Oh, Jules Vignes, qu’ont-ils fait du journal « Libération » ?
. . . . . . . . . .
En effet, à St Genis-Laval le 1er juillet 1927, c’est Jules Vignes qui a édité le premier journal « Libération ». C’était une gazette libertaire, dont le titre a été repris plusieurs fois. Journal clandestin pendant la résistance, puis quotidien du 21 août 1944 à 1962, le projet d’un « Libération » qui donne la parole au peuple a vite tourné court en 1973 avec Serge July, pour devenir aujourd’hui le journal de Rothschild et du capitalisme acoquiné au PS. Quelle dégringolade !
Du « Libération » libertaire de St Genis-Laval...
Jules Vignes publie en 1927 à St Genis-Laval, près d’Oullins, dans la banlieue sud de Lyon, le premier journal « Libération » pour faire connaître les idées libertaires et pour informer les militants plus largement. C’est ainsi que, dès cette époque, il consacre une rubrique spéciale au féminisme sous la plume d’Adèle Bernard-Guillot. Dans le premier numéro de juillet 1927 « Libération » se propose « de faire place à toutes les tendances anarchistes : philosophie, syndicalisme, féminisme, malthusianisme, littérature... au sein de cet organe d’éducation libertaire ». Et c’est sans se prendre la tête que dans ce « Libération » on parle aussi des principes éthiques du mouvement révolutionnaire, de littérature antimilitariste, des méfaits de l’alcool tout autant que de l’opium, de l’alliance entre l’Église et l’État, de la première conférence de l’anarchiste Sébastien Faure à Lyon, tout en dressant un tableau piquant du phallocratisme ouvrier.
Dans le numéro 3, édité le 1er décembre 1927, dont on voit en haut la manchette, après le congrès de l’Union Anarchiste Communiste (Paris, 30 octobre/1er novembre 1927) qui donne naissance à deux organisations distinctes « l’Union Anarchiste Communiste Révolutionnaire » (UACR) majoritaire, et « L’Association des Fédéralistes Anarchistes » (AFA) regroupée autour de Sébastien Faure, la première page appelle à l’unité et s’oppose à la tendance centraliste de l’UACR [1]. Dans un autre numéro de 1928, on traite d’anti-électoralisme et de « la guerre hors la loi »... Ce « Libération » fait suite à la publication de « La Feuille » depuis 1917 à Lyon, puis à St Genis-Laval. Jules Vignes publiait aussi depuis cette date, avec une équipe, le journal « Liberoso » en ido, un esperanto simplifié, ce qui veut dire Libération, dont certains numéros sont sortis à Auxerre.
Jules Vignes né le 13 avril 1884 à Toulouse, s’installe d’abord à Moulins où il fabrique des galoches et fait différents métiers : garçon boucher, manoeuvre, ouvrier-maçon... En mai 1906, il est condamné pour avoir placardé des affiches anarchistes. En 1909, il est le premier secrétaire de l’Union départementale des syndicats ouvriers de l’Allier, mandat qu’il ne garde qu’un an. C’est à ce moment-là qu’il crée, avec Louis Dubost, le journal anarchiste « La Torche », avec les moyens du bord : « d’abord polycopié sur gélatine avant d’être imprimé avec un tri de caractères usagés d’imprimerie achetés au prix du plomb, la brosse et le taquoir suppléant l’absence de rotative. Par la suite Vignes acquit une pédale pour tirer « La Torche », car on n’arrête pas le progrès... » (Léo Campion- Culture & Liberté). Dubost a continué de collaborer sous la signature Picrate à « La Feuille » de Vignes, après qu’il se soit installé sur Lyon.
Demeurant à St Genis-Laval, type épatant, intègre, serviable, Jules Vignes menait campagne contre l’alcoolisme, et pour la langue planétaire ido. Individualiste, libertaire, il était incisif pour le syndicalisme. Il était ouvert et apprécié de tout le mouvement lyonnais. Comme il était tolérant, certains, de différentes tendances, venaient passer des nuits entières chez lui pour tirer des tracts avec son appareil à pédale. En 1939, lorsque les militants de la CGT-SR craignent pour leur bibliothèque, c’est chez Vignes qu’ils la cachent. « Libération » publiait aussi différentes brochures, par exemple de Célestin Freinet, ainsi que des revues de presse de divers pays de par le monde.
« Libération » n°2 du 1er août 1936 « Libération » sera publié à nouveau [2] en 1936, moment où Jules Vignes soutient la révolution espagnole et, début 1939, il accueille chez lui, à St Genis-Laval, plusieurs libertaires espagnols en exil. Il apporte également son aide au réseau de résistance de Francisco Ponzan Vidal. En 1945, il republie « La Feuille », suivi par « Le Vieux travailleur » (1951-57), et "Le Travailleur libertaire" (1957-58). Jules Vignes est mort à Lyon le 28 mars 1970.
...la suite ici : http://rebellyon.info/Oh-Jules-Vignes-q ... it-du.html