«Dans le temps» j'ai commis un texte sur le mouvement anarchiste québécois à la demande de Courant alternatif. C'est par là:
http://nouvelordre.iquebec.com/anarchie ... uebec.htmlÇa a beaucoup changé depuis. En fait, du tout au tout, et pourtant, c'est du pareil au même...
Je constate aujourd'hui qu'internet a quelque peu perverti le mouvement anarchiste. Au début de ma militance libertaire (1993), il y avait plusieurs journaux anarchiste et / ou libertarisant dont quelques uns diffusés en kiosque. «Dans le temps», on mesurait le «sérieux» d'un groupe à la qualité de sa production. Si le groupe était capable de sortir régulièrement un tabloïd ou un magasine imprimé sur offset, alors s'était du sérieux. Il y avait des affiches aussi et, globalement, une volonté d'aller vers les gens. «Dans le temps», on vendait encore les journaux à la criée dans les manifs et à la sortie des métro. Et on se faisait une fierté d'être capable de couvrir Montréal au complet d'affiches.
Je regarde ça aujourd'hui et, même si j'ai le sentiment que le mouvement est «plus fort», je me rend compte que les colleurs d'affiches et les diffuseurs de journaux sont un peu les derniers des mohicans. On fait tellement vieux jeu avec notre Cause commune (qui est d'ailleurs le dernier journal imprimé professionnellement dans la belle province). Aujourd'hui, tout le monde a un blogue, un site, un forum et une liste de diffusion. Plus personne ne fait de tract. Des fois, je me demande si on ne se parle pas un petit peu entre nous...
Au Québec, l'anarchisme a la particularité d'être globalement désorganisé. En fait, le terme est peut-être un peu injuste parce qu'il y a bel et bien des groupes. Plus précisément, l'anarchisme d'ici refuse globalement l'organisation politique. Il n'y a qu'une seule organisation anarchiste: la NEFAC. Sinon, tout le reste est constitué --à deux ou trois exception près-- de petits groupes organisés autour de luttes précises ou alors de projets.
La NEFACLa seule fédération anarchiste regroupe actuellement des groupes dans trois villes et des contacts dans une demi-douzaine d'autres. Elle a récemment lancé un processus de refondation (
http://www.nefac.net/fr/node/2441) qui a commencé a attirer l'attention. On ne vendra pas la peau de l'ours avant de l'avoir tué mais il y a des chances réelles de nouvelles adhésions.
La NEFAC publie un journal, Cause commune, diffusé gratuitement à 4 000 exemplaires...
http://www.nefac.net/blog/59Avant, la fédération avait aussi une revue (
http://www.nefac.net/node/599) mais maintenant elle doit se contenter d'éditer des brochures (
http://www.nefac.net/fr/blog/1141)
Elle organise aussi des campagnes, comme par exemple autour des élections...
http://www.nefac.net/fr/node/2433 ou encore de petites actions de solidarité...
http://www.nefac.net/fr/node/2415Elle anime un site (
http://www.nefac.net/fr) et un forum de discussion (
http://anarchistblackcat.org/viewforum.php?f=47)
Les groupes de Québec et Sherbrooke publient des blogues et animent des émissions de radio
http://voixdefaits.blogspot.com/http://nefac-sherbrooke.blogspot.com/Celui de Montréal a un blogue mais pas d'émission
http://nefacmtl.blogspot.com/Comme on peut le constater, la fédération fait surtout de la diffusion mais elle tente aussi de participer aux luttes et d'animer un pôle communiste libertaire.
Les contre-institutionsÀ côté de la NEFAC (et parfois avec son soutien), un réseau de contre-institutions structurent le mouvement anarchiste québécois. Il y a la librairie l'Insoumise, le centre de doc DIRA et le centre des médias indépendants, tous dans le même édifice à Montréal. À Québec, il y a la libraire-bibliothèque La Page Noire (
http://blogpagenoire.blogspot.com/) et le café-bar l'AgitéE (
http://www.agitee.org, pas spécifiquement libertaire, mais bon...). À Sherbrooke, il y a des projets de centre de doc / bibliothèque autour du RAJ (Regroupement autonome des jeunes) (
http://labiblibertaire.blogspot.com/).
Du côté de l'édition, il y a deux petits éditeurs --pas des militants/bénévoles, de «vrais» éditeurs dont le métier est de publier et vendre des bouquins-- qui ont des liens avec l'anarchisme, il s'agit de Lux (
http://www.luxediteur.com/) et d'Écosociété (
http://www.ecosociete.org/). Il y a aussi quelques intellectuels médiatiques qui sont aussi anarchistes, les plus connus étant Normand Baillargeon et Francis Dupuis-Déri et, dans une moindre mesure, Anna Kruzinsky.
Les groupes et orga autonomesLe plus vieux groupe libertaire au Québec est le groupe «ultra-gauche» La Sociale (qui apparaît aussi parfois sous le sigle «des libertaires»). Il s'agit d'un groupe de diffusion (ils ont l'exclusivité du catalogue de Spartakus et diffusent aussi l'Insomniaque, les Nuits Rouges et ce genre de chose) qui a eu plusieurs librairies dans le passé --actuellement présent à l'Insoumise-- des presses et qui éditait des affiches.
Tous les autres groupes sont de mouture plus récente. Il y a un groupe municipaliste libertaire (pas électoraliste toutefois) à Montréal, la Pointe libertaire (
http://www.lapointelibertaire.org/). Il y a aussi un regroupement anticapitaliste au Saguenay, le CRAC (
http://cracsaguenay.blogspot.com/). Il y avait aussi à Québec un groupe anticapitaliste, Pyrahnas mais ils se sont fondus dans Guerre à a guerre (
http://www.guerrealaguerre.resist.ca/). Toujours à Québec, il y a un collectif féministe libertaire (Ainsi Squattent-elles).
Dans le chapitre nettement moins volumineux et intéressant, il y a quelques résidus groupés autour de divers groupes ultra comme «Mauvaise Herbe», «Anarkhia», «Hors-d'Oeuvre», des ultra-gauches, etc. Ils sont là, ils existent, mais ils sont à peine capable de sortir un bulletin photocopié à quelques dizaines de copies et passent l'essentiel de leur temps à chier sur les autres.
Du côté de «l'action», il y a une pléthore de groupes plutôt libertaires: Comité des sans-emploi, ARA, No one is illegal, Block the empire, etc.
Pour en savoir plus, je vous conseille de lire le chapitre sur les anarchistes, dans le livre Québec en mouvements (chez Lux). C'est un peu tendancieux (tendance autonome intello) mais plutôt complet.