Niger = Areva-Land

Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 04 Juil 2009, 21:11

On peut trouver incongru l'ouverture d'un topic sur le Niger. Eh bien soit !

Pourtant la côte de ce pays ne cesse de monter dans la hiérarchie arbitraire des faits tels qu'ils nous sont transmis par les agences de presse. Depuis plusieurs semaines, le Niger s'enfonce dans une crise politique dont il est difficile de pronostiquer l'issue: dictature autocratique ? coup d'Etat militaire ? soulèvement populaire ? guerre civile ? catastrophe écologique et humanitaire ? Tout est possible.

La situation au Niger est intéressante à plus d'un titre.
Elle est caractéristique du type de relation que le Nord entretient avec le Sud, de la guerre sans merci que se livrent la France et la Chine pour exploiter les richesses dont le sous-sol regorge, mais aussi de l'immaturité politique des peuples africains et du chemin qui leur reste à parcourir pour s'affranchir de l'emprise des bourgeoisies locales.

Quel est le pays le plus pauvre du monde ? Le Niger... ou presque.
Classé 172 ème pays sur 173 selon l’indicateur de développement humain du PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement). Plus de 60% de sa population vit sous ce qu'on appelle pudiquement dans les bureaux le "seuil de pauvreté".

Quel est le pays le plus riche du monde: Areva-Land !... ou presque.
Il pourrait bientôt concurrencer le Canada à la place de premier producteur mondial d'uranium.
Areva, par l'intermédiaire de la Cogema qui est devenue sa filiale, est présente au Niger depuis 1968. Elle est présentée comme le fleuron de l'industrie française. C'est le leader mondial du nucléaire. Preuve de l'intérêt stratégique qu'il y accorde, l'Etat français en détient 93% des parts. Pour les tenants du tout-nucléaire, l'uranium, c'est le pétrole du XXIe siècle. La Chine ne s'y trompe pas...

Le Niger est un débris de l'Empire colonial français, la défunte AOF.
Après son indépendance en 1960, le Niger est devenu une dictature oubliée, banale, mais conforme aux attentes et aux intérêts de la France-à-Fric. En 1961, sitôt l'indépendance accordée, la France s'était empressée de signer avec les gérants de cette nouvelle succursalle une série d'accords dont un, particulèrement stratégique, permettait un accès exclusif à l'uranium à un prix ridiculement bas.

En mars 1974, le président Hamani Diori commet une petite erreur. Enhardi par une quinzaine d'années au pouvoir, il se permet de discuter les prix et les quantités de minerai extraites du sous sol. On essaie de lui faire entendre raison... Mais voila que Pompidou meurt. La barbouzerie Foccard profite alors du vide politique et de la campagne présidentielle pour débarquer Diori ni vu ni connu et le remplacer par une junte militaire conduite par le colonel Seyni Kountché.

A la mort du colonel en 1987, l'armée fait le choix de libéraliser prudemment le régime, d'autoriser le multi-partisme, les mouvements civiques, des journaux moins dépendants du pouvoir. Il fait aboutir la signature d'un accord de paix avec les rebellions touaregue et touboue. En 1992, une nouvelle constitution est promulguée, largement inspirée de notre Ve République avec éléction pour 5 ans au suffrage universel d'un Président qui nomme un Premier Ministre etc.
Ce lent processus conduit en 1996 à des éléctions qui, après qu'elles aient été truquées dans un premier temps, ne permettent pas de dégager une majorité. Mince alors !
Si la démocratie doit rendre le pays ingouvernable, autant revenir aux méthodes qui ont fait leurs preuves... Le coup d'Etat porte au pouvoir le colonel Ibrahim Baré. Des journalistes et des dirigeants de l'opposition sont alors arrêtés (classique, pas de quoi s'affoler) mais quand le colonel se met à rechercher l'aide de son voisin lybien, cela ne va pas plaire du tout, mais alors pas du tout du tout à l'éxécutif chiraquien.

En 1999, par un heureux concours de circonstances... (hum), Baré est assassiné par un sous-fifre et la constitution de 1992 est rétablie. Cette fois, les élections permettent la victoire d'une coalition. Mamadou Tandja, un ancien colonel chef du MNSD (Mouvement National pour une Société Développée), devient Président de la République et Mahamane Ousmane, à la tête de la CDS (Convention Démocratique et Sociale), est élu Président de l'Assemblée Nationale. Les élections de 2004 confirmeront ces dirigeants à leurs fonctions.

Comme la Constitution prévoit que le président ne peut pas exercer plus de deux mandats, Tandja devrait céder son fauteuil en décembre 2009, Mais voila, il n'a pas l'intention de partir. Il a donc décidé d'arranger la Constitution a sa façon afin de pouvoir se représenter et rester trois années de plus.
Le parlement s'y oppose ? Qu'à cela ne tienne: il le dissout. La Cour constitutionnelle l'empêche d'organiser un référendum ? il le dissout également. Après avoir fait le vide autour de lui, il s'octroie les "pouvoirs exceptionnels" qui lui permettent de gouverner par décrets et ordonnances. Pour aller au bout de son projet autocratique, il espère s'appuyer sur les chefferies traditionnelles, mais rien est acquis.

Il se trouve, par une étrange coindidence (décidément !), que cette crise politique est survenue quelques jours après l'inauguration du complexe uranifère de Imouranen, le plus grand projet industriel du Niger, la plus grande mine d'uranium du monde, en présence de Anne Lauvergeon, présidente d'Areva. Quelques semaines plus tôt, Sarkozy avait supervisé un accord extrèmement important signé au mois de janvier par Areva et les autorités de Niamey.
Désormais avec le début de l'exploitation de ce gisement colossal, avec une production portée à 5 000 tonnes par an assurées pendant plus de 35 ans, Areva est à l'abri d'une rupture de stock. En 2012, la moitié du combustible des centrales nucléaires françaises viendra du Niger.

Marché "gagnant-gagnant" assure-t-on de part et d'autre.
Areva accepte d'augmenter de 50% le prix d'achat de l'uranium en provenance des gisements de Arlit... ce qui place encore ce prix très en deça des cours du marché international.
Elle consent également à "partager" les revenus de l'exploitation de Imouranen en laissant 33% à l'Etat nigérien, en échange de quoi, Niamey garantirait la sécurité de la région, aurait le cas échéant le feu vert de Paris pour entreprendre des actions punitives contre la rébellion touarègue dans le Nord du pays, des exactions que l'ONU a eu plusieurs fois l'occasion de condamner (l'Elysée faisant la sourde oreille).
Il se pourrait même que Areva ait aidé à négocier le silence de la France pour les "manquements constitutionnels" qui se sont produits depuis. La proximité des faits peut le laisser penser.

Plus d'un milliard d'euros d'investissement contre quelques milliers d'emplois...
Pour un pays aussi pauvre que le Niger, ce contrat qui engage les trente prochaines années, même s'il n'est pas équitable, est l’assurance de recettes budgétaires importantes. Car de l'argent a été mis sur la table, beaucoup d'argent, ce qui exacerbe les appétits et les ambitions.
L'argent venant d'Areva, même s'il ne représente que 33% d'un tout, ne devrait pas seulement servir à réprimer les touaregs et museler l'opposition, il permettra aussi de remplir les comptes bancaires de Tandja, de sa famille et de son entourage de confiance qu'il a pris le temps d'installer aux postes clés. Sa première épouse est impliquée dans des négociations sur les concessions de permis miniers. Leur fils négocie les ventes d'uranium à la Chine depuis Shanghai. Au Niger, tous les tripatouillages puent l'uranium.

Pendant ce temps, un pays se meurt.
Areva promettait progrès, développement et amélioration des conditions de vie. 40 ans après, le bilan parle de lui-même.
Non seulement l'entreprise française exproprie les tribus nomades de leurs terres, fait expulser les populations pauvres de leurs villages par le concours et la brutalité de l'armée nigérienne, mais elle pollue irréversiblement.

Les études de la CRIIRAD (Commission de Recherche et d'Information Indépendantes sur la Radioactivité) réalisées sur le site de Arlit jusqu'en 2005 (c'est-à-dire tant que Areva les tolérait) ont démontrées que la contamination de l'eau était jusqu'à 100 fois supérieure aux recommandations de l'OMS.
Les déchets et les boues radioactives génèrent des poussières et des gaz qui se répandent et sont absorbés par la population, les ouvriers qui sont embauchés sans rien connaitre des risques, et le bétail.
Par ailleurs, comme l'exploitation des mines nécessite une surconsommation d'eau, Areva se sert directement dans les nappes phréatiques, asséchant les réserves en eau de toute une région qui en manque déjà cruellement, où il ne pleut que un à deux jours par an...
Les conditions existantes sur le site à ciel ouvert de Arlit vont se reproduire sur celui de Imouranen dans des proportions encore plus importantes, et créer des conditions sanitaires encore plus désastreuses pour les populations qui vivent dans l'immédiate périphérie.

La rebellion touarègue, quant à elle, a repris ses opérations depuis 2007, mais elle condamne à peine cette situation. Elle essaie de monnayer ses trèves auprès du gouvernement en échange, pour les populations locales, d'une part conséquente des bénéfices tirés de l’exploitation de l’uranium.
Les chefs touaregs sont prêts à se remplir les poches pour peu qu'on leur en fournisse l'opportunité. Leur pression sur le gouvernement de Niamey n'a pas d'autre signification.

L'attribution des pleins pouvoirs par Tandja fait l'unanimité de toutes les forces politiques contre lui, à commencer par le principal parti d'opposition, le PNDS (Parti Nigérien pour la Démocratie et le Socialisme) dirigé par Mahamadou Issoufou. Sa principale revendication est l'ouverture d'une commission d'enquête sur les concessions minières qui si elle aboutissait devrait mettre en accusation la coalition qui a dirigé le pays ces huit dernières années.
Le 14 juin, une manifestation rassemblait près de 10 000 personnes à Niamey. Fin juin, les syndicats ont organisé une grêve générale, la première depuis 1999. Opération ville morte. Les rues de Niamey étaient désertes. Le calme avant la tempète annonce-t-on.
Actuellement, tous les regards se tournent vers l'armée qui, jusqu'à présent, laisse faire et garde le silence.

Y a-t-il des manifestations prévues en France contre l'Areva-Land ?
L'Afrique intéresse-t-elle les révolutionnaires ?
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede willio » 04 Juil 2009, 22:02

Antigone a écrit:Y a-t-il des manifestations prévues en France contre l'Areva-Land ?
L'Afrique intéresse-t-elle les révolutionnaires ?


Bof, t'sais les révolutionnaires...

Tiens un vieux topic où j'avais parlé d'Areva et du nucléaire au Niger :

viewtopic.php?f=9&t=1414
willio
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede conan » 04 Juil 2009, 22:35

Ajoutons que la vaste zone d'exploitation de l'uranium est une zone de non-droit, d'où les ONG sont expulsées. Le seul hôpital du coin est tenu par Areva : pratique pour détecter d'éventuelles conséquences de l'exploitation d'uranium... ou pas ! Manque criant d'information des travailleurs de l'uranium, comme le souligne Antigone, mais aussi les maladies (cancers), nombreuses, qui sont détectées, ne sont pas reconnues comme maladies professionnelles. Areva contrôle les "observatoires" récemment dédiés à ce problème, ainsi que potentiellement, le règlement de ces questions. Pire : cette mise en place d'observatoires foireux en parallèle de cette concession d'Imouraren, dédiée au pillage des ressources, devrait prochainement lui faciliter une subvention par la Banque européenne d’investissement... à hauteur de 1,2 milliards d'euros. :clap:
conan
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 05 Juil 2009, 08:34

Les événements qui se produisent au Niger depuis le mois de mai sont passés sous silence dans la presse. Seuls RFI et France 24 en font écho. Je communique donc à la suite les dernières informations connues.
Je trouve également des informations et des commentaires sur un forum consacré à ce pays: http://www.agadez-niger.com/forum/viewforum.php?f=23


RFI (les infos du 5 juillet 2009)

Le président Mamadou Tandja, qui s'est arrogé les pleins pouvoirs, a pris vendredi 3 juillet un deuxième décret en vue de convoquer un référendum sur un changement de la Constitution et pouvoir ainsi prolonger son mandat de trois ans.
Le premier décret avait été annulé par la Cour constitutionnelle, mais Mamadou Tandja a dissout cette cour et nommé sept nouveaux juges.

Le président de la CENI (Commission électorale nationale indépendante), Moumouni Hamidou a été reçu mercredi, puis jeudi, par le président Mamadou Tandja. Après ces deux entretiens, ce magistrat, par ailleurs, conseiller à la cour d’appel, s’engage désormais à organiser le référendum convoqué par le chef de l’Etat. Auparavant, il s’était déclaré lié par l’arrêt de la Cour constitutionnelle annulant ce scrutin polémique.
Mais Moumouni Hamidou prend maintenant acte de la situation d’exception actuelle. Vendredi 3 juillet, il a réuni en plénière, les membres de la commission pour les en informer et les rallier à sa position.

Le représentant de la société civile, porte-parole du FDD (Front pour la Défense de la Démocratie) Marou Amadou a tout de suite claqué la porte et démissionné de son poste. Les représentants des partis de l'opposition ont quant à eux adopté une autre tactique : « rester au sein de la CENI pour éviter d'offrir un chèque en blanc au président Mamadou Tandja pour les prochains scrutins », expliquent-ils, comme par exemple pour les législatives qu’on projette au mois d’octobre.

Le chef de l'Etat a déjà accordé une avance de 900 millions de francs CFA à la CENI pour l'organisation du scrutin du 4 août, pour accélérer notamment la réalisation et la distribution des cartes d'electeurs. Le code électoral stipule que les cartes doivent être distribuées deux mois avant l'élection. Qu'à cela ne tienne, le président Mamadou Tandja, fort de ses pouvoirs exceptionnels, a ramené ce délai de deux mois à vingt jours.

L'opposition appelle dimanche 5 juillet à une grande manifestation à Niamey contre la prolongation du mandat présidentiel. La CdS (Convention démocratique et sociale) de Mahmane Ousmane, participera à cette marche. L'ancien allié du président Mamadou Tandja s'est désormais rangé du côté des opposants au référendum. La CDS a créé un front le MDDR (Mouvement de Défense de la Démocratie et de la République).
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede joe dalton » 05 Juil 2009, 10:49

ajoutons que la date de la prochaine mascarade des election legisletive anticipé, decrait etre avancé au 20 aout, et certainement que la "nouvelle" place de choix d'areva au niger, n'est pas étrangère a la volonté de se revetir d'une respectabilité electorale au plus vite !
Antigone a écrit:Il se trouve, par une étrange coindidence (décidément !), que cette crise politique est survenue quelques jours après l'inauguration du complexe uranifère de Imouranen,

si l'on associe si fortement l'afrique dans l'imaginaire avec la sorcelerie, c'est certainement parce qu'il s'y produit sans cesse des coïncidences de ce type !
Antigone a écrit:L'Afrique intéresse-t-elle les révolutionnaires ?

je pense que d'arriver a jeter des ponts avec l'afrique devrait etre une priorité, avant que cela ne soit irremediable ! et plus le temps passe, une lecture blanc \noir ne peut que s'installer durablement las bas !
mais je pense que l'afrique est une realité bien dure a apprehender d' ici ! d'un coté, l'oppression africaine, semble faite d'un seule block, et semble offrir toujours les meme similutudes : passée coloniale jamais digerer, terrain de jeu des puissance occidentale(france, gb, usa, et maintenant chine), pillage des ressources naturel jamais repartie, monopole de la contestation politique par la bourgeoisie locale, instabilité des regime et opposants toujours appeler les rebelles,etc
et pourtant il n'y a pas une réalité africaine, mais des réalité qui varie suivant les pays(et au sein du meme parfois), en sousetiment la diversité des problemes que peut rencontrer chaque etats, l'on ne peut entamer une vrai rencontre avec les africains(qui se sente camrounais, senegalais, congolais..) ! bien sure c'est bien difficile conte tenu de la desinformation(ou secret) qui entourent se continent, et de l'eclatement suite a la decolonisation en pays artificielle(qui ont cependant pris une realité depuis 50ans)! c'est cependant primordiale, sinon tout les beaux discours qui leurs sont fait sont forcement vecue comme condescendant !
c'est pourquoi, se rapprocher des populations nécessite un véritable efforts de curiosité de notre part, et une vraie ecoute !
joe dalton
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 09 Juil 2009, 18:20

Le fil des événements:

05 juillet - Des dizaines de milliers de personnes manifestent dans les rues de Niamey,
RFI:
Dans la foule, des femmes, des vieilles personnes et des jeunes très déterminés scandaient des slogans hostiles au pouvoir et au président Tandja : « Le tazartché (continuité) ne passera pas, Tandja a trahi le peuple nigérien, non au référendum, halte au tripatouillage constitutionnel », pouvait-on lire sur des banderoles et des pancartes brandies par des manifestants, des manifestants qui se protégeaient du soleil à l’aide de parapluies aux couleurs de leurs partis politiques respectifs.


08 juillet - Les partis membres du FDD se retirent de la CENI, commission chargée d'organiser le référendum prévu pour le 04 août 2009 et dont la campagne s’ouvre le 13 juillet. Ce départ massif fait suite à la démission deux jours plus tôt de Aïssatou Zada, vice-présidente de la Commission.

09 juillet - La justice annule le dernier congrès du MNSD (le parti du Président) qui s'était tenu au mois de février, et au cours duquel l'ancien Premier Ministre, Hama Amadou avait été limogé et ses partisans bannis du Mouvement. C'est une crise de plus qui s'ouvre dans les milieux du pouvoir.

°°°°°°°°°°

Harobanda, le 08 juillet 2009;
Mon cher Adal!
D'abord le diable est arrivé avec les colons français, il a mis à genou une grande partie de l'Afrique, qu'il a divisé selon ses caprices. il a mis en place un système qui lui garantisse ses intérêts. il y a placé des régisseurs dévoués.
Ces régisseurs se font aider par des collabos affamés, sans morale, prêts à tout pour un bol de riz. Justes des bénis oui oui, qui à force de courbettes et des baises pieds s'adonnent à toutes les bassesses pour justifier le piétinement des populations .
Cette constitution tant sacralisée par la société civile la pseudo opposition et diabolisée par les charognards qui voltigent autour du dictateur Tanja, est l'émanation du CRN*, voulue par les assassins de Baré et acceptée par leurs complices qui sont tous les chefs des grands partis politiques actuels.
Autrement dit tu es dans un Pays pourri
colonisé par une métropole pourrie
dirigé par une classe politique pourrie
un système qui utilise des collabos touaregs pourris.
Le résultat c'est un "Pays" classé parmi les derniers au bord de la guerre civile.
Awinnane

* CNR: Conseil de Réconciliation du Niger. Il a assuré l'intérim du pouvoir en 1999 entre l'assassinat de Baré et les élections qui ont permis à Tandja d'être élu à la Présidence.
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 24 Juil 2009, 17:58

10 juillet: Tandja prend une ordonnance qui permet de sanctionner les médias «sans mise en demeure préalable». Les journaux ou les radios qui publieraient ou diffuseraient des informations de nature à porter atteinte à la sécurité de l'Etat ou à l'ordre public seraient ainsi sanctionnés.

20 juillet: Grêve pour une semaine de la presse écrite indépendante nigérienne rejointe pour la journée du 21 par les radios et télévisions privées. Les médias privés réclament l'abrogation de la décision présidentielle. La mobilisation a été importante tant à Niamey (où l'on compte quatre télévisions et une douzaine de stations de radio privées) que dans les autres villes du pays.

24 juillet: La grève générale appelée pour les 24 et 25 juillet par les centrales syndicales de la CDTN (Confédération démocratique des travailleurs du Niger) a été décrétée illégale le 23 au soir par une décision du tribunal de Niamey.

Le ton se durcit un peu plus tous les jours, à moins de deux semaines du référendum censé modifier la Constitution qui permettrait au président Tandja de se maintenir au pouvoir indéfiniment. Pour le moment, le jusqu'au-boutisme de Tandja renforce a contrario le légalisme des opposants et tend à les désarmer un peu plus... mais jusqu'à quand ?
Il ne reste qu’à décréter l’Etat d’urgence après la farce du référendum pour couronner le tout. L'été à Niamey cette année pourrait être plus chaud que d'ordinaire.

Le Niger n'est pas un cas isolé. D'autres chefs d'Etats tentent actuellement de bigouiller leur constitution pour se maintenir au pouvoir, "à la demande de leur peuple", "pour le bien de leur peuple" disent-ils. C'est le cas notamment de Gloria Arroyo aux Philippines, de Daniel Ortega au Nicaragua...
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 09 Aoû 2009, 15:28

Je reproduis un extrait (le plus intéressant) d'une conférence débat qui a eu lieu à Brest en décembre 2008 avec la participation de Issouf ag Maha, maire et réfugié politique de la commune de Tchinozerine au N-E d'Agadez.
Je ferai dans quelques jours un point de la situation au Niger depuis la tenue du référendum.

Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 23 Aoû 2009, 10:42

Le référendum n'aura été qu'une formalité pour le pouvoir en place. Celui-ci avait pris soin de faire voter les militaires la veille afin qu'ils prennent position devant les bureaux. Précaution inutile, aucun incident n'a été constaté. Les rues de Niamey sont restées assoupies toute la journée après le passage toutes sirénes hurlantes du cortège présidentiel accompagné des dignitaires.
D'habitude, quand les gens se déplaçaient, on enregistrait entre 30 et 40% de participation. Cette fois, tous les records officiels de bourrage d'urnes ont été battus avec 68%. En réalité, pour l'opposition qui avait appelé au boycott, la participation n'aurait pas dépassé 5%.

Comme la presse française fait silence sur les événements de ses dernières semaines au Niger, voici une vidéo d'un reportage de France24 réalisé juste avant le référendum.
http://www.france24.com/fr/20090814-nig ... referendum

Evidemment, Tandja n'a pas perdu de temps pour annoncer son triomphe. Fort de 92% de oui, il a promulgué une nouvelle constitution qui fixe la tenue d'élections législatives pour le 20 octobre. L'opposition qui dénonce un coup d'Etat a fait savoir qu'elle les boycotterait comme elle l'a fait pour le référendum.

Depuis le mois de mai, la crise politique s'est transformée en déni de démocratie. Mais alors que Tandja s'arrogeait tous les pouvoirs y compris militaires et judiciaires sans la moindre gêne, sans se soucier le moins du monde de la légalité, pour rester au pouvoir aussi longtemps qu'il le souhaitera, l'opposition utilisait tous les recours permis par la loi et s'empêtrait dans un légalisme qui l'amène aujourd'hui à se référer à l'ancienne constitution devenue caduque mais transformée en incarnation de la vraie démocratie.

Le 9 juillet, l'ensemble des forces politiques d'opposition rassemblées dans le FUSAD (Front Uni pour la sauvegarde des acquis démocratiques) publiait une déclaration qui refusait de reconnaitre le résultat de la mascarade référendaire ainsi que le régime né de la nouvelle constitution. Communiqué envoyé à 23h. Le lendemain à 6h, son président Marou Amadou était arrêté. Il est actuellement détenu à la prison de haute sécurité de Koutoukalé, à une quarantaine de kilomètres de Niamey.

D'ici la fin du mois, plusieurs manifestations sont annoncées. Ce samedi 20 août, la CFDR (Coordination des forces démocratiques pour la république) qui réunit les syndicats et des ONG organise des meetings dans tout le pays. Les syndicats ont appelé à une grêve générale de 72 heures à partir du 26 août.
Pour nuancer le propos, je rappelerais que l'opposition actuelle a soutenu Tandja pendant les dix premières années de son mandat, a participé à son gouvernement et en a profité pour se remplir les poches pour certains, au nom d'une démocratie qui remplit bien son rôle d'écran de fumée en faisant oublier beaucoup de misère.

L'Etat français soucieux de ne pas laisser le champs libre aux appetits de la Chine (qui vient de signer un accord mirobolant de 3 milliards d'euros pour l'exploitation du pétrôle) a repris un langage conciliant qui se démarque des récentes déclarations des responsables de l'Union Européenne mais aussi de l'administration américaine qui ne reconnait plus ce régime. Le porte-parole du Quai d'Orsay a déclaré: « Nous serons très attentifs à l’organisation prochaine d’élections législatives qui doivent être transparentes justes et démocratiques ». Cette déclaration a fait bondir le petit peuple à Niamey parce que dans la situation actuelle du Niger, on ne parle plus de démocratie. La réaction des autorités françaises ressemblent,à un blanc seing donné à Mamadou Tandja. Et les observateurs de rappeler que la célèbre phrase de De Gaulle « la France n’a pas d’amis mais que des intérêts » reste plus que jamais d'actualité.

La classe ouvrière nigérienne est faible, sans droits, souvent illétrée, cantonnée aux sites d'exploitation des richesses du pays. Raison de plus pour affirmer une solidarité. On attend toujours celle des syndicats d'Areva en France.
Modifié en dernier par Antigone le 31 Aoû 2009, 15:21, modifié 1 fois.
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 25 Aoû 2009, 20:37

Samedi, des manifestations et des actions de désobéissance civile étaient organisées dans les principales villes du pays.
A Niamey, Tahoua et Tillabery, les rassemblements ont été dispersés à coups de matraques et de gaz lacrymogènes. Il n'y aurait pas de mort mais plusieurs blesses à Tahoua. En tout 41 personnes (dont deux femmes) ont été arrêtées avant tabassage, parmi lesquelles le secrétaire général du FUSAD, Maman Wada et un ancien parlementaire, Soumana Sanda. Elles ont été placées sous mandat de dépôt.
Elles sont accusées de « participation à une manifestation illégale » ; acte puni par l’article 98 du Code pénal qui stipule que : « sera puni d’un emprisonnement de deux mois à un an toute personne non armée qui, faisant partie d’un attroupement armé ou non armé, ne l’aura pas abandonné après la première sommation. L’emprisonnement sera de six mois à trois ans si la personne non armée a continué à faire volontairement partie d’un attroupement ne s’étant dissipé que devant l’usage de la force».

C'est demain 26 août que doit commencer la grêve générale (interdite) de 72 heures...

°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

J'édite pour apporter quelques informations complémentaires:

A Niamey, la manifestation n'a pas pu avoir lieu normalement à partir du lieu de rendez-vous. La police et la Garde républicaine y étaient postées, ainsi que dans plusieurs quartiers de la ville. Dès que 40 à 50 personnes se regroupaient, les policiers chargeaient et poursuivaient leur traque dans les rues adjacentes, faisant grand usage des gaz lacrymogènes, si bien qu'en fin d'après-midi, Niamey était noyée dans la fumée, complètement intoxiquée, comme si elle avait dû faire face à un bombardement.

Depuis la promulgation de la nouvelle constitution, l'opposition n'a plus accès au moindre batiment public ou Maison des Jeunes, pour y tenir ses réunions, ce qui n'était encore jamais arrivé, même sous les dictatures précédentes.
Modifié en dernier par Antigone le 27 Aoû 2009, 18:04, modifié 1 fois.
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede conan » 25 Aoû 2009, 21:09

Toutes ces bonnes nouvelles me donnent furieusement envie d'éteindre l'électricité et de m'éclairer à la bougie.
conan
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 30 Aoû 2009, 09:07

ARRESTATION D'UN OPPOSANT - MODE D'EMPLOI

Récit de l'arrestation de Morou Amadou le 10 août dernier
Lu dans Tam-tam Info (28.08.2009):

MOROU EN BASTILLE
Chaque despotisme a besoin d’une Bastille. Le Maroc de Hassan II eut Tazmamart, la Guinée de Sékou Touré eut le Camp Boiro, la terrible autocratie des Tsars et de Joseph Staline eut les goulags de la Sibérie, et, lorsqu’elle entra en conflit avec ses propres principes, la démocratie américaine usa de Guantanamo. Le despotisme naissant du Niger a, déjà tout préparée, la « Maison de Haute Sécurité de Koutou Kalé », aménagée sous le gouvernement pourtant apparemment civilisé de la 5ème République. A vrai dire, la Bastille de Koutou Kalé n’est pas très impressionnante, comparée aux exemples cités. C’est encore une prison assez civile, dont le régisseur (comme nous le verrons tout à l’heure) tient au respect des formes légales et cultive un sens de l’Etat devenu spectral au gouvernail du Niger. Il s’agit d’un vaste domaine ceint d’un mur de pierre de 1m50 environ de hauteur, au centre duquel se trouve une bâtisse construite dans le même matériau. Cette bâtisse contient sept chambrées plutôt étroites (3m² environ) dans chacune desquelles sont entassés une vingtaine de détenus. Elle contient également une douzaine de cellullettes de la taille environ d’une guérite de faction, qui sont destinées aux individus que les personnes au pouvoir souhaitent traiter avec une inhumanité particulière, c'est-à-dire les prisonniers politiques. Initialement programmée comme une simple prison civile située sur le fleuve, la « Maison » de Koutou Kalé a finalement été conçue comme un instrument d’oppression.

Son isolement sur un terrain ouvert sur un 1 km à la ronde, à l’écart du village de Koutou Kalé et de la route de Tillabéry, est le signe d’un dessein sinistre, que l’on ne doit du reste pas au nouveau dictateur nigérien, Tandja Mamadou, mais (selon toutes apparences) à son ancien ami et partenaire, Hama Amadou.
C’est dans cette plaisante résidence que Morou Amadou, activiste des droits humains et patriote nigérien, a été assigné, après quelques tumultueux événements que nous portons ici à la connaissance du lecteur, car ils soulignent la nature du système de gouvernement qu’on prépare pour les Nigériens.

Les tribulations de Morou ont commencé le dimanche 9 août. C’était le jour anniversaire de la Constitution de la 5ème République, et Morou le célébra en lisant une éloquente déclaration publique d’adhésion à cette constitution, à la démocratie représentative et à l’Etat de droit. C’était au Centre de Documentation de l’Association Nigérienne de Défense des Droits de l’Homme (ANDDH), à dix heures tapantes.
Le lendemain matin (lundi 10), à six heures du matin, Morou Amadou est arrêté pour « atteinte à la sûreté de l’Etat » et retenu à la Police Judiciaire, où il passe la nuit. Lorsqu’il comparaît le mardi 11, devant le tribunal de première instance de Niamey, le chef d’accusation est assez mystérieusement devenu « propagande ethno-régionaliste ». Les avocats de Morou n’eurent guère de mal à mettre en épingle les vices de procédure dont toute l’opération était entachée, et le juge prononça sa relaxe, vers 13h, après deux heures de débats d’audience.

Tout aurait dû s’arrêter là, dans le Niger normal d’avant. Morou devait simplement être conduit à la prison civile de Niamey pour une procédure banale et rapide, la signature des documents de levée d’écrou. Ces documents s’avérèrent cependant « introuvables ». Morou de prendre donc racine à la prison civile, tandis que (comme on s’en doute) l’entourage du dictateur s’enfiévrait pour trouver un moyen plus ou moins malin de le « chauffer ». Durant ce laps de temps, il ne lui fit même pas permis de se sustenter, en dehors de deux bouteilles d’eau minérale consommées au tribunal. En fin de compte, vers 16h, comme Morou sortait pour faire ses ablutions, des 4X4 chargés de FNIS déboulèrent devant la prison et quelques éléments en bondirent pour se saisir de sa personne, devant ses amis et des membres de sa famille éberlués.

L’un de ses amis appelle aussitôt Me Le Bihan pour le prévenir de ce qui se passait, et l’avocat eut le temps de rappliquer tandis que les FNIS s’efforçaient de disperser la foule, tout en chargeant un matelas à l’arrière d’une des 4X4. Me Le Bihan demanda aussitôt aux FNIS : « Où est-ce que vous m’amenez mon client ? » Mais ces derniers l’ignorèrent superbement, et, plaçant Morou à l’arrière d’un de leurs véhicules, démarrèrent en trombe. La scène put être photographiée et filmée, Dieu merci. Me Le Bihan (ah ! le brave homme !) sauta dans sa propre automobile et poursuivit les 4X4 des FNIS, mais ceux-ci réussirent à le semer dans la circulation, au niveau de la place de l’Assemblée. Peine perdue d’ailleurs :

Morou étant maintenant une célébrité, le pouvoir ne faisant pas dans la dentelle et la téléphonie cellulaire étant répandue, une personne de Yantala qui vit passer le convoi sur la route de Tillabéry appela les amis de Morou pour signaler le fait. On put conclure que les FNIS qui avaient enlevé l’activiste l’amenaient à la « Maison » de Koutou Kalé.
Et là, il se produisit quelque chose de fort intéressant.
Il est certain que, dans l’esprit de ceux qui règnent aujourd’hui au Niger, la loi et les règlements ne comptent plus que pour du beurre, et les Nigériens doivent s’accoutumer à vivre dans une sorte de jungle où ceux qui ont le contrôle du plus grand nombre de gros bras et de fusils peuvent n’en faire qu’à leur tête. On peut voir en tout cas que si tel n’est pas encore tout à fait le cas, tel est bien le plat amer et malodorant qui est préparé aux Nigériens. Pour l’heure, ce jour mardi 11 août, en milieu d’après midi, le sens de l’ordre et du point de principe apparut brusquement dans la personne du régisseur de la prison de Koutou Kalé, qui déclara aux FNIS ne pas pouvoir prendre un prisonnier sans ordre écrit (mandat de dépôt) du juge. Waw !
Retour du coup des 4X4 à Niamey, attente encore. Puis les FNIS sont contactés par la nébuleuse autoritaire, avec ordre de retourner à Koutou Kalé, le régisseur ayant, semble-t-il, été dûment chapitré. Néanmoins, lorsque les 4X4 reviennent à la « Maison », le régisseur s’étonne qu’ils n’aient toujours pas de papier, et refuse derechef de prendre livraison du paquet. Re-waw!
Alors, encore, retour à Niamey où, à 22h, à la prison civil, un Morou éreinté signe le document de levée d’écrou miraculeusement retrouvé, et peut appeler un de ses amis pour venir le prendre à la sortie de cet établissement. Sauf que ce qui l’attendait dehors, c’était cette fois un véhicule de la Police Judiciaire, avec ordre d’embarquement et d’interrogatoire.

Morou fait remarquer à l’inspecteur de police que 22h n’était pas, à sa connaissance, une heure légale d’arrestation, mais l’agent lui rétorque qu’il avait reçu des ordres fermes et le supplie de ne pas lui compliquer la tâche. Morou se laisse donc embarquer. Néanmoins, devant son évident état d’épuisement physique, l’inspecteur de police (encore une de ces surprenantes îles d’humanité dans un océan de barbarie) juge plus prudent de surseoir à l’interrogatoire, et décide de faire examiner Morou par un médecin. Le médecin appelé à cet effet prescrit des calmants et un repos complet, et Morou peut enfin voir la fin d’un interminable Golgotha. Au moins pour ce jour là…

Le lendemain, en effet, on lui annonce (surprise !) un nouveau chef d’accusation assez pittoresque, et fleurant bon la mauvaise foi confite : « administration d’organisation non reconnue ». Voilà bien, en effet, de quoi mobiliser la PJ, mettre des FNIS en branle et enfermer quelqu’un dans une prison de haute sécurité. Il nous avait échappé que le FUSAD était une organisation terroriste, ou peut-être une association de malfaiteurs ? Non, dites-vous, il s’agit d’une simple association de défense des droits humains ? Mince alors ! Je ne savais pas que la défense des droits humains était chose si atroce. Ah oui ! Nous sommes en « 6ème République », j’oubliais. Les droits humains n’y ont pas cour, passez votre chemin.

Pour en revenir à notre ami Morou, il passe donc la journée à la PJ, en attendant de comparaître une nouvelle fois au tribunal. Cette fois, cependant, le coup est mieux préparé. Le doyen des juges (poste politique) en personne va entendre le jeune activiste, et décide d’ouvrir une « enquête judiciaire », procédure qui permet de détenir une personne un certain temps de de la façon la plus formellement légale sans rendre justice (c’est ainsi, me dit-on en tout cas). Il faut noter que l’audience au tribunal étant prévue à 9h, une foule considérable se rassembla devant le palais de justice pour assister au procès (Vive Niamey !).

Afin de la décourager, l’heure d’arrivée de Morou fut reculée d’heure en heure jusqu’à 17h ! Néanmoins, à 17h encore il y avait foule (Ouais, décidément : vive Niamey !), et lorsque Morou descendit du véhicule de police, il répondit aux acclamations par des slogans anti-dictature clamés haut et fort. On a pu remarquer que les deux fameuses 4X4 des FNIS étaient déjà présentes sur les lieux, comme des molosses à l’attente. Signe patent que, la décision étant déjà prise à l’avance, le procès était une simple formalité. Le juge fit donc semblant d’entendre Morou et ses avocats puis ordonna son transfert à Koutou Kalé en attendant un « complément d’enquête ». Les FNIS purent repartir avec enfin ce fameux mandat de dépôt.

Le juge avait signifié à Morou qu’il devait de nouveau comparaître le 21 août. Ce jour venu donc, une grosse foule s’était de nouveau rassemblée devant le palais de justice de Niamey – à la grande fureur de la nébuleuse autoritaire. Alors, alors qu’arriva-t-il ? Eh bien, voici M. le juge qui prend sa bagnole et hop ! se rend à Koutou Kalé pour entendre Morou dans sa prison. C’est tout de même sensationnel ! Morou Amadou, grain de sable dans le moteur du rouleau compresseur de la dictature : c’est manifeste.
Ceux qui l’ont vu m’écrivent qu’il est bien traité. Il n’a pas été mis en guérite. Les prisonniers et les gardes de la prison le respectent. Ces derniers accueillent même de façon très hospitalière ses visiteurs.

Certes, il n’a pas droit au traitement de prestige réservé à Hama Amadou en son temps, mais son sort n’est pas comparable à celui d’un autre prisonnier politique moins connu, et arrêté dans des circonstances similaires, Elhadj Alassane Karfi, militant du PNDS, qui a subi des traitements abusifs et dégradants dans sa geôle.
Chaque jour qui passe rend Morou plus populaire à Niamey. Les échos me rapportent qu’il n’est bruit que de lui au Grand Marché, et avant son arrestation, des villageois venaient de la campagne pour le saluer et le remercier de sa bravoure. A l’ambassade de France – dont une bonne partie du personnel n’approuve pas le soutien apporté par Nicolas Sarkozy à la dictature nigérienne, sans oser le faire savoir publiquement – on trouve des affiches « Libérez Morou ».

En dehors du régime, les seuls adversaires qu’il rencontre sont des intellectuels nigériens qui, avec la mesquinerie qui caractérise souvent cette classe dans les petits pays d’Afrique, le jalousent et supposent qu’il « fait tout cela » pour un « poste international » ou des « gros sous ». J’ai bien envie de dire « Et même ? Et alors ? Ce sont les résultats qui comptent ! » En tout cas, c’est bien cet état d’esprit, cette absence de principes et de générosité au niveau de ceux qui pensent être « l’élite », qui expliquent la faiblesse de la résistance nigérienne à la dictature, et risquent de prolonger outre-mesure les épreuves du Niger.
M. Komé
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 30 Aoû 2009, 19:51

La crise nigérienne prend l'allure d'un affrontement constitutionnel entre les partisans de la nouvelle république, celle instaurée autoritairement par Tandja, et les partisans de l'ancienne qui ne reconnaissent pas le nouveau pouvoir.
Le 24 août à Niamey, l'opposition, toujours plus légaliste, avaient réhabilité l'Assemblée Nationale dissoute au mois de mai. lors d’une manifestation publique réunissant plusieurs milliers de militants devant le siège du Bureau de la Délégation Régionale CDS, devenu par la force des choses le QG de la CFDR, à défaut d'avoir accès aux places publiques.

Ce dimanche, lorsque 67 députés (sur les 113 que comptait le parlement) escortés par plusieurs milliers de partisans se sont rendus vers le siège du parlement où ils comptaient se "réinstaller", ils en ont été empêche par les forces de l'ordre qui ont tenté de les disperser à coups de matraques. Des échauffourées ont alors acommencé qui se sont rapidement étendues au quartier Poudrière, dans le centre-ville.
D'après l'AFP, les affrontements ont été "particulièrement violents", grenades de gaz lacrymogènes contre jets de pierres et cocktails molotov. Plusieurs personnes auraient été sévèrement blessées.

Pendant ce temps, le pouvoir tente d'acheter la pacification aux chefs MNJ de la rebellion touarègue dont les troupes seraient à une douzaine de kilomètres d'Agadez. Il est en effet important pour les autorités d'ouvrir cette région au tourisme afin de bénéficier d'un apport financier qui compenserait en partie la suspension de l'aide internationale.

Pendant ce temps, l'Etat français observe tout cela de haut, en espérant que la dégradation de la situation ne viendra pas altérer ses intérêts stratégiques au delà d'une limite qu'il a déjà dû se fixer. Pendant ce temps, les rédactions continuent de mettre à la poubelle les dépêches en provenance de Niamey.
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede conan » 30 Aoû 2009, 19:59

Merci Antigone pour ces infos. J'ai une question : ne penses-tu pas que l'Etat français puisse voir dans ce chaos une opportunité réelle de monnayer une nouvelle intervention de l'armée française, contre une renégociation des prix de l'uranium et des concessions d'Areva ?
Dans un contexte de concurrence accrue avec la Chine, qui peu avant ces événements, avait permis aux potentats locaux de se la jouer (un peu) plus coudées libres avec la France.
conan
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 30 Aoû 2009, 20:19

Je ne crois pas.
Le gouvernement a déjà l'Afghanistan sur les bras et d'autre part, s'il en avait l'intention, il aurait préparé l'opinion publique... hors il y a un black-out total de la presse.
D'autre part, en décidant d'une intervention militaire, il prendrait le risque de tout compromettre. Il serait pris en flagrant délit de soutien à une dictature et s'exposerait aux sentiments anti-français de la population dont il a déjà été la cible par le passé en Centrafrique et plus récemment en Côte d'Ivoire.

Ce qui est intéressant dans cette situation, c'est que y sont réunis tous les problèmes que l'on rencontre en Afrique. Une dictature corrompue, une opposition démocratique dont le légalisme va finir par montrer ses limites, une concurrence impérialiste impitoyable, une rebellion, un scandale écologique, et tout cela s'imbrique. Et en plus, la France est directement impliquée.

Dommage que l'Afrique n'intéresse pas les révolutionnaires parce qu'on y rencontre des initiatives communautaires, des villages qui s'associent grâce à l'énergie des femmes, une solidarité... Dommage.
Modifié en dernier par Antigone le 31 Aoû 2009, 15:44, modifié 1 fois.
Antigone
 

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