3e Partie 1902-1914LA CRISE DE LA CGT1902: LE TOURNANT
Avec le passage à 1900, le XIXe siècle achève tout juste sa mutation industrielle, le XXe n'est pas encore annoncé.
En l'espace de 30 ans, la composition de la classe ouvrière a considérablement évolué. Les emplois de la grande industrie ont augmenté au détriment des emplois qualifiés de la petite entreprise.
De 1899 à 1902, Alexandre Millerand avait participé au gouvernement Waldeck-Rousseau en tant que ministre du Commerce, de l'Industrie, des Postes et Télégraphes. Il avait fait adopter un certain nombre de mesures d'encadrement juridiques (inspection du travail, retraites) et aménageant la loi de 1884. Ses décrets (qui portaient son nom) garantissaient un temps de repos et raccourcissaient graduellement la durée du travail. Il était devenu le premier socialiste à accéder au pouvoir et la classe dirigeante avait trouvé en sa personne l'allié idéal dans son entreprise de séduire la classe ouvrière et de la rallier à sa cause.
Les conflits sociaux qui, pendant les années de crise avait été constants et de plus en plus organisés, commençaient à vouloir se manifester sous la forme de mobilisations fortes et coordonnées. Jusqu'en 1910, on dénombrera plus d'un millier de grêves par an.
L'exploitation minière pèsait désormais dans l'économie du pays et allait y occuper une place stratégique alors même que la croissance commençait à retrouver un bon niveau. Comme signe de cette reprise, le patronat se permettait d'opérer plus de renvois massifs ("fortes têtes", vieux, mauvais ouvriers, militants) alors qu'en période de crise, son paternalisme l'amenait à étaler ses débauchages.
La mise en convergence de toutes ces tendances allait finir par trouver leur aboutissement.
A l'automne 1902, la grêve générale éclate dans les bassins miniers.
Elle touche plus de 70 000 ouvriers, ce qui en fait la mobilisation la plus importante en France à cette époque. Elle a été préparée pendant plus d'un an par la fédération des mineurs (syndicat réformiste). Si Le mot d'ordre central est les "quatre 8": 8 heures de travail, 8 heures de repos, 8 heures de sommeil et 8 francs par jour, c'est la menace d'une diminution des salaires qui provoque la colère.
Mais les pouvoirs publics ne seront pas pris de cours. Préfets et militaires, eux aussi, ont eu le temps de mettre au point leur riposte: déploiement de gendarmerie dans toutes les communes minières, barrages pour endiguer la propagation du mouvement, protection des "jaunes". Le gouvernement Emile Combes (un radical que soutiennent les réformistes) aura beau se montrer conciliant, les compagnies des Houillières, qui avaient pris soin de constituer des stocks, feront trainer les négociations pour ne céder que sur des avantages secondaires. Finalement, cette grêve purement revendicative qui durera 6 semaines se solde par un échec.
En considérant le bilan social de l'action de Millerand au gouvernement, l'échec de la grêve des mineurs, venant après celle des cheminots quatre ans plus tôt, donnera des arguments aux réformistes pour plaider en faveur de compromis. Effectivement, si l'objectif était de montrer, pas seulement aux mineurs mais à l'ensemble de la classe ouvrière, qu'ils obtiendront plus par la voie électorale parlementaire et en trouvant des appuis dans l'Etat, que par la grêve générale, c'était gagné.
On avait laissé les guesdistes en pleine déconfiture en 1898. Mais l'expérience gouvernementale de Millerand leur offre l'occasion de revenir sur la scène politique en endossant un rôle d'opposants révolutionnaires. En dénonçant cette "compromission bourgeoise", ils trouvent le moyen de redorer leur blason et reprendre du poil de la bête.
En 1902, alors que les réformistes qui soutiennent Millerand se regroupent avec le renfort des allemanistes dans le Parti socialiste français (PSF) dirigé depuis l'Assemblée Nationale par Jean Jaurès, en réponse, les partisans de Jules Guesde rejoints par les blanquistes créent le Parti socialiste de France (PSdF).
Cela n'empêche pas tout ce beau monde de se retrouver à Montpellier au congrès de la CGT que dirigent (encore et toujours) les anarchistes.
Le congrès de 1902 passe pour être un congrès d'unité qui permet au syndicat d'élargir son assise et compter plus de 100 000 adhérents. On peut considérer qu'il s'agit du véritable acte de naissance de la CGT. Elle va constituer un pôle d'attraction pour beaucoup de syndicats jusqu'àlors rebutés par l'affiliation inter-professionnelle. Cela va encourager des minorités, comme celle qui se dégagera de la vieille fédération des mineurs, à venir la rejoindre.
Mais c'est aussi un congrès qui réorganise en profondeur ses structures s'adaptant en cela à la concentration capitaliste. Ainsi les fédérations de métiers déjà constituées deviennent des fédérations d'industries dont le poids va être de plus en plus important et qui va contribuer à verticaliser le syndicat. En revanche Les Bourses du Travail, à travers lesquelles avait été drainée l'énergie syndicale, sont transformées en Unions départementales qui, même si elles conservent entre elles une relative autonomie, vont perdre petit à petit de leur influence.
En 1904, la revendication de la journée de 8 heures portée par les réformistes est adoptée. L'amélioration de la condition ouvrière prend place dans la stratégie syndicaliste revolutionnaire et sa tâche d'émancipation des travailleurs telle qu'elle est reprise par ses dirigeants Victor Griffuelhes (secrétaire général, ancien blanquiste), Emile Pouget (secrétaire adjoint, anarchiste) et Georges Yvetot (secrétaire de la Fédération des Bourses, anarchiste).
Ce dernier, successeur de Pelloutier, antimilitariste, incitera les soldats à la désobeissance et créera "le sou du soldat" servant à maintenir un lien entre le jeune conscrit à son syndicat.
Côté politique, l'heure est aussi à la concentration et à l'unité.
Les deux partis socialistes (réformiste et guesdiste) finissent par fusionner sous l'égide de la IIe Internationale pour donner naissance en 1905 à la Section Française de l'Internationale Ouvrière (SFIO). C'est un parti sans beaucoup de moyens tant humains (seulement 30 000 adhérents serait-on tenté de dire) que financiers puisque ne bénéficiant pas de l'appui d'une organisation syndicale. Toutefois, l'unité est de façade. Ce sont les guesdistes qui l'ont imposée sur des positions radicales, mais ce sont les réformistes bientôt rejetés dans l'opposition par Clémenceau qui en prennent la direction. Le contentieux qui en découle ne demande qu'à s'exprimer à la première occasion.
Au sein de la CGT, si l'on en juge par ses publications de l'époque, c'est l'âge d'or du syndicalisme révolutionnaire. Mais là aussi, il s'agit d'une réalité trompeuse. Elle repose sur un jeu complexe d'alliances et de compromis qui ne tarde pas à éclater au grand jour lors du congrès d'Amiens.
LE CONGRES D'AMIENS
Le 13 octobre 1906, un long débat s'engage sur les rapports entre partis et syndicats. Après que les guesdistes soient revenus à la charge et que la résolution de Victor Renard dite "du textile" ait été repousée, Griffuelhes lit l'ordre du jour suivant (co-écrit avec Pouget et Delesalle):
Le Congrès confédéral d’Amiens confirme l’article 2, constitutif de la CGT.
La CGT groupe, en dehors de toute école politique, tous les travailleurs conscients de la lutte à mener pour la disparition du salariat et du patronat… :
Le Congrès considère que cette déclaration est une reconnaissance de la lutte de classe qui oppose, sur le terrain économique, les travailleurs en révolte contre toutes les formes d’exploitation et d’oppression, tant matérielles que morales, mises en oeuvre par la classe capitaliste contre la classe ouvrière ;
Le Congrès précise, par les points suivants, cette affirmation théorique :
Dans l’oeuvre revendicatrice quotidienne, le syndicalisme poursuit la coordination des efforts ouvriers, l’accroissement du mieux-être des travailleurs par la réalisation d’améliorations immédiates, telles que la diminution des heures de travail,
l’augmentation des salaires, etc. ;
Mais cette besogne n’est qu’un côté de l’oeuvre du syndicalisme ; il prépare l’émancipation intégrale, qui ne peut se réaliser que par l’expropriation capitaliste ;
il préconise comme moyen d’action la grève générale et il considère que le syndicat, aujourd’hui groupement de résistance, sera dans l’avenir le groupement de production et de répartition, base de réorganisation sociale ;
Le Congrès déclare que cette double besogne, quotidienne et d’avenir, découle de la situation des salariés qui pèse sur la classe ouvrière et qui fait de tous les travailleurs, quelles que soient leurs opinions ou leurs tendances politiques ou philosophiques, un devoir d’appartenir au groupement essentiel qu’est le syndicat ;
Comme conséquence, en ce qui concerne les individus, le congrès affirme l’entière liberté pour le syndiqué, de participer, en dehors du groupement corporatif, à telles formes de lutte correspondant à sa conception philosophique ou politique, se bornant à lui demander, en réciprocité, de ne pas introduire dans le syndicat les opinions qu’il professe au dehors ;
En ce qui concerne les organisations, le Congrès décide qu’afin que le syndicalisme atteigne son maximum d’effet, l’action économique doit s’exercer directement contre le patronat, les organisations confédérées n'ayant pas, en tant que groupements syndicaux, à se préoccuper des partis et des sectes qui, en dehors et à côté, peuvent poursuivre en toute liberté, la transformation sociale.
La motion est votée à une écrasante majorité (en fait, une quarantaine de délégués).
Mais cette majorité est illusoire. Elle est le résultat d'une alliance conjoncturelle et contre-nature des révolutionnaires et des réformistes pour écarter les guesdistes. Les uns y trouvent un intéret dans le rapport de forces qu'ils veulent continuer à établir à la CGT, les autres pour celui qu'ils ont créé à la SFIO et qui met en avant la collaboration avec les institutions étatiques.
Majorité écrasante, certes, mais si peu démocratique doit-on ajouter, puisque les délégués ont été désignés par cooptation, et que la représentation des syndicats s'est effectuée sans aucun souci de proportionnalité, les petits ayant autant de poids que les gros.
Il s'agit surtout d'un recul qui reflète la position défensive prise par le syndicat depuis 1902. L'hostilité ouvertement déclarée depuis les années 1880 à l'encontre du Parti Ouvrier est oubliée, et remplacée ici par une neutralité politique qui dissimule mal une fausse indépendance par laquelle on serait prêt à accorder à l'Etat ce qu'on refuserait au Parti. Pas étonnant qu'avec le temps et l'intégration des syndicats dans l'appareil d'Etat, elle soit devenue une référence.
Le congrès d'Amiens prend acte d'une évolution qui voit le syndicalisme d'opinion obligé de composer avec celui de la neutralité, et qui, au final, ira plutôt dans le sens de la dissociation entre les moyens et le but réclamée par les guesdistes... et défendue par Malatesta (même si ce qu'ils entendent par but n'a évidemment rien à voir).
La situation de la CGT à la sortie du congrès d'Amiens est paradoxale. Les anarchistes sont confortés à leurs postes de direction bien que le mouvement ouvrier, où dominent les ouvriers spécialisés des grandes industries, devienne plus réformiste, bien que les entreprises modestes et artisanales où survivait un esprit anarchisant soient en recul, et alors qu'au moment où les grêves se multiplient, s’étendent et gagnent en violence, notamment dans le midi viticole, la stratégie de l'action pour l'action semble avoir pris le pas sur toute perspective de transformation sociale.
C'est ce que le pouvoir ne va pas vouloir accepter.
LA REPRESSION
Le 10 mars 1906 à Courrières a lieu la plus grande catastrophe minière de l'époque (1100 morts). Elle révèle à l'opinion l'extrème pauvreté des populations. L'émotion est considérable. Elle soulève un mouvement de solidarité dans tout le pays.
La décision des ingénieurs envoyés par l'Etat de faire passer la préservation des installations avant les vies humaines et surtout la découverte de rescapés plusieurs jours après que les secours aient été abandonnés attiseront la révolte.
Lors des obsèques des premières victimes, le directeur de la compagnie doit fuir sous les huées de la foule. Le lendemain, la grêve est déclenchée. Elle s'étend à tous les bassins miniers, mais aussi à d'autres secteurs (industrie, postes...). Après deux mois de conflit, le patronat devra concéder des augmentations de salaires et l'instauration d'un repos hebdomadaire obligatoire.
Coté bâton, Georges Clémenceau, qui se plait à se présenter comme "le premier flic de France", ne va pas lésiner sur les moyens. Il enverra l'armée pour mettre fin au mouvement, fera arrêter Griffuelhes, mettra Paris en état de siège et s'engagera dès lors dans une spirale répressive.
Son objectif sera d'en finir avec ceux qu'il appelle "la poignée d'anarchistes anti-patriotes qui s'est emparée de la direction syndicale", mais "sans pénaliser ses militants sincèrement réformistes qui ne souscrivent en rien aux appels au sabotage". D'ailleurs, pour preuve en mai 1907, Clémenceau refusera de dissoudre la CGT contre l'avis de sa propre majorité et les injonctions de la droite qui prend peur. Il réaffirnera à l'Assemblée son "respect absolu des libertés syndicales"... mais cela ne concernera pas les centaines de fonctionnaires (P&T et instituteurs) qui seront révoqués la même année pour s'être organisés dans un syndicat.
A partir de 1908, les événements se précipitent. Le climat social se dégrade. La moindre grêve (comme à Raon l'Etape en juillet 1907) peut faire couler le sang, tourner à l'affrontement; rixes et tabassage de "renards" (briseurs de grêve) contre coups de feu des gendarmes sont monnaie courante.
L'affaire la plus célèbre concernera en 1910 Jules Durand, secrétaire des dockers du Havre, condamné à avoir la tête tranchée en place publique pour des faits (la mort d'un "renard") auxquels il était étranger. Il en deviendra fou. En 1961, l'histoire sera adpatée au théâtre par Armand Salacrou, "Boulevard Durand".
En région parisienne, les travaux de construction du Métropolitain nécessitent énormément de sable. On en extrait des carrières en bords de Seine. Les chantiers s'étalent sur 15 kms. Les ouvriers y travaillent 12 heures par jour.
Le 2 juin à Draveil, une grêve de carriers tournent mal. Les gendarmes tuent 2 grêvistes et font 9 blessés. Le 30 juillet, une manifestation reprimée à Villeneuve St-Georges se solde par 4 morts, 200 blessés et plusieurs blessés par balles dans les forces de l'ordre. Le lendemain, toute la direction de la CGT, désignée comme "responsable morale", est arrêtée (sauf Pierre Monatte qui devra se réfugier à l'étranger).
La répression policière oblige la CGT à renouveler complètement son personnel dirigeant. Le congrès de Marseille de 1908 est organisé par des remplaçants inexpérimentés, peu compétents, des socialistes mous, des indépendants effacés, pas forcément des réformistes pourris, mais certainement pas non plus des anarchistes. Leurs personnalités illustraient d'ailleurs assez bien l'état dans lequel se trouvait réellement la CGT. Une ligne directrice révolutionnaire portée à bout de bras par une direction historique, "minorité agissante", et relayée à l'échelon inférieur par une pratique le plus souvent réformiste, sans élan, sans âme.
L'infiltration policière présente de longue date à l'intérieur du syndicat jusqu'aux postes de direction aura favorisé les provocations et permis de justifier la répression. c'est ainsi que des militants honnêtes seront dénoncés comme indicateurs. Une période de désarroi et de suspicion s'ouvre marquée par la peur de la répression et le départ ou la mise en retrait de militants expérimentés désabusés ou découragés. La démoralisation sera telle que de nombreux militants ou dirigeants tels Georges Sorel, Edouard Berth (théoriciens du syndicalisme révolutionnaire) se rapprocheront de l'Action Française par rejet de la démocratie parlementaire et de la Révolution de 1789, tandis que Emile Pataud tombera dans l'antisémitisme.
En juillet 1909, le gouvvernement Clemenceau tombe. Aristide Briand, ancien anarchiste de la CGT devenu député réformiste, le remplace.
Il connait bien la maison. Il va donner le coup de grâce en manoeuvrant de l'intérieur, en utilisant ses amis pour en désorganiser l'administration, falsifier la comptabilité, et en faire reporter la responsabilité sur Griffuelhes afin d'obtenir son départ.
On verra alors monter en première ligne tout ce que le syndicat compte de seconds couteaux médiocres et sans envergure qui sauront tracer leur chemin. Après un court intérim de Louis Niel, un réformiste, c'est Léon Jouhaux, considéré à l'époque comme anarchiste, qui devient secrétaire général.
En décembre 1909, la CGT obtient le renfort des fonctionnaires (la plupart sont des enseignants formés à l'Ecole Normale) qui, pour être tolérés par le pouvoir, se font appeler "employés civils de l'Etat". Ceux-ci vont contribuer à introduire une autre culture, bien différente de celle des ouvriers d'industrie, et apporter une réflexion critique réprouvant l'antipatriotisme et le sabotage à un syndicalisme révolutionnaire dont le déclin apparaissait irrémédiable.
C'est à partir de 1910 que la motion du congrès d'Amiens commence à être appelée "Charte d'Amiens". Ce changement de vocabulaire sonne comme un aveu d'échec. A l'image d'un syndicat qui s'atrophie, la motion se fige pour être élevée à la hauteur d'un mythe.
LA CHUTE
A partir de 1911, le mouvement social reflue. L'action syndicale qui se poursuit malgré tout autour de la vie chère, des retraites, de la journée de 8 heures et de la loi de 3 ans (d'armée) ne sera qu'une longue suite d'échecs (grêve des cheminots en 1910, des chauffeurs de taxis parisiens en 1911-12).
Désormais, la SFIO dont les effectifs ont triplé depuis sa création, et qui peut toujours se reposer sur sa base électorale, parait avoir bien plus d'avenir qu'une CGT qui, en perdant plus de la moitié de ses adhérents entre 1912 et 1914 (passant de 700 000 à 300 000), parait totalement déboussolée.
Autrefois, le Parti Ouvrier courait après la CGT. En 1914, c'est la CGT qui va courir désespérément après la SFIO.
La plupart de ses dirigeants, Jouhaux en tête, seront pris au dépourvu par la déclaration de guerre et vont sombrer sans coup férir dans l'Union sacrée. Ils déviendront réformistes (s'ils ne l'étaient pas déjà) rejoignant leurs anciens ennemis guesdistes.
Léon Juouhaux (1879-1954) restera secrétaire général de la CGT jusqu'en 1947, date à laquelle il fondera Force Ouvrière.
Jean Grave (1854-1939), le fondateur de la revue Les Temps Nouveaux signera en 1916 avec Pierre Kropotkine un manifeste soutenant les gouvernements en guerre contre l'Allemagne.
Gustave Hervé (1871-1944), directeur de La Guerre Sociale, farouchement antimilitariste jusqu'en 1912, se reniera au point de changer le titre de son journal en "La Victoire", et devenir fasciste après la guerre.
Hubert Lagardelle (1874-1958), fondateur du Mouvement Socialiste et théoricien du syndicalisme révolutionnaire, se rapprochera de Mussolini et finira sa carrière à Vichy comme sous-secrétaire d'Etat au Travail.
Victor Renard (1864-1914) mouura d'un cancer deux ans après avoir essayé une dernière fois de faire voter sa motion au congrès du Havre.
Emile Pouget (1860-1931) en 1909 puis Georges Yvetot (1868-1942) en 1914 se retirèrent de toute activité militante.
Paul Delesalle (1870-1948) devint éditeur en 1907.
Alphonse Merrheim (1871-1925), de la puissante Fédération des Métaux, un temps zimmerwaldien, se détachera de la minorité pour rejoindre Jouhaux en 1918.
Itinéraire inverse pour Victor Griffuelhes (1974-1922), d'abord rallié à l'Union sacrée, qui s'en détachera pour se rapprocher des leninistes.
Georges Sorel (1847-1922) rejetera l'union sacrée avant de saluer le pouvoir léniniste avec enthousiasme.
Parmi la minorité, on en retrouva beaucoup juste après la guerre à la nouvelle CGTU, en particulier Raymond Péricat (1873-?) de la Fédération du Batiment (directement impliqué dans la fusillade de Villeneuve St-Georges) et Gaston Monmousseau (1883-1960).
Pierre Monatte (1881-1960), fondateur de la Vie Ouvrière en 1909, sera l'élément le plus emblématique de l'opposition zimmerwaldienne française. Il sera à l'origine des Comités Syndicalistes Révolutionnaires destinés à refonder la CGT après la guerre.
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La guerre marque la fin d'un siècle, la fin d'une génération aussi.
A partir du 1er Août 1914, s'ouvre une parenthèse sanglante qui ne se refermera pas avant quatre longues années.
Qu'en sera-t-il du syndicalisme révolutionnaire ? c'est ce que nous saurons dans la 4e partie.