parait simple... mais c'est simpliste.
Tout d'abord, sur le principe, il est impossible de demander que les licenciements soient interdits autrement que par une loi. Or une telle demande reviendrait à reconnaitre le Parlement, légitimer les politiciens qui y siègent et le rôle qu'ils y occupent. Cela signifierait que nous remettions notre sort entre leurs mains, et que nous abandonnions du même coup toute indépendance de classe. Quand on se dit anti-parlementariste, ça parait inconcevable.

Ensuite, sur le fond, une telle loi dans le système actuel serait aussi inapplicable que si elle prétendait interdire le chômage, les investissements, les profits etc. Les licenciements font partie des règles de gestion et du fonctionnement des entreprises. Si on les "interdisait", ils réapparaitraient sous une autre forme, et de toute façon, cette loi serait immédiatement contournée et rendue caduque.
Cette revendication unilatérale, c'est du populisme social, ni plus ni moins. Qu'on la laisse donc aux adeptes du "ya ka faire ci, ya ka faire ça", à ces poujadistes de gauche qui espèrent s'attirer à bon compte les sympathies des déçus des partis réformistes. La seule façon de s'opposer à des licenciements, c'est par la lutte, au coup par coup, là où le problème se pose, à travers des moyens qui auront été décidés démocratiquement par les travailleurs. Je n'en connais pas d'autre.

2 - L'autogestion, c'est une arnaque.
Il n'y a rien à gérer dans le système capitaliste. Il n'y a pas de bonne gestion à opposer à la mauvaise. Qu'elle soit privée, étatique, de cogestion ou d'autogestion, le maintien d'un système salarial (même "équitable") la placerait de facto face aux impératifs du marché, continuant à la rendre tributaire du carnet de commandes.
Il ne faut pas se leurrer. L'autogestion, si elle était appliquée aujourd'hui, reviendrait à une gestion de l'entreprise assumée par le seul Comité d'Entreprise. Pas par l'ensemble des travailleurs mais par des spécialistes au courant des dossiers, ce qui leur donnerait une position directrice par rapport aux décisions à prendre. L'autogestion, ce serait une gestion syndicale sans patronat. Autant dire qu'on ne changerait pas de société. Le capitalisme s'adapterait.

En outre, une entreprise en grosse difficulté sur le marché ou menacée de fermeture ne retrouverait pas la santé par le simple coup de baguette magique de l'autogestion. Elle serait obligée de se placer sur le marché en concurrence directe avec d'autres entreprises de la même branche qui pourraient connaitre les mêmes difficultés. Cela reviendrait alors à participer à une mise en concurrence des travailleurs entre eux.
Quant à la proposer dans les grosses sociétés du CAC40, elle serait totalement irréaliste en raison de la complexité et de l'interconnexion des échanges internationaux.
En finir avec la gestion, c'est en finir avec la valeur, avec la logique du code barres et de la marchandise qui régit le travail et contraint l'homme à vendre son activité. La solution n'est donc pas dans le capitalisme, même en tentant d'y trouver un espace le moins défavorable possible, mais en dehors de ce système.

Enfin, l'idée que les entreprises sont à nous est une idée qui a fait son temps et qu'il va bien falloir enterrer une bonne fois pour toutes. L'époque où l'usine était la deuxième maison des travailleurs est révolue. On n'occupera plus les entreprises comme en 36 ou en 68. Elle se termine l'époque où celui qui partait à la retraite prenait en photo sa fraiseuse sur laquelle il avait travaillé toute sa vie pour la faire encadrer et l'exposer dans son salon... L'avenir des luttes ne s'incarne pas dans la rancoeur de ceux qui ont tellement vécu dans la culture du travail bien fait qu'il ont fini par s'identifier à leur entreprise et aux machines qui leur ont bouffé la vie, la santé, l'énergie, la culture, le goût de la découverte, l'amour, la liberté....

Les mentalités ont changé sous l'influence du libéralisme triomphant de ces 15 à 20 dernières années.
A force de flexibilité, de mobilité, de précarité, la génération des 20-40 ans n'a plus qu'une relation distante avec les moyens de production. Et même si la culture d'entreprise tente d'y remédier, le monde du travail est de plus en plus perçu comme un lieu qu'onn'a plus les moyens de choisir et avec lequel plus aucun lien durable ne peut s'établir. Il ne sert qu'à obtenir de quoi subsister et c'est tout.
Si la revendication autogestionnaire pouvait encore recueillir un écho jusque dans les années 80, ce sera de moins en moins le cas à l'avenir parce que l'exploitation s'exerce à présent sans se dissimuler sous des prétextes fallacieux. Qui s'interesse à la socialisation des moyens de production actuellement, à part des responsables syndicaux qui cherchent à se donner des airs un peu radicaux ?... personne.
On n'en a plus rien à foutre de gérer ce bordel. Quand ça pètera, les gens ne chercheront pas à gérer le passif, mais à en finir avec les contraintes de l'économie, du salariat et la dictature de la valeur, pour essayer de se réapproprier leur vie, juste un peu de vie...

Voila en substance l'étendue des divergences d'analyse qui, sur ce sujet, permet de distinguer l'anarchisme de l'autonomie.
Antigone
 

Re: Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation

Messagede berneri » 11 Aoû 2009, 20:10

Salut,

Je partage partiellement l'analyse d'Antigone sur le fait que revendiquer une interdiction des licenciements est une erreur. En revanche je ne le pense pas par peur de sortir d'un dogme anarchiste concernant le parlementarisme ( je partage cependant la critique du parlementarisme et l'analyse de son inefficacité pour changer la société dans le sens que nous souhaitons) ou par peur de m'assimiler au NPA (je suis suffisament fort de mes convictions pour cela et je milite au quotidien avec des camarades du NPA dans mon syndicat sans avoir peur d'être converti ou "contaminé") mais tout simplement (et je pense que c'est par cela qu'il faut d'abord l'expliquer) par ce je trouve que cette revendication est inapplicable, inefficace, illusoire. Cependant, je m'intéresse à la dynamique qui peut se créer autour de cette revendication qui est peut-être susceptible de fédérer les travailleurs à la base assez largement. Non pas dicter la bonne voie et éclairer un chemin lumineux aux travailleurs qui seraient en perdition en suivant cette voie, mais être à leurs côté et porter dans un cadre revendicatif et de lutte auprès et avec eux la question de la socialisation des moyens de production.

En revanche je ne rejoins pas Antigone sur le reste:

Personne sur ce topic ne cautionne l'idée d'autogestion organisée en vue de rester dans le système capitaliste me semble-t-il. Ni d'ailleurs l'idée de l'autogestion isolée et déconnectée de la lutte sociale, des organisations de luttes et d'un projet révolutionnaire.

Et je suis dépité de retrouver le risque d'une dérive vers débat sur l'anarchisme et l'autonomie qui à mon avis aurait sa place dans un autre sujet. Ici je souhaitais que nous cherchions ensemble des réponsese concrètes et des analyses nous permettant d'agir dans le cadre des luttes actuelles pour faire avancer le projet social communiste libertaire et ainsi proposer une perspective d'alternative sociale capable de porter les luttes vers des victoires sociales.

En bref je suis assez déçu de retrouver l'écueil d'un romantisme révolutionnaire surrané qui consiste à prêter des propriétés "magiques" à la population dans des "grands soirs". Je pense que c'est une impasse : si on a rien construit, préparé , organisé, nous aurons face à nous la réponse efficace et autoritaire qui aura largement la place pour emporter plus d'adhésion et je ne crois pas que "l'esprit saint libertaire" tombera sur les masses laborieuses. Cela relève de la croyance et de la pensée magique.

C'est pour celà que quand je retrouve des écrits tels que :
" Quand ça pètera, les gens ne chercheront pas à gérer le passif, mais à en finir avec les contraintes de l'économie, du salariat et la dictature de la valeur, pour essayer de se réapproprier leur vie, juste un peu de vie..."

.... je ris mais jaune tant je pense que c'est ce genre de pensée qui a conduit dans l'impasse le mouvement libertaire, à la défaite et à sa très faible audience au final dans l'hexagone par exemple, sans parler de la composition du mouvement qui ressemble à cause de celà à une éternelle passoir incapable jusqu'à ce jour de peser sur la réalité sociale!

Pour ma part je pense qu'il s'agit de construire plutot que de détruire. La génération spontanée d'anarchistes n'existe pas plus à mes yeux que la génération spontanée des champignons, etc...

Enfin cela ferait aussi l'objet d'un autre débat dans un autre sujet. Aussi je travaille à un nouvel écrit constructif pour ce sujet lancé initialement ici afin que nous élaborions ensemble des outils efficaces et pragmatiques pour nos luttes.

Fermement mais fraternellement.
berneri
 

Re: Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation

Messagede leo » 11 Aoû 2009, 21:33

Sur ce que dit Antigone

Je suis d’accord avec le point 1. Interdiction des licenciements.
C’est, en plus développé, ce que j’ai déjà dit précédemment.
Donc aucune raison de participer à ce type de campagne

Sur le point 2 et l’arnaque autogestionnaire : je suis beaucoup plus nuancé.

« La solution n'est donc pas dans le capitalisme, même en tentant d'y trouver un espace le moins défavorable possible, mais en dehors de ce système ».

Certes. Mais je ne vois pas de solution qui soit « en dehors de ce système ». Parce que l’on vit tous dans le système et que l’on n’est pas à la veille d’une révolution, je n’ai pas de scrupule à rechercher des solutions dans ce système. Solution avec tous les guillemets et toutes les pincettes que l’on veut. Mais, ici et maintenant, dans ce système, tout n’est pas équivalent, tout ne se vaut pas, que ce soit dans le boulot et les modes de vie au sens large et les salariés d’aujourd’hui (et cela depuis quelques décennies !) ont d’autres choses à perdre que leurs chaînes. Et là il ne s’agit pas de la culture du travail du fraiseur des 30 glorieuses mais très basiquement de la capacité de ramener un salaire contre un boulot.
Et aussi parce que pour plein de gens, un salaire contre un boulot c’est pas pareil qu’une allocation. La culture du travail a évolué avec l’évolution de son organisation et de la société en général, mais la norme sociale qui se construit autour est toujours bien présente (renforcée par la propagande libérale contre les feignants de chômeurs et autres parasites sociaux).

N'étant pas membre d'un parti politique à la recherche de soutiens ou d'électeurs, je n’ai rien à proposer à personne.
Par contre, ce qui me semble essentiel c’est que les gens se battent, puissent garder cette capacité à se regarder dans la glace, appelons ça dignité, et aussi le sentiment du collectif, de la solidarité, du refus de la fatalité.
Alors, entre prendre la porte (avec même pas un an de salaire comme indemnité) et tenter autre chose, j’ai plutôt tendance à privilégier ceux qui veulent tenter une aventure collective de ce type là. Je veux parler de ce que j’en sais des expériences argentines où, semble-t-il, les travailleurs qui les ont mené se sont affrontés à toutes les forces politiques établies, aux différents pouvoirs institutionnels, n’ont reçu le soutien d’aucun syndicat et se sont démerdés comme des grands (avec seulement l’aide de voisins, de la famille et de certains réseaux militants).

Après, chacun fait sa propre expérience et en tire des conclusions. Et si certains font une expérience positive de l’égalité et de la fin des rapports hiérarchiques de commandement, tant mieux pour eux !

Si c’est les syndicats qui mènent la barque, du moment que les travailleurs l’acceptent, ça ne me gène pas plus que ça. Je trouverais ça dommage. Mais s’ils refusent la mainmise syndicale et veulent se mêler de tout, cela devient plus intéressant. C’est tout.
Sur les récupérations d’entreprises, il s’agit ni de nourrir des illusions là-dessus ni d’en répandre autour de soi. Simplement, à partir du moment où des gens veulent se battre pour conserver des emplois, faire connaître ce qui se passe dans des situations similaires qui semblent fonctionner à peu près me semble juste.

Après je suis d’accord sur 2 ou 3 trucs que dit Antigone.
L’autogestion des multinationales du CAC40 : ont voit pas bien. Mais elles ne sont pas non plus sur le point de fermer !
Dans les faits, il ne peut s’agir que de PME, où les syndicats sont assez peu présents (et le plus souvent grâce au fait qu’il y a un CE), avec peu de militants. Et dans les boîtes de moins de 50 personnes, il n’y a généralement pas de syndicat du tout.


Je ne crois pas que cela sépare l’autonomie de l’anarchisme mais plutôt deux conceptions de la politique : les partisans du tout ou rien (c’est-à-dire du rien) et ceux qui veulent tout mais aussi quelque chose plutôt que rien.

Dire aujourd’hui comme hier qu’il n’y a rien d’autre à faire qu’à abattre le système (en finir avec la gestion, la valeur et la marchandise et j’en passe) revient à dire qu’il n’y a rien à faire. Et donc à accepter ce système qui n’est basé sur aucune sorte d'adhésion active, sur rien d’autre que son acceptation passive, sur l’instauration de l’apathie sociale (Castoriadis) et le sentiment d’impuissance.
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Re: Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation

Messagede berneri » 11 Aoû 2009, 21:54

Je recense 2 lignes directrices :
1) interdiction des licenciements, faut-il être présent dans le cadre de ce type de mobilisation?
Sauf erreur de ma part, à peu près tout le monde sauf moi semble souligner le fait qu'il convient de rester à l'écart de ce type de mobilisation car la revendication est illusoire et conduit à une impasse( ce que je partage par ailleurs).

Je nuance ma proposition en disant que pour moi ne pas se tenir à l'écart permet d'amener les revendications libertaires au sein de ces mobilisations, ce qui peu aussi paraître illusoire et est très dépendant de la nature de la mobilisation sur ce sujet( sociale, syndicale, associative, partis, multiple,...) ce qui peut entrainer tantôt un enclin plutôt favorable à y être de manière critique ( multiple, sociale, syndicale), tantôt un enclin à se tenir très à distance ( partis , associations type attac, club de pensées, ...).

2) campagne spécifique sur le projet communiste libertaire , élaboration d'un contenu
ce point n'a pas fait l'objet d'une contre-critique , et a été relevé plusieurs fois positivement
l'élaboration d'un contenu revendicatif en adéquation avec les réalités d'aujourd'hui et non incantatoire.

Tout le monde a contribué à mettre là où il le semblait nécessaire des garde-fous sur un type d'illusion ou un autre, ce qui dessine un contour encore en pointillé.

plutôt pas mal en somme jusqu'ici , on continue !
berneri
 

Re: Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation

Messagede Pïérô » 11 Aoû 2009, 22:34

Je me retrouve dans ce que tu dis, et comme dans ce que dit leo aussi, constate au passage la qualité de ce fil et l'enrichissement que l'on peut en tirer d'une part et l'intérêt lié à la possibilité de créer de la dynamique commune d'autre part. Je pense qu'il ne faut pas être absent des luttes et qu'il faut aussi y apporter nos contenu, et qu'il y a ici des éléments intéressants que l'on doit s'approprier et développer, en dynamique unifiante et fédérante, pour les porter ensuite sur le terrain aux coté de ceux et celles qui bougent. L'intérêt là c'est de sortir du seul cadre de lutte revendicative qui montre ses limites et de bouffer de l'espace au capitalisme en avançant dans la construction du communisme libertaire, en portant une dynamique autogestionnaire et expropriatrice, et donc révolutionnaire; parce que les revendications en soi, comme le syndicalisme ne le sont pas en elles mêmes, c'est surtout comme disait Pouget de la gymnastique révolutionnaire. Et juste parce que çà me titille, mais je pense qu'Antigone n'est pas plus dépositaire de "l'autonomie" que je le suis de "l'anarchisme", et qu'il y a une sorte d'opposition entretenue qui me paraît déconnante si l'on parle d'autonomie ouvrière car ce sont bien les anarchistes révolutionnaires qui ont aussi porté celà bien avant la "marque déposée", et au sein de la première internationale déjà, et l'ont ensuite affirmé contre ce qui allait créer le courant marxiste d'ailleurs. "L'émancipation des travailleurs sera l'oeuvre des travailleurs eux même", c'est à l'époque la première affirmation de cette autonomie ouvrière. En Argentine la classe ouvrière n'a pas attendu la venue du "grand soir" en priant ou en faisant la danse de la pluie, elle a pris et fait tourner les usines dans un cadre plutôt autogestionnaire, et il me semble qu'il n'y a pas eu vraiment d'encadrement politique constitué de traitres et de menteurs pour quelle le fasse d'elle même. La question des alternatives en actes se pose à mon sens d'avantage comme celà plutôt que le fait de se construire une yourte au milieu d'un champ et bouffer les champignons. Et évidemment il me semble que tout le monde est d'accord ici pour dire que c'est en dynamique révolutionnaire et pas en finalité et en intègration au système capitaliste que l'on doit penser et pratiquer la mise en oeuvre de ce que l'on appelle la socialisation des moyens de production. Et dans la mesure ou les services publics sont de plus en plus menacés et réduits, il serait bon aussi que l'on puisse réfléchir à la socialisation des services publics, là où l'extrème gauche nous parle encore de nationalisation. Mais comment çà pourrait marcher cette bestiole justement dans un cadre de gratuité, cadre que nous revendiquons aussi...?
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Re: Licenciements, délocalisations/ socialisation, expropriation

Messagede Antigone » 12 Aoû 2009, 16:20

leo a écrit:Je ne crois pas que cela sépare l’autonomie de l’anarchisme mais plutôt deux conceptions de la politique : les partisans du tout ou rien (c’est-à-dire du rien) et ceux qui veulent tout mais aussi quelque chose plutôt que rien.


Ce qu'il me parait important d'affirmer, c'est un projet révolutionnaire.
Et pour moi, peu importe que ce soit "tout ou rien" du moment que le tout devenienne de plus en plus crédible et envisageable. Pour avancer dans ce sens, des expériences de lutte seront indispensables.

Je suis anti-gestionnaire, anti-syndicaliste, ce qui revient au même puisque les syndicats ont pour fonction principale d'encadrer le travail et gérer notre exploitation. Toutefois si un mouvement de fond de nature autogestionnaire voyait le jour, j'en serais partie prenante, mais sans illusion tant qu'on en restera là, parce que exproprier des patrons et abolir la propriété privée ne suffira pas pour nous faire sortir du capitalisme. Ni même le principe d'un salariat "équitable" parce que cela supposerait l'existence d'employeurs et d'employés, une division sociale entre dirigeants et dirigés et un système hiérarchique, et que cela irait à l'encontre d'un objectif qui serait de rendre le pouvoir inutile.

Ce qui ne serait pas "rien" en revanche, serait que ces luttes favorisent les actes de solidarité spontanée, d'entraide et de désintéressement par delà les entreprises, et qu'ils se répandent dans la société. Cela démontrerait qu'une société nouvelle est possible, débarrassée de cette dictature de la valeur qui nous oblige à monnayer notre travail et tout ce dont nous avons besoin dans notre vie. Cela aurait un tout autre prix que le "quelque chose" qui ne fera que se dévaluer jusqu'à ne plus rien valoir du tout, jusqu'à ce qu'on en perde le souvenir.
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