Tchad : les forces de sécurité qui répriment les manifestants ont été formées par la France
Le Tchad, surnommé le « porte-avions » de l’armée française en Afrique, est dirigé depuis 1990 par Idriss Deby, dictateur arrivé et maintenu au pouvoir par plusieurs interventions directes et indirectes de la France. L’armée tchadienne est aujourd’hui la principale alliée de l’opération Barkhane, qui permet à l’armée française de quadriller plusieurs pays du Sahel. Les forces de sécurité tchadiennes ont été formées par la France, et elles répriment aujourd’hui férocement les grévistes et les manifestants tchadiens qui luttent pour défendre leurs droits. Pour comprendre les intérêts de l’engagement militaire français au Tchad, l’union départementale héraultaise de la CGT a invité le 27 janvier à Montpellier une membre de l’association Survie, qui se donne pour mission de lutter contre la Françafrique. Le Poing vous retranscrit son discours.
Le Tchad, une (ancienne) colonie française
Le Tchad a été considéré comme un protectorat français en 1900 et a été érigé en colonie en 1920. La domination coloniale s’est fondamentalement exercée par la force et aujourd’hui, c’est encore l’aspect militaire qui prédomine dans les relations franco-tchadiennes. Le pays est devenu indépendant en 1960 mais jusqu’en 1965, les régions du nord Borkou-Ennedi-Tibesti étaient encore administrées par des militaires français. Depuis l’indépendance, les différents gouvernements français ont soutenu tous les chefs d’État tchadiens. Le Tchad est le pays d’Afrique dans lequel il y a eu le plus d’interventions de l’armée française et contrairement à ce que l’on pourrait penser, la France n’intervient pas pour des intérêts économiques, mais pour des intérêts géostratégiques globaux, sans tenir compte de la situation interne du pays.
L’État français est prêt à tout pour défendre ses intérêts géostratégiques
L’État français a soutenu Hissène Habré, au pouvoir de 1982 à 1990, en lui fournissant des armes et en formant ses services de renseignements et ses commandants. Une commission d’enquête tchadienne estime pourtant le bilan de la répression sous son règne à quelque 40 000 morts, et il a d’ailleurs été condamné à la prison à perpétuité en 2016. La France est intervenue deux fois sous le régime de Habré, en 1983 et en 1986, avec comme objectif principal de lutter contre l’influence communiste en Afrique, dans le cadre de la guerre froide. Avec 3 500 hommes mobilisés, l’opération Manta de 1983 a été la plus grosse intervention extérieure française en Afrique depuis la guerre d’Algérie. Le but de cette opération était de contrecarrer l’influence de la Libye, proche de l’Union soviétique, dans le nord du Tchad. En 1986, ce sont 1 000 hommes qui sont mobilisés pour l’opération Epervier, avec toujours pour but de lutter contre l’influence libyenne, même si l’objectif officiel qui a été présenté par l’État français était la protection des 1500 ressortissants français présents au Tchad. Durant le conflit, les Etats-Unis ont fourni de l’aide au Tchad et Habré s’est alors détourné de la France pour tisser des relations plus étroites avec les nord-américains. En réaction, les services de renseignements français ont soutenu la rébellion d’un ancien conseiller de Habré, Idriss Déby Itni, qui s’est emparé du pouvoir en 1990.
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