Niger = Areva-Land

Re: Niger = Areva-Land

Messagede conan » 30 Aoû 2009, 20:29

Justement, j'avais tendance à penser que le black-out médiatique couvait quelque chose... quoique, il y a toujours eu black-out médiatique sur le Niger. Vu que c'est notre fournisseur principal d'électricité, il est clair que ça foutrait mal Areva que les gens en France s'intéressent à ce qu'implique le fait d'appuyer sur un interrupteur électrique.
Antigone a écrit:Je ne crois pas.
Dommage que l'Afrique n'intéresse pas les révolutionnaires parce qu'on y rencontre des initiatives communautaires, des villages qui s'associent grâce à l'énergie des femmes, une solidarité... Dommage.

Tout à fait d'accord ! Pour ma part, je m'y suis toujours intéressé, pour connaître pas mal d'Africain-e-s. J'ai aussi rencontré les Desert Rebel, groupe nigérien (touareg) de musique, de passage dans mon département ; ils avaient évoqué leurs problématiques politiques, c'est désespérant.
Quand on parle avec des gens qui ont vécu là-bas, la route est longue là-bas, et jonchée d'obstacles, pour passer de pratiques quotidiennes alternatives, qui répondent à des situations immédiates parfois dramatiques, à l'espoir d'une réelle alternative politique - révolutionnaire... :cry:
Je me souviens au Niger, il y a deux ans je crois, d'une prise d'otages... la condition de libération était que le président de la République lise la lettre de réclamation balancée par les touaregs. C'est dire le rapport de forces, c'est triste. Il faut dire qu'il y a eu du ménage dans les décennies passées, parmi tout ce que l'Afrique pouvait compter de révolutionnaires prêts à en découdre.
conan
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 13 Sep 2009, 11:08

Pour en finir définitivement avec la Ve République et permettre à la VIe de s'exercer dans les meilleures conditions après les prochaines législatives, Tandja a décidé de faire le vide dans le personnel politique. Il vient de s'en prendre aux députés de l'assemblée, aujourd'hui dissoute, qui le 22 décembre 2008 avaient refusé de lui accorder le droit de se représenter.
Depuis le 10 septembre, ces députés sont interdits de sortie du territoire.
Tous les élus sont concernés et non plus seulement la trentaine de parlementaires interpelés au début du mois, soupçonnés d'avoir détourné des deniers publics. Certains ont déjà été inculpés et placés sous mandat de dépôt pour délit de favoritisme dans des dossiers d'attribution de faux marchés publics, ou pour s'être accordés de faux frais de mission.

Parmi les députés visés, d'anciens députés de l'opposition mais aussi de la majorité présidentielle, ainsi que des fonctionnaires de l'ancienne Assemblée et des commerçants. Leur point commun est d'avoir occupé des postes à responsabilité au Parlement, ces dix dernières années. C'est à ce titre que le parquet de Niamey aurait ouvert une enquête sur les indemnités parlementaires, à la suite d'un rapport d'inspection commandé par le chef de l'État, qui révèlerait, ô surprise, des irrégularités.

Plus de 150 autres personnes devraient être entendues au cours des prochains jours dans cette affaire de détournements qui porterait sur 18 milliards de francs CFA environ (27 millions d'euros). Mais comme au Niger, tous les politiciens ont de près ou de loin participé au système mis en place par Tandja ces dernières années, il n'y a pas besoin de creuser profondément pour découvrir des preuves de corruption.
Tandja a beau jeu de préparer des procès contre des moins corrompus, des moins enrichis que lui. Cela lui fournit l'occasion de se débarrasser à bon compte de quelques uns de ses opposants... et de mettre également sur la touche quelques amis qui s'étaient jusqu'alors montrés loyaux, mais qui auraient pu devenir embarassants. Cela va surtout lui permettre d'apparaitre aux yeux de la population comme l'homme de la vertu et du juste droit. Pour cela, il peut déjà compter sur le soutien de Télé Sahel, la chaîne de télévision nationale, et des médias publics tout acquis à sa cause. Il est habile, le monsieur !

De son côté, l'opposition rassemblée dans la Coordination des Forces pour la Démocratie et la République (CFDR) peut dénoncer "une chasse aux sorcières", accuser le président de "détourner les moyens de répression de l'État à des fins de règlement de comptes politiques" et en appeller à la "résistance", ces appels ont de grandes chances de rester lettre morte. D'autant que, ne participant pas aux législatives du 20 octobre pour ne pas légitimer le coup d'Etat référendaire, elle ne semble pas avoir d'autre atout à faire valoir. Cette politique de la chaise vide n'empêchera pas ces élections d'accoucher d'une Assemblée qui ne sera qu'une chambre d'enregistrement des décisions présidentielles. Chacun parait déjà s'y résigner.

Dans les forums de discussion pourtant, des voix s'élèvent pour mettre en cause cette démocratie importée d'Europe qui ne propose qu'une autre manière d'aboutir à la même case prison. D'autres voix appellent à changer de stratégie, à abandonner les manifestations types estudiantines pour se mettre dans la logique d'une lutte politique qui s'inspirerait de celle de l'ANC pendant l'apartheid, et ne pas reculer devant des risques d'affrontements qui pourraient causer des victimes.
Ainsi cet intervenant: « je trouve ridicule qu’à chaque petite charge de la police que les manifestants fuient pour se cacher et se présenter à la fin devant les caméras de la Télé Dounia pour présenter quelques égratignures et pleurnicher en disant que la répression a été violente ! Les téléspectateurs sont habitués à voir les images des pays ou on réprime violemment ; par exemple en Guinée ou le bilan d’une journée peut s’élever à plus de 100 morts. Il faut en organisant une manifestation se dire qu’il y aura une partie qui va laisser sa vie; c’est de cette manière seulement qu’on aura la victoire sur les forces de répression ».

A quelques milliers de kilomètres plus au Sud, au Gabon, un autre pays où les habitants vivent dans une misère sans nom en dépit des fabuleuses richesses de leur "émirat", l'élection présidentielle aura servi de paravent à un coup d'Etat légal qui, comme on pouvait s'y attendre, aura permis à Bongo fils de succéder à feu Bongo père.
Une mascarade de plus... Courrier International du 11.09.09 rapporte l'exemple d'un bureau à Libreville, la capitale, avec 400 inscrits, 165 votants mais 550 enveloppes !
Les incidents qui ont suivi l'annonce des résultats auraient fait officiellement 3 morts, 15 d'après l'opposition, mais des témoignages indiqueraient que des hélicoptères de l'armée auraient jeté des cadavres par dizaines dans la mer.

En réclamant le recompte des bulletins, une vérification des p.v. et en annonçant trois journées de "ville morte" sur toute l'étendue du territoire, l'opposition gabonaise reprend les mêmes moyens de défense légalistes de l'opposition nigérienne qui ont donné les résultats que l'on sait.
Quant aux intérets français, ils ont à peine été écornés. A Port-Gentil, des installations de Total ont été prises pour cibles par les manifestants, mais rien de sérieux. Ouf de soulagement dans les rédactions.

A Airlit, les mines d'Areva ont été peu affectées par les pluies torrentielles qui se sont abattues dans la nuit du 1er au 2 septembre sur une zone touchant le Mali, le Burkina Faso et le Niger.
Par contre à Agadez, la digue située en amont a cédé, causant l'écroulement de quelques 3500 maisons. Plusieurs personnes, des enfants pour la plupart, ont été emportées par les eaux.
Mais au Niger, la situation est telle qu'en demandant de l'aide, on se demande si elle ne sera pas détournée avant d'avoir la moindre chance de parvenir aux populations à secourir. De plus, les routes environnantes restent peu sures en raison de la présence des forces rebelles, ce qui contribue à l'enchèrissement des produits de première nécessité.
Enfin, du fait que Tandja ait reconduit pour trois mois l’état de "mise en garde" qui donne pleins pouvoirs à l’armée et à la police, on en est à espèrer que l'idée ne viendra pas à l'armée nigérienne de s'en mêler pour ne pas venir piller le peu que les habitants auront pu sauver.

Ainsi va l'Afrique...
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 16 Sep 2009, 17:51

Liberation.fr + Youphil - 15 sept. 2009
AREVA AU NIGER: LES ASSOCIATIONS DEBOUTEES

Le tribunal correctionnel de Paris a jugé mardi irrecevable l'action engagée par les Touaregs du Niger contre le leader mondial de l'industrie nucléaire civile Areva. Le directeur de la protection du patrimoine et des personnes, l'ancien amiral Thierry d'Arbonneau, ainsi qu'Areva en tant que personne morale avaient été assignés par l'association Alhak-en-Akal, défendant la société civile touareg du Niger, ainsi que par l'ONG allemande Menschenrechte 3.000.

M. d'Arbonneau était accusé de «provocation à la discrimination, à la haine et à la violence raciale» pour avoir appelé le gouvernement français à aider le Niger à «mater la rébellion des touaregs, ces hommes en bleu qui font rêver les hommes et chavirer le cœur des femmes, mais ne sont qu’une illusion », lors d'un colloque sur la "sécurité économique" organisé par le Medef à Paris, le 21 octobre 2008. Ses propos avaient été rapportés par Le Canard enchaîné du 5 novembre 2008.
Lors du procès, qui s’est déroulé en juin dernier, le responsable d’Areva s’était défendu de les avoir tenus.

Mais dans un jugement rendu mardi, la 17e chambre a considéré que les associations, enregistrées pour l'une au Niger et pour l'autre en Allemagne, n'avaient pas la légitimité nécessaire (avoir au moins 5 ans d'existence) pour pouvoir prétendre à une telle poursuite.

Joint par Libération.fr à son retour d'audience, l'avocat des plaignants, Me Jérôme Bouquet-Elkaïm, ne compte pourtant pas faire appel car il juge la décision positive : «l'irrecevabilité n'est pas une surprise, elle correspond à la jurisprudence. En revanche, Areva n'a pas obtenu les indemnités qu'elle réclamait pour procédure abusive, ce qui peut être interprété comme une reconnaissance des faits.»

D'autres actions à venir:
Il précise en outre qu'une action de plus grande ampleur est en cours contre l'Etat Français, actionnaire majoritaire d'Areva, auprès du Comité pour l'élimination des discriminations raciales, qui dépend des Nations Unies. Y sont notamment évoqués «la méconnaissance du consentement préalable des populations, leurs droits fonciers, ainsi que les déplacements forcés et la contamination radioactive du sous-sol.»

Me Bouquet-Elkaïm s'insurge d'autre part du procès en diffamation intenté contre lui par l'entreprise suite à l'article «Le lobying d'Areva pour l'uranium du Niger» publié par l'hebdomadaire Charlie Hebdo le 29 avril 2009. Dans une motion de soutien, le barreau de Rennes, dont il est membre, a dénoncé «une mesure de représailles et de déstabilisation dépourvue de substances». Contactés par Libération.fr, les représentants d'Areva n'ont pas souhaité s'exprimer.

Premier employeur privé du Niger, l'industriel français exploite dans ce pays plusieurs gisements d'uranium. Depuis début 2007, les autorités du troisième producteur mondial d'uranium sont confrontées aux actions de la rébellion touareg qui réclame une meilleure redistribution pour les populations locales des bénéfices tirés de cette exploitation. Y.L.
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede conan » 16 Sep 2009, 18:50

La justice a encore joué son rôle de cerbère des intérêts de l'Etat bourgeois. Mais je suis content de voir la stratégie des assocs : bien qu'elles semblent avoir la conscience que ces actions juridiques n'ont aucune chance d'aboutir contre un tel ogre, elles les utilisent délibérément pour faire connaître ce qui se passe au Niger. Et malgré la lucidité à avoir sur la stérilité du recours à la "justice", l'on ne fera pas la fine bouche sur ce point, tant les gens sont ignorants à ce sujet.
conan
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 09 Oct 2009, 15:53

Reuters - 07 oct. 2009

Quatre employés d'Areva enlevés quelques heures au Niger

Quatre employés d'Areva, dont trois géologues, ont été enlevés durant quelques heures, ce mercredi, dans le nord du Niger, dans la région d'Arlit, où Areva exploite des mines d'uranium stratégiques.

D'après le groupe français, ils ont été libérés sains et saufs par leurs ravisseurs. Selon une source bien informée, ces quatre personnes - trois Français et un Nigérien - auraient été capturés par une faction touareg rebelle dirigée par l'ancien ministre du tourisme, Rhissa Ag Boula.

Ce dernier, qui dirige le FFR (Front des forces du redressement), a publiquement affirmé, par le passé, vouloir s'en prendre aux intérêts du groupe nucléaire français, qu'il accuse de soutenir le régime du président Mamadou Tandja. A cet égard, le bref enlèvement des employés d'Areva peut être interprété comme un avertissement.

"Nous voulons faire passer le message au gouvernement (nigérien) qu'il est impossible de faire quoi ce soit en matière de prospection et d'exploitation avant la résolution des problèmes dans le nord du pays", a expliqué le chef du MNJ, Agali Alambo, joint de Lagos.

Le Mali et le Niger ont conclu avec des groupes rebelles touaregs, dont la principale faction, le MNJ (Mouvement des Nigériens pour la justice), un accord de paix global aux termes duquel 1.100 combattants ont déjà déposé les armes, a annoncé mardi le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi qui parrainait les pourparlers.

Cependant, le principal mouvement insurrectionnel touareg a critiqué l'accord dans un communiqué publié mercredi sur son site internet, ce qui fait craindre que la persistance de divisions entre factions ne le torpille comme les précédents.

Depuis début 2007, les autorités nigériennes sont confrontées aux actions du MNJ qui réclame une plus grande part pour les populations locales et le développement de leur région des bénéfices tirés de l'uranium, extrait dans le nord du pays et dont le Niger est troisième producteur mondial.

Areva, numéro un mondial du nucléaire civil et premier employeur privé du Niger, exploite depuis quarante ans deux gisements au Niger, l'un à ciel ouvert à Arlit (nord) et l'autre souterrain à Akokan, près d'Arlit, qui ont produit en 2006 près de 2.260 tonnes d'uranium et permettent d'alimenter un tiers des centrales d'EDF. En mai dernier, le groupe d'Anne Lauvergeon a officiellement lancé les travaux pour l'exploitation d'une mine à ciel ouvert gigantesque, à Imouraren.
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 11 Nov 2009, 14:50

Areva ne fera pas la loi au Niger
RDV à Evreux le samedi 28 novembre, Maison de quartier de Nétreville, 5 rue Duguay Trouin
Réunion publique: Nord Niger, une région pillée, un peuple sacrifié.

> A partir de 14h
Exposition, Stands des organisations participantes, Vente d’artisanat touareg

> A partir de 16h Projection du reportage « Niger : la bataille de l'uranium »
De Frédérique Denis, Stéphane Manier, Siby Nahan, production : Galaxie presse (avec la participation de France 5), durée 47 min

> A partir de 17h: Table-ronde-débat animée par Nicolas Rossignol (Attac27). Intervenants : Issouf Ag Maha (Tchinaghen), Jean-Claude Mary (RSN27), Etienne Lozay (CCFD), Jean-Yves Guyomarch (Les Verts-Europe Ecologie), Pierre Vandevoorde (NPALouviers)

> A partir de 19 h
Moment de convivialité (boissons, musique…)
Entrée libre
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 13 Fév 2010, 12:56

Challenges - 09 fev 2010

L'Elysée s'inquiète pour les positions d'Areva au Niger

Nicolas Sarkozy veut dissuader ce pays riche en uranium, où le groupe français investit 1,2 milliard d'euros dans un nouveau gisement, de se rapprocher des Chinois et des Iraniens
L'Elysée s'inquiète de la pérennité du "partenariat durable" entre Areva et le Niger, un pays riche en uranium où le groupe français investit 1,2 milliard d'euros dans un nouveau gisement.
Nicolas Sarkozy ne devrait pas se rendre à Niamey lors de son voyage en Afrique fin février qui l'amènera au Gabon et au Rwanda. Mais il y dépêchera le ministre des Affaires étrangères Bernard Kouchner ou le ministre de l'Industrie Christian Estrosi afin de dissuader le président Mamadou Tandja de se rapprocher des Chinois et des Iraniens.


RFI - 07 fev 2010

Le Niger menacé par une crise alimentaire

En raison de l’insuffisance des pluies, Quelque 2,7 millions de personnes sont menacées par une crise alimentaire au Niger. Pour éviter la catastrophe, le gouvernement envisage la distribution gratuite sous condition des vivres aux personnes les plus vulnérables. Mais des critiques se font entendre sur la gestion de ce problème par les autorités.

Le 18 janvier 2010, le conseil des ministres a discuté des mesures à prendre pour prévenir une crise alimentaire. Depuis lors les points de presse se sont multipliés. Le porte-parole du gouvernement a ouvert le ban en annonçant le déblocage de 6 millions de francs CFA, pour l’achat de céréales. Quelques jours plus tard, c’est le ministre du Commerce qui s’exprime devant micros et caméras. « Les Nigériens, dit-il, sont assurés qu’ils ne seront pas confrontés à une pénurie alimentaire. Le stock des vivres prévues couvrira largement les besoins », explique le ministre.

Le patron du «Système d’alerte précoce gestion des catastrophes», anime à son tour un autre point de presse. Il annonce, dès février, le début d’une opération cash for work : les personnes vulnérables peuvent effectuer des travaux d’intérêt général et gagner en contrepartie de l’argent pour s’acheter des vivres. Une vente de céréales à prix réduits est prévue en mars. Et des distributions gratuites de vivres auront également lieu.
Mais la presse et les milieux associatifs accusent les autorités de cacher la souffrance des populations en évitant de faire appel à l’aide internationale.
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 18 Fév 2010, 17:30

Au moment du référendum, Tandja avait pensé s'acheter la loyauté des militaires avec quelques promotions assorties de petits cadeaux. Il faut croire que cela n'a pas suffi...

Bien entendu, on va nous dire que l'armée est intervenue pour rétablir des institutions de la Républque, "rendre le pouvoir au peuple". Les vraies raisons sont à rechercher dans les inquiétudes exprimées par l'Elysée il y a quelques jours au sujet de la défense de ses interêts fondamentaux menacés par le projet de Tandja d'avoir la Chine et l'Iran comme partenaires privilégiés (relire l'article plus haut).

Pour l'heure, l'agence Chine Nouvelle n'a toujours pas réagi. Un embarras pas si bizarre.
Tadja a voulu être trop gourmand. Paris le débarque pour damer le pion aux chinois.
Ainsi, Areva est sauf. Le scénario était bien rodé...

AFP - 18 fev 2010

Niger: tirs à Niamey, tentative de "coup d'Etat", selon un responsable français

Une tentative de "coup d'Etat" est en cours jeudi au Niger, a déclaré à l'AFP un responsable français, alors que des témoins ont fait état de tirs nourris d'armes automatiques à Niamey, notamment près de la présidence.

En milieu d'après-midi, des soldats étaient déployés autour du palais présidentiel et dans les rues adjacentes, a constaté un journaliste de l'AFP.

"Il y a une tentative de coup d'Etat" au Niger, a déclaré à Paris ce responsable français, qui a requis l'anonymat. "Tout ce que je peux dire, c'est que a priori (le président nigérien Mamadou) Tandja n'est pas dans une bonne position", a-t-il ajouté.
Paris a demandé aux Français de Niamey de rester chez eux, selon des sources diplomatiques.

Mercredi, le Premier ministre du Niger Ali Badjo Gamatie avait annoncé "une réunion importante du conseil des ministres" pour ce jeudi. Ces réunions ministérielles sont normalement présidées par M. Tandja.

Le Niger est plongé dans une grave crise depuis que Mamadou Tandja, après dix ans de pouvoir, a dissous l'an dernier le parlement et obtenu une prolongation controversée de son mandat à l'issue d'un référendum constitutionnel.

Des témoins ont fait état jeudi après-midi de tirs dans la capitale nigérienne.
"Il y a 40, 45 minutes, on a commencé à entendre des tirs de mitraillettes, et après, de grosses déflagrations. Ca a fait trembler la maison", a raconté vers 13H00 GMT Claire Deschamps, une Française vivant à Niamey, contactée par l'AFP par téléphone depuis Paris.
Ce témoin, qui a indiqué être barricadée chez elle, vit à "une dizaine de minutes en voiture de la présidence".

Un autre témoin a déclaré à un journaliste de l'AFP à Niamey que les tirs avaient commencé autour du palais présidentiel.
"Les tirs étaient dirigés vers le bureau du président", a rapporté ce témoin, qui travaille dans un endroit situé en face de ce bâtiment.

Un troisième témoin a rapporté sur Radio France internationale (RFI) qu'il était "à la présidence pour voir un conseiller quand ça a commencé".
"J'ai entendu des coups de feu. Il y avait des armes lourdes (...) et des obus. Je vois une fumée vers le bureau du président", a-t-il ajouté, interrogé depuis Paris par RFI vers 14H00 GMT.

Après dix ans de pouvoir, Mamadou Tandja devait initialement se retirer en décembre, mais la nouvelle Constitution adoptée en août lui assure encore au moins trois ans à la tête du pays. L'opposition a dénoncé un coup d'Etat.
Pour arriver à ses fins, Mamadou Tandja avait dissout le Parlement et la Cour constitutionnelle qui s'opposaient à son projet.
La tenue en octobre de législatives, également boycottées par l'opposition, a entraîné la suspension du Niger par la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), et l'Union européenne a suspendu son aide au développement.

Le dialogue inter-nigérien de sortie de crise entre pouvoir et opposition, qui se déroule sous l'égide d'un médiateur de la Cédéao, a été suspendu la semaine dernière.
Les médias d'Etat au Niger ne communiquaient jeudi aucune information quant à une éventuelle tentative de coup d'Etat, a constaté l'AFP.

La dépêche diplomatique - 18 fev 2010

Niamey : Le quartier présidentiel pris d’assaut

Rude matinée au quartier du palais présidentiel de Niamey qui semble être, en cette matinée du jeudi 18 février, le théâtre d’une confusion totale. En effet, des tirs à l’arme lourde, durant 40 minutes, ont retenti dans ces lieux, paralysant l’atmosphère. « Il y a 40, 45 minutes, on a commencé à entendre des tirs de mitraillettes, et après de grosses déflagrations. Ca a fait trembler la maison. Ca a duré pendant une demi-heure ininterrompue », a raconté une française vivant à Niamey et contactée par l'AFP. C’est au moment où les ministres nigériens étaient en conseil extraordinaire, que « les tirs sporadiques », confie Rfi, ont retentis de tous bords bloquant du coup, les membres du gouvernement dans les locaux de la présidence.

Dans les rues des quartiers voisins, s’est la débandade des populations à perte de vue, qui fuient dans un tohubohu où se mêlent fumées et coups de canons, pour se cacher chez eux. Selon toujours Rfi, les différentes casernes militaires de la ville sont en état d'alerte avec des armes lourdes pré-positionnées devant les bâtiments.
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 20 Fév 2010, 11:37

Le Figaro - 20 fev 2010

Niger : pas de crainte pour Areva

AFP - Le secrétaire d'Etat français à la Coopération Alain Joyandet a estimé hier qu'il n'y avait "aucune raison de craindre" une remise en cause du partenariat entre l'Etat du Niger et le groupe nucléaire Areva, au lendemain d'un coup d'Etat dans ce pays.

"Les militaires qui ont pris le pouvoir ont affirmé qu'ils respecteraient les traités et conventions signés par le Niger", a déclaré Alain Joyandet au quotidien Le Parisien.

"Il n'existe donc aucune raison de craindre que le partenariat à long terme qu'Areva a construit avec l'Etat nigérien et les populations locales soit perturbé", a-t-il ajouté.

Le leader mondial de l'atome civil est présent depuis 40 ans au Niger, où il extrait près de la moitié de son uranium. L'armée a pris le pouvoir jeudi au Niger, déposant le président Mamadou Tandja et déclarant le gouvernement "dissous".
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 19 Mar 2010, 14:16

Les Afriques - 19 mar 2010

Niger: La valse des multinationales

La junte militaire nigérienne, au pouvoir depuis le 18 février dernier, est sur le point d'examiner les prochains jours les contrats et avenants miniers, pétroliers et de télécommunications attribués à des concessionnaires privés par l'ancien régime Tandja.

"Les autorités militaires ont décidé d'auditer tous les contrats d'uranium et d'or", a déclaré à l'agence d'informations américaine Bloomberg un conseiller du nouveau ministre des Mines et de l'Energie, Mahaman Abda, installé par la junte le 1er mars.
"En jeu, le partage de la rente minière entre le pays et les entreprises étrangères", affirment les Echos.

Selon des sources bien informées proches de la junte, les patrons des firmes Areva, de China National Petroleum Corporation et de Zain Niger vont passer à la table des discussions. Sur demande des autorités du Conseil supérieur pour la restauration de la démocratie.

Face à la forte pression de la société civile nigérienne, soutenue par des mouvements associatifs et ONG du pays, la junte, qui jouit encore de la légitimité populaire, compte franchir le Rubicon.
C'est le premier ministre, Mahamadou Dandah, qui doit mettre en musique la nouvelle feuille de route de l'exécutif par l'intermédiaire du tout nouveau ministre des Mines et de l'Energie, Abba Mahamadou. Ce dernier, qui est juriste de formation, est l'une des éminences grises de l'appareil gouvernemental, réputé, dit-on, intransigeant et homme de mesure. A Niamey, on estime que les autorités ont les moyens de leurs ambitions. Et que l'audition de ces firmes ne sera pas seulement un coup de bluff de trop ?

Annoncée dans la capitale nigérienne début mars, la patronne du groupe nucléaire français, Anne Lauvergeon a décidé de surseoir à son voyage à Niamey. Selon nos informations, l'Elysée l’aurait dissuadée au dernier moment, pour y voir clair. En attendant d'opérer un recadrage diplomatique nouvelle version entre Paris-Niamey.

La firme chinoise, China National Petroleum Corporation, concessionnaire de permis sous le régime précédent sur le bloc d'Agadem, à l'Est du Niger est aussi dans le collimateur. Le consortium chinois s'était engagé à investir plus de 5 millions de dollars dans les activités pétrolières au Niger et à construire une raffinerie moderne sur un pipe-line au nord du pays. Sans allié à Niamey aujourd'hui, la CNPC qui manoeuvre en coulisse entend rester dans le jeu.

Le secteur des télécommunications n'est pas épargné. On apprend dans la même veine, que l'opérateur privé de téléphonie mobile Celtel, devenu Zain-Niger, que l'ex régime avait sanctionné pour manquements au cahier de charge et réduit la licence de 5 ans sur un bail conventionnel de 15 ans, sera de la partie.
Ismael Aidara


Démenti quelques hrures plus tard... et quelques jours après que Areva ait reporté l'exploitation de la mine Imouraren. Il y a de la friture sur la ligne, c'est certain, mais réexamen ne signifie pas remise en cause...

AFP - 19 mar 2010

Le Niger dément vouloir revoir les permis miniers d'Areva

La junte militaire au pouvoir au Niger a catégoriquement démenti vendredi les informations faisant état de son intention de revoir les permis miniers d'Areva, qui extrait dans ce pays la moitié de son uranium.
"Personne n'en a officiellement parlé, ce n'est pas à l'ordre du jour, on a rien dit là-dessus", a affirmé à l'AFP Abdoulkarim Goukoye, le porte-parole du Conseil suprême pour la restauration de la démocratie (CSRD, junte).

Selon le quotidien Les Echos, Niamey a annoncé jeudi qu'il voulait revoir tous les contrats miniers du pays, y compris ceux signés avec le champion français du nucléaire.
"Les autorités militaires ont décidé d'auditer tous les contrats d'uranium et d'or", a déclaré à l'agence d'informations américaine Bloomberg un conseiller du nouveau ministre des Mines et de l'Energie, Souleymane Mamadou Abba, installé par la junte le 1er mars.

"C'est une pure spéculation. Il (le prétendu conseiller) ne tient ça de personne, d'aucun officiel et cela n'engage que sa propre personne", a insisté le porte-parole.
Le colonel Goukoye a précisé que le ministère nigérien des Mines va "incessamment publier un démenti" sur ces allégations
.

Et pendant qu'on parle gros sous...

RFI - 11 mar 2010

La famine menace la majorité de la population du Niger

Il y a bien un risque de famine au Niger, de l'aveu même du Premier ministre Mahamadou Danda. Près de 60% des Nigériens sont confrontés à la faim. L'ONU et l'Union européenne s'engagent à soutenir le pays.

Jusqu'ici, il était interdit d'en parler publiquement. Mais, depuis mercredi 10 mars 2010, le mot a été lâché. Le Premier ministre nigérien a prononcé le terme de « famine » devant les partenaires étrangers. Mahamadou Danda a lancé un « appel pressant » à la communauté internationale pour que son pays puisse faire face à la crise alimentaire. Selon lui, 58% des Nigériens sont confrontés à la faim de manière « sévère ou modérée ». Les donateurs, de l'ONU et de l'Union européenne, se sont engagés lors de cette rencontre à soutenir le Niger.

Le mot de «famine» n'est, donc, plus tabou à Niamey et dans le reste du pays. La crise alimentaire - que l’ancien régime du président Mamadou Tandja a voulu cacher - est officiellement reconnue. Là où l’ancien gouvernement annonçait un excédent céréalier de 18 000 tonnes, en 2009, une récente enquête vient de révéler un déficit céréalier brut de 400 000 tonnes.

Les effets combinés de l’irrégularité et de l’arrêt précoce des pluies ont plongé plus de sept millions de Nigériens, soit la moitié de la population, dans une situation alimentaire difficile. Ce qui a fait dire au Premier ministre Mahamadou Danda que le pays traverse actuellement une crise alimentaire aigüe.

Dans un entretien à la presse en 2005, on s’en souvient, Mamadou Tandja avait nié la situation de famine au Niger. Pour lui et son entourage, l’idée de crise alimentaire ou de famine sonnait comme une menace pour la stabilité du régime. Les conséquences sont connues de tous : plus de 200 000 enfants souffrant de malnutrition sévère ont été admis dans les centres nutritionnels.

La junte militaire nigérienne est décidée à sécuriser les populations contre la crise alimentaire, en ordonnant des ventes promotionnelles de vivres et en mettant en place un plan de soutien de 89 milliards de francs CFA (plus de 135 millions d’euros).

IRIN - 11 mar 2010

Les habitants du sud fuient la sècheresse

TANOUT - Sur les quelque 42 familles que compte habituellement le village de Garin Dagabi, 20 chefs de ménages ainsi que 13 familles entières sont partis à la recherche de nourriture et d’eau.

Au cours de la dernière saison des pluies, qui dure en principe quatre mois, le village n’a reçu en tout et pour tout que deux pluies, a dit Issouf Boukary, le chef du village. « A la première pluie, on a semé du mil, ça a commencé à pousser… mais ensuite, tout a séché, on n’a rien pu récolter. »

L’insuffisance des pluies dans tout le pays a conduit à une baisse de 31 pour cent de la production céréalière par rapport à l’année dernière – 410 000 tonnes de moins – d’après les dernières estimations du gouvernement.

Au Niger, un pays qui compte 15 millions d’habitants, la production céréalière brute par habitant risque d’atteindre son niveau le plus bas depuis 20 ans, et plus de la moitié du pays pourrait bien connaître des déficits de production comparables à ceux de 2004, qui avaient contribué à la crise alimentaire nationale de 2005, d’après FEWS NET, l’organisation américaine de surveillance de la famine.

Le gouvernement a estimé que l’insuffisance des pluies a forcé quelque deux millions de personnes à épuiser leurs réserves alimentaires sept mois avant la prochaine récolte. Ce pourrait être le cas, prochainement, de cinq millions de personnes supplémentaires.

Une banque céréalière mise en place il y a trois ans à Garin Dagabi, qui disposait au départ d’un stock de 10 tonnes de céréales, n’en contient plus aujourd’hui qu’environ trois tonnes. « On a un peu d’argent dans la caisse pour acheter d’autres sacs [de mil], mais au prix actuel [à Zinder] on ne peut pas se le permettre et il faut aller loin pour en trouver », a dit M. Boukary à IRIN.

Gouragass

A quelques kilomètres de là, le village de Gouragass n’a pu récolter qu’environ 10 pour cent de sa production habituelle de mil, sorgho et niébé. « En année normale, on arrive à couvrir neuf à 10 mois de nos besoins [alimentaires], mais cette année a été tellement mauvaise qu’on n’avait même pas un mois de réserves après la récolte [en octobre 2009] », a dit à IRIN Alhadji Idi, le chef du village.

Les 140 tonnes de mil distribuées en octobre 2009 par le gouvernement à neuf villages de la zone sont bien loin. L’argent envoyé par les migrants ne suffit pas à couvrir les besoins, comme par le passé, ont dit les chefs des deux villages à IRIN.
« Le village n’avait pas connu une situation aussi difficile depuis [1984, l’une des plus graves crises alimentaires au Niger]. Même [2005] n’était pas aussi dur. Et ça vient à peine de démarrer », a dit M. Idi à IRIN. Les villageois ont divisé par deux la quantité disponible lors des repas, a-t-il ajouté.

Issouf Bayard, sociologue nigérien originaire de Zinder, a dit à IRIN que la crise de 1984 concernait l’élevage et l’agriculture, tandis que celle de 2005 était essentiellement agricole.
« Aujourd’hui, en 1010, nous avons des problèmes d’agriculture et d’élevage, plus une population qui a doublé de volume et des épidémies que nous n’avions pas il y a deux décennies. »
D’après le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA), il faudra mobiliser quelque 166 millions de dollars pour éviter une crise alimentaire dans la région de Zinder.

Aliment de pénurie

Les prix alimentaires enregistrés en décembre dernier à Zinder étant, selon l’ONG belge AQUADEV, en moyenne 30 pour cent plus élevés que les années précédentes, les ménages se tournent vers une plante sauvage que les habitants appellent ‘jiga’, dont se nourrissent habituellement les chameaux et les criquets.
« Le jiga est un aliment de pénurie », a dit à IRIN Yacouba Adjaharou, directeur de la Direction départementale du développement agricole (DDDA) de Tanout. « Les populations en mangent habituellement en petites quantités, mais lorsque la consommation devient importante, c’est signe de difficultés [d’autant plus que] la cueillette a commencé très tôt [dans la saison]. »

Bétail vendu

Des familles vendent leurs vaches – y compris les vaches pleines et les veaux – pour se procurer de quoi manger, d’après l’Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). « Un éleveur ne vend jamais sa vache suitée sans qu'il ne soit véritablement en difficulté.», a dit à IRIN Nourou Tall, responsable de programme d’urgence à la FAO.

Les prix offerts ont été divisés par deux à cause de la malnutrition des animaux et de la baisse de la demande du plus gros client du Niger, le Nigeria, dont la devise a perdu de la valeur cette année par rapport au franc CFA.
« Avant, on vendait une brebis au moins 20 000 francs CFA [42 dollars], maintenant ça ne dépasse pas 10 000 », a dit M. Idi, le chef de Gouragass.

Faire feu de tout bois

L’insuffisance des pluies a aggravé la pénurie de foin – estimée à cinq millions de tonnes en 2008 par la FAO – utilisé pour nourrir les animaux. Cette année, la quantité de foin disponible suffit à nourrir seulement un tiers du bétail nigérien.
Même ce stock durera tout au plus deux mois, d’après une récente discussion, organisée par la FAO, entre des organisations travaillant dans le domaine de la sécurité alimentaire. « On peut donc envisager que la situation sera très critique dès le mois d'avril prochain.», a dit M. Tall, de la FAO, à IRIN.

Le gouvernement estime qu’il existe une pénurie de 32 000 tonnes d’aliments pour animaux, tels que le maïs, dont la FAO fournira 8 450 tonnes. La première région bénéficiaire de cette distribution sera Diffa, la région la plus orientale du Niger, suivie de Zinder.

Pendant ce temps, les habitants qui n’ont pas de cheptel font feu de tout bois – au sens propre – pour gagner de l’argent : ils ramassent et vendent tout ce qui peut être transformé en fourrage ou bois de chauffage. « Comme beaucoup d’arbres ont été coupés, les gens vont même déterrer des racines de gros arbres à deux ou trois mètres », a dit a dit à IRIN Souleymane Roufaï Kane, de la DDDA de Tanout.
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Antigone » 27 Mar 2010, 09:04

Cet article est paru pour la première fois dans Thinker (vol.11 2010). Il a été traduit de l’anglais par Elisabeth Nyffenegger

Temoust - 24 fev 2010

La puissance nucléaire française et l’uranium du Niger

Le Niger exporte suffisamment d’uranium vers la France pour générer 80% de l’électricité de cette dernière, note Khadija Sharife. Mais le Nigérien ordinaire profite peu de cette mainmise française sur des ressources vitales pour ce pays, avec les trois cinquième de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté. Sans compter les rapports faisant état de la contamination radioactive de l’eau, de l’air et du sol par les opérations d’extraction menées par les multinationales. C’est ce pays qui vient de vivre le énième coup d’Etat de son histoire, avec la destitution de Mamadou Tandja.

Le réseau de routes principales reliant des centres urbains miniers tel Arlit, Agadez et Niamey est connu sous le nom de ‘’l’autoroute de l’uranium’’. Développé entre 1970 et 1980, la route reliant le nord au sud du Niger fait office d’artère principale pour faciliter le transport des ressources liquéfiées d’uranium. Le réseau lui-même fait partie de la route transsaharienne, un ancien système utilisé depuis des temps immémoriaux par les habitants de ‘’Tinariwen’’ ou le Désert des Innombrables, selon le terme sous lequel le Sahara était connu par ses fils, y compris les Hausa et les Touaregs.

Malgré les découpages des territoires par les anciens colonialistes qui ont rassemblé des états/nations à leur convenance ( pour mieux diviser, conquérir et exploiter ), la route transsaharienne a continué à exister en se jouant astucieusement des frontières fermées. Au milieu de cette route se trouve le Niger enclavé, un pont entre le Nord et l’Afrique subsaharienne, un pays qui avoisine sept autres pays.

Le Sahara, qui englobe 11 pays, recouvre 80% des terres du Niger, un pays qui se caractérise par la pauvreté, la famine, les sécheresses et les dictatures. Plus de 60% de sa population vit dans la ceinture de pauvreté, privée de l’accès à la nourriture, à l’eau, aux installations sanitaires, aux infrastructures et à l’instruction. L’espérance de vie culmine à 43 ans et la plupart de ses citoyens - y compris 71% des femmes - sont analphabètes. Seul 3% du budget de l’Etat sont alloués à l’instruction, alors que plus de 50% des finances de développement vont au service d’une odieuse dette à payer. L’annulation de la dette, après que le Niger ait été jugé éligible par le FMI à l’Initiative en faveur des Pays Pauvres Très Endettés), a exigé une privatisation massive des entreprises étatiques nigériennes et a fourni une aide partielle. Néanmoins, en 2007, les directeurs du FMI ont estimé que le fardeau de la dette nationale demeurait trop élevé et ce, malgré le ‘’remède’’ des ajustement structurels.

Le Niger, qui exporte 7,7,% de l’uranium mondial, se situe avec constance parmi les cinq premiers exportateurs avec le Canada, l’Australie, le Kazakhstan et sa production est au même niveau que celle de la Russie. La ville d’Arlit, à elle seule, fournit largement les anciens seigneurs coloniaux, la France, en uranium. Un approvisionnement requis pour le programme nucléaire de l’Hexagone et ses centrales nucléaires estimées au nombre de 59.

L’uranium avait initialement été découvert au Niger en 1957 par le Bureau Minier de la France d’Outre Mer, une année avant la création de la République du Niger. Ceci à la suite d’une étude extensive menée par la Commission à l’Energie Atomique (CEA) de la France, qui a commencé en 1956 et a conduit à plusieurs découvertes à la veille de l’indépendance en 1960. La décolonisation réussie de l’Afrique par la France a été réalisée grâce à des accords militaires secrets et des accords concernant les ressources, ainsi que des zones monétaires spéciales. Ces accords imbriquaient les intérêts de la France avec ceux des gouverneurs autochtones soigneusement choisis comme au Gabon et au Togo - Omar Bongo et Gnassingbé Eyadéma - tous deux dirigeants à vie, de la libération sélective à la mort, et Félix Houphouët-Boigny en Côte d’Ivoire. Ainsi, non seulement la France a eu un accès préférentiel aux ressources stratégiques, la présence de bases militaires françaises dans des anciennes colonies étaient légitimées, servant à la fois à soutenir le règne des dictateurs tout en les gardant sous contrôle. A partir de 1969, 27 accords ont été signés par d’anciennes colonies, y compris le Niger.

Les intérêts français ont été servis par le biais de la politique africaine postcoloniale de la France, connue sous le nom de Françafrique, qui a impliqué les échelons politiques et diplomatiques de l’Elysée depuis l’époque du général de Gaulle. Cette politique impliquait les lobby du renseignement et des multinationales intimement connectée avec l’Etat, comme Elf et Areva, des dictateurs de fabrication française et des réseaux de l’ombre désignés sous le nom de personnalité qu’on souhaitait honorer, comme Jacques Foccart, le principal conseiller pour l’Afrique de de Gaulle qui a été rappelé, après avoir pris sa retraite à l’âge de 81 ans, par le président Jacques Chirac, afin qu’il reprenne des activités. Chirac lui-même a déclaré, au début des années 1990, que le continent ‘’ n’était pas prêt pour la démocratie’’. Lorsqu’il lui a été demandé de décrire le rôle de Foccart dans Françafrique, le vice Premier ministre du général de Gaulle, Louis Joxe, a déclaré ‘’ être la nounou des présidents et s’assurer que les fonctionnaires africains seront payés à la fin du mois’’.

Les mines d’uranium découvertes au Congo, au Gabon et au Niger ont permis à la France de contourner les terrains minés menant à l’uranium en Ouzbékistan, au Canada et en Australie, des régions perçues comme ayant des tendances proaméricaines ou étant gérées par les Etats-Unis, rival de la France en Afrique et ailleurs. La Chine, assoiffée de ressources, avec une présence en expansion rapide en Afrique avec plus de 24 milliards de dollars de prêts depuis 2003, principalement garantis par des ressources, est aussi considérée comme une menace aux intérêts français.

Actuellement la France maintient 10 000 soldats spécialisés sur le continent, principalement basés à Libreville au Gabon, aussi connue sous le nom de ‘’Foccartland’’. De 1997 à 2002, la France est intervenue militairement 36 fois. Sur ces incidents, 24 ont eu lieu sans référence aux Nations Unies. La politique de Françafrique se poursuit sous Sarkosy, avec des soldats français intervenant dans des disputes internes.

Depuis le jour de l’indépendance du Niger, Diori Hamani du Niger et son parti politique, le Parti Progressiste nigérien (PPP), indirectement choisi par la France, ont régné sur le pays, aidé dès 1963 ouvertement par diverses interventions ou par des actions clandestines. Grâce à des accords militaires secrets, les soldats français basés à Niamey ont collaboré avec celui-ci afin d’éliminer et d’exiler l’opposition, tel que l’Union Nigérienne Démocratique. Hamani Diori s’est présenté aux élections, sans opposition, en 1965 et en 1970 mais a commis l’erreur fatale de demander le retrait des troupes françaises au début des années 1970. La France l’a fait, puis sans surprise un coup d’Etat militaire a porté au pouvoir le colonel Seyni Kountche au pouvoir. Kountche a été tué en 1987 et le colonel Ali Saibou lui a succédé.

Une avancée rapide de l’autoritarisme électoral du Niger sous la dictature de Tandja Mamadou

Actuellement, les forces armées du Niger, qui comptent 12 000 hommes, sont guidées par 15 conseillers militaires français. Et les Nigériens sont principalement instruits, entraînés et financés par la France. Ils protégent cinq zones cruciales, à savoir les routes géostratégiques et les mines. Les deux plus importantes mines du Niger sont contrôlées par Areva, l’entité dominante en matière de nucléaire, sous l’égide de l’Elysée, au travers de l’actionnaire principal, le CEA, propriété de la France.

Présent dans 43 pays, impliqué dans tous les aspects de la chaîne des matières premières, de l’extraction à l’enrichissement, de la propulsion, au recyclage et au démantèlement, avec un chiffre d’affaire de 16,16 milliards d’euros, la puissante économie mobile d’Areva éclipse celle de nombreux pays en voie de développement. Les mines du Niger, souterraines et à ciel ouvert, sont exploitées par les firmes subsidiaires d’Areva, comme COMINAK et SOMAIR, qui rapportent entre 75 et 90% du revenu national. Les réserves d’uranium d’Imoumaren, dont il est attendu qu’elles produisent 5000 tonnes par an, ont fait l’objet d’un contrat signé en janvier 2009 entre Areva et le gouvernement de Mamadou Tandja, et ce pour 40 ans. Il est prévu que la production débute en 2012 après un investissement de 1,2milliards d’euros.

COMINAK et SOMAIR produisent au jour d’aujourd’hui presque 5000 tonnes par an. ‘’ Le thème de l’uranium et des accords qui y sont liés sont de nature hautement stratégiques et se situent au niveau des Etats’’ déclare Idriss Ali, coordinateur national au Niger de Publish what you pay (Publiez ce que vous payez). ‘’Ces accords reproduisent un cadre néocolonial qui ont conduit à la signature des accords miniers et déterminent le fonctionnement de SOMAIR (1968) et de COMINAK (1975), qui ne sont rien d’autres que des contrats préférentiels qui mettent l’uranium du Niger à la disposition de la France. Dans ces conditions, le choix se porte sur l’acheteur du produit ; fixer le prix sur le marché international est la prérogative de l’ancienne puissance coloniale’’, déclare-t-il.

Depuis 2007, le gouvernement du Niger, dans une effort de diversification de l’industrie de l’uranium, a octroyé 122 licences d’exploitation à des multinationales françaises en plus des compagnies américaines, sud africaines, chinoises, canadiennes et australiennes. La compagnie étatique chinoise pour l’uranium, SINO-U, investira 300 millions de dollars afin d’exploiter les mines de Somina, près d’Agadez et produira 700 tonnes par an à partir de 2010. Quant à la multinationales américaine Exelon Corporation, elle a signé des accords avec le gouvernement portant sur l’accès à 300 tonnes par an pour une période de dix ans. Mais le gouvernement a encore davantage diversifié le type de matières premières exploitées, y compris le pétrole (l’objet d’un accord de 5milliards de dollars avec la National Petroleum Corporation chinoise) et l’or (d’ores et déjà la troisième plus importante matière première à être exportée, comptant pour 13% dans le revenu des exportations). Mais la France reste la source principale d’investissement et l’élément dominant de contrôle géostratégique et d’exploitation des ressources en uranium du Niger.

Selon Areva, en 2006, la compagnie a atteint le seuil des 100 000 tonnes d’uranium extrait. Le gouvernement du Niger a reçu 300 milliards de CFA sur un total de 2 300 milliards de CFA de revenu des ventes. L’extraction des minerais, dominé par l’uranium, génère entre 2,4,% et 4% du PIB du Niger. Areva reste le principal employeur du pays, suivi par le gouvernement, avec 1850 personnes directement employées et plus de 4000 emplois indirects auprès de sous contractants et des pourvoyeurs de services divers.’’ Nos investissements durables dans l’eau et la santé représentent une contribution de plus de 3 millions de CFA annuellement’’, déclare la compagnie.

Et ce sont précisément les prétentions à un investissement environnemental qui ont mené le pays à s’insurger, en particulier sur la question de l’usage par COMINAK, pour sa mine souterraine, de l’eau provenant de sources non renouvelables, mais aussi pour les fuites de matières radioactives qui ont contaminé l’eau, l’air et le sol, pour la vente de ferraille mortellement radioactives au marché, ainsi que des minerais radioactive utilisés pour construire des routes et des déchets radioactifs (de la roche d’uranium pulvérisée). ‘’Lorsque nous avons visité le Niger, des fonctionnaires nous ont dit’’ ici au Niger vous êtes en France’’ Si il y a un problème au Niger, celui-ci remonte en France, chez Areva’’, disait Bruno Chareyon, un physicien et gérant du laboratoire d’une ONG française, CRIIRAD (Commission de Recherche Indépendante et d’Information sur la Radioactivité) qui a établi un rapport accablant.

Le rapport de la CRIIRAD a documenté plusieurs trouvailles, y compris les 20 millions de tonnes de roche d’uranium pulvérisé, carcinogène et radioactive, stockées en plein air, du matériel radioactif dont la compagnie s’est débarrassé et qu’elle a vendu sur le marché par le biais de ferrailleur, des émissions de gaz toxiques à partir des mines de COMINAK ainsi que l’exploitation d’eau souterraine provenant de sources non renouvelées, sans parler de la contamination des sources d’eau, de la violation des standards internationaux de protection contre les radiations, parmi d’autres. ‘’Lorsque nous avons informé la presse de nos découvertes, Areva a organisé un voyage des médias au Niger, a affrété un avion pour transporter les 30 journalistes mais sans compteur Geiger ni aucun moyen d’évaluer le degré de radiation. Ils (les journalistes) auraient pu se tenir sur de la roche radioactive qui se trouve sur les routes et ne pas le savoir’’, a déclaré Chareyon. Il a aussi révélé qu’un laboratoire avec lequel la multinationale a passé contrat pour mesurer les radiations a rejeté les affirmations de la compagnie. Areva prétend que seul le gouvernement du Niger est responsable pour les systèmes de régulations.

Néanmoins, le gouvernement du Niger semble manifester le même manque de préoccupation que la multinationale. Lors de son inspection, le CRIIAD a jugé indolent le Centre National de Protection contre les Radiations (CNPR), l’institution nationale officielle qui doit surveiller les radiations ionisantes. ‘’ Le CNPR ne peut avoir procédé à des analyses en raison du fait que leur seul spectromètre gamma était cassé. Un fil électrique était délogé depuis le jour où la machine leur a été livrée’’, explique Chareyon.

Mais les citoyens du Niger ne sont pas restés les bras croisés. Le Mouvement du Niger pour la Justice, actif depuis 2007 mené par un ancien fonctionnaire des Forces armées du Niger, a demandé une plus grande part des revenus de l’uranium, la protection contre la dégradation de l’environnement et l’accès à des biens comme l’eau, des installations sanitaires, l’instruction et l’électricité qui sont des droits constitutionnels. Le gouvernement a rejeté le mouvement de la société civile comme étant des trafiquant de drogues anti-démocratiques.

Il va sans dire qu’ « au jour d’aujourd’hui, le Niger n’a pas accès au moindre uranium extrait à l’intérieur de ses frontières : les 100% de l’électricité (225 million de kWh) proviennent d’énergie fossile et est largement importé du Nigeria voisin. Toutefois la France a bien conscience de la situation. » Jusque à maintenant, il est impossible aux citoyens français et à la société civile d’obtenir le contenu de "ces accords secrets" concernant l’accès et le contrôle des ressources. C’est confidentiel’’, déclare Sebastein Alzerreca de l’ONG française Survie. Mais il met en garde : « Si la diplomatie échoue, ils peuvent toujours envoyer l’armée ». Pas de doute que l’autoroute de l’uranium s’avérera bien utile.


°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°°

* Khadija Sharife, journaliste indépendante et écrivain. Elle est actuellement au Centre for Civil Society comme chercheur invitée et à la Tax Justice Network comme chercheur.


Cet article a été écrit avant que Tandja soit déposé par le coup d'Etat des colonels.
Depuis, il serait question changer de d'autoroute. Celui dont on parle dans cet article serait abondonné au profit d'un autre qui remonterait par l'Algérie...

Tamtam Infos - 26 mar 2010
(article extrait de Roue de l'Histoire n°500 du 24/03/2010)

Dossier minier: La junte militaire veut voir clair

L’information est tombée depuis courant semaine dernière, la junte militaire voudrait voir clair dans les contrats miniers signés par le Niger avec les différents partenaires. Dans son tout premier message à la Nation, le chef de l’Etat, le chef d’escadron Djibo Salou, a, en filigrane marqué des orientations dans ce sens quant il a parlé des priorités de la transition militaire. Outre la restauration de la démocratie et la mise en place des mécanismes pour faire face à la famine qui menace la population, le chef d’escadron Djibo Salou a aussi évoqué deux points cruciaux : l’assainissement politique et le développement du secteur minier et pétrolier.

Il faut dire qu’il y a certes dans ce discours programme de la junte militaire des indications nettes pour un assainissement politique relatif à la crise qui s’est cristallisée autour de la prolongation du mandat de Tandja Mamadou, mais il y a aussi un programme plus large sur l’assainissement de la gestion des affaires publiques notamment la question des ressources minières et pétrolières. Un processus qui, à coup sûr, va passer sur un net éclairage des contours des opérations des conclusions d’accord entre le gouvernement déchu de Tandja Mamadou et les groupes étrangers. Comme pour aller dans le sens du discours cadre du Chef de la junte militaire, le ministre des mines et de l’énergie a confié la semaine dernière à l’Agence France Presse que le Niger va revoir les différents contrats miniers du Niger avec les partenaires étrangers.

Cette perspective qui n’est pas sans provoquer des inquiétudes au niveau des partenaires aurait cependant ne pas se traduire par une remise en cause systématique des accords et conventions signés par le Niger. En effet, dans le premier communiqué de la junte le jour du renversement du pouvoir de Tandja Mamadou, le Chef d’escadron Djibo Salou a déclaré que le Niger va respecter tous les traités et conventions qu’il a signés. Ce qui en partie a quelque peu rassuré les partenai res. Pas d’ inquiétude majeure donc du côté du groupe nucléaire français AREVA. Le vendredi 20 février, soit deux jours après le renversement du régime de Tandja par les éléments de l’armée, le Secrétaire d’Etat français à la coopération Alain Joyandet pouvait déclarer sur le quotidien Français le Parisien qu’il n’y a aucune raison de craindre une remise en cause du partenariat entre le Niger et le groupe nucléaire AREVA.

Des assurances fermes obtenues auprès de la junte militaire ou simple allusion au communiqué de prise du pouvoir par le CSRD prononcée par le porte-parole de la junte, le colonel Goukoye Abdoulkarim, jeudi 18 février ? Toujours est-il que de part et d’autre, les choses ont sensiblement évolué, et d’un côté à l’autre, on semble réviser ses positions. Dans un récent communiqué, le Groupe AREVA a affirmé le report du délai de mise en exploi tation du gisement d’Imouraren. Prévue pour démarrer en 2012, l’exploitation du site d’Imouraren a été différée d’un an et ne pourra ainsi démarrer qu’en 2013, indique le communiqué du groupe AREVA. Un autre changement notoire du côté du groupe français concerne la stratégie de transport du minerai d’uranium, même si pour l’instant l’information n’est pas très précisément confirmée par le siège du n°1 du nucléaire mondial.

En effet, on apprend que le groupe AREVA voudrait procéder au transport de l’Uranium nigérien par l’Algérie. Contrairement au projet initial qui prévoyait notamment le développement du chemin de fer depuis le site d’exploitation jusqu’au port de Cotonou au Bénin, AREVA envisage plutôt de transporter l’uranium par l’Algérie sur la route transsaharienne, Tamanrasset- In Guezzam jusqu’au port d’Alger. L’information a été donnée par un responsable algérien qui s’exprimait sur une chaîne nationale algérienne et qui a évoqué les travaux de revêtement en cours sur le tronçon transsaharien. Du côté des autorités militaires nigériennes, on parle de développement minier et pétrolier et des perspectives de revoir les contrats miniers et pétroliers.

Tant pour ce qui concerne le chantier pétrolier avec le groupe chinois sur la raffinerie de Zinder que dans l ’exploitation des gisements uranifères, l’enjeu pour le gouvernement nigérien, c’est surtout mesurer exactement les retombées financières tirées des accords pétroliers et miniers. En terme clair, s’il ne s’agira pas à priori de relancer les discussions sur les prix, le pouvoir de transition va regarder de très près les conditions d’octroi des permis d’exploitation accordés par le pouvoir de Tandja Mamadou. A ce sujet, il faut dire que les opérations de traitement de dossiers de demande de permis miniers ont suscité beaucoup de controverses.

Ce qui est sûr, c’est que pendant la période de boom des affaires minières, dans les années 2007 à 2008, les agents du ministère des mines et de l’énergie ont assez souvent déclaré qu’ils n’ont jamais été impliqués dans les travaux. La course vers les rentes minières a aussi constitué un des éléments de la crise entre l’ancien président de la République Tandja Mamadou et son Premier Ministre Hama Amadou jusqu’à son départ du gouvernement. La présidence de la République va reprendre totalement les opérations d’octroi des permis miniers, opérations dans lesquelles étaient notamment impliqués certains membres de la famille de l’ancien chef d’Etat. L’ampleur de l’opacité dans ces opérations était si décriée que l’Assemblée Nationale, avant sa dissolution, a tenté sans succès de mettre sur pied une commission d’enquête parlementaire sur ces affaires minières.

Dans le courant du mois de juillet 2009, l’opposition politique CFRD, dans une déclaration, a révélé une scandaleuse opération de partage de royalties entre le fils du Président Tandja Mamadou et certains proches de la famille. Gros dossier d’investigation dans lequel la junte ne manquera pas de découvrir d’importants dessous de table.
Ibrahim Elhadj, dit Hima
Antigone
 

Re: Niger = Areva-Land

Messagede Pïérô » 11 Mai 2010, 11:18

Dans Basta! : http://www.bastamag.net/article1029.html :

Areva poursuit sa pollution radioactive au Niger

L’uranium importé du Niger alimente les réacteurs nucléaires hexagonaux. Les impacts de son extraction sur la santé des populations locales et l’environnement restaient encore peu connus. La publication, le 4 mai 2010, d’une étude de Greenpeace commence à combler cette lacune. Ses résultats laissent perplexes sur la stratégie d’Areva, géant français du nucléaire, en matière de « développement durable ».

En collaboration avec la Criirad, un laboratoire français indépendant spécialisé dans les mesures de radioactivité, et le réseau nigérien d’organisations non gouvernementales ROTAB, Greenpeace a accédé à proximité des villes minières où opère Areva. Sur place, l’ONG a prélevé des échantillons de sol, d’eau et d’air que la Criirad a ensuite analysés en France pour en mesurer la radioactivité. Résultat : la radioactivité dans ces zones habitées et les déchets produits par l’extraction minière sont « alarmants ».

Eau polluée à la radioactivité

Sur quatre des cinq échantillons d’eau analysés, et provenant de la région d’Arlit, la concentration en uranium est supérieure à la limite recommandée par l’Organisation mondiale de la santé pour l’eau potable. Pour Greenpeace, « les données historiques indiquent une augmentation progressive de la concentration en uranium au cours des 20 dernières années, ce qui peut être révélateur de l’impact des opérations minières ». Greenpeace a également trouvé plusieurs morceaux de ferraille radioactive sur le marché local d’Arlit, présentant des taux de radiation supérieurs à 50 fois les niveaux habituels. Or, les populations locales se servent de ces matériaux pour construire leurs habitations. Toujours selon le rapport, dans les rues d’Akokan, l’intensité des radiations est environ 500 fois supérieure aux niveaux normaux. « Une personne passant moins d’une heure par jour dans cet endroit serait donc exposée à une radiation supérieure au taux maximal annuel autorisé ». Charmante attention à l’égard des populations locales !

Après qu’une partie des premiers résultats de l’étude aient été publiés fin novembre 2009, Areva a entamé le nettoyage d’endroits radioactifs dans un des villages miniers cités dans le rapport. Mais cela est loin d’être suffisant pour Greenpeace qui exige la mise en place de « contrôles permettant de garantir que les activités d’Areva respectent les normes internationales en matière de sécurité et l’environnement, et tiennent compte du bien-être des employés et des populations vivant à proximité des sites miniers ». L’ONG demande également « qu’une étude indépendante soit réalisée autour des mines et des villes d’Arlit et d’Akokan, suivie d’un nettoyage et d’une décontamination complète ».

Classée 480e parmi les 500 plus importantes multinationales mondiales, Areva puise abondamment depuis 40 ans dans les ressources minières du Niger pour alimenter les centrales nucléaires françaises. Aujourd’hui, ce sont les éléments essentiels à la vie même des populations à proximité des sites miniers qui disparaissent.

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Re: Niger = Areva-Land

Messagede Pïérô » 31 Mai 2014, 13:28

Areva en Afrique

Areva vient d’annoncer un accord avec le gouvernement du Niger pour prolonger l’exploitation de plusieurs mines d’uranium. L’indépendance énergétique de la France grâce au nucléaire est un mythe : l’uranium qui alimente le nucléaire civil et militaire provient pour une large part du sous-sol africain. Dans Areva en Afrique, Raphaël Granvaud détaille les conditions dans lesquelles la France et Areva se le procurent au meilleur coût, au prix d’ingérences politiques et de conséquences environnementales, sanitaires et sociales catastrophiques pour les populations locales. Son travail s’inscrit dans le sillon creusé depuis des années par l’association Survie qui n’a cessé de dénoncer et d’analyser les dérives peu médiatisées de la Françafrique contemporaine.

Areva au Niger : une tragédie sociale

La ville d’Arlit est à l’image de ce qu’Areva a apporté à la région et de la relation qui unit la France au Niger. Même si le personnel d’encadrement subalterne des mines a été, pour des raisons politiques et économiques, progressivement « nigérianisé », les classifications et les hiérarchies coloniales ont été reproduites et sont visibles dans l’organisation même d’Arlit, cette ville créée artificiellement en plein désert pour les besoins de l’exploitation uranifère. « La ségrégation est flagrante », témoigne Almoustapha Alhacen : « Dans la cité, Areva a instauré le système des collèges. Il y en a cinq en matière d’habitation. Les MAB (maisons pour agents blancs), qui sont bien nanties, avec une prise en charge totale des frais de l’énergie et de l’eau. Suivent les RA (résidences africaines) destinées aux agents africains, constituées de deux pièces étroites avec de moindres commodités. Les DA (dortoirs africains) sont encore moins nantis et ne bénéficient que d’un espace très réduit, dépourvu d’électricité et d’eau. » [1] Les plus mal lotis des ouvriers d’Areva bénéficient pourtant de conditions privilégiées au regard du sort de l’immense majorité de la population de la ville : « Hors de l’environnement fabriqué par l’entreprise, Arlit offre un visage différent », constate une journaliste du Guardian. « Dans les rues, une atmosphère de désespoir pèse sur des cabanes construites avec de la terre, des bâches en plastique, de la tôle ondulée et des bouts de ferraille probablement volés dans les mines. » [2] Une autre journaliste, algérienne, rapporte : « À quelques centaines de mètres du centre, des quartiers encore plus pauvres, les boukokis, abritent des milliers d’anciens nomades, rescapés de la grande sécheresse de 1984, qui a disséminé leur cheptel. Leur vie est un enfer perpétuel. Les plus chanceux survivent grâce aux revenus de la contrebande de pâte et de carburant venus de Tamanrasset ou du trafic des sans-papiers à destination de l’Algérie. » [3] Cette situation que n’ont pas arrangé les dégâts écologiques de l’exploitation minière est évidemment passée sous silence par Areva, qui prétend déployer « depuis plusieurs décennies des programmes de santé et de développement […] très importants pour la région d’Arlit. » [4] Qu’importe si dans la réalité, il existe encore « des écoles sans locaux ni tables ? » [5] Areva se flatte aussi d’être « partenaire financeur d’un ambitieux projet socio-économique d’électrification de la ville induite d’Arlit (quartiers périphériques) qui doit toucher près de 50 000 personnes. » Mais comme l’exploitation du site d’Arlit n’en a plus que pour une dizaine d’années [6], il y a fort à parier que les populations des bidonvilles, comme les travailleurs devenus inutiles, soient abandonnés à leur sort, aucune reconversion du site n’ayant été envisagée. Qui entretiendra les infrastructures d’une ville devenue inutile en plein désert ? Comment les populations seront-elles alors approvisionnées en eau ?

Les pollutions résultant de l’exploitation minière, ainsi que la surexploitation de la nappe phréatique ont contribué à la désertification de la zone d’Arlit. La faune et la flore, très riches avant les débuts de l’exploitation minière, ont largement disparu. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, on peut nourrir des inquiétudes concernant les villages qui se trouvent à quelques kilomètres du futur gisement d’Imouraren. C’est même toute la région jusqu’à Agadez qui risque de se trouver sinistrée, avec des répercussions socio-économiques et culturelles considérables si l’exploitation vient compromettre le tourisme (déjà affecté par l’insécurité grandissante) et surtout l’activité agro-pastorale, cette dernière représentant tout de même 11 % du PIB, contre moins de 5 % pour l’uranium.

Comme on l’a dit, des populations ont déjà été priées de déguerpir d’Imouraren, comme d’autres territoires sur lesquels des concessions minières ont été attribuées, la distribution de ces dernières s’effectuant en violation flagrante des droits des peuples autochtones tels qu’ils sont mentionnés dans la déclaration des Nations unies ou la Charte africaine des droits de l’homme. Ni leur droit à l’eau, ni le droit à leur mode de développement économique, social ou culturel ne sont respectés. Pour Areva, c’est bien simple, ces populations n’existent pas : ainsi son porte-parole, en réponse aux accusations d’expropriation, peut-il tranquillement déclarer dans la presse française que « cette immense superficie n’est pas habitée » ou que « les populations locales, majoritairement nomades, n’ont quasiment pas de biens fonciers », puisqu’elles ne possèdent pas de titres de propriété pour les terres qu’elles parcourent depuis des siècles. « Nous avons réussi à délimiter une surface d’exploitation qui ne risque pas de gêner les éleveurs » [7], conclut-il. C’est sans doute pourquoi les 200 km2 du site d’Imouraren sont sanctuarisés, clôturés, interdits d’accès et surveillés par des dizaines de militaires ou de para-militaires. « Dans les faits », estiment deux chercheurs, « la pression sur les ressources naturelles (eau, terres arables, etc.) et les richesses minérales (uranium, pétrole, etc.) concourt à un retour en force du vieux principe colonial du cantonnement des tribus. Tout se passe comme si les nomades d’Imouraren se faisaient refouler sans autre forme de procès qu’un droit de conquête, c’est-à-dire un droit du plus fort puisque la terre, propriété de l’État, a été concédée sans prendre en compte leur existence. »[8] Dans ces conditions, le nomadisme paraît voué à disparaître.

Il ne faudra donc pas s’étonner que des processus en cours s’en trouvent amplifiés, que certains parmi les populations marginalisées trouvent dans le choix des armes ou les activités criminelles un espoir de salut. Lorsque les trafiquants de drogues ou les miliciens d’Al-Qaida au Maghreb islamique seront devenus les uniques employeurs de la région pour les exclus de l’exploitation minière, il sera toujours temps de déployer encore davantage de militaires français en guise de remède…

Raphaël Granvaud

Extrait de Areva en Afrique, une face cachée du nucléaire français http://www.agone.org/dossiersnoirs/arevaenafrique/. Collection « Dossiers noirs », co-édition Agone – Survie


[1]. A. Alhacen, «Areva nous a apporté une pollution durable et non réversible», Interview à El Watan, 7 décembre 2010.

[2]. C. Sourt, « Areva accusé de toutes parts », The Guardian, cité et traduit par Courrier international, 12 mars 2009, n° 958.

[3]. S. Tlemçali, « Arlit, une poudrière aux portes de Tamanrasset », <elwatan.com>, 7 décembre 2010.

[4]. <http://www.areva.com/FR/activites-592/un-partenariat-durable-avec-le-niger.html>

[5]. « Les raisons de la colère », Aïr Info, 15 mai 2006, n° 40.

[6]. Areva, Areva au Niger, janvier 2009, p. 3.

[7]. « Areva défend son action au Niger », LeJDD.fr, 26 mars 2009.

[8]. A. Afane et L. Gagnol, 2010, p. 50.

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Re: Niger = Areva-Land

Messagede altersocial » 31 Mai 2014, 17:05

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Re: Niger = Areva-Land

Messagede Pïérô » 07 Juin 2015, 01:43

Niger: mobilisation citoyenne et revendications tous azimuts à Niamey

Des milliers de Nigériens ont manifesté ce samedi matin à l'appel de 48 structures de la société civile à Niamey. Restrictions des libertés, mauvaise gouvernance, pauvreté... Des revendications tous azimuts.

Ils étaient des milliers de citoyens à avoir répondu au rendez-vous de la place Toumo. « Nous avons joint notre petite action à celle de la société civile tout entière pour montrer à la face du monde notre ras-le-bol, notre déception en raison de la non-satisfaction d’un certain nombre de nos préoccupations, à nous, enseignants », explique Harouna Maïga.

... http://www.rfi.fr/afrique/20150606-nige ... ce=twitter
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