Krach économique en vue ? (2e partie)

Re: Krach économique en vue ?

Messagede Antigone » 19 Déc 2009, 13:17

La Vie Financière - 19 dec 2009

Dette sociale : la mariée était pourrie

.../...
Parmi les menaces qui planent sur 2010, La Tribune a identifié le chômage, en augmentation de 25 millions de personnes depuis 2007 dans l'OCDE et la dette mondiale qui "va atteindre 50 000 milliards de dollars fin 2009". Deux menaces qui ne devraient pas surprendre les lecteurs de La Quotidienne, car cela fait des mois que nous soulignons qu'une reprise avec un tel taux de chômage n'en est certainement pas une et que l'endettement public menace les capacités d'emprunt des Etats.

A cela, il faut ajouter une nouvelle menace pour 2010 : le poids de la dette sociale.

Un petit exemple dans l'actualité. British Airways et Iberia se tournent autour depuis quelque temps, envisageant sérieusement un mariage de raison. Seulement voilà, la mariée British Airways n'est pas si en bonne forme que cela, et Iberia hésite de plus en plus à s'unir à un demi-zombie.

En cause, la dette sociale de British Airways, qui s'envole, comme nous l'apprend Reuters : "British Airways a annoncé lundi une multiplication par plus de deux de ses engagements retraite, à 3,7 milliards de livres (4,1 milliards d'euros), un niveau supérieur aux attentes des analystes". Cette fameuse dette – l'argent qu'une société doit à ses employés présents ou passés comme la retraite – n'est pas prise en compte dans les bilans "officiels" des entreprises et pourtant elle plombe sérieusement leurs comptes.

Le poids de la dette sociale est loin d'être anecdotique. De nombreuses entreprises sont engagées pour des milliards dans des fonds de pensions, comme Calpers. Cet emblématique fonds de pension gère les retraites d'une bonne partie des employés de General Motors mais aussi d'1,6 million de fonctionnaires californiens.

Les entreprises ne sont pas les seules à être plombées par la dette sociale, les Etats n'y échappent pas non plus. Ce montant, du "hors bilan", fait exploser l'endettement public, comme l'expliquait Simone Wapler dans un précédent MoneyWeek : "La France partage avec les Etats-Unis le statut peu enviable de pays au gouvernement le plus endetté : plus de 500% de la production annuelle de richesse mondiale, si l'on incorpore la dette sociale des retraites. Oui, vous avez bien lu : cinq années de production. Juste derrière nous, se trouvent les Etats-Unis. Le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Italie n'atteignent qu'un niveau de 400%".

Alors, 2010, année de l'explosion de la dette sociale ?
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Re: Krach économique en vue ? (2e partie)

Messagede sebiseb » 22 Déc 2009, 21:43

La dette sociale pourrait largement être épongée par les excédents de la spéculation bourso-financière.

Le problème c'est que les analystes qui font le constat d'un côté, ne le mettent jamais en parallèle avec l'argent planqué dans les paradis fiscaux, les hypers profits des entreprises, la détaxation de certains hauts voir très hauts revenues..

Aucune démonstration ne m'a jamais convaincu que la dette dépassait vraiment la capacité de remboursement. Par contre, ce dont je suis sûre, c'est l'absence de volonté des gouvernants de par le monde de vouloir équilibrer les comptes sociaux en récupérant l'argent indu de leurs amis les plus riches !
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Re: Krach économique en vue ? (2e partie)

Messagede leo » 28 Déc 2009, 16:59

Les Etats s'endettent, mais la crise financière "privée" (dite des subprimes des prêts immobiliers) n'est pas terminée !


Subprime : la deuxième vague arrive

Paul Jorion avait prédit la crise et son ancrage dans le crédit immobilier, il récidive ici avec des prévisions inquiétantes mais fondées sur des statistiques bancaires. La seule question maintenant est : cette fois-ci, que vont faire les états? (Cet article est un article presslib*)



Ceux qui avaient prévu la crise étaient peu nombreux. Ceux qui annonçaient qu’elle aurait son origine dans l’immobilier résidentiel américain étaient encore moins nombreux. Le sort a voulu que je fasse partie de ce club très sélect et je n’ai pas arrêté de répéter depuis, non seulement que ce lieu d’origine n’était pas accidentel mais aussi que l’économie américaine ne pourrait pas redémarrer tant que son immobilier résidentiel ne recouvrerait pas la santé.

Dans « L’implosion. La finance contre l’économie : ce que révèle et annonce la « crise des subprimes » » (Fayard 2008), je parle des crédits hypothécaires « Pay Option ARM ». J’explique que ces prêts immobiliers qui s’adressent à des emprunteurs relativement fortunés embarqués dans un processus de « cavalerie », finiraient par exploser à leur tour, déclenchant une nouvelle crise au coût à peu près égal à celle des subprimes. Ces prêts doivent leur nature explosive au fait que les mensualités ne couvrent dans environ 80 % des cas qu’une somme inférieure aux intérêts dus, et que la différence entre ce qui est dû et ce qui est effectivement versé par l’emprunteur est alors ajoutée au montant restant à rembourser, faisant croître celui-ci inexorablement. Quand la somme due atteint 115 % du prêt initialement contracté, l’emprunteur est immolé : son crédit est instantanément converti en un prêt avec amortissement mensuel, ce qui représente de son point de vue un doublement, voire un triplement, de ses mensualités. J’écrivais dans « L’implosion » : « Avec la poursuite de la chute de l’immobilier, le seuil fatidique des 115 % sera franchi en 2008 ou en 2009 » (page 34).

Manque de pot, on est en 2009. Voici un diagramme qui met cela en images (© wwww.agorafinancial.com à partir de données fournies par le Crédit Suisse).

Le premier diagramme montre les volumes très comparables de la crise en cours des « Pay Option ARM » et de celle des « subprimes ».

http://www.pauljorion.com/blog/wp-conte ... M-wave.jpg

Dans le second diagramme, la ligne bleu foncé montre l’échéancier initialement prévu, la ligne jaune, ce qui s’est réellement passé en raison de l’augmentation inexorable de la somme à rembourser dans la plupart des cas.



http://www.pauljorion.com/blog/wp-conte ... M-wave.jpg

Le résultat ?
27,9 % des prêts « Pay Option ARM » sont désormais « en difficulté », soit que les mensualités n’ont pas été réglées depuis plus de trois mois, soit que le processus de saisie a déjà été engagé. 27,9 % c’est énorme : entre un quart et un tiers des emprunteurs. Evidemment, il s’agit de ménages très particuliers : ceux qui étaient disposés à jouer à la roulette russe au plus fort du boom immobilier des années 2002-2006. Cela ne couvre pas tout le monde : juste un secteur de l’immobilier américain d’un volume du même ordre que le secteur subprime de triste mémoire.

Au sommet de la pyramide de l’immobilier résidentiel américain, il reste encore, le secteur « prime », celui des gens sans problèmes. C’est du moins la manière dont on les caractérisait jusqu’ici. Le niveau de défaut y atteint désormais 3,6 %, un chiffre qui a doublé en un an. Quant au programme d’aide aux emprunteurs en difficulté, seul un candidat sur six a pu y avoir accès jusqu’ici. Mais qu’importe : de toute manière six mois après avoir obtenu des conditions plus favorables sur leur crédit, plus de la moitié des emprunteurs font à nouveau défaut.


(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez.


Retrouvez les autres articles de Paul Jorion ici
[ http://www.pauljorion.com/blog/ ]

Lundi 28 Décembre 2009
Paul Jorion - Economiste



Source :
http://www.marianne2.fr/Subprime-la-deu ... 83255.html
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Re: Krach économique en vue ? (2e partie)

Messagede sebiseb » 28 Déc 2009, 19:49

Et, les plus modestes, voir les plus pauvres devront encore essuyés les plâtres tout en permettant aux plus riches qui auront plongé le monde encore un peu au fond du gouffre de se gaver de caviar :gerbe:
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Re: Krach économique en vue ? (2e partie)

Messagede Antigone » 23 Jan 2010, 16:57

La Tribune - 20 jan 2010

La Chine tente de limiter le crédit bancaire

REUTERS - Les autorités bancaires chinoises ont demandé à plusieurs grands établissements du pays de réduire leurs prêts pour le reste du mois de janvier pour juguler la récente explosion du crédit, indiquent des médias officiels et des sources bancaires.

La nouvelle a pesé sur les cours de plusieurs banques cotées à Shanghai et Hong Kong et a affecté les marchés boursiers d'Asie-Océanie. En Europe, les Bourses accusent aussi le coup en matinée.

La banque centrale chinoise a également demandé à plusieurs banques, dont Citic Bank et Everbright Bank, de relever leur réserve obligatoire d'un demi-point de pourcentage, ont indiqué à Reuters des sources bancaires.
Pékin s'efforce de garder le contrôle de la croissance du crédit bancaire, qui s'est envolé durant les premières semaines de l'année. La semaine dernière, la banque centrale avait déjà demandé aux établissements bancaires de relever leurs réserves obligatoires, pour la première fois depuis juin 2008.

Selon des sources citant des données de la banque centrale, les banques chinoises auraient accordé 1.100 milliards de yuans de prêts lors des quinze premiers jours de janvier, dont 500 milliards de yuans pour les quatre plus grands établissements du pays.
En 2009, les banques chinoises ont accordé un montant record de 9.600 milliards de yuans de prêts (989 milliards d'euros). Cette tendance, couplée au plan de relance de Pékin de 4.000 milliards de yuans, a permis de relancer l'économie après l'engourdissement de la fin 2008.
Mais le gouvernement craint maintenant la surchauffe. En décembre, l'inflation s'est accélérée "de manière importante" et devrait être en moyenne de 3,0% cette année, a déclaré mercredi, lors d'un forum, Zhu Baoliang, un conseiller économique des services du gouvernement.

Une réforme évoquée

Il a ajouté que la banque centrale répondrait sans doute à ces pressions inflationnistes en relevant les taux d'intérêt au milieu de cette année.

Les chiffres de l'inflation en Chine en décembre seront publiés jeudi, jour où seront aussi diffusés ceux du PIB pour 2009. Le taux d'inflation est attendu à 1,5% en décembre en rythme annuel, selon la moyenne des économistes interrogés par Reuters, contre 0,6% en novembre.
La croissance économique devrait avoir grimpé à nouveau au-dessus de 10% au quatrième trimestre 2009 en rythme annuel, notamment en raison d'une base de comparaison faible, le quatrième trimestre 2008 n'ayant enregistré qu'une hausse de 6,8% du PIB.
"En gros, la banque centrale est en train de dire 'si vous continuez à prêter à ce rythme, nous allons être sévères'", a déclaré une des sources bancaires interrogées.

Le China Securities Journal, publication officielle, cite mercredi des sources bancaires anonymes selon lesquelles certains établissements se sont vu interdire d'accorder le moindre prêt pour le restant du mois.
Toutefois, une source au sein de la Commission chinoise de régulation bancaire, qui s'exprimait sous le sceau de l'anonymat, a démenti cette information et déclaré qu'aucun ordre n'avait été donné pour stopper complètement les prêts jusqu'à la fin janvier.
Cette source a ajouté que la commission estimait de longue date que certaines banques ne répondant pas aux critères réglementaires devaient cesser d'accorder des prêts.

Un haut responsable de la China Merchants Bank et un autre de l'Agricultural Bank of China ont indiqué à Reuters que leurs banques cesseraient d'approuver l'octroi de prêts jusqu'à la fin janvier.
L'inquiétude liée à une limitation du crédit bancaire a fait reculer l'indice de la bourse de Shanghai de 2,7%. A Hong Kong, les actions de Bank of China et China Construction Bank ont perdu 4%.
Un autre responsable de la commission de régulation bancaire a déclaré à Reuters que la vive hausse du crédit lors des deux premières semaines de janvier entraînerait probablement un changement de politique.
L'instance de régulation pourrait recourir à davantage de mesures administratives pour infléchir la croissance du crédit, les mesures prises par la banque centrale n'ayant pas été suffisamment efficaces jusqu'ici, a-t-il ajouté.

Bulle chinoise ?

Le président de la Banque mondiale, Robert Zoellick, avait averti dès septembre de "l'émergence de nouveaux dangers" avec la croissance exceptionnelle du crédit en Asie et en particulier en Chine, et en novembre du "risque" de bulles financières dans ce pays.
Andrew Burns, directeur des tendances macroéconomiques à la Banque mondiale et principal auteur du rapport publié mercredi, réaffirme que l'institution perçoit des "signes de bulle" dans l'économie chinoise - en particulier dans le secteur de l'immobilier -, un problème dont sont conscientes, selon lui, les autorités de Pékin.

Le président de la Commission chinoise de régulation bancaire, Liu Mingkang, a de fait indiqué mercredi que Pékin allait limiter le crédit bancaire, après la hausse de 95% de son volume en 2009. La Chine avait annoncé le 12 janvier un relèvement du taux de réserves obligatoires pour les grandes banques, et du taux d'intérêt sur certains bons du Trésor.

L'idée que des bulles soit en train de se former en Chine est controversée. Certains économistes estiment que l'explosion des prix de l'immobilier dans les grandes villes en présente toutes les caractéristiques, d'autres considèrent que les signes de surchauffe de l'économie chinoise ne présagent pas l'éclatement d'une bulle.

Les pays en développement fragilisés par les coûts d'emprunt

La Banque mondiale estime également que la reprise timide de 2010 pourrait représenter un risque pour les pays en développement, menacés par des coûts d'emprunts élevés et des crédits limités. Le rapport prévoit que la croissance dans les pays en développement pourrait être ralentie de 0,2% à 0,7% sur une période de cinq à sept ans en raison de l'ajustement de l'économie aux conditions financières plus difficiles.
"Malheureusement, nous ne pouvons pas nous attendre à une reprise du jour au lendemain après cette crise profonde et douloureuse parce qu'il faudra des années pour reconstruire les économies et le marché de l'emploi", souligne l'économiste de la banque mondiale Justin

Lin.


L'Expansion - 30 nov 2009

La Chine sur le fil rouge

L'explosion du crédit fait craindre l'apparition de nouvelles bulles et une hausse des créances douteuses.
Production industrielle, ventes de détail et investissements en hausse, ralentissement de la chute des exportations : au vu des dernières statistiques, le gouvernement chinois a davantage de raisons de croire que la croissance dépassera sans problème son objectif de 8 % cette année.

Les onze mois de politiques gouvernementales intenses (grand plan de relance de l'économie par les investissements principalement à hauteur de 400 milliards d'euros sur deux ans, assouplissement de la politique monétaire, mesures fiscales de soutien par secteurs industriels) portent leurs fruits. Preuve : les investissements en capital fixe dans les zones urbaines ont bondi, sur les dix premiers mois de l'année, de 33,1 %, soit 5,9 points de pourcentage de plus que sur la même période de 2008.

La production industrielle a, elle aussi, poursuivi sa progression en octobre, atteignant 16,1% sur un an, nettement plus forte que celle d'octobre 2008 (+8,2%), mois durant lequel la crise économique mondiale avait commencé à se faire sentir en Chine. C'est qu'avec la reprise mondiale, les exportations donnent des signes de redressement, avec une chute des ventes à l'étranger moindre en octobre que le mois précédent (-13,8% en glissement annuel, après -15,2%), et un excédent de près de 24 milliards de dollars.

Quant aux ventes de détail, elles ont progressé de 16,1% en glissement annuel en octobre, une hausse supérieure à septembre dernier. Une victoire pour le gouvernement qui, depuis plusieurs années, souhaite voir augmenter la consommation des ménages pour tendre vers un rééquilibrage de l'économie.

Inquiétudes sur le secteur financier
Mais celui-ci est loin d'être atteint. Sans compter que pour pallier la chute de ses exportations qui ont fait sa richesse, la Chine est devenue dépendante des investissements officiels, insoutenables sur le long terme, mais surtout du crédit facile.

Car les inquiétudes aujourd'hui se concentrent sur le secteur financier. L'explosion du crédit fait craindre l'apparition de nouvelles bulles et une hausse des créances douteuses. Conséquence : les banques chinoises pourraient avoir besoin de lever des dizaines de milliards de yuans dans les prochaines années, estiment les analystes de BNP Paribas et Citigroup. Ces augmentations de capital leur permettraient d'être moins vulnérables à une éventuelle hausse de leurs créances douteuses et de faire face aux exigences du gouvernement chinois en matière de ratio de fonds propres. A l'heure actuelle, les banques chinoises doivent être dotées de fonds propres d'au moins 8% du montant de leurs prêts totaux.
Or les autorités, inquiètes des risques potentiels de hausse des prêts non-performants qui pourrait accompagner cette explosion du crédit, poussent les banques à porter ce ratio à 10% et à renforcer leur bilan. Onze banques cotées à Shanghai et Hong Kong pourraient vouloir récolter 326 milliards de yuans (32 milliards d'euros).
Danièle Licata
Antigone
 

Re: Krach économique en vue ? (2e partie)

Messagede Antigone » 29 Jan 2010, 13:11

La courbe de l'endettement des grands pays industrialisés ne s'infléchira pas avant 2012, et on cherche à faire croire qu'il est possible de faire passer le déficit public de la Grèce de 13 à 3% en l'espace de 2 ans ! C'est comme faire passer un éléphant à travers le cha d'une aiguille. On sait que c'est impossible, mais cela n'empêche pas les fonctionnaires de la BCE de bâtir leur stratégie sur le fait c'est réalisable. A Davos, Sarkozy a parlé de la nécessité de moraliser le capitalisme. Les banquiers étaient mort de rire. Et les journalistes, commentateurs, observateurs de rapporter leurs délires sans la moindre réserve.
Décidément, à mesure que le chaos progresse, le traitement de l'économie relève de la croyance mystique.

La Tribune - 28 jan 2010

Dette : tension sur la Grèce, pression sur le Portugal

La situation financière européenne inquiète. Les capacités de la Grèce et du Portugal de réduire leurs dettes inquiètent. L'agence de notation Standard & Poor's vient d'annoncer qu'elle ne rangeait plus le système bancaire britannique parmi les plus stables.
La capacité de la Grèce à faire face à son endettement continue d'inquiéter. Résultat : les prix des obligations grecques ont chuté et leur rendement a bondi. C'est à ce prix que la Grèce, qui a lancé une émission obligataire sur cinq ans, a pu attirer cinq fois plus de demande que le montant proposé. Elle a donc levé 8 milliards d'euros, avec un rendement de plus de 7%, selon l'agence grecque de gestion de la dette du ministère des Finances.

Et ce, sans l'aide de la Chine. En effet, le Financial Times avait affirmé, mercredi, qu'Athènes souhaiterait que la Chine achète des obligations de l'Etat grec pour une somme pouvant aller jusqu'à 25 milliards d'euros. Mais les autorités grecques ont immédiatement démenti cette rumeur.
Et également sans l'aide des champions de la zone euro. Le ministère des Finances allemand a démenti une information du Monde qui affirmait que les gouvernements de la zone euro, notamment la France et l'Allemagne, travaillaient à un mécanisme de "soutien financier" à la Grèce.

Le Premier ministre grec Georges Papandréou a dénoncé les attaques spéculatives dont est victime son pays, utilisé "comme le maillon faible de la zone euro".

Mais malgré le fait que la Grèce traverse sa pire crise depuis 30 ans, avec une dette qui devrait atteindre 113% du PIB (produit intérieur brut) pour 2009 et un déficit public 12,7% du PIB, le porte-parole du gouvernement Georges Pétalotis a souligné qu'"il y avait quelques signes positifs de la part des marchés internationaux, qui semblent de plus en plus être persuadés que le gouvernement œuvre pour regagner sa fiabilité".

Tensions sur la dette du Portugal

Les marchés sont également crispés sur le déficit du Portugal. En effet, le chiffre du déficit portugais est ressorti plus important que prévu, relançant des inquiétudes sur une contagion aux pays périphériques, comme l'Espagne ou l'Italie.

Il a atteint le niveau record en 2009 de 9,3%, nettement supérieur aux dernières prévisions de la Commission européenne et du Fonds monétaire mondial (FMI) qui l'estimaient à 8%.

Les agences de notation financières menacent de dégrader la note du pays si le gouvernement ne présente pas un plan de redressement "crédible". Pour l'instant, l'Etat s'engage, dans son budget 2010, de réduire d'un point le déficit. "Une réduction limitée cette année signifie que des coupes plus ambitieuses seront nécessaires entre 2011 et 2013, année où le gouvernement prévoit de ramener le déficit sous les 3%.Il est difficile d'envisager que le gouvernement atteigne cet objectif sans des coupes dans les dépenses ou des hausses d'impôts plus importantes que ce qui est actuellement prévu", a estimé l'agence Moody's.

Le système bancaire britannique inquiète

L'agence de notation financière Standard & Poor's vient d'annoncer qu'elle ne considérait plus le système bancaire britannique comme "l'un des plus stables et des moins risqués du monde".

Selon S&P, le secteur a vu sa réputation ternie par la crise financière, plusieurs groupes ayant eu besoin de recourir aux aides de l'Etat.
S&P rappelle avoir dégradé, fin décembre, la note du secteur bancaire britannique, et avertit pouvoir l'abaisser encore si l'économie du pays ne se redresse pas durablement.
Antigone
 

Re: Krach économique en vue ? (2e partie)

Messagede Antigone » 07 Fév 2010, 11:29

Yeti blog hébergé par Rue 89 - 06 fev 2010

Grèce, Portugal, Espagne… les métastases de la crise rongent l'Europe

« Ça va plus vite que prévu. » Tels sont les mots lâchés par Paul Jorion dans son dernier Temps qu'il fait à propos des nouvelles métastases de crise apparues en Grèce, au Portugal, en Espagne. Le mal désormais ronge dangereusement l'Europe et la zone euro.

Nous avions ici même tenté d'analyser les successives phases de l'irréversible effondrement en cours. Et en particulier la phase III sur la défaillance des puissances publiques. Nous y voilà en plein !

Un scénario totalement prévisible… et imprévu

Les signaux d'alarmes (Islande, Dubaï..) étaient-ils si marginaux ou si lointains pour que les gens de pouvoir continuent comme si de rien n'était de plastronner sur des signes de fin de crise et de reprise totalement illusoires ?

Après avoir lâché des milliards de milliards pour sauver un système financier exsangue, s'être échinées à colmater les brèches d'une économie réelle à la dérive à grands coups de plans de relance stériles, faut-il s'étonner de voir les « puissances » publiques vaciller sous le poids de leurs dettes abyssales ?

Maintenant que ces idiots ont grillé sans compter leurs principales cartes, quelles sont celles qui leur restent à tirer de leurs manches pour sortir du bourbier où ils s'enfoncent ?
Vont-ils couper les branches pourries ? Mais alors ce serait précipiter l'éclatement de la zone euro et un séisme mondial aux conséquences incalculables.

Les branches les moins atteintes (« saines » seraient un bien grand mot ! ) comme l'Allemagne ou la France vont-elles finalement voler au secours des malades ? Mais avec quoi ? Quelles poudres de perlimpinpin miraculeuses ? Quelles dettes publiques supplémentaires ?
Coincés !

Des Diafoirus grotesques dépassés par les évènements

Face à ces enchaînements catastrophiques, quel remède de cheval ? Quelle potion magique ? Depuis maintenant plus de deux ans que cette crise a éclaté, RIEN ! Aucun diagnostic un tant soit peu lucide. Aucune décision d'envergure. Aucune correction de trajectoire d'avenir.

Justes des saignées financières et sociales à la pelle, des formules ampoulées et creuses pour masquer leur impuissance, des augures hilarantes (rappelez-vous, ces fameux et ténébreux fonds souverains qui devaient sauver notre pauvre monde).

Récemment réunis à Davos, nos grotesques Diafoirus ont continué à s'agiter en toute inutilité, clamant que le capitalisme n'avait pas d'alternative, que le malade était plus imaginaire qu'il n'y paraît, que le moribond était un tout petit peu moins moribond que prévu.

Une agonie désormais irréversible

Pas besoin d'être grand clerc ni de se perdre dans leurs logorrhées d'initiés déconfits pour comprendre et éclairer ce qui va désormais advenir. Les métastases vont inexorablement poursuivre leurs œuvres de destruction, faire imploser à terme la zone euro. Et progresser sans pitié vers d'autres corps souffrants : la Grande-Bretagne et jusqu'au cœur même de l'empire : les Etats-Unis d'Amérique et leur zone dollar.

Le mal est désormais bien trop avancé pour pouvoir être enrayé. La tête (nos Diafoirus) trop déjantée pour réagir. Mais aussi trop solidement enracinée pour être amendée, corrigée, remplacée.

Nous sommes dans le cul-de-sac d'une agonie irréversible.Tout ce que nous pouvons espérer désormais, c'est que cette agonie ne se prolonge pas trop, que la bête meurt au plus vite. Les souffrances ? Nous n'y échapperons plus. Autant souhaiter les abréger dans la durée.

(.../...)




RFI - 05 fev 2010

Les bourses mondiales dans la tourmente
.
REUTERS - Les bourses européennes ont poursuivi leur chute ce vendredi 5 février 2010 dans le sillage des grandes places financières asiatiques. En cause, la forte dégradation des comptes publics de plusieurs pays de la zone euro. Le CAC 40, l’indice de la bourse de Paris a terminé en baisse de 3,40%.

La panique a gagné jeudi 4 février 2010 les grandes places financières mondiales, en effervescence à cause principalement de la dégradation de la situation économique de plusieurs pays du sud de l’Europe. Après la Grèce, soumise ces dernières semaines à de fortes pressions, c’est au tour de l’Espagne et du Portugal d’être pris dans la tourmente. Ces deux pays ont été très durement frappés par la crise économique et financière qui a plongé le monde dans la récession. Et les plans massifs de relance qu’ils ont mis en place se sont avérés désastreux pour leurs budgets.

Entrée en récession dès 2008, l'Espagne a ainsi vu ses finances publiques se dégrader à une vitesse vertigineuse. Ses comptes sont passés d'un excédent de 2,23% du PIB en 2007 à un déficit de 11,4% l'année dernière. Et sa dette a grimpé de 36.2% du PIB à 55,2% sur la même période. Et on estime qu'elle devrait même filer jusqu'à 74.3% en 2012. La situation du Portugal n'est guère plus enviable avec notamment une dette publique qui devrait dépasser dès cette année les 85% du PIB.

Risques d’insolvabilité

Dans ce contexte, les investisseurs doutent de plus en plus de la capacité de ces pays à honorer leurs dettes. Cette défiance s’est communiquée aux marchés qui ont tous dévissé. Et alors que jusqu’au milieu de la semaine, les pressions se sont exercées principalement sur la Grèce, les analystes redoutent désormais un effet de contagion aux autres pays du sud de l’Europe. Car si les faiblesses structurelles de ces économies ont longtemps été masquées par une conjoncture favorable et un crédit à des taux faibles qui a favorisé un boom immobilier, la crise a mis un terme brutal à cette configuration.

Cette situation n’est pas sans danger pour la zone euro puisque, dans la mesure où ces pays ont adhéré à une monnaie unique, ils ne peuvent aujourd’hui ni réduire les taux d'intérêt ni déprécier leur devise pour remettre de l’ordre dans leurs finances. Or en cas d’insolvabilité d’un de ces pays, c’est l’ensemble de la zone euro qui risque d’en pâtir.

L’incertitude qui pèse sur les marchés a d’ores et déjà des conséquences sur le cours de l'euro. La monnaie unique a accentué vendredi ses pertes face au dollar, tombant sous 1,36 dollar pour la première fois en huit mois et demi. Onze ans après sa création, la zone euro traverse donc sa plus grosse tempête. Et certains analystes estiment qu'une sortie de l'Union monétaire ne peut être exclue à plus long terme pour certains pays affaiblis.
Mounia Daoudi



AFP - 06 fev 2010

Banques: 16e faillite aux Etats-Unis depuis le 1er janvier

NEW YORK — Les autorités américaines ont annoncé vendredi la faillite d'une seizième banque depuis le début de l'année, la petite 1st American State Bank of Minnesota, basée à Hancok dans cet Etat frontalier du Canada.

Le fonds de garantie des dépôts bancaires, la FDIC, a chargé une autre banque de l'Etat, la Community Development Bank basée à Ogema, de reprendre tous les dépôts de l'établissement failli, et lui a permis de racheter ses actifs.

Au 31 décembre 2009 la 1st American State Bank of Minnesota disposait de 18,2 millions de dollars d'actifs et avait 16,3 millions de dollars en dépôts.

Le coût de l'opération est estimé à 3,1 millions de dollars pour la FDIC, qui a conclu un accord de partage des risques avec la Community Development Bank.

C'est la deuxième fois en une semaine qu'une banque fait faillite au Minnesota.

Deux ans et demi après les débuts de la crise financière aux Etats-Unis, la FDIC estime que le nombre de banques en difficulté financière continue de grimper, étant à 552 au 30 septembre, contre 416 trois mois auparavant. L'an dernier 140 banques américaines ont fait faillite.
Antigone
 

Re: Krach économique en vue ? (2e partie)

Messagede Antigone » 20 Fév 2010, 12:34

Le Monde - 19 fev 2010

La Grèce n'est pas la seule à "maquiller" sa dette

Maquillage de comptes ou habillage légal de bilan ? Sous le feu des critiques pour leur responsabilité dans la crise financière, les banques de Wall Street, Goldman Sachs en particulier, sont au coeur d'un nouveau scandale. Cette fois, il ne s'agit plus de "subprimes", ces crédits hypothécaires explosifs vendus à des ménages modestes, mais de produits financiers sophistiqués proposés à des Etats endettés pour enjoliver leurs comptes.

Encore une fois, la Grèce est au coeur de cette affaire. Mais le pays est, semble-t-il, loin d'être le seul à avoir eu recours à des astuces financières conseillées par des banques de New York et de Londres. Le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Italie le Portugal ont, eux aussi, "optimisé" leurs comptes avec l'aide de Goldman Sachs, JP Morgan, Barclays ou encore "feu Lehman Brothers".

Dans le cas grec, la très controversée Goldman Sachs aurait, selon la presse allemande et américaine, offert ses services à Athènes pour réduire, en 2001, ses déficits en utilisant des "swaps de devises". Un outil qui permet de se protéger des effets de changes en transformant en euros la dette initialement émise en dollars et en yens.

"Légal !", affirment les autorités grecques. Sauf que le taux de change utilisé ici aurait été exagérément favorable. Bilan de l'opération : 1 milliard d'euros de dette gommée pour le pays et 300 millions de commissions empochés par la banque.

"Ce serait une honte s'il s'avérait que les banques, qui nous ont déjà amenés au bord du précipice, ont également participé à la falsification des statistiques budgétaires de la Grèce", a réagi la chancelière allemande, Angela Merkel, mercredi 17 février.

La Grèce a-t-elle triché ? Peut-être, mais dans les faits, le savoir-faire des banques américaines a profité à de nombreux pays. "Il s'agit d'opérations naturelles, qui participent de la bonne gestion de la dette", assure un émetteur de dette souveraine en Europe. Les mécaniques sont variées. "Elles n'ont de limites que la créativité des financiers", indique un ancien haut responsable de banque.

L'Italie a fait partie des pays les plus friands de cette ingénierie financière. Le pays a notamment multiplié les opérations de titrisation de sa dette. Autrement dit, l'Etat a revendu au marché ses créances sous forme de titres financiers pour se débarrasser de sa dette. La Belgique, de son côté, a titrisé des arriérés fiscaux, se souvient un opérateur sur le marché de la dette : "C'était en 2006." Le pays a ainsi évité d'emprunter de l'argent, faute d'avoir perçu à temps les sommes dues par les contribuables.

Certains Etats ont vendu de la dette indexée "sur un peu n'importe quoi", indique un opérateur de marché. Exemple : ces emprunts grecs émis en 2000, dont le remboursement des intérêts était adossé aux profits attendus de la loterie nationale !

"Quand on est "limite'', on a forcément la tentation d'utiliser ces astuces-là pour essayer de réduire sa dette, commente René Defossez, stratège sur le marché des taux chez Natixis . Ce n'est pas très orthodoxe, mais ce n'est pas forcément contestable."

La France n'a pas été pas absente du jeu. Le pays assure n'avoir jamais eu recours aux services de Goldman Sachs. "Nous ne faisons sans doute pas d'opérations assez "funky''sur la dette française", indique-t-on au Trésor.

Mais jusqu'en 2002, le pays a utilisé des outils financiers complexes de couverture (des "swaps de taux") pour modifier les échéances de remboursements de sa créance. A première vue, grâce à ces artifices, tout le monde est gagnant. "Pour les Etats, ces opérations permettent de reporter la dette à plus tard. Et pour les banques, ce sont des promesses de marges juteuses", indique Emmanuel Fruchard, consultant en risques financiers. Les établissements empocheraient en moyenne 1 % voire plus des montants de dettes émis.

Sur ce "marché", les banques anglo-saxonnes ont été particulièrement actives et recherchées. Du fait de leur savoir-faire, mais aussi "en faisant miroiter un accès direct à des investisseurs étrangers comme des fonds de pensions", indique l'économiste Philippe Brossard, de l'agence Macrorama. Pour lui, "fignoler" de la sorte la structure des déficits publics n'est pas sans risque. Si l'Etat semble gagnant à court terme, il peut être contraint par la banque à rembourser des intérêts beaucoup plus lourds à long terme. Le New York Times raconte ainsi que le ministre grec des finances avait dénoncé, en 2005, l'opération de Goldman Sachs, se plaignant du fait que l'Etat devait rembourser de grosses sommes à la banque américaine jusqu'en... 2019. " En utilisant des outils sophistiqués, les Etats se rendent dépendants des banques, ajoute M. Brossard. Certains avaient traité avec Lehman Brothers et se sont inquiétés lorsque l'établissement a fait faillite."

Conscient du danger, Eurostat, l'institut européen de statistiques, censé valider ces opérations, a mis en 2008 le holà à certaines pratiques, en déconseillant, notamment le recours à la titrisation.

Est-ce assez ? Pour Michel Sapin, ancien ministre français des finances et secrétaire national du Parti socialiste à l'économie, "une régulation plus contraignante est absolument nécessaire sur le marché. D'autant plus qu'il s'agit ici de la signature d'un Etat".
Claire Gatinois et Marie de Vergès


Le Trésor américain semble un peu pressé de remettre la machine en route. Ce serait tout de même étonnant qu'il relève les taux directeurs avant l'été. On verra alors comment réagira le malade, une fois qu'on lui aura retirer son assistance respiratoire, après avoir été maintenu pendant plus de 18 mois dans un coma artificiel, avec un crédit quasi-gratuit.

La Tribune - 18 fev 2010

La Réserve fédérale relève son taux d'escompte

La Fed entame sa stratégie de sortie de crise, en relevant son taux d'escompte. Un relèvement de son principal taux directeur est toujours écarté.
Ben Bernanke l'avait évoqué la semaine passée, voila chose faite. La Réserve fédérale a annoncé ce jeudi après la clôture de Wall Street qu'elle allait relever son taux d'escompte (taux de refinancement à court terme auprès de l'institution). Celui-ci va ainsi passer dès vendredi de 0,5% à 0,75%. C'est la première fois que la Fed remonte un de ses taux depuis le début de la crise économique et financière.

Ce changement vise à normaliser les facilités de crédit, explique la Fed. Il ne doit cependant pas être interprété comme une modification des perspectives pour la politique monétaire, insiste la banque centrale américaine. Un moyen d'écarter un relèvement de son principal taux directeur ("Fed funds") à court terme. Ce dernier devrait ainsi rester à son plus bas niveau historique, dans une marge de fluctuation allant de 0 à 0,25%, pendant une période prolongée.

La semaine dernière, Ben Bernanke avait en effet estimé que "l'économie américaine continue d'avoir besoin du soutien de politiques monétaires très accommodantes". Cependant, "à un moment donné, la Réserve fédérale devra durcir les conditions financières", avait-t-il précisé dans un discours rédigé en vue d'une audition par une commission de la Chambre des représentants.
Antigone
 

Re: Krach économique en vue ? (2e partie)

Messagede skum » 22 Fév 2010, 02:33

« Pourquoi la crise s'aggrave : la croissance ne crée pas de la richesse mais de la pauvreté », par Gérard Briche.

Image
[ :haha: ]

Le discours officiel à propos de la crise se présente de deux manières complémentaires et apparemment contradictoires. D’une part, de plus en plus on parle de « sortie de crise », de « reprise de la croissance », avec pour preuve que les indices à la Bourse repartent de plus belle, et d’autre part on reconnaît l’absence de création d’emplois, voire une stagnation du chômage. Avec pour conséquences un optimisme mesuré, et l’appel à la patience des salariés (« la création d’emplois aura bien lieu – avec un décalage »).

Tout cela est faux, et bien malin qui fera la part de la propagande et celle de la simple ignorance du mécanisme de la crise. D’ailleurs, les dirigeants politiques et les économistes sont à la même enseigne, et les prétendus « experts » tiennent le même discours mensonger ou ignorant. Au point qu’on peut très clairement tenir pour nulle la quasi-totalité de ce qui se dit sur le sujet : inutile de chercher à « comprendre » des « explications » qui ne sont que du baratin destiné à justifier l’optimisme de rigueur quant à la « santé » de notre système économique.

La vérité, c’est que la crise, loin de s’éloigner, s’aggrave, et que les mesures de « reprise économique », loin de permettre d’en sortir, ne font que l’aiguiser. La raison en est que notre système est malade d’une maladie sans remède, parce qu’il est fondé sur la croissance de la production, et que la croissance ne produit pas de richesse : elle produit de la pauvreté.

Cette formule semble absurde. Elle contredit l’apparente évidence que la croissance de la production produit de la richesse ; évidence partagée par les « experts » dans leur quasi-unanimité, ce qui du reste disqualifie immédiatement leur prétendue expertise. Et pourtant, l’analyse critique de ce qu’est le travail dans notre système économique démontre qu’il ne crée que de la pauvreté, et que toute relance du travail dans les conditions présentes est facteur de crise.

Qu’est-ce que crée le travail ? Il crée de la richesse, certes, mais il crée de la richesse de manière contradictoire. D’une part, il y a de la richesse réelle, ou richesse matérielle (des produits utiles), et d’autre part il y a de la valeur (capitalisable). En assimilant les deux sortes de richesse, on se condamne à ne rien comprendre, ni à la vérité de l’économie, ni à la crise – et c’est pourquoi la majorité des prétendus « experts » ne comprend rien ni à l’une, ni à l’autre.

Or, la valeur est le contraire de la richesse réelle, et la croissance de la valeur se fait aux dépens de la richesse réelle, avec pour conséquence que la croissance de la valeur est en fait croissance de la pauvreté. Cela nécessite quelques explications.

Ce qu’on appelle le travail présente deux aspects contradictoires : d’une part, il y a un aspect « concret », qui se manifeste par les produits fabriqués, et d’autre part il y a un aspect « abstrait », la valeur de ces produits, qui se manifeste par la somme d’argent que ces produits représentent (et qui est visible lors de l’achat et de la vente). Bref, tout travail est, dans notre système économique, à la fois « concret » et « abstrait », quelle que soit d’ailleurs la nature de ce travail : il y a autant de travail abstrait dans la fabrication d’une table que dans la conception d’un programme informatique.

Cependant, dans notre système économique, c’est la dimension abstraite des produits fabriqués qui est la plus importante. En effet, ce qui est important, c’est qu’il y ait de la valeur dans les produits, c’est-à-dire qu’on puisse les échanger contre une somme d’argent qu’on peut réinvestir (et on sait que l’industrie privilégie les produits dits « à forte valeur ajoutée »). Le corollaire, c’est que la dimension concrète des produits n’est pas au service de l’utilité pratique qu’ils peuvent avoir pour les gens, mais qu’elle a le rôle d’un simple support de leur valeur dans l’échange, que l’on cherche à rendre la plus élevée possible.

Cependant, l’acheteur doit être en mesure d’acheter le produit, faute de quoi la valeur ne se réalise pas (sous sa forme monétaire) et le processus est bloqué. Il faut donc que le prix du produit ne représente le coût de sa réalité « concrète» que dans une proportion aussi faible que possible. Ce qu’on fait en abaissant au maximum la part payée de puissance de travail humaine (salaire), ainsi que le coût de la production (matières premières, …). Avec pour conséquence que les produits sont de plus en plus pauvres… mais réalisent de plus en plus de valeur – en théorie (c’est-à-dire à condition qu’ils soient vendus).

Cette croissance de la pauvreté, qui est l’autre face de la croissance de la valeur – et non son contraire – , est inévitable dans notre système économique fondé sur la valeur marchande, et en proie à la concurrence. Elle est également l’indication que ce système va à sa perte dans le mouvement même de son développement. Ce qui est résumé dans la formule bien connue : « le capitalisme produit ses propres fossoyeurs », formule qu’il faut bien comprendre, et non seulement répéter.

Pour cela, il faut revenir à la manière dont le travail produit de la richesse. Dans le processus de la production, la puissance de travail engagée (et payée par le salaire) présente cette caractéristique de produire davantage de richesse que la valeur représentée par le salaire contre lequel on l’achète. C’est le « secret » de la production marchande, soigneusement caché par la formule trompeuse selon laquelle c’est un travail qu’achète le salaire. Et c’est là l’origine de cette valeur que l’acte de vente de la marchandise rend visible, et qui est bien supérieure à la valeur du salaire contre lequel la puissance de travail, cette marchandise très particulière, a été vendue par le prolétaire.

La pression de la concurrence internationale et, depuis presque un demi-siècle, l’extraordinaire productivité entraînée par cette révolution scientifique et technique que constitue la micro-informatique, a poussé à l’extrême la contradiction qui est à la base du système économique capitaliste, et qui est la vérité de sa mort annoncée. Cette contradiction est la suivante : d’une part, la puissance de travail est un élément nécessaire du processus de la production, et d’autre part, cette puissance de travail intervient dans une proportion toujours moindre dans le processus de production (c’est encore plus vrai de la part payée du travail). En effet, au niveau social global, la science et la technique interviennent dans une proportion toujours plus grande, au point que des analystes un peu myopes annoncent la fin de la puissance de travail comme élément nécessaire, et l’avènement d’un « capitalisme cognitif » où la seule force productive serait la science.

Qu’en est-il, en vérité ? Certes, au niveau social global, la science et la technique interviennent toujours plus comme « force productive », et le « travail immédiat » intervient dans une proportion toujours moindre. Ce qui, au niveau des travailleurs, se traduit d’une part, à durée constante, par une productivité croissante du travail (et donc à une part payée toujours moindre), et d’autre part, par une exclusion croissante hors du procès de production, de travailleurs toujours moins nécessaires à la production de la valeur. Parce que c’est bien la valeur produite (et capitalisable) qui importe, et non la richesse réelle produite, laquelle est assez indifférente dans le système économique capitaliste (l’utilité de la marchandise n’importe pas au capitalisme).

Cette productivité, et le caractère superflu des travailleurs, sont d’ailleurs le signe que dans un système préoccupé, non par la production de valeur, mais par la production de richesses réelles (des biens et des services produits pour leur utilité pratique), on pourrait immédiatement dépasser le travail. C’est-à-dire le remplacer par l’activité de production de richesses réelles – cette perspective n’est donc pas une utopie, c’est même la seule issue désirable à la crise…

Mais cela exigerait une rupture radicale dans la vision de l’activité productive. Alors que la vision qui, aujourd’hui, est partagée par tous les économistes, de la droite à la gauche, c’est qu’il faut produire pour vendre et vendre pour produire : ce qui prouve qu’on se situe au plan de la valeur, et non au plan de la richesse réelle. Et cette vision entraîne l’idée que la crise ne sera dépassée qu’en vendant plus, pour produire plus, pour créer plus! Bien sûr, il s’agit de produire de la valeur, réalisable et capitalisable. Le paradoxe étant que, dans cette accélération désespérée du processus marchand et de la productivité tournée vers le profit, on accélère aussi la chute de la part de puissance de travail dans le processus de production, c’est-à-dire de l’élément indispensable à la production de valeur. Et lorsque la valeur de cet élément tend vers zéro, le coefficient multiplicateur (la productivité) a beau être le plus élevé possible, le total finit, tôt ou tard, par être nul.

C’est bien la situation présente. Il y a crise parce que la valeur aujourd’hui est fictive. En effet, le discours stupide ou hypocrite qui oppose un « capitalisme financier » à un capitalisme sain dissimule le fait que c’est le système capitaliste dans son ensemble qui marche sur du vent. On est désormais au-delà de l’époque où il pouvait faire illusion, et où on pouvait croire que moyennant une régulation, il serait un système sain et juste. L’écart entre richesse réelle et valeur est de plus en plus profond et la financiarisation du système capitaliste, accentuée par la mondialisation, en est la conséquence inévitable. Car avec la mondialisation, c’est la totalité du monde aujourd’hui qui est entraînée dans la course effrénée à l’accumulation généralisée du capital, chaque jour plus difficile, et qui détruit les vies des hommes et les ressources de la nature.

En effet, en en augmentant la quantité des marchandises au prix de l’exclusion des travailleurs, c’est-à-dire en excluant du travail des producteurs qui sont aussi des consommateurs, on pille les ressources en produisant toujours plus de marchandises, tout en « détruisant » la possibilité de les vendre. Cette crise est celle d’un système structurellement mortifère, d’une machine folle dont il est inutile d’accuser les conducteurs, car ils ne sont que les servants d’un mécanisme automatique.

Le pire n’est pas toujours sûr, mais il est clair qu’on n’est qu’au début d’une crise majeure, sans précédent quoi qu’on en dise, et qui pourrait déboucher sur l’effondrement complet du système dans une barbarie dont de ci, de là sur le globe, on voit déjà le visage.

À moins que l’aggravation n’ait pour effet de montrer que les prétendus remèdes sont illusoires. Et que l’impossible apparaisse enfin comme l’unique solution réaliste : abolir le travail producteur de valeur et renverser la table des catégories pour mettre en place un système où les activités produiraient des richesses réelles. En ce sens, on peut presque espérer que la crise s’aggrave.

Source http://palim-psao.over-blog.fr/article- ... 06465.html


Je renvoie également sur le même blog à la catégorie Crise du capitalisme -> http://palim-psao.over-blog.fr/categorie-11062449.html
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Re: Krach économique en vue ? (2e partie)

Messagede hocus » 22 Fév 2010, 03:56

skum a écrit:Le pire n’est pas toujours sûr, mais il est clair qu’on n’est qu’au début d’une crise majeure, sans précédent quoi qu’on en dise, et qui pourrait déboucher sur l’effondrement complet du système dans une barbarie dont de ci, de là sur le globe, on voit déjà le visage.


Où donc ? A Guantanamo ?

Nous sommes certainement dans une période de Kairos (voir : http://zeroanthropology.net/2009/05/27/ ... of-kairos/ ), une période où les actions peuvent (enfin ?) avoir des conséquences importantes pour l'avenir, car le système est dans une période de bifurcation.

Mais s'il est possible qu'un système pire que l'actuel (pire, c'est à dire plus inégalitaire, plus hiérarchique, plus meurtrier et plus autoritaire) puisse voir le jour, je ne pense pas que le terme "barbarie" soit le plus approprié pour le décrire (surtout que comme dirait Montaigne : « Nous les pouvons donc bien appeler barbares, eu égard aux règles de la raison, mais non pas eu égard à nous, qui les surpassons en toute sorte de barbarie. » ).

Ceci dit, "Barbary" est aussi le premier mot de cette chanson dite "VERSUS", qui, dans son côté binaire, a un certain réalisme, et une certaine force :



(le sous titrage est un peu défaillant, et comme le son est tout pourri, c'est écoutable ici, dans la liste de lecture en bas de la page : http://www.myspace.com/ez3kielmyspace )


Bon, maintenant, il faut retourner aux chose sérieuses. :)
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Re: Krach économique en vue ? (2e partie)

Messagede skum » 22 Fév 2010, 23:39

Peut-être veut-il pointer des régions d'ex-Yougoslavie, ou des régions d'ex-URSS où des formes "barbares" et mafieuses, de dominations directes (pillages, etc.) on refait "massivement" surface. A moins que ce ne soit dans nos beaux et tendres pays du "centre capitaliste", où des gens tentent de chopper les "derniers emplois" et "sont prêts à tout" pour bouffer...

Peut-être que Briche, lecteur de Michel Henry, fait aussi allusion au livre du même nom de ce dernier -> http://www.michelhenry.com/labarbarie.htm
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Re: Krach économique en vue ? (2e partie)

Messagede hocus » 22 Fév 2010, 23:56

Oui, oui, et peut-être aussi le pillage organisé des ressources africaines, irakiennes, etc, par les grandes puissances mondiales, le trafic d'armes et d'êtres humains, etc. etc.

C'est pas hyper important, mais barbarie, dans ses sens premiers ça désigne toujours l'Autre, et même plus précisément celui qui est à l'extérieur de l'Empire, de la civilisation (grecque, romaine, etc.). Or avec l'effondrement du système, l' "empire" (USA, OTAN), la "civilisation" (occidentale), produisent eux même les fruits les plus pourris et les écrasent sur la gueule des Autres. Bref, tu vois ce que je veux dire quoi. Désolé pour la digression.
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Re: Krach économique en vue ? (2e partie)

Messagede skum » 23 Fév 2010, 00:32

Oui, je vois et je partage ce que tu dis. En fait, je viens de repenser (ma mémoire fonctionne parfois) à son petit livre, précisément un passage du chapitre intitulé La crise moderne de la forme-sujet :

...Maintenant que le règne de la valeur [marchande] atteint sa limite et que se craquèlent les modèles d’identification du sujet moderne, la face obscure de ce sujet ressurgit avec toute l’agressivité dont elle avait été chargée et prend la forme d’une barbarie protéiforme. Une barbarie qui a pour noms : violence des rapports sociaux, « incivilité » croissante, haine des femmes, homophobie, xénophobie, mais aussi violence du sujet envers lui-même, comme première cible de la haine...

Ca me fait presque approuvé la définition henryenne du mot "quand les hommes (entre eux) ne se comprennent plus , ça sent le roussi!" - je ne dis pas qu'ils se sont compris, hein. Peut-être que le mot est abusif mais je ne crois pas qu'il désigne le barbare comme l'Autre ou l'étranger. Bien qu'être philosophe n'excuse pas tout, un philosophe reniant sa "part maudite" n'est pas un philosophe - nouveau décret de moi.

Le plus simple se serait de le contacter et lui demander pour-quoi ce mot, mais, en fait, je suis pas sûr que ce soit si simple de le contacter, je sais juste qu'il est de Lille, prof d'esthétique (prouvé scientifiquement par la revue Illusio), et que M'sieur Critique de la valeur le connaît personnellement : critiquedelavaleur@hotmail.fr
skum
 

Re: Krach économique en vue ? (2e partie)

Messagede Antigone » 03 Mar 2010, 17:53

Marianne - 23 fev 2010

Dark pools: le nouveau visage de l'horreur financière

5,8 milliards de profits malgré plus de 8 milliards de provisions ! Les résultats de BNP-Paribas contrastent avec l’état de l’économie réelle. Parallèlement, la finance trouve de nouveaux moyens de spéculer avec les dark pools, comme le rapporte Edgar, du blog La lettre volée.

C’est la nouvelle création sortie du cerveau des financiers. Des marchés électroniques parallèles où l’on peut échanger des actions en toute discrétion. Ces marchés permettent d’acheter ou de vendre sans que cela n’influe sur le cours officiel, qui dépend du marché officiel. Selon un article des Echos cité par Edgar, 5 à 7% des échanges européens transiteraient déjà par les dark pool. Pire, The Economist révélait il y a quelques mois qu’ils concernaient plus de 20% des échanges outre-Atlantique.

La faute à une directive européenne de 2007

L’arrivée de cette nouvelle innovation financière en Europe a une simple raison : une directive européenne de 2007 qui a cassé le monopole des Bourses au nom de la concurrence et autorisé à abandonner la traditionnelle règle de transparence. On ne voit pas bien à nouveau ce que cette innovation peut apporter de positif à la collectivité. On y voit bien l’intérêt des institutions financières, qui y gagnent un nouvel instrument de spéculation, protégé et secret, échappant à la réglementation.

En effet, un tel outil peut faciliter les délits d’initiés, qui seront plus difficiles à tracer et il permet à l’avance de se mettre à l’abri de toute tentative de taxation sur les transactions financières. En revanche, il semble évident qu’en cas de crise grave, ce marché serait le premier à s’effondrer, du fait du défaut de confiance des opérateurs. Bref, voici encore un nouvel outil qui permettra à la finance de faire davantage de profits quand la mer est calme mais qui risque de la déstabiliser en cas de gros temps…

D’ailleurs, l’annonce d’un profit de 5,8 milliards d’euros net par BNP Paribas, malgré plus de 8 milliards de provision, montre que la sphère financière se redresse étonnamment vite de la pire crise qu’elle ait pourtant traversée depuis 80 ans. Comment ne pas rester songeur devant un tel profit pour à peine 40 milliards de produit net bancaire et de telles provisions ? Cela montre bien que les banques font des marges totalement indécentes sur les innombrables produits facturés à leurs clients.

Le système ne peut se remettre en question

Certes, nous ne sommes pas encore au niveau de 2007, où 31 milliards de produit net bancaire permettait de dégager plus de 7 milliards de profits, soit une marge après impôt de plus de 20%, ce qui augure d’une pression compétitive bien légère… Pire, on voit bien que les banques ont traversé la crise de manière assez sereine et que les profits reviennent rapidement. Bien sûr, BNP-Paribas s’en est mieux sortie que la moyenne, mais 2010 devrait permettre à tout le monde d’en profiter.

Globalement, ces deux exemples relativisent considérablement les déclarations de certains dirigeants politiques, au premier rang desquels Nicolas Sarkozy, qui affirment que « le laisser-faire est fini », ou que « la moralisation de finance est en marche »… Il y a un immense contraste entre la violence de la crise que nous traversons et l’absence quasiment totale de remise en question des raisons même qui ont mené à la crise. Il est hallucinant que rien ne soit fait pour fermer les dark pool par exemple.

Par-delà l’incapacité du système financier à se remettre en question (ce qui n’est pas totalement surprenant étant donné à quel point il en profite), il est chaque jour plus choquant de voir le décalage entre le discours des dirigeants politiques et la réalité.
Laurent Pinsolle
Antigone
 

Re: Krach économique en vue ? (2e partie)

Messagede Antigone » 06 Mar 2010, 14:11

La Vie financière - 05 mar 2010

Les armes de destruction massive de la Grèce

Faut-il s’inquiéter pour la Grèce ? Et de manière plus générale d’un krach obligataire mondial ?
Après tout, les Etats sont des spécialistes de la faillite.

Depuis le début du XIXe s., l’Espagne a fait faillite 13 fois, l’Allemagne et la France 8 fois, le Portugal 6 fois et la Grèce 5 fois (soit tout de même 50,5 années de faillite pour la seule Grèce). Et pourtant, ces Etats sont toujours bel et bien là. Les problèmes de financement de la Grèce pourraient donc rester localisés et ne pas avoir d’effet de contagion au reste des pays.
Pourtant trois facteurs nous font penser que la crise des déficits grecque pourrait s’étendre, comme celle des subprime.

La contagion
Au départ, ce n’est pas grand-chose. Comme pour les subprime. Tout a commencé avec des soucis sur le marché immobilier américain. Ennuyeux pour les personnes concernées, mais pas mortel pour l’économie. Puis, la crise s’est étendue – par le biais des titrisations de crédits – au marché des dérivés de crédits, puis au marché actions, puis au système bancaire, puis, dans un magnifique krach, à l’économie toute entière.

C’est ce qui se passe en ce moment. A peine les ennuis de la Grèce avaient-ils commencé que l’Italie, le Portugal, l’Espagne ou l’Irlande étaient sur la sellette. Mêmes causes (déficit, endettement), même conséquences (crainte d’une faillite). Et certains économistes, un peu plus lucides que la majorité, commencent maintenant à dénoncer ce que nous signalons depuis des années : l’endettement délirant des Etats-Unis ou du Japon.

La cupidité
Nous vous en parlions hier dans la Quotidienne, Monsieur le Marché est maintenant habitué à un flot d’argent facile. Il y a pris goût et il en veut toujours plus. Pouvons-nous vraiment le blâmer ? Après tout, on a offert aux investisseurs de l’argent sur un plateau d’argent. Ils s’en sont servis. Normal.

Aujourd’hui, les investisseurs se jettent sur les obligations grecques – l’émission d’obligations à 10 ans pour 5 milliards d’euros a été un véritable succès – les pensant vraiment sûres car garanties par la France ou l’Allemagne. Et en plus, elles offrent un attractif rendement à plus de 6%. Conclusion, comme pour les subprime, la cupidité règne sur les marchés et les investisseurs privilégient toujours le rendement à la sécurité. Ils vont se brûler les ailes avec le marché de la dette souveraine.

La malhonnêteté
C’est le plus flagrant des points communs entre l’actuelle crise obligataire et celle des subprime. Le système financier tout en entier repose sur l’avis émis par les agences de notation. Elles ont estampillés “AAA” – soit normalement les investissements les plus sûrs – les plus risqués des titrisations ou des fonds spéculatifs, comme celui de Madoff. Elles ont préféré oublier que les titrisations de crédits reposaient sur des crédits ultra-risqués accordés à des ménages qui ne pourraient jamais rembourser.

Aujourd’hui, elles feignent d’ignorer le déficit de pays comme le Royaume-Uni, le Japon ou les Etats-Unis. Leurs dettes souveraines se voient toujours accorder le fameux AAA. Et pourtant les signes de fissures ne manquent pas : les grands fonds se désengagent des obligations d’Etat et les obligations d’entreprises sont considérées par les assureurs comme bien plus sûres que les souveraines…

Par bêtise ou par malhonnêteté, les agences de notations préfèrent maintenir une apparence de sécurité sur le marché obligataire, quitte à encourager la formation d’une bulle spéculative. Et les gouvernements pour nous complaire, à nous électeurs, préfèrent continuer à nous fournir du pain et des jeux à tout prix en faisant croire que cela n’aura pas d’incidence.

Quand on met bout à bout ces trois facteurs, contagion, cupidité et malhonnêteté, le potentiel de destruction de la crise des dettes souveraines est le même que celui des subprime. Banques d’investissement, fonds spéculatifs, banques centrales, investisseurs privés… tous possèdent des obligations d’Etat. Un seul conseil : ne vous laissez pas tenter par les sirènes des obligations d’Etat. Cela va faire mal…
Cécile Chevré
Antigone
 

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